Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la décision n° 348006 du 15 février 2013 par laquelle le Conseil d’Etat a, sur le pourvoi introduit par M. et Mme A…B…, d’une part, annulé l’arrêt n° 09VE01840 en date du 18 janvier 2011 par lequel la Cour administrative d’appel de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2002 et, d’autre part, renvoyé l’affaire à la Cour ;
Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d’appel de Versailles, présentée pour M. et MmeB…, demeurant…, par Me Kozlowski, avocat à la Cour ;
M. et Mme B… demandent à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0602713 du 9 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande à fin de décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu, à la contribution sociale généralisée, à la contribution pour le remboursement de la dette sociale et au prélèvement social auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2002 ;
2°) de prononcer la décharge demandée, ainsi que la restitution des sommes versées au Trésor Public assorties des intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 8 000 euros au titre de l’article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
– les bons de souscription d’actions (BSA) émis par une société par actions simplifiée ne constituent pas une valeur mobilière au sens de la doctrine administrative, dès lors qu’ils ne sont pas susceptibles d’être admis aux négociations sur un marché réglementé ; ils ne sont pas non plus des droits sociaux ; ils ne sont pas assimilables à des droits portant des valeurs, droits ou titres imposables ; par conséquent, ils se situent en dehors du champ d’application de l’impôt de plus-values sur titres ; les impositions litigieuses ne sont pas conformes, au sens de l’article
L. 80 A du livre des procédures fiscales, à l’interprétation de l’article 150-0 A qu’a fait connaître l’administration dans son instruction du 1er juillet 2001 ;
– subsidiairement, l’opération de vente de BSA en cause intervenue le 2 décembre 2002 n’a pu se traduire, en tout état de cause, que par la réalisation d’une moins-value ; en effet, l’article 150-0 D-3, 2ème alinéa, du code général des impôts étant inapplicable en l’espèce, le prix d’acquisition des bons n’est pas égal à zéro ; l’attribution des bons de souscription d’actions de la société Agate investissements, qui leur ont été attribués à l’issue de l’opération de fusion absorption de la société Financière La Galice par cette société le 9 juillet 2001, ne procédait pas d’une opération d’échange pouvant bénéficier à l’époque du sursis d’imposition de l’article
150-0 B du code général des impôts et, par suite, le prix de revient des bons de souscription d’actions est égal à la valeur qu’ils avaient à la date du 9 juillet 2001 ; les actifs détenus par la société Agate investissements étaient quasi exclusivement constitués par des titres cotés de la société Carrefour dont le cours avait fortement baissé entre le 9 juillet 2001 et le
2 décembre 2002 ; ainsi, la valeur des bons de souscriptions d’actions Agate investissements a également diminué, ce qui rend impossible la réalisation d’une plus-value lors de la cession de ces titres par les requérants ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 4 décembre 2014 :
– le rapport de Mme Van Muylder, premier conseiller,
– les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,
– et les observations de Me Kozlowski, pour M. et MmeB… ;
1. Considérant que le 12 décembre 2002, Mme B…a cédé les bons de souscription d’actions de la société Agate investissements qu’elle détenait à la société Grande Paroi dont elle était la gérante-associée ; qu’à l’occasion de la vérification de comptabilité de la société Grande Paroi, l’administration fiscale a estimé que, par application des dispositions du 3 de l’article 150-0 D du code général des impôts, le prix de revient des bons de souscription en cause était nul ; qu’elle a alors réintégré le montant total du prix de la vente des bons dans les revenus de la contribuable au titre de l’année 2002 et soumis ce montant au taux proportionnel de 16 % sur le fondement des dispositions de l’article 150-0 A du code général des impôts ; que par une décision en date du 15 février 2013, le Conseil d’Etat a, sur le pourvoi introduit par
M. et MmeB…, d’une part, annulé l’arrêt n° 09VE01840 en date du
18 janvier 2011 par lequel la Cour administrative d’appel de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2002 et, d’autre part, renvoyé l’affaire à la Cour ;
