Cour administrative d’appel de Nantes, du 3 juillet 1991, 89NT00880, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Nantes, du 3 juillet 1991, 89NT00880, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

VU l’ordonnance en date du 27 janvier 1989 par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d’Etat a transmis à la Cour administrative d’appel de NANTES le dossier de la requête présentée par M. Michel LEROYER et enregistrée au secréta-riat du contentieux du Conseil d’Etat le 16 novembre 1988 sous le n° 1O3174 ;

VU la requête susmentionnée présentée par M. Michel X…, demeurant …, PETIT-QUEVILLY, enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 89NTOO88O ;

M. LEROYER demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement en date du 8 juillet 1988 du Tribunal administratif de ROUEN en ce que celui-ci a rejeté sa demande en décharge du complément d’impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1977 à 1979 ;

2°) de prononcer la décharge de cette imposition ainsi que des pénalités dont elle a été assortie ;

3°) de lui accorder le remboursement des frais exposés tant en première instance qu’en appel ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts ;

VU le livre des procédures fiscales ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience,

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 19 juin 1991 :

– le rapport de M. SALUDEN, conseiller,

– et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de première instance que le mémoire présenté le 1er juin 1988 par le directeur des services fiscaux au Tribunal administratif de ROUEN n’a été communiqué à M. LEROYER que le 3 juin 1988, soit le jour de l’audience ; que ce mémoire contenait des éléments nouveaux ; que, dans ces conditions, M. LEROYER est fondé à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure n’a pas été respecté ; qu’ainsi, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens relatifs à sa régularité, le jugement attaqué doit être annulé en tant qu’il a rejeté les conclusions de la demande relatives aux impositions établies au titre des années 1977, 1978 et 1979 ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions restant en litige de la demande présentée par M. LEROYER devant le Tribunal administratif de ROUEN ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition et la charge de la preuve :

Considérant que les irrégularités qui entache-raient selon M. LEROYER la procédure d’imposition suivie en ce qui concerne la société anonyme PRIDOR dont il est le président-directeur général sont sans influence sur la validité des compléments d’impôt sur le revenu qui lui ont été réclamés ; que M. LEROYER ne relève aucun vice propre à l’encontre de la procédure d’imposition qui a conduit à l’établissement des compléments d’impôt restant en litige qu’il conteste ;

Considérant que M. LEROYER conteste les seuls compléments d’imposition qui découlent du rattachement à son revenu imposable des années 1977, 1978 et 1979, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des rehaus-sements des bénéfices de la société PRIDOR pour les mêmes années qui ont été regardés comme constituant des bénéfices distribués à M. LEROYER ; que M. LEROYER ayant accepté ces redressements, il lui appartient de faire, devant le juge de l’impôt, la preuve de l’exagération des impositions en litige ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu’aux termes de l’article 1O9 du code général des impôts : « 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices » ; qu’aux termes de l’article 11O du même code : « Pour l’application de l’article 1O9-1-1°, les bénéfices s’entendent de ceux qui ont été retenus pour l’assiette de l’impôt sur les sociétés » ; qu’aux termes, enfin, de l’article 111 : « Sont notamment considérés comme revenus distribués :…c) les rémunérations et avantages occultes » ;

Considérant, en premier lieu, que l’administration a imposé M. LEROYER, en vertu des dispositions précitées des articles 1O9 et 11O, à raison de la réintégration dans les recettes de l’entreprise des sommes correspondant à l’enri-chissement inexpliqué de M. LEROYER constaté après l’éta-blissement d’une balance entre les disponibilités dégagées et celles engagées par lui en espèces ; que le contribuable conteste la méthode ainsi suivie par l’administration ; que ni le caractère non probant de la comptabilité, ni le fait que M. LEROYER détenait 9O % des parts sociales et exerçait la responsabilité de la gestion de l’affaire, ni la circons-tance qu’il avait contracté personnellement un emprunt pour le compte de la société, dès lors qu’il a été régulièrement comptabilisé, ne suffisent à établir qu’il y ait eu, en fait, confusion de son patrimoine avec celui de la société ; que, dès lors, l’administration ne pouvait reconstituer les chiffres d’affaires et bénéfices dissimulés de la société à partir de l’enrichissement inexpliqué de son dirigeant ; que, par suite, M. LEROYER est fondé à demander une réduction de ses bases d’imposition pour un montant, respec-tivement, de 19.882 F pour 1977, 2O.3O6 F pour 1978 et 5.556 F pour 1979 ;

