Cour d’appel de Caen, 12 février 2008, 06/3064

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Cour d’appel de Caen, 12 février 2008, 06/3064

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AFFAIRE : N RG 06 / 03064

Code Aff. :

ARRET N

J B. C G.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Grande Instance de LISIEUX en date du 20 Septembre 2006-

RG no 05 / 1061

COUR D’APPEL DE CAEN

PREMIERE CHAMBRE- SECTION CIVILE

ARRET DU 12 FEVRIER 2008

APPELANTE :

Mademoiselle Anabelle X…

représentée par la SCP TERRADE DARTOIS, avoués

assistée de Me BELLENGER, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

La SA CREDIT AGRICOLE SUISSE

4 Quai du Général Guisan- GENEVE (Suisse)

prise en la personne de son représentant légal

représentée par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avoués

assistée de Me DEGROUX, plaidant Me MORILLOT avocats au barreau de PARIS

Monsieur Jannick B…

non représenté bien que régulièrement assigné

Madame Martine C… épouse D…

représentée par la SCP MOSQUET MIALON D’OLIVEIRA LECONTE, avoués

assistée de Me MONTENOT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. BOYER, Président de Chambre, rédacteur,

Madame BEUVE, Conseiller,

M. VOGT, Conseiller,

DEBATS : A l’audience publique du 13 Décembre 2007

GREFFIER : Madame GALAND

ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 Février 2008 et signé par M. BOYER, Président de Chambre, et Madame GALAND, Greffier

* * *

Par jugement du 20 septembre 2006, le tribunal de grande instance de Lisieux a statué ainsi :

« – Constate que la loi française est bien applicable aux engagements de cautionnement personnel conclus le 23 juillet 1996 par Jannick B…, Martine D… et Anabelle X…, pour le crédit accordé par la société UBP à la SARL Les 3 Maj.

– Rejette l’exception d’irrecevabilité soulevée par Anabelle X… sur le fondement de l’article L 621- 48 ancien du code de commerce.

– Condamne solidairement Annabelle X…, Martine D… et Jannick B… à verser à la SA Crédit Agricole Indosuez Suisse la somme de cinq cent vingt mille neuf cent soixante dix neuf euros et quinze centimes (520. 979, 15 euros),

au titre de leur engagement de cautionnement solidaire du crédit octroyé à la SARL Les Trois Maj par la société UBP (aux droits de laquelle vient la SA Crédit Agricole Indosuez suisse).

Dit que cette somme porte intérêts au taux conventionnel de 5 % l’an, à compter du 13 octobre 2003.

– Rejette la demande relative à une résistance abusive.

– Rejette la demande, formulée par Martine D…, de condamnation de Jannick B… à la garantir de sa condamnation au remboursement de la somme susvisée.  »

Le tribunal relatait :

 » La S. A. R. L. LES 3 MAJ a été constituée le 26 octobre 1995 ? entre Anabelle X…, Martine D…, et Jannick B….

Le 23 avri11996, elle a contracté un crédit d’un montant de 2 500 000 FF auprès de l’Union des Banques Privées (ci dessous dénommés UBP), société de nationalité britannique.

Ce prêt, soumis expressément à la loi anglaise et donnant compétence aux tribunaux anglais pour connaître des éventuels litiges entre la banque et l’emprunteur, était destiné à financer les travaux de rénovation de l’établissement de restauration  » Le Domaine de la Bergerie  » à Deauville.

Il était prévu un taux d’intérêts équivalent au taux de refinancement de la banque sur le marché financier de Londres, augmenté de 1, 25 %.

Ce crédit devait être remboursé dans sa totalité avant le 31 décembre 1996.

Il était mentionné des intérêts de retard d’un montant de 4 % au- dessus du taux du marché financier de Londres.

Le contrat de crédit prévoyait l’existence de plusieurs garanties, lesquelles ont fait l’objet d’un acte notarié établi le 23 juillet 1996 à Paris :- la caution personnelle solidaire de chacun des trois associés de la S. A. R. L. LES 3 MAJ, pour un montant maximum de 2 750 000 FF chacun, pour toutes sommes qui seraient dues au titre du principal ou des intérêts du crédit. Cet engagement de caution expirait au 31 janvier 1997.

