Cour d’appel de Bastia, 18 novembre 2015, 14/00347

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Cour d’appel de Bastia, 18 novembre 2015, 14/00347

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Ch. civile A

ARRET No

du 18 NOVEMBRE 2015

R. G : 14/ 00347 C

Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d’AJACCIO, décision attaquée en date du 20 Mars 2014, enregistrée sous le no 12/ 00561

SCI SOCIETE IMMOBILIERE DE LA POINTE DE PORTICCIO

C/

SCI LES TROIS POINTES

COUR D’APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU

DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE

APPELANTE :

SCI SOCIETE IMMOBILIERE DE LA POINTE DE PORTICCIO prise en la personne de son administrateur provisoire, Monsieur Jean-Loup X…

C/ O M. X…

20200 PIETRANERA

assistée de Me Jean Paul MATTEI de la SELARL MATTEI Jean Paul, avocat au barreau d’AJACCIO, Me CERVETTI, avocat au barreau d’AJACCIO plaidant en visioconférence

INTIMEE :

SCI LES TROIS POINTES

prise en la personne de son représentant légal domicilié es-qualité audit siège

5 Rue Debelleyme

75003 PARIS

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA, Me Vincent LOIR, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 12 octobre 2015, devant la Cour composée de :

Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre

Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller

Mme Marie BART, vice-président placé près M. le premier président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2015.

ARRET :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La SCI La Pointe de Porticcio inscrite au RCS d’AJACCIO sous le no 443. 93 1. 902 et dont le siège social est sis domaine de la pointe, maison commune de La Pointe de Porticcio 20116 Grosseto Prugna a été constituée par acte du 28 décembre 1957 avec pour objet :

 » La propriété, l’exploitation et l’administration par bail ou location d’immeubles ruraux et urbains qu’elle acquerra par voie d’apports ou autrement dans le département de la Corse.

La Société pourra notamment effectuer ou faire effectuer sur les terrains dont elle sera propriétaire toutes opérations de viabilité, de construction d’immeubles, ou d’équipement en vue de la construction d’immeuble « .

Cette société bénéficiait d’un apport en nature consistant en un immeuble sis à Porticcio, commune de Grosseto Prugna.

Le capital était réparti entre les associés qui se voyaient attribués des lots composés de parts stables d’une part et rachetables d’autre part.

La SCI constituait alors un lotissement approuvé par arrêté préfectoral du 18 juin 1959 modifié. Les associés se retiraient ensuite partiellement de la société en faisant annuler les parts rachetables qu’ils détenaient et qui correspondaient à la parcelle de terrain qu’ils se faisaient attribuer en pleine propriété.

Pour le surplus, ils demeuraient associés de la SCI en qualité de porteurs de parts stables correspondant à un actif précis du lotissement dont la société demeurait propriétaire (terrains de tennis, maison commune, port, garages, terrains…).

L’acquéreur d’une portion de terrain, retirée de la SCI constituant un lot du lotissement, devient automatiquement et de plein droit associé, en lieu et place de son cédant, de la SCI La Pointe de Porticcio.

La SCI Les Trois Pointes, inscrite au RCS de Paris sous le no 497. 551. 697 et dont le siège social est sis 5 me Debelleyme 75003 Paris a acquis par acte notarié en date du 3 mai 2007 des consorts A…le lot no8 du lotissement et s’est vu par là même attribuer par acte du 4 mai 2011, 50 parts stables du capital de la SCI La Pointe de Porticcio.

Cette même société a acquis par acte notarié en date du 12 mai 2007 des époux B…le lot no7 du lotissement et s’est vu par là même attribuer par acte du 9 mai 2011, 48 parts stables du capital de la SCI La Pointe de Porticcio.

Ces deux cessions ont été notifiées par acte d’huissier de justice respectivement les 13 et 10 mai 2011 à la SCI La Pointe de Porticcio.