2. Considérant qu’aux termes de l’article 150-0 A du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : » 1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que de l’article 150 A bis, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l’article 118 et aux 6° et 7° de l’article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l’impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 15 000 euros par an. / (…) » ; qu’aux termes de l’article 150-0 D du code général des impôts : » 1. Les gains nets mentionnés au I de l’article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d’acquisition par celui-ci ou, en cas d’acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. / (…) / 3. (…) / Le détachement de droits de souscription ou d’attribution emporte les conséquences suivantes : / (…) / b) Le prix d’acquisition des droits détachés est, s’ils font l’objet d’une cession, réputé nul ; / (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 228-95 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable : » L’assemblée générale extraordinaire, sur le rapport du conseil d’administration ou du directoire, selon le cas, et sur le rapport spécial des commissaires aux comptes, peut autoriser, indépendamment de toute autre émission, l’émission de bons qui confèrent à leurs titulaires le droit de souscrire des titres représentant une quote-part du capital de la société émettrice. Ces bons sont soumis aux dispositions qui régissent les valeurs mobilières. L’émission de ces bons ne peut avoir lieu que si, d’une part, l’émission de titres auxquels ils donnent droit a été décidée ou autorisée par l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires et si, d’autre part, les actionnaires ont renoncé à leur droit préférentiel de souscription à ces titres. / En cas de renonciation des actionnaires à leur droit préférentiel de souscription aux bons mentionnés au présent article, ceux-ci doivent être émis dans un délai d’un an à compter de la décision de l’assemblée générale mentionnée à l’alinéa précédent et les titres auxquels ils donnent droit doivent être émis dans un délai de cinq ans à compter de l’émission desdits bons. (…) » ;
3. Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’à l’occasion de l’augmentation de capital de la société Financière La Galise, le 15 novembre 2000, Mme B…a apporté 41 650 bons de souscription de la société Agate investissements en rémunération desquels 7 437 actions nouvelles assorties de 74 370 bons de souscription de la société La Galise lui ont été attribuées ; que le 9 juillet 2001, dans le cadre d’une opération de fusion-absorption, les actions de la société Financière La Galise ont été échangées contre des actions
Agate investissements ; que la société Agate investissements a été substituée dans les droits et obligations de la société Financière La Galise résultant de l’exercice des bons de souscription d’actions émis par cette dernière le 15 novembre 2000, ainsi qu’il ressort du procès-verbal de l’associé unique de la société Agate Investissements en date du 9 juillet 2001 ; que le traité de fusion-absorption stipule que les bons de souscription d’actions de la société Financière La Galise pourront être exercés en actions de la société Agate investissements ; qu’il ne résulte pas des pièces produites au débat et notamment de la fiche individuelle de titulaire de valeurs mobilières de MmeB…, que de nouveaux bons auraient été émis dans les conditions prévues par les dispositions de l’article L. 228-95 du code de commerce alors applicable ; que, dans ces conditions, ces bons ne peuvent être regardés comme autonomes ; que la cession, le 12 décembre 2002, des 74 370 bons de souscription d’actions de la
société Agate investissements par Mme B…sans cession des actions a, dès lors, porté sur des droits détachés d’une valeur mobilière composée ; que cette opération, qui entrait dans le champ d’application de l’article 150-0 A du code général des impôts, a engendré une plus-value de cession devant être évaluée suivant les modalités prévues au 3 de l’article 150-0 D du même code ; que, par suite, l’administration était en droit de réputer nul le prix de revient des bons en cause pour calculer le montant de la plus-value réalisée par Mme B… ;
4. Considérant qu’en énonçant que les valeurs mobilières s’entendent des titres négociables susceptibles d’être admis sur un marché réglementé, en raison de leurs caractéristiques uniformes, dans une même catégorie et en énumérant une série, non exhaustive, d’actions, droits de souscription, certificats d’investissement, obligations et autres titres négociables visés par cette définition, les paragraphes nos 15 et 16 de l’instruction n° 5 C-1-01 du 13 juin 2001 n’ajoutent pas à la loi fiscale et n’ont pas placé les bons de souscription d’actions, qu’ils soient autonomes ou détachés, en dehors du champ d’application de l’article 150-0 A du code général des impôts ; que ces valeurs ne sont pas au nombre des bons et titres de créance, limitativement énumérés, placés en dehors du champ de ce texte par l’effet des paragraphes nos 17 et 18 de la même instruction ; que, par suite, M. et Mme B…ne sont pas fondés à soutenir, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, que la plus-value en cause échappait à l’impôt en vertu de l’interprétation admise par l’administration ;
5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme B…ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B…est rejetée.
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N° 13VE00784