Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 mai 1990, présentée par Mme Colette X…, demeurant … (Landes) ;
Mme X… demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement du 28 mars 1990 par lequel le Tribunal administratif de NANTES a rejeté sa demande en décharge du complément d’impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 1981 et 1982 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ; VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience,
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 9 septembre 1992 ;
– le rapport de M. ISAIA, conseiller,
– et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,
Sur la désignation du redevable de l’impôt :
Considérant que l’administration a établi l’imposition correspondant aux revenus perçus par la succession de M. Jean X…, décédé le 18 décembre 1980, au nom de Mme veuve X…, son épouse ; qu’il résulte de l’instruction que cette succession était composée de Mme veuve X… et de ses deux enfants mineurs, les autres héritiers ayant renoncé à la totalité de leurs droits ; que compte tenu des dispositions de l’article 6-1 du code général des impôts, qui prévoient que chaque contribuable est imposable à l’impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants, l’administration n’a commis aucune irrégularité en établissant au nom de Mme X… seule l’imposition correspondant aux revenus de la succession ; que, quelles que soient ses modalités, le partage de la succession intervenu en 1983 reste sans incidence sur le principe de l’imposition, au nom de Mme veuve X…, des revenus de la succession perçus antérieurement à cette opération ; que Mme X… ne peut utilement invoquer, en se fondant sur l’article L 80 A du livre des procédures fiscales, une instruction administrative du 1er mars 1979 qui concerne le régime applicable à des revenus imposables au titre d’années antérieures au décès du contribuable, dès lors qu’en l’espèce le litige porte sur des sommes encaissées postérieurement au décès de M. Jean X… ;
Sur la régularité de la procédure d’imposition :
Considérant qu’il résulte de l’instruction que la notification de redressements en date du 26 avril 1985 a été adressée à « Mme veuve X… représentant la succession de M. Jean X… » ; que, par suite, le moyen soulevé par Mme X… et tiré de ce que ladite notification lui aurait été adressée personnellement manque en fait ;
Considérant qu’aux termes de l’article L 57 du livre des procédures fiscales : « L’administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation » ;
Considérant que, dans sa notification de redressements en date du 26 avril 1985, qui est à l’origine des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu au titre des années 1981 et 1982 contestées par Mme X…, l’administration, après avoir indiqué que les redressements résultaient de la vérification de la SARL Constructions traditionnelles Jean X… dont l’intéressée était la gérante, a précisé que lesdits redressements se rattachaient à la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, qu’ils étaient afférents à des intérêts non réclamés sur le compte débiteur de M. Jean X… et que les sommes correspondantes devaient être regardées comme des revenus distribués au profit de la succession ; qu’ainsi, l’administration a mis Mme X… en mesure de formuler ses observations en toute connaissance de cause ; que, dès lors, la notification de redressements était suffisamment motivée ;
Considérant que si la requérante fait état d’une erreur de rubrique en ce qui concerne les chiffres portés sur l’avis d’imposition, cette erreur, dès lors qu’elle concerne un document destiné à l’information du contribuable et émis postérieurement à l’établissement des rôles de l’impôt, reste sans influence sur la régularité des impositions contestées ;
Sur le bien-fondé de l’imposition :
Considérant qu’aux termes de l’article 109-1, 2° du code général des impôts, « sont considérés comme revenus distribués : 1° tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts, et non prélevées sur les bénéfices » ; qu’il résulte de ces dispositions que, si les sommes qui ont été réintégrées dans les résultats de l’entreprise puis soumises à l’impôt sur les sociétés sont présumées constituer des revenus distribués, l’administration conserve la charge de justifier l’imposition au titre des revenus des capitaux mobiliers des sommes de cette nature lorsqu’elles n’ont pas été assujetties à l’impôt sur les sociétés en raison de la persistance d’un déficit après réintégration ; qu’il lui appartient en ce cas, en application des dispositions précitées de l’article 109-1, 2°, d’apporter la preuve que ces sommes ont été effectivement appréhendées par les associés ;
Considérant qu’en autorisant Mme X…, gérante statutaire, à ouvrir un compte courant dans sa comptabilité distinct de celui ouvert au nom du mari, la SARL Constructions traditionnelles Jean X… a pris une décision de gestion qui lui est opposable ; que l’administration a pu estimer à bon droit que le solde débiteur du compte de M. X… correspondait à la mise à disposition de ce dernier de sommes prêtées sans intérêt, ce qui l’autorisait à regarder ladite société comme ayant fait un abandon injustifié de recettes, et à réintégrer dans ses résultats, pour le calcul du bénéfice imposable, la valeur des intérêts auxquels elle aurait pu normalement prétendre ; que ce compte étant distinct de celui de Mme X…, il n’y a pas lieu, pour déterminer le montant des sommes prêtées, de faire masse des deux comptes et de calculer le solde débiteur du compte de M. X… en le diminuant du solde créditeur du compte courant de Mme X… ; qu’ainsi, et nonobstant la persistance, après redressement, d’un déficit au titre de l’exercice clos le 31 mai 1982, l’administration était en droit, par application des dispositions de l’article 109-1, 2° du code général des impôts, de réintégrer les sommes en cause dans les résultats de la société et de regarder les héritiers de M. X… comme ayant bénéficié, à due concurrence, d’un revenu distribué imposable ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme X… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de NANTES a rejeté sa demande ;
Article 1er – La requête de Mme X… est rejetée.
Article 2 – Le présent arrêt sera notifié à Mme X… et au ministre du budget.