Cour d’appel de Paris, CT0109, du 14 mars 2006

·

·

Cour d’appel de Paris, CT0109, du 14 mars 2006

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Grosses délivrées

REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

3ème Chambre – Section A

ARRET DU 14 MARS 2006

(no , 09 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 04/14853 Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Mai 2004 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY – RG no APPELANTS Monsieur Yves Michel X… … par la SCP RIBAUT, avoués à la Cour ayant pour Avocat Me Laurent CARETTO, avocat du Barreau de Paris – Toque D 413 Monsieur Robert Leslie Y… … par la SCP MENARD – SCELLE-MILLET, avoués à la Cour Monsieur Douglas Earle Z… demeurant : 610 South Drive WINNIPEG MANITOBA CANADA demeurant : 23 rue Meslay – 75003 PARIS représenté par la SCP MENARD – SCELLE-MILLET, avoués à la Cour assistés de Me Bernard VATIER, avocat plaidant pour le compte de VATIER & Associés – P 82 INTIME Maître Jacques A… … par la SCP VARIN – PETIT, avoués à la Cour assisté de Me HIEST NOBLET, avocat plaidant pour la SCP HYEST – P311 COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 31 Janvier 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme CHAGNY, Président

M. LE DAUPHIN , Conseiller

Mme MORACCHINI, Conseiller

qui en ont délibéré Greffier, lors des débats : Monsieur MZE MCHINDA B… public :

L’affaire a été communiquée au ministère public ARRET :

– Contradictoire

– prononcé publiquement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau Code de procédure civile.

– signé par Madame CHAGNY, président et par Monsieur COULON, greffier présent lors du prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. Yves X…, M. Robert Y…, Mme Lianne C… et M. Douglas Z… sont appelants d’un jugement du 24 mai 2004 du tribunal de commerce de Bobigny qui a dit qu’il n’y avait lieu ni d’ouvrir une procédure de redressement judiciaire à leur encontre, en leur qualité d’anciens dirigeants de la société Imprimerie spéciale banque (ISB), en liquidation judiciaire, ni de prononcer à leur encontre une sanction personnelle, a condamné M. X… à supporter l’insuffisance d’actif de cette société à hauteur de 155.588,66 euros et MM. Y… et Z… ainsi que Mme C…, solidairement, à

supporter l’insuffisance d’actif à hauteur de 1.217.359,11 euros et les a condamnés solidairement à verser à M. A…, liquidateur judiciaire de la société ISB la somme de 7.622 euros en remboursement de ses frais de procédure.

M. X… rappelle que la société ISB, créée en 1927 par son père, Henry X…, avait pour spécialités l’impression bancaire et fiduciaire ainsi que l’impression des tickets de loterie avec la Française des jeux comme client pratiquement exclusif; qu’elle a été placée sous le régime du redressement judiciaire le 27 août 1991 puis a obtenu un plan de redressement sur 7 ans le 17 juin 1992 augmenté d’un an le 26 juin 1996 et que le plan a été exécuté tant qu’il est resté dirigeant jusqu’au 15 juin 1998. Il indique encore que par jugement du 2 avril 1997 le tribunal de commerce a autorisé le groupe Z… Banknote Limited à entrer dans le capital d’ISB et à devenir majoritaire par augmentation de capital, lui-même ne détenant plus que 11% du capital, et que le 25 novembre 1999 il a été procédé à la déclaration de cessation des paiements de la société qui a fait l’objet le 20 décembre 1999 d’un jugement d’ouverture d’un redressement judiciaire, converti le 31 janvier 2000 en liquidation judiciaire.

Il soutient que la liquidation judiciaire est le fait de la société Z… dont la responsabilité n’a cependant pas été recherchée. Il invoque la nullité du rapport de M. D… d’abord saisi d’une expertise judiciaire par ordonnance de référé infirmée par la cour puis à la demande du liquidateur par le juge commissaire et reproche à cet expert de n’avoir pas conduit contradictoirement ses opérations. Il conteste les faits qui ont été retenus à son encontre par le premier juge, à savoir son appropriation du fonds de commerce

de la société ISB relatif aux impressions fiduciaires et son abstention dans la gestion de l’entreprise alors que sa qualité d’administrateur comme celle d’associé muni d’une minorité de blocage ne lui permettaient pas de s’opposer à la gestion des majoritaires. Il demande 5.000 euros en remboursement de ses frais de procédure.

