Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 24/00566 3 mai 2024

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Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 24/00566 3 mai 2024
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n° 24/00566
3 mai 2024
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 3 MAI 2024

N° 2024/ 0566

N° RG 24/00566 – N° Portalis DBVB-V-B7I-BM67S

Copie conforme

délivrée le 03 Mai 2024 par courriel à :

-l’avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 01 Mai 2024 à 12H42.

APPELANT

Monsieur [L] [U]

né le 22 Octobre 1986 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

de nationalité Algérienne

Comparant en personne,

Assisté de Maître Perrine DELLA SUDA, avocate au barreau de Nice,

Substituée par Me Domnine ANDRE, avocate au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

et de Monsieur [N] [F], interprète en langue arabe, inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

INTIMÉ

MONSIEUR LE PRÉFET DES ALPES-MARITIME

Représenté par Monsieur [D] [B]

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé et non représenté

*****

DÉBATS

L’affaire a été débattue en audience publique le 3 Mai 2024 devant Madame Angélique NAKHLEH, conseillère à la cour d’appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Monsieur Nicolas FAVARD, greffier,

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 3 Mai 2024 à 16h15,

Signée par Madame Angélique NAKHLEH, conseillère et Monsieur Nicolas FAVARD, greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 2 Mars 2024 par le préfet des Alpes-Maritimes , notifié le même jour à 10h55;

Vu la décision de placement en rétention prise le 2 mars 2024 par le préfet des des Alpes-Maritime notifiée le même jour à 10h55;

Vu l’ordonnance du 1er Mai 2024 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de Monsieur [L] [U] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;

Vu l’appel interjeté le 2 Mai 2024 par Monsieur [L] [U] ;

Monsieur [L] [U] a comparu et a été entendu en ses explications, s’exprimant sans interprète ; il déclare disposer d’ une adresse avec une attestation d’hébergement. Qu’il est en France depuis presque 10 ans. Qu’il travaille en faisant des chantiers, des marchés, du Uber ; mais qu’il n’a jamais déclaré ses activités. Qu’il a fait 18 mois de détention à [Localité 2] du fait qu’il ait été avec des collègues et qu’une personne avait laissé un sac contenant des armes, qu’il l’a touché et à été contrôlé à cause de cela.

Son avocat a été régulièrement entendu ; il conclut ; au regard de l’article R743-2 du CESEDA, sur le défaut de renseignement du registre en ce que les alias de l’intéressé ne sont pas notés et qu’il comporte une erreur sur la date de naissance de celui-ci.

Que le défaut de motivation de la 1re prolongation constitue un moyen plus pertinent. Le fait que Monsieur ait été condamné ne justifie pas d’une menace à l’ordre public surtout dans le cadre d’une 3e prolongation ; que le retenu n’a provoqué aucun incident que ce soit en détention ou au centre de rétention. Monsieur [L] [U], le 5 avril, n’est pas reconnu par [Localité 3] mais le 20 mars 2024 l’Algerie engage des recherches. L’avocat considère qu’il s’agit un délais trop long et observe le manque de célérité de la préfécture. Concernant la demande d’assignation à résidence, le retenue justifie d’une promesse d’embauche et d’un justificatif de domicile présenté par sa compagne.

Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de l’ordonnance de maintien en l’absence de passeport en cours de validité. Il justifie l’absence des alias et la date de naissance en ce que dans le jugement correctionnel les alias n’y figurent pas. Pour l’erreur sur la date de naissance, il s’agit d’une erreur que ne cause aucun grief au retenu. Sur la justification d’une menace à l’ordre public au regard de l’article L742-5 du CESEDA, la condamnation du 12 février 2024 pour détention d’arme de catégorie B en constitue une. La préfecture à relancé les autorités consulaires le 3 avril 2024.

Le retenu à eu la parole en dernier.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.

Sur le défaut de mise à jour du registre

a) Sur la copie du registre actualisé

L’article L744-2 du CESEDA dispose qu’il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l’état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil.

L’autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d’information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

L’article R743-2 du CESEDA rappelle qu’à peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2.

Lorsque la requête est formée par l’étranger ou son représentant, la décision attaquée est produite par l’administration. Il en est de même, sur la demande du juge des libertés et de la détention, de la copie du registre.