Les statuts de la société n’étaient pas modifiés au vu de la nouvelle qualité d’associée de la SCI Les Trois Pointes, malgré les demandes de celle-ci.

Par jugement en date du 5 décembre 2011, le Tribunal de grande instance d’AJACCIO rendait la décision suivante :

 » Dit que la SCI Les Trois Pointes est fondée en sa demande ;

Dit que la SCI de La Pointe de Porticcio devra procéder à la modification de ses statuts en y faisant apparaitre la SCI Les Trois Pointes qui a fait l’acquisition selon actes reçus par Maître Thierry J…, Notaire à Meudon, en date des 3 et 12 mai 2007 des lots no 7 et 8 du lotissement de la Société Civile Immobilière de La Pointe de Porticcio en qualité d’associé porteur de quatre-vingt-dix-huit parts composant le capital social de ladite société immobilière comme venant aux droits de ses vendeurs les indivisions Leca et Amillard ainsi que Monsieur B…, dans le délai d’un mois à dater de la signification de la présente décision ;

Dit que la SCI de La Pointe de Porticcio devra procéder à la publication de cette modification au registre du commerce et des sociétés en faisant apparaître la SCI Les Trois Pointes en qualité d’associé porteur de 98 parts composant le capital social ;

Dit que passé ce délai la société civile immobilière de La Pointe de Porticcio y sera contrainte sous astreinte de trois cent euros par jour de retard ;

Dit que le tribunal se réserve le droit de liquider l’astreinte au cas de non-exécution du présent jugement ;

Rejette les demandes plus amples… « .

Par ordonnance de Mme la présidente du tribunal de grande instance d’Ajaccio en date du 29 février 2012, M. Jean-Loup X…était désigné en qualité d’administrateur provisoire de la SCI La Pointe de Porticcio.

Par actes d’huissier de Justice en date des 18 et 27 avril 2012, la SCI Les Trois Pointes assignait la SCI La Pointe de Porticcio en liquidation de l’astreinte.

Par jugement du 20 mars 2014, le tribunal de grande instance d’AJACCIO :

– liquidait l’astreinte à la somme de 184 200 euros arrêtée à la date du 30 septembre 2013, somme que la SCI La Pointe de Porticcio était condamnée à payer à la SCI Les Trois Pointes,

– assortissait le jugement du 5 décembre 2011 d’une nouvelle astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du présent jugement,

– déboutait la SCI La Pointe de Porticcio de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– disait n’y avoir lieu à exécution provisoire,

– condamnait la SCI La Pointe de Porticcio à payer à la SCI Les Trois Pointes la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et à acquitter les entiers dépens.

Par déclaration du 23 avril 2014 la SCI La Pointe de Porticcio a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions récapitulatives du 9 janvier 2015, la SCI La Pointe de Porticcio demande à la cour de :

– infirmer l’ensemble du jugement du 20 mars 2014,

– débouter la SCI Les Trois Pointes de l’ensemble de ses demandes,

– reconventionnellement, ordonner la suppression de l’astreinte telle que fixée dans le jugement du 5 décembre 2011,

– à titre très subsidiaire, diminuer l’astreinte,

– condamner la SCI Les Trois Pointes à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et à acquitter les dépens, dont distraction au profit de la SELARL Cegexport.

La SCI La Pointe de Porticcio fait valoir que l’impossibilité pour elle de régulariser ses statuts ne réside pas dans le grand nombre d’associés, mais dans le fait que certains d’entre eux n’ont jamais respecté les règles édictées dans les statuts.

Elle rappelle que la SCI a été fondée le 28 décembre 1957, pour constituer une copropriété  » Le Domaine de La Pointe de Porticcio « , et que depuis cette date, de très nombreux changements sont intervenus : cessions de villas, décès de copropriétaires, suivis d’indivisions plus ou moins organisées, héritiers vivant parfois à l’étranger… et qu’à cette occasion, l’existence de la SCI la Pointe de Porticcio aux côtés d’une association syndicale libre (ASL du Domaine de Porticcio) a parfois été méconnue tant par les propriétaires que par les notaires rédacteurs d’actes eux-mêmes, et que pour la SCI Les Trois Pointes elle-même, les cessions de parts sociales ne sont intervenues que les 4 et 9 mai 2011, alors que les biens immobiliers avaient été acquis en 2007.