– une caution hypothécaire sur un immeuble appartenant à Mme X…, situé à paris.

– une garantie réelle sur le bail emphytéotique conclu entre la Mairie de Deauville et la S. A. R. L. LES 3 MAJ.

Par acte notarié en date du 25 novembre 1998, la société UBP a cédé cette créance, avec les garanties l’accompagnant, à la S. A. Banque du Crédit Agricole Indosuez suisse.

Celle- ci a été ultérieurement fusionnée avec la S. A. Crédit Agricole Indosuez Suisse.

La S. A. R. L. LES 3 MAJ a été condamnées, par arrêt de la Cour de Justice du Canton de Genève en date du 6 janvier 2001, à verser, à la S. A. Banque du Crédit Agricole Indosuez Suisse, la somme de 657 834, 25 F suisses avec intérêts au taux conventionnel de 5 % à compter du 1er septembre 1999, au titre du principal et des intérêts restant dus sur l’emprunt.

La S. A. R. L. LES 3 MAJ a été placée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 13 octobre 2003.  »

C’est la société les Trois Maj qui avait saisi le tribunal de la République et du Canton de Genève.

Mlle Annabelle X… conclut ainsi :

 » Avant tout débat au fond et ce dans le but évident d’une bonne administration de la Justice,

• Enjoindre la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE de fournir auprès de la juridiction du second degré tous les éléments probants issus du droit anglais permettant de s’assurer :

1) de la validité formelle de l’engagement de caution de Mademoiselle X…,

2) de l’opposabilité du droit de créance dont se prévaut la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE, suite d’une part à la cession pleine et entière en date du 3 mars 1998, et d’autre part, de sa survie au profit de l’entité juridique nouvelle née le 19 novembre 1999.

• Assortir le cas échéant cette légitime injonction d’une astreinte comminatoire provisoire au profit de qui il appartiendra ou à défaut surseoir à toute étude au fond jusqu’à cette production effective et indispensable, la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE devant ici honorer la charge de la preuve d’un droit qu’elle a entendu et entend opposer.

A titre subsidiaire et en toute hypothèse en l’état dans l’attente de cette communication explicative après avoir débouté la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE de toutes ses demandes, fins et conclusions :

1. Constater la nullité de l’acte authentique en date du 25 novembre 1998 reçu par Maître Dominique H…, Notaire à Paris, L’UNION BANCAIRE PRIVEE CBI- TDB ne pouvant, à cette date, céder un droit dont elle s’était dépossédée irrévocablement depuis le 3 mars 1998.

2. Tirer toute conséquence de cette nullité, en :

a) en l’état, infirmant dans toutes ses dispositions le jugement prononcé le 20 septembre 2006, la Banque reposant et articulant sa demande précisément sur cette cession.

b) déclarant également nulles les inscriptions hypothécaires renouvelées le 10 décembre 19998 et enregistrées le 14 décembre 1998 à PARIS ainsi que celle enregistrée à PONT L’EVEQUE.

3. Constater que le relevé de la forclusion encourue par la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE a reposé et repose sur un argumentaire délibérément tronqué qui a emporté la religion du Juge- Commissaire désigné, puisque le requérant n’était pas le titulaire de l’inscription hypothécaire avancée d’une part, et qu’elle reposait d’autre part, sur une nullité manifeste, et que ce relevé de déchéance obtenu dans des conditions inacceptables risque de générer un préjudice à Mademoiselle X… :

Accueillir dans une telle hypothèse et en conséquence, Mademoiselle X… dans sa demande en dommages- intérêts afin de sanctionner une attitude coupable, si son engagement de solidarité était maintenu, à hauteur de l’intégralité de la condamnation en paiement qui serait retenue à son encontre, ou à due concurrence selon le montant arrêté par la Cour, face à son analyse relative à l’argumentaire de Madame Martine D…, co- obligée ou non, indépendamment de la présence initiale et incontestable d’un tiers qui, à l’origine du prêt, a, en vérité, était le véritable instigateur de celui- ci et son garant principal, au regard de sa solvabilité au moment de l’engagement de Mademoiselle X….

