Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/05141 13 mai 2024

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Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/05141 13 mai 2024

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour d’appel d’Amiens
RG n° 22/05141
13 mai 2024
ARRET

CPAM CÔTE D’OPALE

C/

Etablissement Public CENTRE HOSPITALIER [4]

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 13 MAI 2024

*************************************************************

N° RG 22/05141 – N° Portalis DBV4-V-B7G-ITQO – N° registre 1ère instance : 18/00203

JUGEMENT DU TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE BOULOGNE-SUR-MER EN DATE DU 21 octobre 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

CPAM CÔTE D’OPALE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et plaidant par M. [U] [C], muni d’un pouvoir régulier

ET :

INTIMEE

CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 3]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

sis [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée et plaidant pa Me Emmanuelle PELETINGEAS, avocat au barrau de PARIS, substituant Me Omar YAHIA de la SELARL YAHIA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l’audience publique du 07 Mars 2024 devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 13 Mai 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Diane VIDECOQ-TYRAN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

M. Pascal HAMON, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 13 Mai 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, Greffier.

*

* *

DECISION

Dans le cadre du programme de contrôle régional de la tarification à l’activité dite « T2A» de l’année 2016 approuvé par le directeur général de l’Agence Régionale de Santé des Hauts de France, le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer a fait l’objet d’un contrôle sur site du 3 novembre au 18 novembre 2016 pour des soins dispensés durant la période du 1er mars 2015 au 31 décembre 2015.

Les résultats du contrôle ont été adressés le 20 janvier 2017 à l’établissement, lequel a formulé des observations reçues le 8 mars 2017 par l’Unité de coordination régionale (UCR) qui a répondu le 20 avril 2017.

Par courrier du 24 octobre 2017, une notification d’indu a été adressée au centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Côte d’Opale, agissant pour son compte et pour le compte des autres caisses ou organismes lui ayant donné délégation, pour un montant total de 373 972,71 euros, dont 319 917,05 euros au profit de la seule CPAM de la Côte d’Opale. Des sous-facturations pour un total de 12 859,82 euros étaient relevées.

Le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer a contesté l’indu devant la commission de recours amiable de la CPAM de la Côte d’Opale. Puis il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Boulogne-Sur-Mer d’un recours contre la décision implicite de sa contestation par la commission.

Par jugement du 21 octobre 2022, le tribunal judiciaire de Boulogne-Sur-Mer, pôle social, a :

– dit irrégulière la procédure de contrôle portant sur la tarification à l’activité effectuée à l’encontre du centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer pour la période du 1er mars 2015 au 31 décembre 2015,

– débouté la CPAM de la Côte d’Opale de sa demande reconventionnelle en répétition d’un indu s’élevant à un montant de 319 917,05 euros,

– condamné la CPAM de la Côte d’Opale à verser au centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la CPAM de la Côte d’Opale aux dépens.

Par lettre recommandée avec accusé réception expédiée le 15 novembre 2022, la CPAM de la Côte d’Opale a interjeté appel du jugement.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 7 mars 2024.

Par conclusions n°2 visées par le greffe le 1er mars 2024 et soutenues oralement, la CPAM de la Côte d’Opale demande à la cour de :

– infirmer le jugement déféré et juger la procédure régulière,

– constater le bien-fondé de l’indu réclamé et condamner le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer au paiement d’une somme de 319 917,05 euros,

– condamner le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions n°2 transmises le 12 janvier 2024 et soutenues oralement, le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer demande à la cour de :

A titre principal,

– confirmer le jugement rendu le 21 octobre 2022 en toutes ses dispositions,

– en conséquence, juger que la procédure de contrôle de la tarification à l’activité est irrégulière et ne saurait servir de fondement à l’action en recouvrement d’indu et à la notification de payer du 24 octobre 2017,

A titre subsidiaire,

– juger infondé l’indu notifié par la CPAM de la Côte d’Opale et la débouter de sa demande en paiement de la somme de 319 917,05 euros,

– condamner la CPAM de la Côte d’Opale au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

En cours de délibéré, le centre hospitalier a justifié de la délégation du directeur du centre donnée le 7 mars 2024 au docteur [G] [V], médecin chef du service du Département d’information médicale (DIM) et vice-président de la Commission médicale d’établissement, pour représenter le centre hospitalier à l’audience.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur la régularité de la procédure de contrôle

L’appelante fait grief au jugement d’avoir déclaré la procédure de contrôle irrégulière au motif de l’absence de date manuscrite sur le rapport de contrôle. Elle soutient que :

– l’arrêt du 15 février 2018 de la Cour de cassation cité par le tribunal a été rendu au visa des dispositions anciennes de l’article R. 162-42-10 du code de la sécurité sociale et concernait l’absence de signature du rapport de contrôle par toutes les personnes chargées du contrôle et non seulement par le médecin chargé de l’organisation du contrôle ;

– le rapport de contrôle est un document informatisé et le logiciel génère automatiquement une date intitulée « date de bordereau » de sorte que le médecin en signant l’onglet 5 « conclusions » du rapport comportant la date de bordereau a signé la datation automatique qui est celle du rapport ;

– l’absence de date sur le rapport n’entraîne aucun grief ainsi que l’exige l’article 114 du code de procédure civile, l’établissement hospitalier ayant adressé ses observations dans le délai réglementaire de 30 jours ;

– dès lors que le courrier accompagnant le rapport de contrôle est daté et que l’établissement a bien disposé du délai réglementaire pour présenter des observations, la procédure est régulière.