Plusieurs associés ne participent pas à la vie de la SCI La Pointe de Porticcio alors qu’ils sont par ailleurs membres de l’ASL.

Tous les associés qui devraient figurer sur l’extrait K bis de la SCI au Registre du Commerce et des Sociétés n’y figurent donc pas, et d’autre part, les parts sociales rachetables ont fait l’objet d’une réduction de capital, mais figurent toujours au K-Bis, malgré les dispositions contraires de l’article 21-4 des statuts.

La réduction du capital social, entérinée par les assemblées générales dans les bilans de la SCI, n’apparaît pas au Registre du Commerce.

La SCI La Pointe de Porticcio ajoute que pour remédier à cette situation, elle a fait voter lors de l’assemblée générale de 2011, une modification de l’article 21 des statuts, afin de supprimer le délai de 10 mois imparti au gérant pour attraire l’associé à un acte notarié constatant la réduction du capital social, mais que la SCI Les Trois Pointes a obtenu en justice l’annulation de cette assemblée générale.

Elle soutient avoir toujours cherché à trouver des solutions à la situation actuelle, alors que la SCI Les Trois Pointes n’a eu de cesse que de bloquer ses initiatives en ce sens, et que le greffe du tribunal de commerce d’Ajaccio refuse de procéder à des régularisations partielles et ce malgré les dispositions du jugement du 5 décembre 2011, et qu’il exige une régularisation pour l’ensemble des associés.

La SCI La Pointe de Porticcio précise que l’article L131-4 alinéa 1 du code de l’exécution ne prévoit nullement l’existence d’une cause étrangère, mais impose au juge de tenir compte du comportement du débiteur de l’astreinte, et des efforts accomplis pour exécuter ou tenter d’exécuter le jugement de condamnation.

Elle rappelle qu’elle est une personne juridique distincte de ses membres qui seuls sont responsables des omissions de cessions de parts sociales dans les actes de vente.

Elle dit avoir sollicité pour tenter de régulariser les statuts, la désignation par le président du tribunal de grande instance d’Ajaccio, d’un administrateur provisoire en la personne de M. Jean-Loup X…, mais qu’actuellement, compte tenu de la situation juridique particulièrement complexe à laquelle elle doit faire face depuis longtemps, elle est dans l’incapacité d’exécuter le jugement.

Elle sollicite la suppression de l’astreinte sur le fondement de l’article L131-4 alinéa 3 du code des procédure civiles d’exécution, au motif que l’exécution du jugement du 5 décembre 2011 lui est, malgré la bonne volonté dont elle a fait preuve, particulièrement difficile, et que le refus du greffe du tribunal de commerce d’enregistrer le changement de statuts tant que la situation de tous les autres associés ne serait pas régularisée constitue une cause étrangère au sens de ces dispositions.

Par conclusions récapitulatives du 5 décembre 2014, la SCI Les Trois Pointes demande à la cour de :

– confirmer le jugement du tribunal de grande instance d’Ajaccio du 20 mars 2014, en ce qu’il a liquidé l’astreinte prononcée par le jugement du tribunal de grande instance d’Ajaccio en date du 5 décembre 2011, et condamné la SCI La Pointe de Porticcio à lui payer le montant de cette astreinte liquidée, fixé une nouvelle astreinte, et condamné la SCI La Pointe de Porticcio à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à acquitter les dépens,

– infirmer le jugement pour le surplus,

– usant de son pouvoir d’évocation, et statuant à nouveau,

– liquider l’astreinte prononcer par le jugement du 05 décembre 2011 à la somme de 324 300 euros arrêtée au 10 décembre 2014,

– condamner la SCI La Pointe de Porticcio à lui payer cette somme de 324 300 euros,

– assortir la condamnation du jugement du 5 décembre 2011 d’une nouvelle astreinte définitive de 1 000 euros par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir,

– débouter la SCI La Pointe de Porticcio de toutes ses demandes, fins et prétentions,

– condamner la SCI La Pointe de Porticcio à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens.