Par conclusions dites « récapitulatives no 4 », déposées au greffe le 9 janvier 2006, les consorts Z…, Y… et C… précisent que la société de droit canadien Z… a soumissionné à un appel d’offre de la Française des jeux du 30 janvier 1996 avant d’entrer en pourparlers avec la société ISB à la demande de la Française des jeux en août 1996 et a signé le 3 décembre 1996 avec ISB et la Française des jeux un contrat de 3 ans expirant le 30 juin 1999 particulièrement favorable à ISB qui pourtant n’était plus compétitive sur les prix, que le 1 juillet 1999 la société Z… a signé un nouveau contrat transitoire avec la Française des jeux puis le 29 septembre 1999 un contrat avec ISB pour maintenir l’activité de cette dernière, que la société Z… a soumissionné à l’appel d’offre de la Française des jeux de juillet 1999 et que la déclaration de cessation des paiements a été déposée 10 jours après la fin de la fabrication des tickets en exécution du contrat transitoire. Ils soulignent que l’offre aux prix mondiaux de Z… a été acceptée par la Française des jeux le 14 décembre 1999, ce qui a exclu IBS qui ne pouvait offrir que des prix européens supérieurs. A titre principal, ils soutiennent que le rapport non contradictoire de M. D… chargé d’une véritable mission d’expertise sur la base exclusive duquel le premier juge a statué leur est inopposable et qu’en conséquence les fautes qui leurs sont reprochées ne sont pas

prouvées. A titre subsidiaire, sur les fautes qui leur sont reprochées, ils allèguent en premier lieu qu’à aucun moment le fonds de commerce relatif à l’imprimerie fiduciaire traditionnelle n’a été cédé à la société Henri X… dirigée par M. Yves X…, les sommes versées à cette entreprise en décembre 1999 l’ayant été en paiement d’un travail effectué à la demande d’ISB pour l’un de ses clients, en deuxième lieu que la cessation des paiements est intervenue le 15 novembre 1999 et non pas le 30 juin ou le 30 septembre 1999, les paiements de l’associé majoritaire ne pouvant être considérés comme préférentiels, en troisième lieu qu’il n’ y a pas eu de détournements de fonds, ceux versés à la société Z… l’ayant été en paiement de prestations de services ou de remboursement de prêt, en quatrième lieu qu’il n’y a pas eu de poursuite d’une activité déficitaire, celle-ci ayant été bénéficiaire au 30 septembre 1999, date à laquelle elle a achevé la réalisation des commandes de juillet 1999 et était dans l’attente des résultats de l’appel d’offres de juillet 1999, en cinquième lieu que la comptabilité a été régulièrement tenue, aucune raison n’imposant une comptabilité liquidative en 1999 dès lors qu’ISB fabriquait des tickets jusqu’en septembre 1999 et était dans l’attente de l’appel d’offre de la Française des jeux de juillet 1999 qui pouvait lui apporter de nouvelles commandes si, comme par le passé, la Française de jeux acceptait de payer au moins pour partie le prix européen supérieur au prix mondial, ce qu’espérait le tribunal de commerce qui a ouvert en décembre 1999 une procédure de redressement judiciaire et non de liquidation judiciaire, en sixième lieu que le bail résilié a diminué les charges d’ISB. Ils contestent l’existence d’un lien de causalité entre les fautes qui leur sont reprochées et le préjudice de la société ISB, estimant que la liquidation judiciaire a pour origine le refus de la Française des jeux de continuer à payer une

partie de ses tickets à un prix supérieur au prix mondial, qu’IBS ne pouvait pas offrir. Ils estiment que le montant de l’insuffisance d’actif n’est pas justifié. Ils sollicitent la confirmation du jugement en ce qu’il ne leur a pas infligé de sanctions personnelles et demandent 10.000 euros en remboursement de leurs frais de procédure.

Ils ont déposé le 16 janvier, jour de l’ordonnance de clôture, des conclusions reprenant pour l’essentiel les précédentes et ne présentant aucun moyen ou demande nouveaux et deux pièces datées de janvier et juin 1996.

M. A…, sollicite le rejet des débats tant des conclusions du 9 janvier que de celles du 16 janvier et des pièces communiquées à cette dernière date en raison de leur tardiveté qui l’empêchent de pouvoir les examiner et y répondre.