4. Constater qu’à défaut d’obligation de paiement à l’égard de l’entité juridique nouvelle née le 19 novembre 1999 et démontrée à cette date, et en l’absence d’acquiescement de la caution pour cette novation par substitution, et vu les dispositions de l’article 1281 du Code Civil, prononcer la décharge de la caution.

Encore plus subsidiairement.

Vu l’article 2314 du Code Civil,

Vu les négligences de la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE qui, si l’exigibilité du prêt est retenue et fixée à la date du 30 mars 1999,

Vu l’anéantissement du fonds de commerce interdisant tout espoir pour la caution de récupérer le moindre euro auprès du débiteur principal,

Vu la perte de l’affectation hypothécaire attachée au bail emphytéotique par la nullité de son renouvellement d’une part, mais aussi par la cession de celui- ci au profit d’un tiers, par l’effet du jugement prononcé par le Tribunal de Commerce de Paris le 28 avril 2005, d’autre part,

5. Prononcer la décharge de la caution.

A titre infiniment subsidiaire

Si par exception Mademoiselle Anabelle X… était tenue financièrement,

6. Dire dans un premier temps que l’engagement, toutes causes confondues, était limité à 419. 234, 89 € uros (principal, intérêts et frais touts compris),

7. Dans un second temps qu’à l’époque il existait quatre garants personnels et non trois.

Dès lors, au regard de la décision à intervenir à l’égard de Madame D…, la proportion au paiement étant également minorée dans son assiette au regard de la solvabilité de la solvabilité au moment de son engagement d’office par la Sagesse de la Cour,

8. Dire que Mademoiselle Anabelle X… ne sera tenue qu’à hauteur de 50 % du plafond arrêté ou des deux tiers.

9. Condamner enfin la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE à payer- et en toute hypothèse- la somme de 10, 000 € uros au titre des frais de nature irrépétible, conformément aux dispositions de l’article 700 du NCPC.

10. La condamner également aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de la SCP TERRADE & DARTOIS, Avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du NCPC.  »

Elle relate les circonstances de la conclusion du contrat, attribuant compétence aux tribunaux de Paris, avec application de la loi anglaise et divers épisodes dont le relevé de forclusion de la banque dans la procédure collective de la société les trois MAJ, et une inscription d’hypothèque judiciaire par une personne selon elle dépourvue de droits.

Elle estime que son obligation est devenue potestative  » car outre l’affectation hypothécaire de son appartement, l’emprunteur pouvait non seulement désormais céder sa créance à qui bon lui semble, mais aussi accorder tout délai à l’emprunteur principal, soit à son initiative, soit à l’initiative du cessionnaire.  »

Elle pose diverses questions et sollicite la communication de pièces complémentaires, affirme que la société ne pouvait pas rembourser le prêt, invoque le caractère excessif de son engagement, les délais de l’action qu’elle qualifie d’inertie coupable, l’absence de fondement de la garantie dans la mesure où les cautions avaient été invitées à acquiescer, selon acte sous seings privés à la cession de créance ce qui rendrait sans objet un acte authentique du 25 novembre 1998 et le transfert de garantie invoqué pour obtenir le relevé de forclusion indu, la nécessité de refaire le décompte, le tribunal n’ayant pas retenu le plafond de la garantie, l’imbroglio juridique qui devrait conduire selon elle à l’infirmation logique de la décision, la stipulation contractuelle selon laquelle, selon elle les cautions devaient être actionnées entre le 1er janvier et 31 janvier 1997,  » la légitime demande reconventionnelle consécutive à la sommation de communication de pièces « .

