Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2012, présentée pour la société par actions simplifiée Helea financière, ayant son siège social 25 rue Le Peletier à Paris (75009), par Me C… ;
La société Helea financière demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 1020617 du 25 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 2007 ;
2°) de prononcer la réduction de ces impositions ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 27 mars 2014 :
– le rapport de Mme Bernard, premier conseiller,
– et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;
1. Considérant que la société Helea financière, qui exerce une activité de holding dans le secteur de la restauration et de l’hôtellerie, détenait la totalité des parts sociales de la société Compagnie hôtelière du confluent (CHC), laquelle était propriétaire à Lyon, sous l’enseigne franchisée » Kyriad « , d’un fonds de commerce hôtelier donné depuis 2003 en location-gérance à la société à responsabilité limitée Antanaïs, alors détenue en totalité par M. B… A…et son père, ainsi que d’un fonds de restaurant ; que la société Helea financière a souhaité vendre à la société Antanaïs les 5 000 titres composant le capital de la société CHC ; que, pour accorder le prêt bancaire d’un montant de 2 millions d’euros sollicité à cette occasion par la société Antanaïs, la banque a exigé, à titre de garantie, que la société Helea Financière entre au capital de la société Antanaïs ; que, par le protocole de cession des titres de la société CHC, conclu le 1er mars 2006, les parties ont donc convenu que la société Helea financière entrerait au capital augmenté de la société Antanaïs, ce qui a effectivement été fait le 31 mars 2006 pour 12 190 parts au prix unitaire de 10 euros, soit à hauteur de 48,50 %, le reste du capital étant détenu par M. A… et son épouse ; que ledit protocole a également posé comme condition suspensive à la vente la signature d’un pacte d’actionnaires ; qu’aux termes de ce pacte, effectivement conclu le 24 mars 2006, la société Helea financière s’est engagée à céder à M. A… les parts ainsi acquises jusqu’au 30 septembre 2014, en précisant que, pour une levée d’option intervenant dans les deux ans suivant la cession du fonds de commerce, le prix de cession serait égal à la valeur nominale des actions, soit 10 euros par action, et que pour une cession intervenant à une date postérieure, le prix serait déterminé selon les modalités prévues dans l’acte ; que c’est dans ces conditions que la société Antanaïs a acquis les titres de la société CHC le 31 mars 2006 pour un prix total de 2 308 668 euros ; que, moins de deux ans plus tard, le 13 décembre 2007, la société Helea financière a cédé à M. A…, pour ce prix unitaire de 10 euros, la totalité des 12 190 actions qu’elle détenait dans le capital de la société Antanaïs ; qu’à la suite de la vérification de comptabilité de la société requérante, portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007, l’administration a notamment estimé que la cession du 13 décembre 2007 avait été consentie moyennant un prix minoré par rapport à la valeur vénale des titres, sans contrepartie pour la société Helea financière, et était, par suite, constitutive d’un acte anormal de gestion ; qu’elle a, en conséquence, notifié à la société Helea financière un rehaussement de son bénéfice imposable à l’impôt sur les sociétés, correspondant à la différence entre la valeur vénale, estimée à 59,82 euros l’unité, et le prix de cession ; que, par la présente requête, la société Helea financière relève appel du jugement du 25 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 2007 à raison de ladite rectification et des pénalités correspondantes ;
2. Considérant qu’en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l’impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l’entreprise, à l’exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale ; qu’il appartient à l’administration, dans l’hypothèse où la rectification a été effectuée selon la procédure contradictoire et a été refusée par le contribuable, d’apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que, à concurrence de l’insuffisance du prix stipulé, la cession à un tiers des titres d’une filiale est constitutive, pour l’entreprise cédante, d’un acte étranger à une gestion commerciale normale ; que, pour apporter cette preuve, l’administration doit établir l’existence, d’une part, d’un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale des titres cédés et, d’autre part, de l’intention de l’entreprise cédante d’octroyer [D1]une libéralité du fait des conditions de la cession ;
3. Considérant que le protocole de cession des titres de la société CHC du 1er mars 2006, le pacte d’actionnaires du 24 mars 2006, la cession du capital de la société CHC à la société Antanaïs le 31 mars 2006 et le rachat par M. A… le 13 décembre 2007 des titres de la société Antanaïs constituent les éléments successifs d’une opération économique globale, dont le but final était la cession, par la société Helea financière, de la totalité d’un fonds de commerce d’hôtel-restaurant ; qu’il est exact, ainsi que le soutient l’administration, que la société Helea financière a renoncé, pour une durée de deux années, à valoriser les titres de la société Antanaïs qu’elle avait acquis à l’occasion de cette opération, dans l’hypothèse avérée d’un développement de l’exploitation, tout en ayant, dans l’hypothèse inverse, l’obligation d’assumer sa qualité d’associé, puis a effectivement cédé les titres de la société Antanaïs à un prix notablement inférieur à leur valeur réelle au 13 décembre 2007 ; qu’en revanche, en se bornant à affirmer, sans plus de précision, que » la société Helea financière a délibérément minoré le prix de cession des titres Antanaïs sans contrepartie et au profit exclusif de M. B… A… « , l’administration n’apporte pas la preuve, qui lui incombe, que la société requérante aurait, ce faisant, octroyé une libéralité à l’acquéreur et n’aurait, ainsi, pas agi dans son propre intérêt, alors que la société requérante fait valoir que l’engagement pris de revendre sans plus-value, dans les deux premières années suivant l’acquisition, sa participation dans la société Antanaïs constituait une condition à la réalisation de la vente des titres de la société CHC, laquelle lui a permis, d’une part, de réaliser, le 31 mars 2006, une plus-value de 1 800 000 euros et, d’autre part, de s’assurer de la pérennité du fonds de commerce et, par suite, du paiement du loyer annuel de 380 000 euros à ses filiales propriétaires des murs de l’hôtel-restaurant ; que, dès lors, l’administration n’établit pas que la vente à un prix minoré des titres de la société Antanaïs le 13 décembre 2007 au profit d’un tiers aurait constitué, pour la société Helea financière, un acte étranger à une gestion commerciale normale ; que la base d’imposition à l’impôt sur les sociétés assignée à la société Helea financière au titre de l’année 2007 doit, en conséquence, être réduite de la somme de 607 305 euros ;
4. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société Helea financière est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’État le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Helea financière et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1020617 du 25 janvier 2012 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La base d’imposition à l’impôt sur les sociétés assignée à la société Helea financière au titre de l’année 2007 est réduite de la somme de 607 305 euros.
Article 3 : La société Helea financière est déchargée des compléments d’impôt sur les sociétés correspondant à la réduction de base d’imposition définie à l’article 2 ainsi que des pénalités correspondantes.
Article 4 : L’État versera à la société Helea financière une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
[D1]Eviter de mettre ca : ca ne concerne que le bénéficiaire de la libéralité
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N° 12PA01698