Sur le fond, il allègue qu’à compter d’août 1999, en raison des termes des contrats antérieurs, ISB ne reçoit plus aucune commande de fabrication de tickets de loterie et n’a plus d’activité fiduciaire depuis avril 1999, date à laquelle l’activité a été transférée à la société Henri X… Il précise que le montant du passif déclaré de la société ISB est de 5.227.617,05 euros et estime l’insuffisance d’actif à 4.102.731 euros, l’actif réalisé étant de 1.124.886 euros. Il soutient que la désignation de M. D… par le juge commissaire, titulaire du pouvoir général d’investigation que lui reconnaît l’article L 621-12 du code de commerce, est régulière et que le rapport déposé est opposable aux appelants qui ont pu en discuter les termes. A titre principal il sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a refusé de prononcer l’ouverture d’une

procédure collective à l’égard des 4 dirigeants de droit et de leur infliger une sanction personnelle. Il reproche à M. X…, dirigeant jusqu’au 15 juin 1998 puis resté administrateur après cette date, d’avoir détourné une partie de l’actif de la société ISB en s’appropriant de manière occulte le fonds de commerce d’imprimerie fiduciaire sans contre partie financière qu’il avait pourtant proposée au nom de la société Henri X… qu’il dirigeait, et ce, avec l’accord des dirigeants d’ISB. Il lui reproche encore d’avoir accepté que la société X… reçoive de la société ISB une somme de 220.334,52 frs le 15 décembre 1999 après la déclaration de cessation des paiements. Il reproche aux consorts Z…, Y… et C… d’avoir réglé depuis juillet 1999 à la société Z…, associée majoritaire, une somme globale d’environ 16.000.000 frs, dont des remboursements de prêt, de préférence aux créanciers bénéficiaires du plan de continuation et des créanciers sociaux, contrairement aux termes des jugements du tribunal de commerce de Bobigny. Il estime qu’à la date du 30 septembre 1999 la continuité de l’entreprise était définitivement compromise et que ses comptes auraient dû être faits en valeur liquidative, qu’en conséquence la comptabilité présentée est irrégulière et n’a pas été arrêtée par le conseil d’administration. Il leur reproche encore d’avoir poursuivi une exploitation déficitaire avec des moyens techniques peu opérationnels qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements, ce qui a permis à M. Z… de percevoir son salaire et à la société Z… de bénéficier de substantiels paiements. Il estime que ces différentes fautes et encore l’absence de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal qui a accru le passif de plus de 7.000.000 frs et la résiliation d’un bail sans contrepartie constituent des fautes de gestion et doivent entraîner une condamnation de leurs auteurs au paiement d’une part plus

substantielle de l’insuffisance d’actif que celle retenue par le premier juge. Il demande 7.622 euros en remboursement de ses frais de procédure.

SUR CE LA COUR,

1- Sur la demande de rejet des débats,

Considérant que les conclusions déposées le 9 janvier 2006 développent celles déposées le 30 août 2005 auxquelles le liquidateur a répondu sans présenter de moyens ou demandes nouveaux; que M. A…, es qualités, ne justifie pas que ces développements nécessitaient plus de temps que le délai d’une semaine pour les lire et y répondre; qu’elles sont recevables; que celles du 16 janvier 2006 sont identiques, à quelques termes près qui n’en modifient pas le sens, à celles du 9 et sont en conséquence recevables; que l’appel d’offre de la Française des jeux du 30 janvier 1996 et le cahier des spécifications d’un jeu accepté par Z… le 26 juin 1996 déposées le jour de la clôture ne sont pas directement liées au litige, comme étant très antérieures aux faits qui sont reprochés aux appelants; qu’elles ne seront pas écartées des débats;

2- Sur l’opposabilité du rapport de M. D…,

Considérant que M. D… a été désigné par ordonnance du juge commissaire du 3 juin 2002 dans le but de rechercher si des fautes auraient été commises par les différents dirigeants de droit sur le fondement de l’article L 621-12 du code de commerce et non sur le fondement des articles 145 et suivants du nouveau code de procédure civile; que le technicien ainsi désigné n’est pas tenu d’appliquer

les règles de forme prévues par ces derniers textes; qu’en conséquence son rapport, établi à titre de simple renseignement, ne peut être écarté des débats dès lors qu’il a été régulièrement communiqué et discuté par les parties; que le seul fait que M. D… ait été antérieurement désigné sur le fondement de l’article 145 du nouveau code de procédure civile par le juge des référés dont la décision a été annulée par la cour n’entache pas d’irrégularité sa nomination par le juge commissaire, le rapport déposé conservant la valeur de simple renseignement et non celle attachée à un rapport d’expertise contradictoire; que le juge commissaire est libre de donner au technicien qu’il désigne la mission qui lui paraît la plus appropriée au regard de la finalité recherchée qui peut être similaire à celle que le juge des référés pourrait confier à un expert judiciaire;