Considérant, en second lieu, que la société X… a déduit de ses bénéfices imposables une partie des dépenses relatives à des installations communes à l’entre-prise et au logement privé de son dirigeant ; que l’adminis-tration a remis en cause la répartition de ces dépenses, en ce qui concerne les loyers, l’installation de chauffage central, le gaz et l’électricité, a, en conséquence, réintégré dans les bases imposables de la société la part de ces dépenses regardée à tort par cette dernière comme engagée dans son intérêt direct et a imposé M. LEROYER, en vertu des dispositions précitées des articles 1O9, 11O et 111 c, à raison de ces avantages ; qu’il résulte de l’instruction que les redressements opérés par le service se fondent sur des données objectives, telles que la valeur locative des locaux et le nombre de sections de radiateurs qu’ils comportent ; que M. LEROYER se borne à des affirma-tions générales et imprécises ou non étayées de justifi-cations revêtues d’une valeur probante ; que, dans ces conditions, il n’apporte pas la preuve que la part des dépenses dont il s’agit pouvait être valablement regardée comme des charges supportées dans l’intérêt de la société PRIDOR ; que, compte tenu de la nature de ces dépenses, les avantages correspondants doivent être regardés comme apréhendés par M. LEROYER et, par suite, comme des revenus imposables à son nom ;

Considérant, en revanche, que pour remettre en cause le montant des prélèvements de marchandises par le dirigeant de l’entreprise tel que ces derniers sont inscrits en comptabilité, l’administration s’est bornée à une évalua-tion forfaitaire et imprécise ; que M. LEROYER a versé au dossier des factures des fournisseurs de la société PRIDOR qui justifient de l’existence et de l’importance d’échantil-lons de produits alimentaires délivrés gratuitement à la société et mis à la disposition de son gérant ; que, dans ces conditions, le requérant doit être regardé comme ayant apporté la preuve que ces redressements ne sont pas fondés ; que ses bases d’imposition doivent, par suite, être réduites des sommes de 4.834 F pour 1977, 4.167 F pour 1978 et 4.592 F pour 1979 ;

Sur les pénalités :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la lettre du 18 novembre 1981 de motivation des pénalités, qui se référait expressément à la notification de redressement adressée à M. LEROYER, indiquait les considérations de droit et de fait qui fondaient les pénalités dont ont été assorties les impositions litigieuses ; qu’ainsi, les pénalités ont été suffisamment motivées ;

Considérant qu’aucune disposition du code général des impôts n’impose à l’administration de suivre une procédure contradictoire pour l’application des pénalités ; que, par suite, M. LEROYER ne peut arguer utilement de ce que la lettre du 18 novembre 1981 susmentionnée n’indiquait pas que le contribuable disposait d’un délai de 3O jours pour produire ses observations pour soutenir que les pénalités lui ont été assignées à la suite d’une procédure irrégulière ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. LEROYER est seulement fondé à demander la réduction du complément d’impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 1977, 1978 et 1979 correspondant à une réduction de ses bases d’imposition des sommes, respectivement, de 24.716 F, 24.473 F et 1O.148 F ;

Sur la demande de remboursement des frais exposés :

Considérant que ces conclusions ne sont pas chiffrées ; qu’elles ne sont, par suite, pas recevables ; qu’elles doivent, en conséquence, être rejetées ;

Article 1er – Le jugement du Tribunal adminis-tratif de ROUEN en date du 8 juillet 1988 est réformé en tant qu’il a rejeté les conclusions de la demande de M. LEROYER relatives aux impositions établies au titre des années 1977, 1978 et 1979.

Article 2 – Les bases de l’impôt sur le revenu assigné à M. LEROYER au titre des années 1977, 1978 et 1979 sont réduites des sommes, respectivement, de vingt quatre mille sept cent seize francs (24.716 F), vingt quatre mille quatre cent soixante treize francs (24.473 F) et dix mille cent quarante huit francs (1O.148 F).

Article 3 – Il est accordé à M. LEROYER décharge des droits et pénalités correspondant à cette réduction des bases d’imposition.

Article 4 – Le surplus des conclusions de la demande et de la requête de M. LEROYER est rejeté.

Article 5 – Le présent arrêt sera notifié à M. LEROYER et au ministre délégué au budget.


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