Des pièces ayant été produites, elle maintient se demandes de vérification au regard du droit anglais, l’erreur contenue dans l’assignation sur la date de transfert de la créance lors de modification de personne de la créancière, l’utilisation d’un acte nul pour tromper la religion du magistrat ayant statué sur le relevé de forclusion, les problématiques liées à la création d’une entité juridique nouvelle,  » l’incroyable retard dans le recours à l’égard de la caution (s’il était et est envisageable)  » étant observé que, sous ce titre, il est fait état de l’absence de remplacement du crédit initial par un crédit de plus longue durée, la perte du bail emphytéotique vendu au profit d’un repreneur, l’impossibilité pour les cautions de reprendre l’entreprise, l’absence d’information annuelle, les deuxième et troisième moyens développés par Melle D…, l’intervention d’une tierce personne occulte, sous le titre  » Une évidence non démontrée  » l’inapplicabilité du taux de 5 % retenu par les premiers juges, sous le titre  » l’incidence financière  » une novation résultant de la modification du taux devant conduire la cour à limiter son obligation à 50 % ou 2 / 3.

En réponse aux écritures de la banque signifiées le 27 novembre 2007, elle reproche à la banque de ne pas avoir satisfait à une demande légitime de clarification  » Dès lors, au- delà des procédures engagées à l’égard de la débitrice principale et qui sont inopposables à la caution qui peut se prévaloir des exceptions d’ordre personnel, il est patent ici que le CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE n’a nullement- en l’état- démontré que :

– à l’égard de la caution, la cession de créance du 3 mars 1998 lui était opposable d’une part,

– à l’égard de la caution, la transmission de la garantie personnelle et réelle à l’occasion de cette cession au profit du cessionnaire, d’autre part, lui était également opposable.

Il est ici inconcevable, alors que les écritures de la SA CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE qui veulent donner l’impression d’être aussi savantes qu’elles sont péremptoires, que la Banque qui de surcroît est un tiers, par rapport au cessionnaire cité dans l’acte du 3 mars 1998, n’ait pas satisfait à une demande légitime de clarification.  »

Elle procède ensuite a 10  » nécessaires mises au point  » et conteste des manoeuvres dilatoires.

Les moyens et demandes de Mlle X… ont été, autant que possible, rapportées selon l’ordre et la terminologie adoptés dans ses conclusions.

Madame Martine D… demande de juger :

« – que la lettre de l’UNION BANCAIRE PRIVEE du 6 novembre 1996 constituait une main levée de la caution de Madame Martine D… privant ainsi la banque de tout recours envers cette dernière ;

– que, par application de l’article L. 341- 4 du Code de la consommation, l’engagement de Madame Martine D… étant disproportionné au regard de son patrimoine et de ses revenus cette dernière en est déchargée ;

– que, par application de l’article 2314 du Code civil, la perte de son droit à subrogation dans les droits du créancier a entraîné la décharge de Madame Martine D… de son engagement.

Si la Cour devait, par extraordinaire, confirmer le jugement de première instance et ne pas retenir la décharge de l’obligation de caution pesant sur Madame Martine D… résultant de la lettre du 6 novembre 2006, de la disproportion de ladite obligation ainsi que de la perte de son droit à subrogation dans les droits du créancier alors, il lui est demandé :

– de limiter le montant de la condamnation à la portée du cautionnement des trois associés, ce pour un montant de 2. 750. 000 Frs chacun soit, 419. 234, 8 €.

– de constater, par application de l’article L 313- 22 du Code monétaire et financier que l’UNION BANCAIRE PRIVÉE n’ayant pas remplit son obligation d’information annuelle de la caution Madame Martine D… doit être déchargée du paiement des intérêts ;

Madame Martine D… ne pourrait alors, être condamnée qu’à hauteur de 424. 758, 15 €.

