Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 octobre et 20 novembre 2007, présentés pour l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL -BOIS DE BOULOGNE-, dont le siège est 79 boulevard de Montmorency à Paris (75016), par Me Musso ; l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL -BOIS DE BOULOGNE- demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0701198 du 2 août 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation la délibération des 12 et 13 juin 2006 par laquelle le Conseil de Paris a approuvé le plan local d’urbanisme (PLU) ;
2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, ladite délibération ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l’habitation ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 29 janvier 2009 :
– le rapport de M. Bouleau, rapporteur,
– les observations de Me Pouilhe, pour l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL -BOIS DE BOULOGNE, et celles de Me Foussard, pour la ville de Paris,
– les conclusions de M. Bachini, commissaire du gouvernement,
– et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 30 janvier 2009, présentée pour la ville de Paris, par Me Foussard ;
Considérant que l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL-BOIS DE BOULOGNE relève appel du jugement n° 0701198 du 2 août 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation la délibération des 12 et 13 juin 2006 par laquelle le Conseil de Paris a approuvé le plan local d’urbanisme de Paris ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le moyen tiré de ce que le tribunal aurait omis de statuer sur le moyen relatif à l’insuffisance du rapport de la commission d’enquête manque en fait et doit, par suite, être écarté ; qu’il en est de même du moyen tiré de l’insuffisante motivation du jugement en ce qui concerne la procédure de consultation ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant que, comme l’ont jugé les premiers juges par des motifs qu’il y a lieu d’adopter, les moyens tirés des insuffisances de la procédure de consultation et de celles du rapport de la commission d’enquête doivent être écartés ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Sur le règlement de la zone UG :
S’agissant de la réserve pour logements sociaux instituée sur le site de l’ancienne gare d’Auteuil et le classement de ce site en zone UG :
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 123-2 du code de l’urbanisme : Dans les zones urbaines ou à urbaniser, le plan local d’urbanisme peut instituer des servitudes consistant : (…) b) A réserver des emplacements en vue de la réalisation, dans le respect des objectifs de mixité sociale, de programmes de logements qu’il définit…. ; que selon l’article R. 123-12 du même code : Les documents graphiques (…) font également apparaître, s’il y a lieu : 1° Dans les zones U : (…) ; c) Les emplacements réservés en application du b de l’article L. 123-2 en vue de la réalisation, dans le respect des objectifs de mixité sociale, de programmes de logements en précisant la nature de ces programmes ; (…) ;
Considérant que la création, en application dispositions précitées, d’un emplacement réservé pour la réalisation de logements sociaux sur le site de la gare d’Auteuil est figurée sur les documents graphiques par la mention LS 50 % , correspondant, aux termes de l’article UG 2.3 du règlement du PLU, à l’obligation de réaliser en habitation affectée au logement social 50 % de la surface hors-oeuvre nette (hors rez-de-chaussée, sous-sol, constructions et installations nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif) ; que cette mention, qui renvoie aux catégories de logements sociaux dont la liste est limitativement fixée par l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation et détermine la surface de logements susceptible d’être réalisée, définit ainsi suffisamment un programme de logement au sens desdites dispositions ; qu’eu égard aux garanties que présente la procédure d’élaboration du PLU, au droit de délaissement dont disposent les propriétaires et au caractère d’ intérêt général du but de mixité sociale poursuivi, la mise en oeuvre de ces dispositions ne peut, en tout état de cause, porter une atteinte excessive au droit au respect des biens ;
Considérant, en second lieu, qu’ainsi que l’ont indiqué à juste titre les premiers juges aucune disposition du schéma directeur de la région Ile-de-France n’a pour effet d’imposer la continuité d’une coulée verte entre le parc du Ranelagh et la porte d’Auteuil ; que la réalisation d’un programme de logements sociaux sur le site de l’ancienne gare d’Auteuil, n’est pas, en conséquence, susceptible d’être regardée comme incompatible avec ledit schéma ; que le classement de ce site en zone urbaine générale (UG) et non en zone urbaine verte (UV), qui découle nécessairement du choix, cohérent avec les orientations exposées par le rapport de présentation, de réaliser un tel programme à cet emplacement n’est, par ailleurs, entaché d’aucune erreur manifeste d’appréciation ;
S’agissant de l’article UG.10-1 du règlement :