Elle fait valoir que la prétendue complexité à exécuter le jugement du 05 décembre 2011 est factice et forgée pour les besoins de la cause, que le greffe du tribunal de commerce d’Ajaccio n’a exprimé aucune opposition à la publication de statuts modifiés, mais qu’il se contente de demander à la SCI La Pointe de Porticcio des pièces que celle-ci ne lui produit pas.

Elle souligne que le capital est réparti entre 49 associés, dont 60 % sont des associés d’origine, déjà présents à la constitution de la SCI en 1957, et que celle-ci a pour vocation de gérer son patrimoine, constitué à minima de ses parts stables, et que si elle n’est pas en mesure de donner le nombre exact de ses associés, et si le nombre de ces derniers diffère selon qu’il apparaît dans les statuts ou au Registre du Commerce et des Sociétés, cette situation est à imputer à la négligence des gérants successifs de la SCI.

La SCI Les Trois Pointes fait valoir que la partie adverse ne rapporte pas la preuve des fautes qu’elle attribue à ses associés, que l’article 21-4 des statuts n’est pas applicable en l’espèce, et que la SCI La Pointe de Porticcio qui veut créer une difficulté artificielle en évoquant cet article, ne cite d’ailleurs aucun nom d’associé défaillant dans la signature de l’acte de retrait du capital prévu par ces dispositions, alors même qu’elle ne justifie pas accomplir les diligences qui lui incombe pour établir ces actes de retrait.

L’intimée fait valoir que les gérants successifs ont toujours été informés des ventes qui avaient une incidence sur le capital social, qu’ils intervenaient même aux actes de vente, mais sans jamais faire ensuite les démarches prévues par les statuts pour que la composition du capital social soit adaptée, et que cette adaptation soit publiée.

L’application des statuts ne se heurtait donc selon elle à aucune difficulté insurmontable qui justifierait une réduction de l’astreinte liquidée.

La SCI les Trois Pointes affirme que la pièce no19 de la partie adverse (courrier de Me K…) est tronquée, que Me Anne K…qui répond en qualité de notaire à une demande d’explications de l’administrateur, est en fait elle même associée de la SCI suite au décès de son mari, qui était également notaire et qui avait veillé à ce que les parts détenues par son prédécesseur lui soient cédées, et publiées au Registre du Commerce et des Sociétés, mais qu’après son décès, Mme Anne K…et ses enfants, héritiers, n’ont pas accomplis les démarches pour que leur nom apparaissent dans les statuts publiés.

En ce qui concerne ses propres parts, la SCI Les Trois Pointes fait valoir que les pièces nécessaires à la mise en conformité des statuts ne leur ont été réclamées qu’après qu’elle ait intenté une action en justice.

Elle conteste que le greffe du tribunal de commerce d’Ajaccio exige la régularisation en même temps, de la situation de tous les associés, une telle exigence ne résultant ni du courrier du 12 septembre 2011, ni de celui du 12 janvier 2012, courriers par lesquelles le greffe ne réclamait que la copie de la carte d’identité ou du passeport en cours de validité, de tous les associés restant au jour de la formalité requise, et que l’appelante n’a manifestement donné aucune suite à ces demandes, pourtant simples à satisfaire. Elle ajoute que depuis son entrée en fonction, l’administrateur provisoire n’a rien fait non plus pour que le jugement du 05 décembre 2011 soit exécuté, qu’il n’a notamment pas informé tous les associés de sa désignation, ni tenu en 2012 2013, ni même 2014 d’assemblée générale au cours desquelles il lui aurait été possible d’exposer ses difficultés et de chercher des solutions.