– de condamner le CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ SUISSE à lui payer la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du NCPC,

– de dire et juger, en application des articles 1382 et 1134 du Code civil, que Monsieur Jannick B… devra garantir Madame Martine D… du paiement de toutes les sommes qui pourraient être mises à sa charge par l’arrêt de la Cour ;

– de condamner ce dernier à lui payer la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du NCPC, en cas de non décharge de son obligation de cautionnement.  »

Elle relate que, associée, elle a vu les relations se dégrader entre Mlle X… et M. B… d’une part, elle- même d’autre part, qu’elle a été licenciée et que le protocole d’accord réglant les modalités de son départ a été signé, après que la société l’Union Bancaire privée ait adressé à M. B… une lettre selon laquelle, d’après une traduction libre : « l’UNION BANCAIRE PRIVEE vous confirme que Madame D… n ‘ a jamais eu la signature des TROIS MAJ, qu’elle n’a pas été non plus caution personnelle de l’agrément de découvert »-

Elle explique que son désengagement de la société était conditionné par la levée des cautionnements souscrits auprès de la ville de Deauville et de l’Union Bancaire Privée obtenue par ce courrier.

En réponse aux conclusions adverses, elle fait valoir que le signataire de la lettre est aussi celui du prêt, ce qui priverait la banque de sa créance.

Elle fait valoir le caractère disproportionné de l’engagement et la perte de son droit à subrogation eu égard au délai dans lequel l’action a été intentée.

Elle fait aussi valoir la limitation de l’engagement de caution, et le non- respect des obligations d’information de la banque.

Elle demande la production de la lettre adressée à la banque par M. B… et qui a donné lieu à la réponse précitée.

La société Crédit Agricole Suisse conclut à la confirmation du jugement.

Elle estime que les pièces dont la communication est demandée sont sans influence sur la solution du litige, en observant que les cautions sont actionnées sur le fondement de l’acte notarié du 23 juillet soumis au droit français, que les cautions ne peuvent pas contester la décision suisse et que la transmission de la créance a été jugée par la juridiction suisse en référence au droit anglais puis admise à la procédure collective de la société Les Trois Maj.

Elle fait valoir que :

– selon l’acte notarié, les cautions sont engagées jusqu’à parfait paiement,

– l’étendue du cautionnement avec les frais et accessoires, résulte de l’acte,

– le transfert du cautionnement a été jugé par les juridictions suisses, et, en droit français, la cession de créance, n’entraîne pas extinction du cautionnement, pas plus que la transformation de la personne morale créancière, principes applicables à l’espèce.

Concernant Mme D…, elle fait valoir que la lettre invoquée, signée par des personnes démunies de pouvoirs et adressée à un tiers, contient une erreur puisqu’elle était caution, alors que cette lettre dit le contraire, l’erreur s’expliquant par la circonstance que le cautionnement avait été donné sous son nom de jeune file, C….

Elle conteste avoir commis une quelconque négligence et l’application de l’article 2314 du Code civil sur la perte de la subrogation.

Elle conteste l’application du principe de proportionnalité du patrimoine à des associés de la société cautionnée.

Elle conteste également l’existence d’un quatrième garant et de toute raison de limiter l’engagement des cautions.

Sur la déchéance des intérêts, elle fait valoir que le prêt était arrivé à échéance le 31 décembre 1996 et que, par ailleurs, les intérêts légaux resteraient dus.

M. Jannick B…, assigné dans les formes de l’article 659 du Code de procédure civile ne comparaît pas.

Par ordonnance du 13 décembre 2007, le juge de la mise en état en a ordonné la clôture.

Il a dit son rapport avant les plaidoiries.

SUR QUOI

Liminaire

Attendu que la juridiction est confrontée au type d’écriture employé dans les conclusions de Mlle X… ;

Que ces écritures développent sur 30 pages une argumentation confuse émaillée de questions telle, par exemple p. 9  » la garantie personnelle des trois associés était plafonnée à hauteur de 2. 750. 000, 00 Francs, la garantie expirant le 31 janvier 1997. Fallait- il dès lors mettre en jeu les cautions dès cette date ou le prêteur de deniers avait- il, toute latitude pour modifier les termes de la convention initiale à l’occasion du rendez- vous chez le notaire en France lors de la signature de l’acte notarié du 23 juillet 1996 ?

