Cour administrative d’appel de Paris, 2e chambre, du 29 juin 2000, 97PA00298, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Paris, 2e chambre, du 29 juin 2000, 97PA00298, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

(2ème Chambre A)

VU, enregistrés les 3 février et 3 avril 1997 au greffe de la cour, la requête et le mémoire ampliatif, présentés pour M. Paul X…, demeurant …, par Me Y…, avocat ; M. X… demande à la cour :

1 ) de réformer le jugement n 8907709/1 en date du 27 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu’une décharge partielle des compléments d’impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1982 à 1984 dans les rôles de la ville de Paris, ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2 ) de prononcer la décharge de l’imposition restant en litige ;

3 ) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 60.300 F au titre de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 15 juin 2000 :

– le rapport de M. MAGNARD, premier conseiller,

– et les conclusions de M. MORTELECQ, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X… a fait l’objet d’une vérification de sa situation fiscale d’ensemble au titre des années 1982 à 1984 ; qu’à l’issue du contrôle, des redressements lui ont été notamment notifiés dans la catégorie des traitements et salaires et dans celle des revenus d’origine indéterminée ; que, par la présente requête, M. X… fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu’une décharge partielle des impositions consécutives à ces redressements ;

Sur l’étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 7 juillet 1997, postérieure à l’introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris-Ouest a prononcé, à concurrence de la somme de 139 F, en droits et pénalités, la réduction des compléments d’impôt sur le revenu auxquels M. X… a été assujetti au titre de l’année 1984 ; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la procédure d’imposition :

Considérant qu’aux termes de l’article L.66 du livre des procédures fiscales : « Sont taxés d’office : 1 ) à l’impôt sur le revenu, les contribuables qui n’ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d’ensemble de leurs revenus ( …) sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l’article L.67 » ; qu’aux termes de l’article L.67 du livre des procédures fiscales : « La procédure de taxation d’office prévue aux 1 et 4 de l’article L.66 n’est applicable que si le contribuable n’a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d’une première mise en demeure … » ;

Considérant qu’il résulte des pièces produites par l’administration devant la cour qu’une première mise en demeure de déposer la déclaration de revenus afférente à l’année 1983 a été réceptionnée par le contribuable au plus tard le 23 juillet 1984, date à laquelle l’accusé de réception du pli recommandé a été renvoyé au service expéditeur ; qu’aucune déclaration n’a été adressée au service dans le délai prévu à l’article L.67 précité du livre des procédures fiscales ; que, par suite, M. X… n’est pas fondé à soutenir que la procédure de taxation d’office appliquée à l’année 1983 serait irrégulière ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X… a été taxé d’office à l’impôt sur le revenu pour les années 1982 et 1984 en application des dispositions des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales ; que, pour l’année 1983, il a été taxé d’office à l’impôt sur le revenu en application des dispositions précitées de l’article L.66-1 ; que, par suite, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions d’office lui incombe en vertu de l’article L.193 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les salaires imposés au titre de l’année 1983 :

Considérant que si M. X… soutient qu’une confusion aurait été commise par l’administration dans l’imposition des salaires perçus au titre de l’année 1983, les éléments chiffrés qu’il fournit à l’appui de son argumentation ne permettent pas à la cour d’identifier la portée de ce moyen, le requérant ne précisant notamment pas dans quelle mesure il aurait été surtaxé ;

En ce qui concerne les crédits expliqués par des gains au jeu :

Considérant que M. X… ne justifie pas, par la seule production d’une attestation imprécise d’un casino, que le chèque de 200.000 F crédité sur son compte à la Banque Hervet le 9 avril 1984 correspondrait à un gain de jeu ; qu’aucune pièce du dossier ne vient étayer ses allégations selon lesquelles de nombreuses remises d’espèces sur ses comptes durant les trois années en litige correspondraient à des gains de jeux non imposables ;

En ce qui concerne les crédits expliqués par des prêts et des remboursements de prêts :

Considérant que le requérant n’établit pas par la seule production d’un bordereau de remise de chèques mentionnant comme nom du tireur M. X…, sans indication du prénom, que le crédit de 60.000 F figurant le 15 avril 1982 sur son compte à la Société générale n 50003215 correspondrait à un versement de son père et non à un revenu imposable ;

Considérant que M. Paul X… ne justifie pas qu’un crédit de 200.000 F constaté le 11 juillet 1983 correspondrait à une somme versée par son père, M. Moïse X…, dont le relevé bancaire fait effectivement mention à cette date d’un débit de 200.000 F, dès lors que le chèque correspondant à ce débit a été établi par M. Moïse X… à l’ordre de M. Sylvain X… ;