Selon les dispositions de l’article 2 du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé ‘logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative et de son annexe, le registre de rétention enregistrent les données à caractère personnel et informations suivantes:

I. – Concernant l’étranger faisant l’objet de la mesure de placement en rétention administrative :

1° Nom(s), prénom(s), alias éventuels ;

2° Date et lieu de naissance, nationalité ;

3° Sexe ;

4° Situation familiale, nom(s), prénom(s) et âge des enfants mineurs accompagnants;

5° Photographie d’identité ;

6° Type et validité du document d’identité éventuel ;

7° Numéro de l’application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France correspondant au dossier de l’étranger placé en rétention ;

8° Le cas échéant, qualité de sortant de prison ;

9° Signature.

II. – Concernant la procédure administrative de placement en rétention administrative :

1° Date et heure du prononcé et de la notification de l’arrêté préfectoral de placement en rétention et, le cas échéant, des décisions de prolongation ;

2° Lieu de placement en rétention, date et heure d’admission au centre de rétention administrative, date et heure d’un transfert d’un lieu de rétention administrative à un autre lieu de rétention et motif ;

3° Préfecture en charge de l’exécution de la mesure de placement en centre de rétention administrative ;

4° Service interpellateur ou réalisant le transfert : transfert éventuel depuis un autre centre de rétention administrative ou depuis un établissement pénitentiaire ;

5° Droits de la personne liés au placement en rétention (date et heure de la notification des droits, référence du procès-verbal de notification) ;

6° Agent chargé de la mesure d’admission en centre de rétention administrative : nom, prénom, grade, numéro d’identification, signature ;

7° Conditions particulières d’accueil, secteur d’hébergement, affectation d’une chambre et d’un lit ;

8° Origine, nature et date de la mesure d’éloignement, date de sa notification, interdiction de retour ;

9° Bagages placés en consigne : numéro de registre et de consigne, détail et état des bagages, date de restitution des bagages ;

10° Biens placés au coffre : numéro de registre et de coffre, liste des objets de valeur et des objets écartés, date de dépôt et de restitution ;

11° Objets laissés à la disposition du retenu ;

12° Mouvements d’argent : numéro de registre, détail du numéraire, date et heure de dépôt et de retrait des fonds ;

13° Compte rendu des incidents au centre de rétention (date, heure, circonstances) : mise à l’écart, dates de début et de fin de la mise à l’écart et avis de cette mesure aux autorités judiciaires et administratives compétentes, nom, prénom, grade et numéro d’identification de l’agent ayant décidé la mise à l’écart, date et heures d’une demande d’examen médical et, le cas échéant, date et heure de l’examen médical et des mesures prescrites nécessitant l’intervention d’un agent du centre de rétention administrative ;

14° Hospitalisation éventuelle : date et heure d’admission, coordonnées de l’établissement hospitalier, date et heure de sortie ;

15° Existence d’une procédure « étranger malade » : date de saisine de l’agence régionale de santé (ARS), avis de l’ARS, décision préfectorale ;

16° Nom, prénom et signature de l’interprète ;

17° Nom, prénom, grade et signature du personnel du centre de rétention administrative.

III. – Concernant les procédures juridictionnelles mises en ‘uvre au cours de la rétention:

1° Contentieux administratif : type de recours, juridiction saisie, date et heure de l’audience, décision, appel ;

2° Contentieux judiciaire : présentation devant le juge des libertés et de la détention (JLD) et saisine du JLD par le retenu, date de présentation, décision, appel, date d’audience de la cour d’appel, résultat, motif d’annulation ;

3° Demande d’asile : date et heure du dépôt de la demande, modalité d’instruction, décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et date de celle-ci, recours auprès de la Cour nationale du droit d’asile.

IV. – Concernant la fin de la rétention et l’éloignement :

1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d’identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de l’entretien, moyen de transport utilisé, résultat de l’entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire ;

2° Réservation du moyen de transport national et international : date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte ;

3° Fin de la rétention : date et motif de la fin de rétention.