Ces questions sont d’autant plus importantes que les fonds avaient déjà été avancés pour permettre notamment le financement des travaux prévus à l’intérieur du domaine dit de « la Bergerie »  » ;

Que ce genre de formulation dont le contenu sera analysé ci- après ne peut que rendre très difficile la fonction juridictionnelle qui doit répondre à des demandes et des défenses en justice articulées en droit et en fait et non à de telles questions ;

Que l’on y trouve aussi des propositions assorties de  » il semble « , sorte de débuts d’affirmations ou de suggestions qui ne devraient pas trouver place dans des conclusions et auxquelles il faut répondre malgré l’indétermination du propos, la réponse étant d’autant plus malaisée ;

Que l’on pourrait envisager de renvoyer la partie à conclure de manière claire et synthétique ; mais qu’il n’est pas sûr qu’elle le puisse et que l’on peut craindre de prolonger la procédure sans résultat ;

Attendu en conséquence que la cour est obligée de statuer en l’état de ces écritures ;

1) Sur le droit applicable

Attendu que Mlle X…, en réponse aux dernières conclusions adverses, soutient l’application du droit anglais ; que cette détermination suppose la détermination de l’acte fondant la créance ;

a) sur le droit applicable au contrat de cautionnement et la détermination de l’acte juridique le déterminant

Attendu que si le contrat de cautionnement est accessoire au contrat de prêt il constitue un contrat différent, obéissant à ses propres règles aussi loin que le permet son caractère accessoire ;

Attendu que selon Mlle X… son acte de cautionnement est régi et interprété par le droit anglais ; qu’elle cite la clause 22, mais ne précise pas l’acte dans lequel figurerait 22 ;

Que le contrat de prêt initial sous seing privé, qui prévoit les cautionnements, du 23 avril 1996 s’arrête au paragraphe 13. 2 ;

Que le paragraphe 12, selon la traduction versée aux débats indique :  » ce contrat sera gouverné et interprété en accord avec les lois anglaises  » ;

Que l’on ne peut tenir compte de la clause 22 d’un acte inconnu ; qu’il faut en rester à ce paragraphe 12, la désignation sous le numéro 22 résultant probablement d’une erreur ;

Mais attendu que cet acte sous seing privé a été suivi d’un acte de cautionnement et d’affectation hypothécaire distinct passé devant Me J…, notaire associé à Paris le 23 juillet 1996 ;

Que l’acte ultérieur portant sur le même objet prévaut sur l’acte antérieur qu’il remplace nécessairement ; qu’une critique de la validité de cet acte est suggérée par Mlle X…, mais que cette critique, analysée ci- après n’est pas fondée ;

Attendu en conséquence que l’acte régissant le cautionnement et l’affectation hypothécaire est l’acte notarié du 23 juillet 1996 ;

Que le contrat porte des références traditionnelles du droit français, notamment de solidarité et d’indivisibilité et en page 6, à l’article 877 du Code civil ; qu’il s’agit bien d’une référence au droit français ;

Que c’est donc le droit français qui s’applique au contrat de cautionnement ;

Que le premier juge a justement relevé que la clause contenue dans le passage  » contestations  »  » le tout sous réserve de l’application de la loi anglaise et l’attribution de juridiction aux tribunaux britanniques contenues dans la convention d’ouverture de crédit et auxquels la présente clause ne constitue pas une dérogation  » ne concerne que le contrat de crédit et non le contrat de cautionnement ; que la distinction des régimes des deux contrats est d’autant plus patente que le contrat de cautionnement attribue compétence aux tribunaux de Paris ;

Que les premiers juges ont aussi exactement relevé qu’il n’y avait pas à distinguer dans le contrat de 1996 ce qui concernait les garanties personnelles de ce qui concernait les garanties réelles, aucune clause du contrat ne stipulant cette distinction ;

b) sur le droit applicable à la créance principale

Attendu que la créance à l’encontre de la débitrice principale ne résulte plus des contrats mais de la procédure suisse qui analyse la faculté de céder des droits en droit anglais (jugement § 5) et de la décision d’admission à la procédure collective, ce qui rend secondaire à ce moment de l’analyse l’étude de la situation contractuelle antérieure ;