Considérant que l’article UG.10.1 du règlement du PLU, relatif au plafonnement des hauteurs, prévoit que les hauteurs qu’il détermine sont fixées sans préjudice des dispositions énoncées à ses § 1° à 5° ; qu’aux termes du § 4° Travaux sur les constructions existantes dudit article : Certains éléments de construction à caractère technique (machineries d’ascenseurs, chaufferies, conduits de cheminées, armoires relais d’installations d’émission ou de diffusion, antennes…), ainsi que les édicules d’accès et les dispositifs de sécurité nécessaires, peuvent être admis en dépassement localisé de la hauteur atteinte par les constructions, ainsi que de la cote résultant de l’application du présent article UG.10, à condition : / – que ces éléments, édicules ou dispositifs ne soient pas constitutifs de surface hors-oeuvre nette supplémentaire au-dessus de la cote résultant de l’application du présent article UG.10, / que leur aspect architectural soit satisfaisant au regard des dispositions de l’article UG.11 ci-après. ;
Considérant qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle à ce que, comme le prévoient les dispositions précitées, des règles, qui ne constituent pas des dérogations, soient fixées pour définir la hauteur autorisée pour des éléments et édicules techniques et de sécurité devant être implantés en toiture des bâtiments ; qu’eu égard à la nature des équipements concernés, qui sont susceptibles de devoir être édifiés alors qu’ils n’étaient pas initialement prévus, la circonstance que cette hauteur ne concerne que les seules constructions existantes ne saurait faire regarder ces dispositions comme portant atteinte au principe d’égalité ; qu’il suit de là que le moyen tiré de l’illégalité dont seraient entachées ces dispositions doit être écarté ;
S’agissant de l’article UG 12-1 du règlement :
Considérant qu’aux termes de l’article UG.12.1 du règlement du PLU: 1°- Dispositions générales : / Le stationnement des véhicules à moteur n’est soumis à une norme quantitative que pour les constructions à usage d’habitation qui ne sont pas concernées par les motifs d’interdiction énoncés au § 3° ci-après (…). En ce qui concerne les destinations ne faisant pas l’objet de normes, la capacité de stationnement des parcs doit être examinée au regard des objectifs ci-dessus, de la desserte en matière de transports en commun et des caractéristiques de la voirie environnante (…) / 2°- Norme de stationnement applicable aux constructions à usage d’habitation : / Les dispositions qui suivent ne s’appliquent que si la SHON d’habitation créée est supérieure a 1 000 m². En application de l’article L. 421-3 du code de l’urbanisme, les foyers et résidences financés avec un prêt aidé par l’Etat n’y sont pas soumis. / A l’exception des constructions concernées par les motifs d’interdiction énoncés au § 3° ci-après, le nombre minimal de places exigibles pour une construction a usage d’habitation est le résultat, arrondi au chiffre entier inférieur, de la division de la SHON d’habitation par une surface de 100 m². / Cette norme ne s’applique pas aux surfaces des planchers existants, y compris ceux faisant l’objet d’un changement de destination soumis a permis de construire (…) / 3°- Reconstruction, limitation ou interdiction de création ou d’extension de parcs de stationnement : / Est interdite toute création de place de stationnement ou extension de parc de stationnement : / – prenant accès (entrée ou sortie) sur une voie indiquée aux documents graphiques du règlement comme voie sur laquelle la création d’accès a un parc de stationnement est interdite, / – projetée sur un terrain ne présentant aucun linéaire sur voie supérieur à 10 mètres. / Cette interdiction ne s’applique pas aux parcs de stationnement existants, qui peuvent être mis aux normes ou reconstruits sous les conditions suivantes : / ils doivent contribuer à assurer le stationnement résidentiel local, / – ils ne peuvent comporter aucune extension de surface, / – un espace doit être réservé au stationnement des deux-roues et des poussettes. ;
Considérant que ni les dispositions de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme ni aucune autre disposition ne font obligation à un plan local d’urbanisme de comporter des prescriptions relatives à la création d’aires de stationnement pour les véhicules à moteur ; que les dispositions précitées, notamment en ce qu’elles n’imposent aucune obligation en la matière pour les constructions à usage d’habitation créant moins de 1 000 m² de S.H.O.N.et prévoient seulement pour les constructions excédant cette surface la création d’une place de stationnement pour 100 m² de S.H.O.N ou laissent à l’autorité compétente la possibilité d’imposer pour les autres destinations la création des places nécessaires ne sont entachées d’aucune erreur manifeste d’appréciation au regard des choix auxquels le Conseil de Paris a procédé pour la conciliation des différents objectifs que doit avoir un plan local d’urbanisme en vertu de l’article L. 121-1 du code de l’urbanisme et notamment celui de modifier très sensiblement, en conformité avec les orientations retenues par le projet d’aménagement et de développement durable, les obligations qui existaient antérieurement en matière de création de places de stationnement ;