3- Sur l’action en paiement de l’insuffisance d’actif visant M. X…,

Considérant que M. X… a dirigé la société ISB jusqu’au 15 juin 1998; qu’après sa démission il est resté actionnaire à hauteur de 11% et administrateur, la société Z… étant, par suite d’une augmentation de capital, entrée dans le capital à hauteur de 59,50 % depuis le jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 2 avril 1997;

Considérant, sur l’appropriation du fonds de commerce d’imprimerie fiduciaire, que M. X… a, dès sa démission de ses fonctions de dirigeant d’ISB le 15 juin 1998, créé la société Henri X… ayant le même objet social qui était celui d’origine de la société ISB, à savoir l’impression financière traditionnelle; qu’il n’était astreint

as plus démontré que l’offre de la société tierce était plus intéressante pour ISB que celle de la société Pattegayté ISB comme le directeur commercial qui, peu après lui, a démissionné de la société ISB; que ce secteur d’activité de la société ISB, représentant environ 20% de son chiffre d’affaires, était déficitaire de 8.000.000 frs pour l’exercice clos au 30 septembre 1998; que la nouvelle direction de la société avait envisagé de le vendre; que la société X… avait proposé en février 1999 d’en acheter les éléments incorporels au prix de 100.000 frs alors qu’une autre société avait en avril 1999 proposé 150.000 frs pour les éléments incorporels et une partie du matériel; que ces offres n’ont pas été acceptées, les nouveaux dirigeants d’ISB ayant renoncé à la vente; que la commande du 11 janvier 1999 du Cameroun à la société ISB qui n’a pu être exécutée par cette société qui n’avait plus l’infrastructure nécessaire, matériel ou local, et a demandé à la société X… de l’exécuter sous sa responsabilité ne saurait être assimilée à une appropriation du fonds de commerce; qu’en effet dès cette date la nouvelle direction de la société ISB avait abandonné ce secteur d’activité, comme le projet de le vendre; que M. X…, en sa qualité de dirigeant de la société X… a seulement exercé cette activité déficitaire abandonnée par la société ISB; que la société X… n’a d’ailleurs jamais obtenu certains des éléments contenus dans son offre; qu’il n’est pas démontré que M. X… soit intervenu auprès de la direction d’ISB pour que celle-ci renonce à la vente de son secteur déficitaire; qu’il n’est pas plus démontré que l’offre de la société tierce était plus intéressante pour ISB que celle de la société X… que M. X… soit intervenu auprès de la direction d’ISB pour que celle-ci renonce à la vente de son secteur déficitaire; qu’il n’est pas plus démontré que l’offre de la société tierce était plus intéressante pour ISB que celle de la

société X… qui ne portait pas sur les mêmes éléments et qu’elle pouvait aboutir alors que l’activité n’était plus exercée; que, contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, il n’est pas prouvé que le passif de la société ISB s’est accru de la somme de 150.000 frs par l’action fautive de M. X…;

Considérant que la somme de 219.614,21 frs versée le 16 juin 1999 à la société X… par la société ISB provenant du Cameroun n’était que le prix du travail effectué par la société X… à la place de la société ISB qui ne pouvait prétendre à aucune rémunération de ce chef et a seulement servi d’intermédiaire; qu’il n’est pas justifié que la somme de 220.334,52 frs versée le 15 décembre 1999 par ISB à Henri X… n’aurait pas eu la même origine ainsi que l’affirme M. X… alors que n’est pas versée aux débats la preuve du seul débit du compte d’ISB pour la seconde somme et que le montant total de la commande en frs n’est pas établie; que les activités de la société X… postérieures à la déclaration de cessation des paiements ne sauraient pas plus constituer des fautes de M. X… qui n’a pas détourné un actif d’ISB à son profit personnel ni à celui d’une société dans laquelle il avait des intérêts;