L’article R.162-42-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, dispose :

« L’agence régionale de santé informe l’établissement de santé de l’engagement du contrôle réalisé en application de l’article L.162-22-18 par tout moyen permettant de déterminer la date de réception. Elle précise les activités, prestations ou ensembles de séjours ainsi que la période sur lesquels porte le contrôle, le nom et la qualité du médecin chargé de l’organisation du contrôle et la date à laquelle il commence.

Le contrôle porte sur tout ou partie de l’activité de l’établissement et peut être réalisé sur la base d’un échantillon tiré au sort. Il recherche notamment les surfacturations et les sous-facturations.

L’établissement est tenu de fournir ou de tenir à disposition des personnes chargées du contrôle l’ensemble des documents qu’elles demandent. Les personnes chargées du contrôle exercent leur mission dans les conditions prévues à l’article R. 166-1.

À l’issue du contrôle, le médecin chargé de l’organisation du contrôle communique à l’établissement de santé, par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, un rapport qu’il date et signe mentionnant la période, l’objet, la durée et les résultats du contrôle et, le cas échéant, la méconnaissance par l’établissement de santé des obligations définies à l’alinéa précédent.

À compter de la réception de ce rapport, l’établissement dispose d’un délai de trente jours pour faire connaître, le cas échéant, ses observations. À l’expiration de ce délai le médecin chargé de l’organisation du contrôle transmet à l’unité de coordination le rapport de contrôle accompagné, s’il y a lieu, de la réponse de l’établissement.

Au vu de ces éléments, l’unité de coordination peut consulter tout expert qu’elle juge nécessaire d’entendre. ».

En l’espèce, le rapport de contrôle a été communiqué au centre hospitalier par un courrier daté du 20 janvier 2017 reçu le 23 janvier 2017. Il comporte en dernière page la signature du docteur [J], médecin chargé de l’organisation du contrôle, mais aucune date manuscrite. La dernière page du rapport intitulée « conclusion » ne comporte d’ailleurs aucune mention avec une date.

La date du 20 janvier 2017 figure sur le courrier d’envoi du rapport et sur la mention « date du bordereau : 20/01/2017 » en page 1 sur 22 des conclusions du rapport qui sont les conclusions du contrôle. Elle ne saurait pallier l’absence de date sur le rapport exigée par l’article R.162-42-10 qui prévoit que « le rapport » est daté et signé par le médecin. Le médecin authentifie ainsi la procédure et le rapport de contrôle.

La jurisprudence de la Cour de cassation sur laquelle se fonde le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer a certes été rendue au visa de l’article R.162-42-10 dans sa rédaction antérieure au décret n° 2011-1209 du 29 septembre 2011 qui prévoyait que le rapport devait être daté et signé par toutes les personnes chargées du contrôle et non uniquement par le médecin chargé de l’organisation du contrôle. Mais elle est parfaitement applicable au cas d’espèce dès lors que la modification intervenue ne porte nullement sur la date du rapport qui a toujours été exigée mais uniquement sur le nombre de médecins devant signer le rapport. L’arrêt du 15 février 2018 précité retient au surplus l’absence de date du rapport de contrôle pour rejeter le pourvoi.

Enfin, la Cour de cassation n’exige pas la démonstration d’un grief (Cass. Civ. 2e, 7 mai 2014, n° 13-14.725) étant observé que l’article 114 du code de procédure civile vise la nullité pour vice de forme des actes de procédure dans la procédure civile, ce qui n’est pas le cas du rapport de contrôle réalisé dans le cadre d’un contrôle administratif de facturation.

Le rapport de contrôle adressé à le centre hospitalier de Boulogne-Sur-Mer n’étant pas daté, les dispositions de l’article R.162-42-10 du code de la sécurité sociale n’ont pas été respectées.

C’est donc à bon droit que le tribunal a constaté l’irrégularité de la procédure de contrôle et en a déduit que cette irrégularité faisait obstacle à la mise en ‘uvre de la procédure de recouvrement de l’indu. Le jugement mérite confirmation.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en l’espèce.

Les dépens sont à la charge des organismes appelants dès lors qu’ils succombent conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoire,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer du 21 octobre 2022,

Y ajoutant,

Rejette les demandes présentées en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la CPAM de la Côte d’Opale aux dépens.

Le Greffier, Le Président,


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