Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu I) sous le n° 07VE02501, la requête, enregistrée le 2 octobre 2007 au greffe de la Cour administrative d’appel de Versailles, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) SHANATEK, anciennement dénommée TWC Europe, dont le siège est 51, Chemin des Vignes à Bobigny (93000), par Me Korkmaz ; La SAS SHANATEK demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0303305-0303152-0507411 du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la [décharge ou] la réduction des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre, respectivement, de l’exercice clos en 1995 et de la période du 1er avril 1996 au 31 mai 1998, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Elle soutient que, s’agissant des redressements opérés en matière de taxe sur la valeur ajoutée, elle a fait l’objet d’une double vérification de comptabilité ; qu’ainsi, la procédure d’imposition mise en oeuvre par le service a méconnu les dispositions l’article L. 51 du livre des procédures fiscales ; au fond, qu’elle justifie de la réalité des livraisons intracommunautaires qu’elle a réalisées au titre de la période en litige ; que, s’agissant des redressements opérés en matière d’impôt sur les sociétés, elle apporte, par les pièces qu’elle produit, la preuve du caractère déductible des charges que l’administration a réintégrées à tort dans son résultat imposable ;
………………………………………………………………………………………….
Vu II) sous le n° 07VE02506, la requête, enregistrée le 2 octobre 2007 au greffe de la Cour administrative d’appel de Versailles, présentée pour la SAS SHANATEK ayant son siège à l’adresse susmentionnée, par Me Korkmaz ; la SAS SHANATEK demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0506688 du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamées au titre de la période du 1er avril 1998 au 28 février 2003 et des pénalités y afférentes ;
Elle soutient qu’en s’abstenant de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, l’administration a méconnu les dispositions de l’article L. 59 du livre des procédures fiscales, les recommandations de la charte du contribuable vérifié qui lui sont opposables en application de l’article 10 du même livre, ainsi que les stipulations de l’article 6 – 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; au fond, et à titre subsidiaire, que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige procèdent d’une application erronée des articles 256, 271, 283 et 272 du code général des impôts ainsi que de l’article 223 de l’annexe II au même code ; qu’en effet, c’est à tort que le service a estimé qu’elle n’était pas en droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé certains de ses achats auprès de fournisseurs qu’il a regardés comme des sociétés taxis s’inscrivant dans un circuit frauduleux de type carrousel et visant à éluder ladite taxe ; qu’elle n’a jamais participé à un tel réseau de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu’elle s’était assurée de l’existence réelle et légale de ses 46 fournisseurs qui étaient régulièrement déclarés et inscrits au registre du commerce ; que 33 d’entre eux disposaient de sièges sociaux effectifs et non de simples domiciliation ; que s’agissant des modalités d’acheminement des marchandises, il est courant, sur le marché des produits informatiques, que des fournisseurs achètent des stocks qui ne transitent jamais par des entrepôts leur appartenant mais qui sont directement livrés par leurs producteurs ou leurs entrepositaires, dont la douane, aux clients ; que si elle n’a pas été en mesure de fournir certains des bons de livraison, il appartenait à l’administration d’en demander la communication aux sociétés prétendument défaillantes ; que le règlement des marchandises par chèque à leur ordre permet d’identifier ses fournisseurs ; qu’il est inexact que lesdites marchandises lui ont été vendues à perte ; que le fait que certaines factures présentent des similitudes n’est pas de nature à établir sa participation à une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ; que la réalité des achats de marchandises, et leur livraison subséquente, auprès des fournisseurs qualifiés de défaillants n’a jamais été remise en cause par l’administration ; que la prétendue fraude à la taxe sur la valeur ajoutée a été commise à son insu ; que la jurisprudence communautaire l’autorisait donc à déduire ladite taxe ;
……………………………………………………………………………………….