Que la procédure collective ayant été diligentée devant le tribunal de grande instance de Paris, la décision et sa portée sont régies par le droit français ;

Qu’au surplus, un autre acte avait été prévu et préparé dans une étude de notaire Ayraut Dousset K… qui l’avait écrit le 6 mai 1998, sans que le projet ait abouti ;

2) sur la créance principale, les dommages intérêts sollicités par Mlle X… à propos de la procédure devant le juge commissaire et les demandes de communication de pièces afférentes à la créance principale

Attendu en conséquence que tous les écrits de Mlle X… sur la créance à l’encontre de la débitrice principale et son admission par le juge commissaire sont sans efficience sur la créance elle- même ;

Attendu que Mlle X… reproche à la banque d’avoir faussement invoqué une hypothèque :  » Toutefois, ledit « Crédit Agricole » s’appuie sur une hypothèque publiée auprès de la conservation des hypothèques de PONT L’EVEQUE en date du 14 décembre 1998. Alors que cette inscription bénéficiait en réalité à la banque du Crédit Agricole Suisse et non à la nouvelle entité juridique créée depuis le 20 novembre 1999 soit le Crédit Agricole Indosuez Suisse.

Le 13 décembre 2004, sur la base de cette requête, et en articulant sa décision sur ladite inscription hypothécaire, Monsieur L… a relevé la nouvelle personne morale de la forclusion encourue alors qu’elle ne bénéficiait nullement de cette publicité. « , étant observé que ce Monsieur était le juge commissaire ;

Attendu que, en première lecture, on comprend mal pourquoi Mlle X… invoque cette circonstance ; que cela peut s’expliquer par l’obligation d’avertir

le créancier inscrit de la procédure collective, ce qui a pu avoir de l’influence sur la décision relevant de la forclusion ;

Mais que la présente juridiction n’est pas juridiction de recours du juge commissaire ayant prononcé ce relevé de forclusion ;

Que ce relevé de forclusion est acquis ;

Que l’admission de créance l’est aussi ;

Que l’argumentation de Mlle X… à ce sujet est sans intérêt ;

Attendu que la banque n’a pas argué d’une qualité qu’elle n’avait pas, sa qualité de créancier hypothécaire étant analysée dans la suite de la présente décision ;

Qu’il n’y a pas lieu à dommages intérêts de ce chef au profit de Mlle X… ;

Que toutes ses demandes, tant sur le fond que sur les communications de pièces ou demandes de procédure relatives au montant de la créance principale, notamment les relevés de banques de la société cautionnées depuis la conclusion du prêt, sont aussi dépourvues d’intérêt, la créance résultant de son admission par le juge commissaire après les décisions des juridictions de Genève ;

Attendu en outre que la continuation de la Banque de Crédit Agricole (Suisse) par la banque demanderesse est acquise dans la procédure, comme il sera examiné ci- après ;

3) sur le cautionnement, l’affectation hypothécaire et leur durée

Attendu que l’étude ci- avant a déterminé que le cautionnement invoqué résulte de l’acte notarié du 23 juillet 1996 par lequel Mlle X… affecte également en hypothèque un bien lui appartenant ;

Que cet acte portait aussi l’affectation hypothécaire du bail emphytéotique dont la société les Trois Maj était titulaire ;

Attendu que les cautions font valoir que leur engagement devait prendre fin le 31 janvier 1997 ; que cette date figure dans l’acte de prêt initial, le  » loan  » de droit anglais, au paragraphe des garanties personnelles ;

Attendu que Mlle X… fait écrire :  » Fallait- il dès lors mettre en jeu les cautions dès cette date ou le prêteur de deniers avait- il toute latitude pour modifier les termes de la convention initiale à l’occasion du rendez- vous chez le notaire en France lors de la signature de l’acte notarié du 23 juillet 1996 ?  » ;

Attendu que l’on, comprend mal ce que cela signifie, la mise en jeu des cautions ne signifiant pas, en tout cas, une demande en paiement qui n’a pas été formulée à ce moment- là ;