Sur le règlement de la zone UV :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : (…) / Les plans locaux d’urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d’utilisation des sols permettant d’atteindre les objectifs mentionnés à l’article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l’interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l’implantation des constructions ; qu’aux termes de l’article R. 123-9 de ce même code : Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes : (…) / 6º L’implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques ; / 7º L’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives (…) / Les règles mentionnées aux 6º et 7º relatives à l’implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques et par rapport aux limites séparatives, qui ne sont pas fixées dans le règlement, doivent figurer dans les documents graphiques. ;
Considérant qu’il résulte des termes mêmes de ces dispositions que les règles d’implantation qu’elles prévoient doivent être fixées relativement aux voies, emprises publiques et limites séparatives ; qu’elles ne peuvent en conséquence demeurer abstraites mais doivent, qu’elles soient exprimées dans le règlement ou qu’elles résultent des documents graphiques, déterminer entre lesdites voies, emprises et limites et les constructions un rapport dont le respect puisse être concrètement apprécié ;
Considérant que l’article UV.6 du règlement du PLU, relatif à l’implantation des constructions par rapport aux voies se borne à prévoir que : L’implantation de toute construction, installation et ouvrage doit permettre sa bonne insertion dans le paysage environnant. ; que si l’article UV.7 relatif à l’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives prévoit la possibilité d’un adossement aux murs-pignons de bâtiments existants, il n’en fait pas une règle et se borne, pour le reste, à indiquer que l’implantation d’une construction peut être refusée si elle a pour effet de porter gravement atteinte aux conditions d’habitabilité d’un immeuble voisin ou à l’aspect du paysage urbain et que la dite implantation doit permettre son insertion harmonieuse dans le paysage environnant ; qu’ainsi ces articles ne définissent donc quant à l’implantation des constructions que des obligations abstraites dont il ne se déduit aucune règle susceptible de déterminer la position des constructions par rapport auxdites voies, emprises et limites ; que lesdits articles ne sont en conséquence pas conformes aux dispositions précitées ;
Considérant que les autres dispositions du règlement de la zone UV correspondent à son caractère de zone urbaine et ne sont pas incompatibles avec la définition qui est donnée de cette zone par le rapport de présentation ; que le zonage tel qu’il est défini par les articles L. 123-1 et R. 123-4 et suivants du code de l’urbanisme impose seulement que soient déterminées quelques grandes catégories de zones correspondant aux caractéristiques principales des différentes parties du territoire communal et implique donc nécessairement que les secteurs de la commune regroupés pour être soumis aux règles édictées pour une zone donnée puissent être de natures différentes ; que le moyen tiré par l’association requérante du caractère hétérogène de la zone UV ne peut en conséquence être utilement examiné dès lors qu’elle ne critique pas précisément les choix faits quant au classement des secteurs ou terrains qui ont été soumis aux règles édictées pour la zone UV ;
Considérant que dès lors que, comme dit ci-dessus, sont illégales les dispositions du règlement de la zone UV qui sont de celles que doivent impérativement comporter le règlement d’un PLU, ledit règlement de la zone UV, illégal du fait de l’absence de ces dispositions obligatoires, ne peut qu’être annulé dans son ensemble ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL-BOIS DE BOULOGNE est seulement fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la délibération des 12 et 13 juin 2006 en tant que qu’elle approuvait le règlement de la zone UV du PLU ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu dans les circonstances de l’espèce de mettre à la charge de la ville de Paris le versement d’une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative à l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL-BOIS DE BOULOGNE et de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la ville de Paris ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0701198 du Tribunal administratif de Paris du 2 août 2007 est annulé en tant qu’il a rejeté la demande de l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL-BOIS DE BOULOGNE tendant à l’annulation de la délibération des 12 et 13 juin 2006 du Conseil de Paris en tant qu’elle approuve le règlement de la zone UV. La délibération des 12 et 13 juin 2006 du Conseil de Paris en tant qu’elle approuve le règlement de la zone UV est annulée.
Article 2 : La ville de Paris versera à l’ASSOCIATION DE SAUVEGARDE AUTEUIL-BOIS DE BOULOGNE, une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la ville de Paris tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 07PA03886