Aussi, il est constant que toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée d’une copie de ce registre actualisé. L’absence de production avec la requête du préfet de cette copie est sanctionnée par l’irrecevabilité de la requête, cette irrecevabilité pouvant être accueillie sans que celui qui l’invoque ait à justifier d’un grief. La production d’une copie actualisée du registre a pour seul but de permettre au juge de contrôler l’effectivité de l’exercice des droits reconnus à l’étranger au cours de la mesure de rétention. Elle a pour fondement la volonté de pallier la difficulté voire l’impossibilité pour l’étranger, de rapporter la double preuve, d’une part, de la réalité d’une demande portant sur l’exercice de l’un des droits lui étant reconnus et, d’autre part, du refus opposé à cette demande, qui constitue un fait négatif. Il se déduit de ces considérations que la sanction qu’est l’irrecevabilité ne doit s’apprécier qu’à l’aune de la fonction assignée au registre. A ce titre, il sera rappelé que si le juge, gardien de la liberté individuelle, doit s’assurer d’après les mentions figurant au registre que l’étranger a été, au moment de la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en mesure de les faire valoir, ce contrôle s’opère également par tous moyens.

En l’espèce, le juge des libertés et de la détention a constaté à juste titre que la date de naissance de monsieur [U] est mentionnée sur la copie du registre, que monsieur prétend être né en 1986 comme mentionné sur le jugement du tribunal correctionnel rendu par le tribunal judiciaire de Grasse le 12 février 2024, que la mention de l’année 1985 sur le registre du centre de rétention apparaît comme une erreur matérielle et ne peut avoir comme conséquence l’irrecevabilité de la requête de la préfecture, et ne fait en tout état de cause pas grief ;

Au surplus, la copie du registre de rétention est en l’état actualisée en ce qu’elle mentionne les dates et teneur des différentes décisions judiciaires et administratives rendues et les différentes diligences entreprises par le préfet.

Sur l’absence de la mention d’alias, il apparaît que le registre reprend l’identité telle qu’elle découle de l’arrêté préfectoral, et celle-ci était mentionnée sans alias. Aucune irrégularité ne peut donc en découler.

Dès lors, ce moyen sera écarté.

Aux termes des dispositions de l’article L742-5 du CESEDA, ‘A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :

a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 9° de l’article L. 611-3 ou du 5° de l’article L. 631-3 ;

b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.

Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.’

Selon les dispositions de l’article L741-3 du CESEDA, ‘Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet.’

En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que M. [L] [U] a été condamné par le tribunal correctionnel de Grasse le 12 février 2024 à la peine de 18 mois d’emprisonnement, à la peine complémentaire d’interdiction de détenir ou porte une arme soumise à autorisation pendant 5 ans et à la peine d’interdiction du territoire français pendant5 ans pour des faits de détention et transport non autorisée en réunion d’armes, munitions ou de leurs éléments de catégorie B, qu’il a été placé sous mandat de dépôt le 6 octobre 2022 et a été détenu jusqu’à son procès.

Cette condamnation, même si elle est unique, justifie à elle seule au regard des infractions et de la nature des faits, suffit à caractériser la menace à l’ordre public.

Dès lors, les conditions posées par l’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont réunies, le moyen sera écarté.

Sur le défaut de diligences

L’article L. 741-3 du CESEDA prévoit que :

« Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps

strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet

».

Le texte impose au Préfet d’effectuer les démarches nécessaires à l’exécution, dans les

meilleurs délais, de la décision d’éloignement.

En l’espèce, en ce qui concerne le les diligences de l’Administration, il est démontré, contrairement à ce qui est soutenu, que les services de la Préfecture ont bien avisé les autorités algériennes. Le consulat d’Algérie a précisé aux services de la préfecture le 20 mars 2024 que l’audition du 13 mars 2024 n’avait pas permis d’établir la nationalité de M. [L] [U] et que des investigations complémentaires étaient nécessaires en Algérie aux fins d’identification.

Les fonctionnaires de la police aux frontières ont relancé ce même consulat le 30 avril 2024.

La Tunisie a, quant à elle, indiqué que M. [L] [U] n’était pas ressortissant tunisien le 05 avril 2024.

Aucun manque de célérité ne peut être retenu contre les services de la Préfecture. Au surplus, il est admis de façon constante que les autorités françaises ne peuvent en aucun cas contraindre les autorités étrangères.

Le retour au pays ne pouvant être effectué dans le délai, la prolongation était donc nécessaire.

Dès lors, le moyen sera écarté .

La décision sera confirmé.Å

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l’ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 01 Mai 2024.

Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [L] [U]

né le 22 Octobre 1986 à [Localité 1] (ALGERIE) (99)

de nationalité Algérienne

Assisté d’un interprète


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