Cour d’appel de Lyon, du 24 mars 2005

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Cour d’appel de Lyon, du 24 mars 2005

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

R.G : 04/00375 décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE au fond du 17 décembre 2003 RG N°2003/627 S.A.S. DISTRIBUTION X… FRANCE C/ DIRECTION GENERALE DES IMPOTS COUR D’APPEL DE LYON PREMIERE CHAMBRE CIVILE ARRET DU 24 MARS 2005

APPELANTE : SNC DISTRIBUTION X… FRANCE venant aux droits de la Société ASTYAGE représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assistée de Me Y…, avocat au barreau de PARIS INTIMEE : DIRECTION GENERALE DES IMPOTS Direction des Vérifications Nationales et Internationales représentée par Me LIGIER DE MAUROY, avoué à la Cour Instruction clôturée le 21 Janvier 2005

Audience de plaidoiries du 16 Février 2005 COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Monsieur JACQUET, président, Monsieur ROUX, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence pendant les débats de madame MONTAGNE, greffier. ARRET :

contradictoire prononcé à l’audience publique de ce jour par monsieur JACQUET, président, en présence de madame JANKOV, greffier, qui ont signé la minute. FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 30 décembre 1995 la société S.H.N.P. a fait apport pur et simple à la société Astyage, filiale créée le 29 septembre 1985 de la société X… France (ci-après la société X…), d’un fonds de commerce d’hypermarché exploité à Glisy-Amiens ; en rémunération de cet apport, dont les éléments – corporels et incorporels – ont été évalués à 127.182.000 francs, elle a reçu 1.271.820 actions d’un nominal unitaire de 100 francs de la société Astyage. Cette opération a été soumise au seul paiement d’un droit fixe d’enregistrement acquitté par la société Astyage.

Le 4 janvier 1996 la société S.H.N.P. a cédé à la société X… les 1.271.820 actions de la société Astyage pour leur prix de revient (127.182.000 F).

Ayant considéré, en raison de la concomitance de ces opérations ayant concouru au transfert du fonds de commerce à la société X…, que l’apport avait en réalité été fait à titre onéreux et s’analysait en une véritable vente passible des droits prévus à l’article 719 du code général des impôts, le 9 décembre 1998 les services fiscaux ont notifié un redressement à « la société X… France venant aux droits et obligations de la société Astyage » qu’elle avait absorbée en novembre 1997.

Après avoir présenté une réclamation qui a été rejetée, la société X… a porté sa contestation devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne qui, le 17 décembre 2003, a rendu le jugement suivant : .

Déclare fondée la requalification par l’administration fiscale de l’apport à titre pur et simple en apport à titre onéreux entre l’apporteur, la société S.H.N.P., et le bénéficiaire, la société Astyage, .

Dit que la notification de redressement en date du 9 décembre 1998, afférente à l’acte d’apport, est justifiée, .

Confirme la décision de rejet de la réclamation formulée par la société X… France venant aux droits et obligations de la société Astyage.

Appelante de cette décision, la société X… fait valoir que même si elles ont eu lieu dans un délai rapproché, les deux opérations d’apport de fonds de commerce et de cession d’actions doivent être appréciées distinctement ; que la seconde opération ne peut avoir eu pour effet de modifier la nature de la première. Elle soutient que le tribunal a commis une erreur en considérant que les opérations litigieuses n’avaient pas eu d’autres effets que ceux d’une vente qui avaient ainsi été dissimulée dans un but uniquement fiscal alors que l’apport avait des effets multiples ayant subsisté après la cession des actions qui avaient rémunéré cet apport ; qu’il a commis une autre erreur en considérant que l’opération réelle consistait en la vente du fonds de commerce à la société Astyage et que celle-ci était redevable des droits afférents à cette vente dont elle avait été bénéficiaire alors qu’elle n’était ni l’auteur ni le bénéficiaire des actes qui, selon l’administration fiscale, constituerait l’abus de droit ; que la disqualification de l’apport à la société Astyage viole les dispositions de l’article 4-1 de la Directive 65/335 CEE du

17 juillet 1969. Elle demande que lui soit accordé un dégrèvement de droits et pénalités d’un montant de 4.565.641,56 euros et que la direction générale des impôts soit condamnée à lui payer une indemnité en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le délégué interrégional des impôts répond que l’apport a effectivement été rémunéré par la remise d’action mais que la cession de ces actions quatre jours plus tard à leur prix de revient ne répondait à aucune logique économique, la société apporteuse n’ayant réellement encouru aucun risque social et ayant eu dès l’origine l’assurance de « récupérer en cash la totalité de sa mise »; que les parties s’étaient livrées à plusieurs actes concertés et cohérents mais sans rationalité économique dont l’objectif exclusif était d’éluder l’impôt et dont le caractère abusif résulte de leur organisation rationnelle, d’où résulte la fraude à la loi ; que c’est bien la société Astyage, en qualité d’acquéreur, qui seule était redevable des droits de mutation prévus à l’article 719 du code général des impôts. Il conclut à la confirmation du jugement et au rejet des demandes adverses.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu’il est constant que la société Astyage a été créée par la société X… afin qu’y fût transféré le fonds de commerce cédé par la société S.H.N.P. et que la société X… entendait contrôler le capital de la société Astyage ;

Attendu qu’il n’est pas soutenu que la société Astyage était fictive et que ses organes ne fonctionnaient pas normalement, de sorte qu’elle était distincte de la société X…, bien que contrôlée par cette dernière, et que ces deux personnes morales ne peuvent être confondues ;

Que, par ailleurs, il est constant que cette situation de même que

chacune des opérations litigieuses – apport du fonds de commerce à la société Astyage d’une part et acquisition par la société X… des actions reçues par la société S.H.N.P. en rémunération de son apport d’autre part – impliquaient des effets multiples de nature économique et juridiques ;

Mais attendu que but poursuivi aurait été atteint avec les mêmes effet si, avant l’apport du fonds de commerce à la société Astyage, la société X…, en sa qualité d’actionnaire, avait décidé d’augmenter le capital de sa filiale par création de 1.271.820 actions d’un nominal unitaire de 100 francs qu’elle aurait reçues en rémunération d’un apport en numéraire de 127.182.000 francs qu’elle lui aurait fait et qui aurait été utilisé par la société Astyage pour verser à la société S.H.N.P. le prix du fonds de commerce ;

Que le choix d’opérer ainsi qu’il a été fait en l’espèce ne se justifiait que par la poursuite d’un but exclusivement fiscal, consistant à éluder le payement des droits de mutation à titre onéreux ;

Que c’est à bon droit que le tribunal a jugé que l’administration fiscale était fondée à requalifier cette opération en considérant qu’elle s’analysait en une vente consentie à la société Astyage, laquelle était donc redevable des droits ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement ;

Condamne la société Distribution X… France aux dépens de première instance et d’appel. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT Madame JANKOV

J.-F. Z…


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