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 10 décembre 2009 :
– le rapport de Mme Garrec, premier conseiller,
– et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes n° 07VE02501 et n° 07VE2506 présentées pour la SAS SHANATEK, anciennement dénommée TWC EUROPE concernent la situation d’un même contribuable et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la requête 07VE02501 :
Considérant que la SAS SHANATEK, qui exerçait une activité d’achat et de revente de matériels informatiques, alors dénommée, comme il a été dit ci-dessus TWC EUROPE, a fait l’objet d’une première vérification de comptabilité en matière de taxe sur le chiffre d’affaires portant sur la période comprise entre le 1er avril 1994 et le 31 mars 1997 et en matière d’impôt sur les sociétés sur les exercices correspondants et d’une seconde vérification de comptabilité uniquement en matière de taxes sur le chiffre d’affaires au titre de la période du 1er avril 1997 au 31 mai 1998 ; qu’elle relève appel du jugement susvisé du 3 juillet 2007 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie en conséquence des redressements qui lui ont été notifiés, respectivement, au titre de l’exercice clos le 31 mars 1995 et de la période correspondante à la suite de ces contrôles ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure d’imposition :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 51 du livre des procédures fiscales : Lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d’un impôt ou taxe ou d’un groupe d’impôts ou de taxes est achevée, l’administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période (…) ;
Considérant qu’il est constant que la comptabilité de la SAS SHATANEK a fait l’objet, au titre de la période du 1er avril 1994 au 31 mars 1997, de contrôles effectués du 12 janvier 1998 au 14 avril 1999 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, notamment, par un premier vérificateur, puis, en raison de l’empêchement de celui-ci, du 10 au 15 décembre 1999, par un seconde vérificateur ; qu’il ne résulte de l’instruction, ni que, lors de son intervention sur place, le 14 avril 1999, le premier vérificateur ait indiqué que les opérations de vérification étaient terminées, ni qu’une notification de redressement ait été adressée à la société entre la date de cette intervention et celle à laquelle la vérification a été reprise par un autre agent des impôts, qui en a avisé la société par un courrier du 30 novembre 1999 ; que, dans ces conditions et en dépit du long délai écoulé entre le 14 avril et le 10 décembre 1999, la SAS SHATANEK n’est pas fondée à prétendre qu’elle aurait fait l’objet, s’agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, d’une double vérification prohibée par les dispositions précitées de l’article L. 51 du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
S’agissant de l’impôt sur les sociétés :
Considérant qu’aux termes de l’article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d’oeuvre, le loyer des immeubles dont l’entreprise est locataire. (…) ; qu’il appartient toujours à l’entreprise de justifier tant du montant de ses charges que de la correction de leur inscription en comptabilité c’est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;
Considérant, d’une part, que la société requérante n’apporte en appel aucun élément nouveau permettant de justifier des charges d’un montant de 71 464 F (10 894,62 euros) dont la déduction a été remise en cause par le service et réintégrées dans son résultat imposable de l’exercice clos le 31 mars 1995, faute d’être appuyées de documents justificatifs ;
Considérant, d’autre part, que si la SAS SHANATEK fait valoir que les deux montres de marques Rolex et Brietling qu’elle a acquises le 31 décembre 1994 pour un montant de 63 900 F sont des cadeaux d’entreprise destinés à ses fournisseurs, elle n’établit pas qu’elle aurait exposé les dépenses correspondantes dans l’intérêt de l’entreprise ; que, par suite, c’est à bon droit que le service a rejeté leur déduction du résultat imposable de l’exercice correspondant ;
Considérant, enfin, que la société requérante n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que l’administration a réintégré dans son résultat de l’exercice clos le 31 mars 1995 une somme d’un montant de 26 385 F (40 22,37 euros) correspondant à l’échange standard du moteur d’un véhicule utilitaire de la société dès lors que cette acquisition, qui a eu pour effet d’augmenter l’actif immobilisé en prolongeant la durée effective d’utilisation de ce véhicule, inscrite à tort en comptabilité au poste frais généraux , ne pouvait être regardée comme une charge au sens des dispositions précitées ;
S’agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu’aux termes de l’article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (…) ; qu’aux termes de l’article 262 ter du même code : – I. Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d’un autre Etat membre de la Communauté économique européenne à destination d’un autre assujetti ou d’une personne morale non assujettie (…) ; que pour l’application de ces dispositions, il appartient au redevable de la taxe sur la valeur ajoutée d’apporter la preuve, par tous moyens et, notamment, par la production des documents afférents au transport ou à la livraison hors de France des marchandises vendues, que les biens ont été effectivement expédiés ou transportés sur le territoire d’un autre Etat membre de la Communauté européenne ; que la production de ces documents ne fait cependant pas obstacle à ce que, si l’administration entend remettre en cause l’exonération de taxe dont se prévaut le redevable, elle puisse établir, sur la base d’indices précis et concordants, que les livraisons en cause n’ont, en réalité, pas été effectuées en faisant notamment valoir que des livraisons, répétées et portant sur des montants importants, ont eu pour destinataire présumé des personnes dépourvues d’activité réelle ; qu’il appartient au juge de l’impôt d’apprécier, au vu de l’instruction, si la condition de la livraison des biens sur le territoire d’un autre Etat membre de la Communauté européenne se trouve satisfaite pour permettre au redevable de bénéficier de l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que l’administration a remis en cause, au titre de la période du 1er avril 1996 au 31 mai 1998, l’exonération de taxe sur la valeur ajoutée afférente à des livraisons intracommunautaires qu’aurait effectuées la SAS SHATANEK à destination des sociétés belges Vidéo Mag et Deldra, britannique, Pentagon Trading et de la société luxembourgeoise Transnet Business Service ;