L’intimée désigne les 5 personnes qui sont associées de la SCI mais qui n’apparaissent pas dans ses statuts, et celle des personnes qui figurent sur l’extrait K-bis et qui sont décédées.

Elle regrette que l’administrateur provisoire n’ait entrepris cette tâche simple qu’elle même a effectué sans difficultés, que le 09 août 2013 soit 18 mois après sa désignation, et qu’un an plus tard, elle ne soit toujours pas informée du résultat.

Elle craint que l’obstruction de la SCI La Pointe de Porticcio à la régularisation des statuts n’ait pour conséquence de la spolier de ses droits, et de l’empêcher de revendre des parts sociales dont elle est pourtant propriétaire.

La clôture de la procédure a été prononcée le 18 mars 2015, et l’affaire fixée pour être plaidée le 12 octobre 2015.

MOTIFS

Par application de l’article L131-4 du code des procédures civiles d’exécution,  » le montant de l’astreinte provisoire est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter.

Le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.

L’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient en tout ou partie, d’une cause étrangère.  »

Le tribunal de grande instance d’Ajaccio a, par jugement du 05 décembre 2011, dit que la SCI de La Pointe de Porticcio devrait procéder à la modification de ses statuts en y faisant apparaître la SCI Les Trois Pointes qui a fait l’acquisition, selon actes reçus par Me Thierry J…notaire à Meudon, en date des 3 et 12 mai 2007, des lots no7 et 8 du lotissement de la SCI La Pointe de Porticcio en qualité d’associé porteur de 98 parts composant le capital social de ladite société immobilière comme venant aux droits de ses vendeurs les indivisions Leca et A…, ainsi que M. B…, dans le délai de un mois à compter de la signification de la présente décision.

Le tribunal a également dit que la SCI La Pointe de Porticcio devrait procéder à la publication de cette modification au registre du commerce et des sociétés en faisant apparaître la SCI Les Trois Pointes en qualité d’associée porteur de 98 parts composant le capital social, et que passé le délai de un mois, la SCI La Pointe de Porticcio y serait contrainte sous astreinte de 300 euros par jour de retard, le tribunal se réservant la liquidation éventuelle de l’astreinte.

Ce jugement a été signifié le 23 décembre 2011.

Il appartient à la SCI La Pointe de Porticcio de justifier des diligences qu’elle a accomplies pour exécuter cette décision dans le délai imparti, et des difficultés qu’elle a pu rencontrer. La réalité et l’importance des difficultés éventuelles ne peuvent être appréciées qu’au regard de la situation juridique des parties, et de sa genèse.

Le 12 janvier 2012, le greffe du tribunal de commerce d’Ajaccio a adressé à l’appelante un courrier l’informant de ce qu’il avait réceptionné le même jour son dossier, mais que la formalité requise ne pouvait être effectuée pour les motifs suivants :

 » Au vu des documents déposés, il semble que des actes soient manquants, les cédants mentionnés sur les actes de cession de parts ne sont pas titulaires de parts, ils ne peuvent par conséquent céder ces dernières.

L’acte de retrait d’associés du 20 mars 2004 doit être déposé en deux exemplaires, et doivent être des copies authentiques, les documents présents au dossier sont de simples photocopies.

De plus, suite au décret du 1er février 2005, tous les associés doivent être portés sur l’extrait d’immatriculation au registre du commerce, par conséquent, lors des régularisations vous devez nous faire parvenir les extraits d’actes de naissance originaux de moins ou copie de la carte d’identité en cours de validité, ainsi que les extraits d’immatriculation originaux de moins de trois mois, de tous les associés étant associés au jour de la formalité « .

Pour la clarté des débats, il aurait été logique de produire la copie de la demande de formalité et des pièces qui y étaient jointes, auxquelles le greffe répondait ainsi de façon négative.