Considérant qu’il n’est pas plus établi que bien qu’étant administrateur présent aux conseils d’administration et associé titulaire d’une minorité de 11%, il ait été en mesure de s’opposer aux actes de gestion des dirigeants qui l’ont remplacé à la tête de la société et participer à la création de l’insuffisance d’actif, qu’il ait pu, notamment, s’opposer aux décisions de paiement de la société Z… effectués à compter de juillet 1999 alors que les conseils d’administration de septembre et décembre 1999 n’ont pas arrêté les comptes, seule la situation financière préoccupante de la

société y ayant été évoquée; qu’il n’y a pas lieu à condamnation de M. X… au paiement d’une partie de l’insuffisance d’actif de la société ISB;

4- Sur l’action en paiement de l’insuffisance d’actif visant les consorts Z…, Y… et C…,

Considérant que MM. Z… et Y… et Mme C…, salariés ou dirigeants de la société Z…, devenue associée majoritaire d’ISB, sont devenus gérants de droit de cette société au départ de M. X… en juin 1998;

Considérant que le 20 octobre 1993 la société ISB, dont le plan de continuation avait été arrêté le 17 juin 1992 a signé un contrat avec la Française des jeux lui attribuant 20% de la production des tickets de loterie devant prendre fin le 31 décembre 1997; qu’en janvier 1996 la Française des jeux a lancé un appel d’offres pour l’impression de tickets avec obligation de la fabrication dans un pays de l’union européenne; que la société de droit canadien Z… s’est déclarée intéressée par l’offre en mars 1996 et a, pour satisfaire aux conditions de l’offre, envisagé d’entrer dans le capital de la société ISB dès juin 1996; que le 3 décembre 1996 un contrat était conclu entre la Française des jeux et la société Z… avec l’intervention de la société ISB selon lequel Z… obtenait, pour 3 ans, sous réserve d’une prise de participation majoritaire dans le capital d’ISB la fabrication de 40% en volume des besoins en tickets de la Française des jeux dont 27% devaient être fabriqués à un prix supérieur par ISB qui renonçait à la poursuite du contrat du 20 octobre 1993; que le jugement du 2 avril 1997 a autorisé l’entrée de Z… dans le capital d’ISB par une augmentation de capital de

5.000.000 frs; que le 1 juillet 1999, après l’expiration du contrat du 3 décembre 1996 le 30 juin 1999, un contrat intermédiaire a été signé entre la Française des jeux et Z… avec obligation pour cette dernière de sous-traiter une part à ISB pour la période allant jusqu’au 31 décembre 1999, dans l’attente des résultats d’un nouvel appel d’offres de la Française des jeux émis en juillet 1999 et ne comportant plus comme critère de sélection la fabrication de tickets dans un pays de l’Union Européenne; que la société Z… a obtenu le 16 décembre 1999 un contrat de fabrication de tickets payés au prix mondial plus compétitif, ne comportant plus d’obligation de sous traiter avec ISB;

Considérant qu’il résulte de ces différents contrats qu’à compter de la connaissance par Z… de la nouvelle offre de la Française des jeux de juillet 1999 ne comportant plus son acceptation de privilégier la société ISB en payant ses réalisations à un prix européen plus élevé que le prix mondial et en n’obligeant plus ses co-contractants à fabriquer une partie des tickets sur un site européen, les dirigeants majoritaires d’ISB également dirigeants ou salariés de Z… savaient qu’en soumissionnant seule à cette offre Z… ne sous traiterait plus une partie du marché à ISB dont la situation devenait gravement compromise puisqu’après avoir abandonné l’imprimerie fiduciaire elle allait inéluctablement perdre son seul client pour l’imprimerie de loterie; qu’elle n’a d’ailleurs pratiquement plus investi (3.000.000 frs) pour rester compétitive alors que la société Z… investissait massivement au Canada (15.000.000 dollars);

Considérant que malgré cet état de fait les dirigeants majoritaires d’ISB ont continué l’exploitation en réglant à l’associé majoritaire