Que l’on ne comprend pas non plus cette présentation de l’acte de cautionnement comme dépendant de la seule volonté du prêteur ; que Mlle X… ne prétend pas que son consentement ait été vicié lors de la passation de cet acte notarié qui ne dépendait donc pas que du créancier ;

Que si cet acte a été passé dans ces circonstances particulières, elle ne les dit pas ;

Attendu que rien ne permet de mettre en doute la validité de cet acte ; qu’aucune critique utile n’est formulée ;

Attendu en conséquence que les cautionnements sont régis par l’acte notarié du 23 juillet 1996 ;

Attendu que la limitation dans le temps n’est pas reprise dans cet acte notarié ;

Qu’il ne s’agit pas à proprement parler d’une prorogation, mais d’un nouveau contrat qui ne prévoit pas cette limitation dans le temps ;

Que les cautions ne peuvent donc pas se prévaloir d’une telle limitation ;

Attendu par ailleurs que les limitations dans le temps figurant dans l’acte sous seing privé du 23 avril présentaient quelques curiosités ; que le prêt principal devait être remboursé avant le 31 décembre 1996, ce qui était impossible, sauf à l’envisager comme une sorte de prêt relais, ce que confirme la préparation d’un nouvel acte ; que l’expiration des cautionnements était fixée au 31 janvier 1997, sans que le mois de différence soit expliqué ;

Qu’en outre l’avènement du terme qui était suspensif ne dispensait pas du paiement ; qu’ainsi, l’article 10. 3, dans une traduction qui n’est pas contestée, prévoit un intérêt majoré dans l’hypothèse où l’emprunteur est défaillant d’ » un quelconque paiement à la date d’échéance jusqu’à la date du paiement effectif (réel)  » ; que même l’argumentation sur l’extinction de l’obligation dans l’acte sous seing privé n’est pas pertinente ;

Attendu en conséquence que les cautions doivent être déboutées de leurs demandes fondées sur l’expiration de leur engagement par référence à cet acte sous seing privé ;

4) Sur la cession des cautionnements et des garanties hypothécaires

Attendu qu’il résulte des documents juridiques versés au dossier, notamment l’étude à l’en- tête Radcliffes Le Brasseur versée par Mlle X…, et non contestés que le droit anglais connaît la cession de contrat et autorise notamment la cession de contrat de prêt ; que Mlle X… n’indique pas en quoi cette cession serait irrégulière au vu de ces documents, et se contente d’une formule générale de vérification sans conséquence procédurale ; que cette demande ne serait utile que si, alors que le contrat de vente est versé au dossier, elle articulait une critique précise constituant une demande également précise ;

Attendu que Mlle X… fait valoir que, alors que la banque leur avait notifié une cession de créance sous seing privé intervenue par acte du 3 mars 1998, un acte authentique est intervenu pour la même cession le 25 novembre 1998 ; qu’elle soutient qu’on ne peut céder ce qui l’a déjà été ;

Attendu cependant que les parties peuvent disposer de leurs droits qui ne heurtent pas l’ordre public, ce qui implique qu’elles peuvent revenir sur une convention déjà formée à la seule condition d’y consentir toutes les deux ;

Qu’elles peuvent notamment après une cession convenue dans une forme et sous des conditions données, modifier les termes de cette cession dans une nouvelle convention ; que l’existence de la première convention n’entraîne pas nullité de la seconde ;

Attendu que la cession par acte notarié pouvait s’avérer utile à la publication au bureau des hypothèques ; que le cédant et le cessionnaire étaient en droit de formuler la cession dans de nouveaux termes qui, là encore, prévalent nécessairement sur les précédents ;

Que d’ailleurs, cet acte authentique mentionne l’acte sous seing privé du 3 mars 1998 qu’il présente comme une étape de la réalisation du contrat ;

Que la nouvelle cession entraîne nécessairement renonciation à la précédente, dont la passation est qualifiée d’étape de la convention et donc réduite à un élément préparatoire du contrat ;

Mais que


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