On comprend cependant le sens et la portée de la décision du greffe, à la lecture de ses refus précédents, et des pièces antérieures du dossier.

Par acte notarié du 3 mai 2007, les consorts A…/ L…héritiers de Roger A…et de son épouse, vendaient à la SCI Les Trois Pointes une maison d’habitation avec terrain constituant le lot no8 du Lotissement  » Domaine de Porticcio « , et les millièmes de propriété des parties communes du lotissement. Au titre de l’origine de propriété, il était rappelé que M. A…avait acquis le bien le 12 juillet 1966 devant Me M…notaire à Bastia, par un acte de réduction du capital de la SCI La Pointe de Porticcio à concurrence des 150 parts rachetables lui appartenant. Mais il n’était pas fait mention des 50 parts stables de la SCI qui étaient également attachées à la propriété du lot, en application des statuts de la SCI.

En conséquence, par acte sous seing privé du 4 mai 2011, les consorts A…/ L…cédaient à la SCI Les Trois Pointes les 50 parts stables de la SCI qui étaient attachées au lot no8.

Il était à noter que Roger A…était expressément désigné comme propriétaire du lot 8, et des parts stables y attachées, dans l’article 7 des statuts (annexe : composition du capital social), actualisé au 13 juin 1968, et que l’indivision des héritiers A…l’était également dans les statuts actualisés au 18 octobre 2002.

Par acte notarié du 12 mai 2007, M. Aimé B…cédait à la SCI Les Trois Pointes le lot no7 du lotissement consistant en un terrain nu, et les millièmes de propriété des parties communes afférentes à ce lot. Là encore, au titre de l’origine de propriété, l’acte mentionnait que M. B…s’était vu attribuer ce lot par un acte de réduction du capital social de la SCI passé le 29 mars 2004 en l’étude de Me N…, notaire à Bastia, à concurrence des 144 parts rachetables lui appartenant. Mais il n’était pas fait mention des 48 parts stables de la SCI qui étaient attachées à la propriété du lot, en application des statuts.

Dès lors, par acte sous seing privé du 9 mai 2011, M. Aimé B…cédait les 48 parts stables de la SCI qui étaient attachées au lot no7. Il était précisé que M. B…avait acquis son lot des consorts Leca par acte notarié du 13 août 2002, suivi d’un avenant du 25 septembre 2002. Or l’indivision Leca était mentionnée comme propriétaire du lot no7 tant sur l’extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés en date du 29 mars 2010, que dans les statuts mis à jour au 25 juin 2002, (composition du capital social).

Ainsi, au premier motif de rejet du greffe du tribunal de commerce d’Ajaccio dans sa notification du 12 janvier 12 :  » il semble que des actes soient manquants, les cédants mentionnés sur les actes de cessions de parts ne sont pas titulaires de parts, ils ne peuvent par conséquent céder ces dernières « , (motif qui était repris d’une précédente décision de rejet du 12 septembre 2011), et  » l’acte de retrait d’associé du 29 mars 2004 doit être déposé en deux copies authentiques « , il appartenait à la SCI Domaine de Porticcio d’une part de réclamer à M. B…, ou à la SCI Les Trois Pointes, deux copies authentiques de l’acte de réduction de capital passé le 29 mars 2004 en l’étude de Me N…, formalité facile à accomplir, et d’autre part en ce qui concerne la vente du lot no8 par les héritiers A…, de produire l’acte d’acquisition avec réduction de parts passé en 1966 par Roger A…devant Me M…, un éventuel certificat d’hérédité des consorts A…, et les statuts de la SCI (statuts d’origine, et composition du capital actualisées).

Il convient de souligner la formule employée par le greffe :  » il semble « , qui traduit une position non définitive de sa part, mais qui appelle des précisions et des justificatifs.