de juillet à octobre 1999 une somme globale de 15.939.832,28 frs au titre de remboursements de frais dont le salaire et les avantages en nature de M. Z…, avancés par la société Z…, et du remboursement de deux échéances du prêt de 5.175.500 frs concédé à ISB le 4 avril 1997; que les deux derniers règlements de 3.465.000 frs relatifs au prêt ont été faits en contravention avec le jugement du 2 avril 1997 qui prenait acte de l’engagement de Z… de ne rembourser ce prêt qu’après paiement des créanciers du plan, ce qui n’a pas été le cas, les échéances payées en mars et juin 1999 l’ayant été alors que les annuités du plan dues au 30 juin 1998 et au 30 juin 1999 n’étaient pas intégralement payées, ce que reconnaissent les intimés qui ne peuvent utilement invoquer avoir payé tous les créanciers qui en avaient fait la demande alors que le jugement n’exigeait pas une demande de chaque créancier du plan mais visait seulement les échéances dues et non celles exigées; que le remboursement du prêt en juin 1999 a en outre été fait en contravention à une seconde condition du jugement du 2 avril 1997 qui ne l’autorisait que si la société faisait un bénéfice avant impôts de 3.000.000 frs; qu’en effet si le projet de bilan qui n’a pas été arrêté par le conseil d’administration et n’était pas revêtu de l’accord du commissaire aux comptes mentionne un bénéfice supérieur à cette somme, il ne tient pas compte de l’état liquidatif de la société qui à défaut de commandes ne pouvait plus continuer son activité, ce qui devait l’amener à verser des indemnités d’un montant supérieur au bénéfice enregistré ainsi artificiellement; que la société Z… a bénéficié de paiements qui auraient dû revenir aux créanciers du plan ou aux créanciers sociaux qui n’ont pas été payés et a pu ne procéder qu’à une déclaration de créance de faible importance ( 282.868,47 euros); que l’exploitation a été poursuivie dans le seul intérêt de l’associé majoritaire et ne pouvait conduire

qu’à la cessation des paiements; que la déclaration de cessation des paiements a été fautivement retardée; qu’en effet dès le 30 septembre 1999, la société ISB n’avait plus de commandes et avait terminé celles reçues en application du contrat du 1 juillet 1999; qu’elle n’était plus à cette date en mesure de faire face au passif exigible avec son actif disponible; que les fautes de gestion sont ainsi caractérisées; que le paiement de l’associé majoritaire a nui à l’ensemble des autres créanciers et, notamment aux créanciers du plan et aux créanciers sociaux postérieurs; que MM. Z… et Y… et Mme C… seront solidairement condamnés à supporter la part de l’insuffisance d’actif directement liée à leurs fautes de gestion, soit la somme de 8.855.947 frs, soit 1.350.000 euros ; qu’il n’est pas démontré que la résiliation d’un bail ait entraîné une aggravation du passif, le bail ayant été souscrit dans la perspective de la vente d’un autre local qui n’est pas intervenue;

5- Sur les sanctions personnelles et l’ouverture d’une procédure collective,

Considérant qu’aucune faute n’ayant été relevée à l’encontre de M. X…, celui-ci ne saurait faire l’objet d’une procédure collective ou d’une sanction personnelle; qu’en ce qui concerne M. Z… et Y… et Mme C…, le premier juge a justement apprécié, au vu des éléments mis aux débats, qu’il n’y avait pas lieu au prononcé d’une sanction personnelle; qu’il n’apparaît pas opportun d’ouvrir à leur encontre une procédure collective;

6- Sur les demandes en remboursement de frais de procédure et les dépens,

Considérant qu’il est équitable d’allouer à M. A…, es qualités, la somme sollicitée au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile en remboursement de ses frais irrépétibles d’appel; que MM. Z… et Y… et Mme C… seront condamnés à lui verser 7.622 euros; qu’il apparaît équitable de laisser à M. X… la charge de ses propres frais irrépétibles de procédure; que M. A…, es qualités, aura la charge des dépens le concernant; PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en ses chefs déférés à la cour en ce qu’il a:

-dit n’y avoir lieu à sanction personnelle ou ouverture d’une procédure collective à l’égard de MM. X…, Z… et Y… et de Mme C…, -condamné solidairement MM. Z… et Y… et Mme C… au paiement d’une partie de l’insuffisance d’actif, -condamné solidairement MM. Z… et Y… et Mme C… à verser 7.622 euros et aux dépens, à l’exception de ceux relatifs à M. X…,

Le réformant pour le surplus,

Fixe à la somme de 1.350.000 euros la condamnation de MM. Z… et Y… et de Mme C… au titre de l’insuffisance d’actif,

Les condamne sous la même solidarité à verser à M. A… , es qualités, la somme complémentaire de 7.622 euros et aux dépens d’appel, à l’exception de ceux tant de première instance que d’appel relatifs à M. X… qui resteront à la charge de M. A…, es qualités,

Dit que les dépens d’appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective et recouvrés conformément à l’article 699 du

nouveau code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT D. COULON B. CHAGNY


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x