Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
(2ème Chambre) VU la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour administrative d’appel les 4 septembre et 31 octobre 1996, présentés pour le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS, représenté par le président du conseil général, par la SCP RYZIGER-BOUZIDI, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ; le département demande à la cour :
1 ) d’annuler le jugement n 9305825/4 en date du 3 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, sur déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis, la délibération n 4 de la commission permanente du conseil général de la Seine-Saint-Denis en date du 15 septembre 1992 décidant d’accorder une bonification d’intérêts d’emprunt au profit de la société d’ingénierie et de développement économique (SIDEC) ;
2 ) de rejeter le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
VU la loi n 82-6 du 7 janvier 1982 approuvant le plan intérimaire 1982-1983 ;
VU la loi n 82-213 du 2 mars 1982 modifiée par la loi 88-13 du 5 janvier 1988 ;
VU la loi n 83-597 du 7 juillet 1983 relative aux sociétés d’économie mixte locale ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 17 septembre 1997 :
– le rapport de Mme TRICOT, conseiller,
– les observations de la SCP RYZIGER-BOUZIDI, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, pour le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis et celles de Me X…, avocat, pour la SIDEC,
– et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que, par une délibération en date du 15 septembre 1992 de la commission permanente du conseil général de la Seine-Saint-Denis, le département a accordé à la société d’ingénierie et de développement économique (SIDEC) le bénéfice de bonification d’intérêts au titre d’une opération confiée à cette société par la commune de Pantin pour la réalisation de l’opération d’acquisition des sites J. COTTIN et UGC sur le territoire de la commune ; que, sur déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis, le tribunal administratif de Paris a annulé cette délibération ; que le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS fait appel du jugement ;
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 48 de la loi du 2 mars 1982 : « L’Etat a la responsabilité de la conduite de la politique économique et sociale ainsi que de la défense de l’emploi. Néanmoins, sous réserve du respect de la liberté du commerce et de l’industrie, du principe de l’égalité des citoyens devant la loi ainsi que des règles de l’aménagement du territoire définies par la loi approuvant le plan, le département peut intervenir en matière économique et sociale dans les conditions prévues au présent article. I- Lorsque l’intervention du département a pour objet de favoriser le développement économique, il peut accorder des aides directes et indirectes dans les conditions prévues par la loi approuvant le plan … ; qu’en vertu de l’article 4 de la loi du 7 janvier 1982 approuvant le plan intérimaire 1982-1983, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les régions peuvent, lorsque leur intervention a pour objet la création ou l’extension d’activité économique, accorder des aides directes ou indirectes à des entreprises dans les conditions ci-après : « Les aides directes revêtent la forme de primes régionales à la création d’entreprises, de primes régionales à l’emploi, de bonifications d’intérêts ou de prêts et avances à des conditions plus favorables que celles du taux moyen des obligations. Les aides directes sont attribuées par la région dans des conditions fixées par un décret en Conseil d’Etat ; ce décret déterminera notamment les règles de plafond et de zone indispensables à la mise en oeuvre de la politique nationale d’aménagement du territoire et compatibles avec les engagements internationaux de la France. Ces différentes formes d’aides directes peuvent être complétées par le département, les communes ou leurs groupements, lorsque l’intervention de la région n’atteint pas le plafond fixé par le décret mentionné à l’alinéa précédent » ;
Considérant qu’il est constant que la région d’Ile-de-France n’est pas intervenue pour aider la société d’économie mixte à réaliser l’opération en cause ; que si le département soutient qu’il s’agit d’une aide indirecte qui peut faire l’objet d’une libre attribution par le département, il résulte des termes mêmes de l’article 4 de la loi du 7 janvier 1982 que les bonifications d’intérêts sont des aides directes ; que, par suite, la délibération du 15 septembre 1992 ne peut trouver de base légale dans les textes précités ;
Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article 5 de la loi du 7 juillet 1983 susvisée : « I- Lorsqu’il ne s’agit pas de prestations de service, les rapports entre les collectivités territoriales … , d’une part, et les sociétés d’économie mixte, d’autre part, sont définis par une convention qui prévoit, à peine de nullité : … 3 Les obligations de chacune des parties et, le cas échéant, le montant de leur participation financière, l’état de leurs apports en nature ainsi que les conditions dans lesquelles la collectivité … fera l’avance de fonds nécessaire au financement de la mission ou remboursera les dépenses exposées pour son compte et préalablement définies » ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS, s’il est actionnaire de la société d’ingénierie et de développement économique, n’est pas partie à la convention par laquelle la commune de Pantin a concédé à cette société une mission d’aménagement ; que si le département se prévaut de la convention qu’il devait, aux termes de la délibération du 15 septembre 1992, signer avec la société d’ingénierie et de développement économique, cette convention fait seulement référence à l’octroi de la bonification d’intérêt et n’est d’ailleurs pas de la nature de celles prévues par l’article 5 de la loi du 7 juillet 1983 ; que le département ne saurait soutenir ni que cette aide accordée à la société d’économie mixte, seule bénéficiaire mentionnée dans la délibération, était destinée en réalité au financement d’un service public administratif concédé par la commune à la société d’ingénierie et de développement économique, ni, à titre subsidiaire, qu’elle serait versée à la commune par l’intermédiaire de la société d’ingénierie et de développement économique, en l’absence de toute clause en ce sens ; que, par suite, la délibération du 15 septembre 1992 ne saurait davantage trouver, en tout état de cause, de base légale dans la loi du 7 juillet 1983 ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa délibération du 15 septembre 1992 ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS est rejetée.