Or aucune suite n’a été donnée par la SCI La Pointe de Porticcio à ce courrier, de sorte que le 08 février 2012, la demande était rejetée.

Aucune demande de pièces n’a été adressée à la SCI Les Trois Pointes, aucune nouvelle pièce n’était adressée au greffe.

La seule demande de pièces qui ait jamais été adressée à la SCI Les Trois Pointes date du 21 juin 2011, c’est-à-dire antérieurement au jugement prononçant l’astreinte. Elle portait sur deux originaux supplémentaires des actes de cession de parts, et un extrait K-bis de la SCI datant de moins de trois mois. La SCI Les Trois Pointes y a répondu trois jours plus tard, en adressant les pièces réclamées.

La SCI La Pointe de Porticcio n’a pas d’avantage contesté la décision du greffe devant le président du tribunal de grande instance d’Ajaccio, comme elle en avait la possibilité, ce qui lui aurait permis de produire plus tard les pièces nécessaires, et de justifier d’une poursuite même tardive de ses diligences.

Sa réaction a consisté à faire désigner le 29 février 2012 par le président du tribunal de grande Instance d’Ajaccio un administrateur provisoire de la SCI, qui en août 2013 seulement, a écrit à un certain nombre d’associés pour leur demander leurs titres de propriété.

Force est donc de constater en ce qui concerne les premières demandes du greffe du tribunal de commerce, qu’elles pouvaient être satisfaites sans réelles difficultés, même si la production des documents nécessaires pouvait prendre plus qu’un mois, et que la SCI La Pointe de Porticcio a eu un comportement passif.

*

* *

Concernant le deuxième motif fourni par le greffe dans sa décision de rejet du 12 janvier 2012, confirmée le 08 février 2012, il consistait à exiger en application du décret du 1er février 2005,  » les extraits d’actes de naissance originaux de moins (de trois mois) ou la copie de la carte d’identité, ou la copie du passeport en cours de validité ainsi que (pour les associés personnes morales) les extraits d’immatriculation originaux de moins de trois mois, de tous les associés étant associés au jour de la formalité « .

Il doit être en premier lieu souligné que ce qu’exige le greffe du tribunal de commerce, ne consiste pas en titres de propriété, mais seulement en copies de pièces d’identité, documents particulièrement faciles à obtenir, dès lors que l’on connaît la liste et les coordonnées de ses associés.

Il est exact en revanche que le greffe exigeait les pièces d’identité de toutes les personnes associées au jour de la demande, pour faire droit à une formalité concernant l’un d’eux.

L’appelante ne justifie d’aucune démarche pour obtenir ces pièces d’identité auprès des associés, ni par son gérant M. Jacques C…, ni par l’administrateur provisoire après sa désignation.

Elle fait valoir qu’elle n’est pas en mesure de connaître ses associés actuels, car l’existence de la SCI a été très souvent méconnue tant par les propriétaires de lots que par les notaires dans les actes de cession, mais aussi parce que la procédure prévue par l’article 21-4 des statuts lors des cessions de parts rachetables, n’est pas respectée par les associés.

L’article 21-4 des statuts mis à jour en 1968, puis en 2002, stipule d’abord que  » la réduction du capital prend effet au jour où elle est signifiée à l’administrateur de la société, par un associé remplissant les conditions requises. La preuve de la signification résulte soit d’un acte extra-judiciaire, soit de tout autre moyen, tel par exemple qu’une reconnaissance émanant de l’administrateur de la société.

Afin de permettre la transcription du droit de propriété échéant à l’associé, l’administrateur doit dans un délai de 10 mois de la signification qui lui a été faite, constater la réduction de capital devant notaire, dans un acte auquel intervient l’associé bénéficiaire, acte constatant que cet associé remplissait au moment de la signification du retrait, les conditions requises par le présent article. Faute pour l’associé de comparaître à l’acte dans les 60 jours de la date impartie, la réduction du capital est nulle et considérée comme non avenue « .

