Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la décision n°326952 du 15 décembre 2010, enregistrée le 24 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d’appel de Paris sous le n°11PA00424, par laquelle le Conseil d’Etat a, d’une part, annulé l’arrêt du 4 février 2009 de la 2ème chambre de la Cour et, d’autre part, renvoyé l’affaire à la Cour administrative d’appel de Paris ;
Vu la requête, enregistrée le 20 février 2008, présentée pour Mlle Mercedes A, demeurant …, par Me Desmoineaux ; Mlle A demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0214539/2 du 18 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté d’une part, sa demande à titre principal en décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1998 ainsi que des pénalités correspondantes et, d’autre part, sa demande subsidiaire en décharge de l’imposition mise en recouvrement au titre de l’année 1996 dans la catégorie de revenus de capitaux mobiliers ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 8 décembre 2011 :
– le rapport de Mme Merloz, rapporteur,
– les conclusions de M. Gouès, rapporteur public,
– et les observations de Me le Griel, avocat de Mlle A ;
Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : (…) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (…) ; qu’aux termes de l’article 112 du même code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : Ne sont pas considérés comme revenus distribués : (…) 6° Les sommes ou valeurs attribuées aux actionnaires au titre du rachat de leurs actions, lorsque ce rachat est effectué dans les conditions prévues aux articles 217-1 ou 217-2 à 217-5, modifiés, de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, modifiés par la loi n° 81-1 162 du 30 décembre 1981 relative à la mise en harmonie du droit des sociétés commerciales avec la deuxième directive adoptée par le Conseil des communautés européennes le 13 décembre 1976 ; qu’aux termes de l’article 161 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l’année 1996 : Le boni attribué lors de la liquidation d’une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n’est compris, le cas échéant, dans les bases de l’impôt sur le revenu que jusqu’à concurrence de l’excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d’acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l’apport./ La même règle est applicable dans le cas où la société rachète au cours de son existence les droits de certains associés, actionnaires ou porteurs de parts bénéficiaires ;
Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le rachat par une société, au cours de son existence, à certains de ses associés ou actionnaires personnes physiques, des droits sociaux qu’ils détiennent, notamment sous forme d’actions, correspond, sous réserve des dispositions de l’article 112 du code général des impôts, à une mise à disposition au sens du 2° du 1 de l’article 109 du même code ; que toutefois, en vertu du second alinéa de l’article 161 du même code, qui, en se référant à la même règle que celle prévue au premier alinéa, ne renvoie, eu égard à la différence d’objet entre les deux alinéas de cet article, qu’au mode de calcul de l’assiette, le prix du rachat ne correspond, pour chaque actionnaire, à un revenu distribué qu’à concurrence de l’écart, s’il est positif, entre le prix de ce rachat et celui auquel il a lui-même acquis les actions ; que ces dispositions relatives au rachat de droits sociaux trouvent application que les droits sociaux aient été ou non annulés après leur rachat par la société émettrice ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mlle A a été directrice salariée de la société Saatchi et Saatchi Advertising (SSA), agence de publicité, filiale de la société Saatchi et Saatchi France (SSF), du 1er juillet 1981 au 30 avril 1995, date de la cessation de son contrat de travail ; que, conformément aux termes d’un accord transactionnel signé le 26 mars 1998, elle a cédé, pour un montant de 6 650 000 francs, à la société SSF, les 1000 actions de cette société qu’elle avait acquises en 1987 et 1990 pour un montant de 2 481 000 francs, en partie par un prêt consenti par la société SSF ; que ce rachat par la société de ses propres actions a donné lieu à une compensation avec le solde de ce prêt, intervenue le 30 janvier 1996 à hauteur de 904 011 francs, ainsi qu’à deux versements, l’un, en 1996, d’un montant de 593 867 francs, l’autre, en 1998, d’un montant de 5 112 122 francs ; que, le 23 avril 1998, Mlle A a souscrit une déclaration faisant état d’une plus-value imposable, au titre de l’année 1998, au taux de 16 %, pour un montant de 4 169 000 francs ; qu’estimant que le gain réalisé devait être regardé non comme une plus-value mais comme des revenus distribués, l’administration fiscale a réintégré le résultat de la cession dans les revenus imposables à l’impôt sur le revenu de la contribuable dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers et imposé la contribuable, au titre des années 1996 et 1998, sur le gain global retiré de cette cession, au prorata des versements effectués ; que toutefois, comme indiqué ci-dessus, ces sommes ne pouvaient être regardées comme un revenu distribué qu’à concurrence de l’excédent du prix de rachat des mille actions litigieuses sur leur prix d’acquisition ; qu’il est constant qu’en 1996, la contribuable n’avait perçu qu’une somme de 1 537 878 francs, inférieure au prix d’acquisition, et qu’un excédent n’est apparu qu’à l’occasion du versement, en 1998, du solde du prix de rachat des actions d’un montant de 5 112 122 francs ; qu’il suit de là que Mlle A ne peut être regardée comme ayant bénéficié d’un revenu distribué au sens des dispositions précitées du 2° de l’article 109-1 et de l’article 161 du code général des impôts au titre de l’année 1996 ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mlle A est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujetties au titre de l’année 1996 ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mlle A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Mlle A est déchargée des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 1996.
Article 2 : Le jugement n° 0214539/2 du Tribunal administratif de Paris en date du 18 décembre 2007 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L’Etat versera à Mlle A une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 11PA00424