Considérant que M. X… n’établit pas par la seule production de chèques qu’il a émis au profit de diverses personnes que des crédits sur ses comptes bancaires en 1983 et 1984 correspondraient à des prêts accordés par des tiers ou à des remboursements de prêts consentis à des tiers ; qu’il ne justifie pas non plus que des dépôts en espèces résulteraient de sommes qui lui auraient été remises par son père ;

En ce qui concerne les remises d’espèces expliquées par des retraits antérieurs :

Considérant que M. X… soutient que certaines remises d’espèces s’expliquent par le dépôt sur ses comptes bancaires d’espèces qui avaient fait l’objet de retraits antérieurs ; que, toutefois, en se bornant à produire des copies de chèques à « moi-même » établis au cours des années d’imposition et en l’absence de toute justification de l’objet des mouvements de fonds allégués, M. X… ne met pas la cour en mesure d’apprécier le bien-fondé de son argumentation ;

En ce qui concerne le crédit expliqué par un remboursement d’assurance :

Considérant que M. X… ne produit aucune pièce justificative à l’appui du moyen tiré de ce que le crédit de 18.965 F constaté le 5 mars 1984 correspondrait partiellement à un remboursement d’assurances ;

En ce qui concerne les crédits expliqués par des rémunérations, honoraires ou remboursements de frais en provenance des sociétés Sodemecane, Datm et Faa :

Considérant qu’en se bornant à produire des bordereaux de remise de chèques rédigés de sa main et indiquant le nom des sociétés Sodemecane, Faa et Datm, M. X… n’établit pas que les sommes ainsi encaissées correspondraient à des indemnités pour frais, à des honoraires ou à des rémunérations exceptionnelles ;

En ce qui concerne le crédit expliqué par un remboursement de compte-courant en provenance de la société Sease :

Considérant que si M. X… justifie qu’un crédit de 200.000 F en date du 6 août 1982 a pour origine un virement de la société Sease, il ne justifie pas, en l’absence de production des relevés de ce compte, que cette somme constituerait un remboursement partiel de son compte-courant ouvert dans les écritures de ladite société ; que, par suite, M. X… n’établit pas que la somme litigieuse serait un virement de compte à compte non imposable ;

En ce qui concerne les crédits expliqués par des rémunérations, honoraires ou indemnités pour frais versés par la société Atesma :

Considérant qu’il résulte du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré que les crédits bancaires dont M. X… établissait le versement par la société Atesma, devaient être taxés, non pas comme ils l’avaient été initialement dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée, mais, par voie de substitution légale, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers dès lors que l’intéressé était actionnaire et dirigeant de ladite société ; que si M. X… soutient que cette substitution de base légale serait irrégulière, ce moyen n’est pas assorti dans sa requête introductive d’instance des précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé et n’est pas repris dans son mémoire ampliatif ;

Sur les pénalités :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, dans sa réponse aux observations du contribuable en date du 8 septembre 1986, le vérificateur a motivé les pénalités de taxation d’office appliquées au titre de l’année 1983, par l’absence de production, malgré l’envoi de deux mises en demeure en date des 3 juillet et 5 septembre 1984, de la déclaration de revenus ; qu’il a également précisé que cette circonstance était de nature à justifier l’application des pénalités de 100 % prévues à l’article 1733-1 du code général des impôts ; que ce courrier indiquait ainsi les considérations de droit et de fait qui ont fondé les pénalités litigieuses, lesquelles, par suite, ont été régulièrement et suffisamment motivées conformément aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ;

Sur les conclusions de M. X… présentées devant le tribunal administratif et tendant à l’application de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel :

Considérant que, par un mémoire présenté devant le tribunal administratif le 17 juin 1994, M. X… avait demandé la condamnation de l’Etat au versement de la somme de 59.300 F sur le fondement des dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ; que le tribunal a omis de statuer sur ces conclusions ; que, dans cette mesure, le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 27 juin 1996 doit être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions susanalysées ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel : « Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions précitées, de condamner l’Etat à payer à M. X… la somme de 10.000 F ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X… est seulement fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris n’a pas statué sur ses conclusions tendant à l’application de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ; que, pour le surplus, il n’est pas fondé à se plaindre dudit jugement en tant qu’il a rejeté les conclusions de sa demande ;

Sur les conclusions présentées devant la cour et tendant à l’allocation des sommes non comprises dans les dépens :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit à la demande de M. X… ;

Article 1er : A concurence de la somme de 139 F en ce qui concerne les compléments d’impôt sur le revenu mis à la charge de M. X… au titre de l’année 1984, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 27 juin 1996 est annulé en tant qu’il a omis de statuer sur les conclusions de M. X… tendant à l’application de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

Article 3 : L’Etat versera à M. X… une somme de 10.000 F au titre de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X… est rejeté.


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