L’article 21-5 de ces mêmes statuts prévoit ensuite que la validité de toute réduction du capital par retrait d’une portion de terrain est subordonnée à trois conditions impératives :

– les parts stables ne sont cessibles et transférables, qu’à l’acquéreur de la portion de terrain à laquelle elles se rapportent,

– une portion de terrain retirée de la société ne peut être vendue ou cédée qu’à une personne qui acquiert ou reçoit simultanément le nombre correspondant de  » parts stables « ,

– l’associé auteur du retrait doit adhérer sans réserve au règlement d’habitation, au cahier des charges du lotissement, et à l’association syndicale libre du Domaine de Porticcio.

La SCI La Pointe de Porticcio reproche à ses différents associés successifs d’une part de l’avoir ignorée dans leurs actes de vente, en omettant de procéder au retrait des parts annulables correspondantes, et à la vente concomitante les parts stables, et d’autre part de ne lui avoir pas signifié les actes de réduction du capital.

Cependant, à la lecture des statuts, si une vente a été opérée sans retrait préalable du capital du vendeur, et sans cession des parts stables, comme c’est le cas pour les consorts D…et E…, elle n’est pas opposable à la SCI, dans laquelle le vendeur reste associé : Dès lors, son nom ou celui de ses héritiers, peut tout à fait être fourni au Greffe du tribunal de commerce pour qu’il apparaisse comme associé.

Par ailleurs, la SCI n’a jamais contesté la régularité des ventes sans retrait préalable des parts de capital, alors qu’elle avait au premier chef intérêt à le faire.

Enfin, tous les lots vendus sont en lotissement, et dès lors les actes de vente mentionnent nécessairement l’existence de ce lotissement, et le fait que les parties communes appartiennent à la SCI La Pointe de Porticcio. Le notaire chargé de l’acte devait donc obligatoirement informer de la mutation l’association syndicale libre dont le représentant était le même que celui de la SCI, et dont le cahier des charges devait être accepté par tous les associés, aux termes de statuts. La SCI pouvait donc, lorsqu’elle était avertie d’un projet de cession de parcelle, rappeler à son associé-vendeur, la nature exacte des actes qu’il devait passer.

En ce qui concerne les actes de réduction du capital, la SCI La Pointe de Porticcio n’en cite aucun dont elle n’aurait pas été informée. Il est en effet logique qu’elle intervienne à l’acte pour y consentir.

La SCI La Pointe de Porticcio était d’ailleurs représentée par M. Auguste H…son gérant, lorsque par acte notarié du 29 mars 2004, elle a acquiescé à la réduction de son capital, par annulation des 144 parts annulables de M. B…auteur de la SCI intimée.

Elle était encore représentée par M. Claude I…son gérant suivant, lorsque par acte notarié du 9 juin 2009, elle a acquiescé à la réduction de son capital, par annulation des parts annulables des consorts F…et G….

En résumé, la SCI La Pointe de Porticcio doit être en mesure, en y consacrant quelques semaines, de fournir la liste de ses associés actuels, et leur identité.

Elle ne peut valablement soutenir être dans l’incapacité de le faire, cette situation résultant quasi-exclusivement de son incurie.

Il résulte de l’ensemble de ses éléments que pour exécuter le jugement du 5 décembre 2011, la SCI appelante a été très peu diligente, qu’elle devait produire un certain nombre de documents qu’elle pouvait obtenir dans un délai supérieur à un mois, mais qu’elle n’a pas sollicités.

Ces circonstances ne constituent en rien une  » cause étrangère  » susceptible d’expliquer en tout ou partie l’inexécution du jugement, et de justifier en conséquence, une suppression même partielle de l’astreinte.

En revanche, le fait que les documents sollicités ne pouvaient être obtenus que dans un délai nettement plus long qu’un mois à compter de la signification de la décision, constitue une difficulté qui justifie que le montant de l’astreinte provisoire soit li


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