Considérant, en premier lieu, qu’en ce qui concerne les sociétés Vidéo Mag et Pentagon Trading, l’administration fait valoir, sans être utilement contredite, que les renseignements qu’elle a obtenus auprès des autorités fiscales belges démontrent, d’une part, qu’à l’adresse du siège social de la société Vidéo Mag se trouvait un bar et que cette société était inconnue du voisinage et, d’autre part, auprès des autorités britanniques, que la société Pentagon Trading, spécialisée dans la vente de bois et la plantation d’arbres était, à la date des faits en litige, dissoute ; que, par ailleurs, la SAS SHATANEK ne produit aucun justificatif permettant d’établir la réalité des livraisons qu’elle aurait effectuées à destination de ces sociétés ; que, dans ces conditions, en refusant d’accorder à la société requérante l’exonération de taxe sur la valeur ajoutée dont elle d’était prévalue à raison de ces livraisons, le service n’a pas méconnu les dispositions précitées ;
Considérant, en deuxième lieu, que si, pour justifier les livraisons qu’elle allègue avoir effectuées à destination de la société Deldra, la SAS SHANATEK produit des factures et des bons de livraison signés d’un chauffeur attestant leur enlèvement en France, elle n’apporte la preuve, ni de la date d’acquisition de ces biens par cette entreprise, ni de leur transfert et de leur réception en Belgique ; qu’ainsi, les documents produits ne permettent pas d’établir la réalité desdites livraisons, les autorités fiscales belges ayant émis, par ailleurs, au vu des informations qu’elles ont recueillies à la demande de l’administration fiscale française, des doutes sérieux quant à la réalité des activités effectives de la société Deldra ;
Considérant, en troisième lieu, qu’en ce qui concerne la société Transnet Business Service, implantée au Luxembourg, si la société requérante produit des factures établies au nom de son client ainsi que des bons de transport, elle ne justifie pas du transfert physique des biens en cause ; qu’il ressort pas, par ailleurs, des renseignements communiqués par les autorités fiscales du Luxembourg que cette société n’aurait aucune activité économique ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre s’agissant de la requête n° 0303152, que la SAS SHANATEK n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;
Sur la requête 07VE02506 :
En ce qui concerne l’intervention de Me Gorrias de la SCP BTSG et de Me Martinez de la SELARL Bauland, Gladel et Lartinez :
Considérant qu’une intervention ne peut être admise que si son auteur s’associe soit aux conclusions du requérant, soit à celles de l’administration ;
Considérant que Me Gorrias de la SCP BTSG et Me Martinez de la SELARL Bauland, Gladel et Martinez en tant, respectivement, que mandataire judiciaire et administrateur judiciaire désignés par jugement du Tribunal de commerce de Paris du 14 octobre 2008 ouvrant une procédure de redressement judicaire à l’encontre de la SAS SHANATEK, et que représentants des créanciers de la société, ne s’associent ni aux conclusions du ministre, ni à celles de la SAS SHANATEK, et se bornent à s’en remettre à la sagesse de la Cour ; que, par suite, leur intervention n’est pas recevable ;
En ce qui concerne l’appel de la SAS SHANATEK :
Considérant que la SAS SHANATEK relève appel, sous le n° 07VE056 susvisé, du jugement n° 0506688 du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamées au titre de la période du 1er avril 1998 au 28 février 2003 et des pénalités y afférentes :
S’agissant de la régularité de la procédure d’imposition :
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 59 du livre des procédures fiscales : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l’administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l’avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires prévue à l’article 1651 du code général des impôts, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l’article 667 du même code. Les commissions peuvent également être saisies à l’initiative de l’administration ; qu’aux termes de l’article L. 59 A du même livre : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d’affaires, déterminé selon un mode réel d’imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d’intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 1° du 1 du 6° de l’article 257 du Code général des impôts ; 2° Lorsqu’il s’agit de différends portant sur l’application du 1° du 1 de l’articles 39 du d et 111 (d) du code général des impôts relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du bénéfice des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l’article 39 du même Code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l’article 54 quater du code précité ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction que le différend opposant la SAS SHANATEK à l’administration concernant les redressements en litige portait, non sur le montant du chiffre d’affaires, mais sur le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu’il s’agissait ainsi d’un motif de pur droit ne relevant pas de la compétence de la commission départementale ; qu’ainsi, et alors même que, par courriers des 3 avril et 10 juin 2004, la société requérante avait demandé la saisine de la commission départementale, le défaut de consultation de cette commission n’a pas entaché la procédure d’imposition d’irrégularité ; que le service n’a pas davantage méconnu, en ne soumettant pas ce différend à cette commission, les recommandations de la charte du contribuable vérifié, opposables à celui-ci en application de l’article 10 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (…) ; que cet article ne peut être utilement invoqué devant le juge de l’impôt, qui ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas des contestations sur des droits et obligations à caractère civil ; qu’ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 6-1 précité de la convention est inopérant ;
S’agissant du bien-fondé des impositions :
Considérant qu’aux termes de l’article 256 du code général des impôts : I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (…) ; qu’aux termes de l’article 223 de l’annexe II au même code, dans ses dispositions alors applicables, précise : I . La taxe dont les entreprises peuvent opérer la déduction est, selon les cas : celle qui figure sur les factures d’achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures ; (…) ; qu’aux termes de l’article 271 du même code dans ses dispositions alors applicables : I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (…) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon les cas : a) celle qui figure sur les factures d’achat qui leur sont délivrées par leurs vendeurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures ; (…) IV. La taxe déductible dont l’imputation n’a pu être opérée peut faire l’objet d’un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d’Etat (…) ; qu’aux termes de l’article 283 dudit code : (…) 4. Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d’une marchandise ou à l’exécution d’une prestation de services, ou fait état d’un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l’acheteur, la taxe est due par la personne qui l’a facturée (…) ; qu’aux termes de l’article 272 du code : (…) 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l’article 283 ne peut faire l’objet d’aucune déduction par celui qui a reçu la facture ; qu’en vertu de ces dispositions combinées, un contribuable n’est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ; que dans le cas où l’auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présentait à ses clients comme assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu’il soit manifeste qu’il n’aurait pas rempli les obligations l’autorisant à faire figurer cette taxe sur ses factures, il appartient à l’administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d’établir qu’il s’agissait d’une facture fictive ou de complaisance ;
Considérant qu’à l’issue de la vérification de comptabilité de la SAS SHANATEK opérée en matière de taxe sur la valeur ajoutée et portant sur la période du 1er avril 1998 au 28 février 2003, le service a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures émises par 46 fournisseurs de la société requérante au motif que ces entreprises ne présentaient aucune réalité commerciale et que les transactions en cause s’inscrivaient dans un réseau de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée de type carrousel ; qu’il résulte de l’instruction que ces 46 sociétés ont vendu, à des prix inférieurs à celui du marché, des marchandises qui ont donné lieu à l’établissement des factures litigieuses ; que si ces sociétés étaient inscrites au registre du commerce et des sociétés et disposaient d’un numéro d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée, elles possédaient des boîtes à lettre communes et ne disposaient, pour certaines, ni de siège social, ni de moyens en personnels et de logistique leur permettant d’exercer une activité commerciale réelle et d’effectuer la livraison des marchandises ; qu’enfin, une part non négligeable des marchandises achetées à ces sociétés défaillantes était vendues à Hong-Kong à des entités dirigées par M. A, gérant et principal actionnaire de la SAS SHANATEK, laquelle ne pouvait pas ignorer les anomalies affectant les devis, les factures et bons de transport émis par ses fournisseurs et rédigés selon la même présentation ; qu’ainsi, eu égard à l’ensemble de ces circonstances, c’est à bon droit l’administration a estimé que la SAS SHANATEK, dont le dirigeant, au demeurant, a fait l’objet, le 13 décembre 2007, d’une condamnation pour fraude fiscale à raison de ces faits par la Cour d’appel de Paris, avait sciemment participé, par ses agissements, à un réseau de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée consistant à imputer de façon indue la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures établies par ses fournisseurs et a procédé aux redressements en litige ;
Considérant qu’à supposer que la SAS SHANATEK entende se prévaloir, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l’instruction référencée 3 CA-92 du 31 juillet 1992 ainsi que de l’instruction référencée 3-A-3-97 du 28 mars 1997, ces instructions ne comportent aucune interprétation formelle de la loi fiscale ;
S’agissant des pénalités de mauvaise foi :
Considérant qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l’acte mentionné à l’article 1728 font apparaître une base d’imposition ou des éléments servant à la liquidation de l’impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l’intérêt de retard visé à l’article 1727 et d’une majoration de 40% si la mauvaise foi de l’intéressé est établie ( …) ;
Considérant que, comme qu’il a été dit ci-dessus, l’administration fait valoir sans être utilement contredite que la SAS SHANATEK ne pouvait ignorer que ses fournisseurs intervenaient à son profit dans un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée de type carrousel ; qu’ainsi, le service établit la volonté délibérée de la SAS SHANATEK d’éluder l’impôt et, par suite, son absence de bonne foi ; que, dans ces conditions, la société requérante n’est pas fondée à demander la décharge des pénalités de mauvaise foi dont ont été assortis les rappels contestés ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SAS SHANATEK n’est pas fondée, sous le n° 07VE2506, à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
D E C I D E
Article 1er : L’intervention de Me Gorrias et de Me Martinez n’est pas admise.
Article 2 : Les requêtes de la SAS SHANATEK sont rejetées.
»
»
»
»
2
N° 07VE02501 – N° 07VE02506