Cour administrative d’appel de Nantes, 1ère Chambre, du 27 octobre 2004, 01NT00873, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Nantes, 1ère Chambre, du 27 octobre 2004, 01NT00873, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 7 mai 2001, présenté par le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 96.3109 du 8 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a accordé à M. Jacques Y la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 1990 ;

2°) de remettre à la charge de M. Jacques Y ladite imposition ;

……………………………………………………………………………………………….

C

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 29 septembre 2004 :

– le rapport de M. Luc MARTIN, premier conseiller,

– les observations de M. Jacques Y,

– et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la S.A.R.L. Société d’investissement Y a cédé le 3 janvier 1990 à ses trois associés, Mme Marie-Paule Y, M. Léon Y et M. Jacques Y, 4 032 des 4 034 actions qu’elle possédait dans la S.A. Transports Y au prix de 450 F l’action ; qu’ayant estimé que ce prix était inférieur à la valeur vénale réelle des titres cédés, qu’elle a fixée à 3 550 F, et que M. Jacques Y avait ainsi bénéficié d’un avantage qui devait être regardé comme un revenu distribué, l’administration a soumis l’intéressé à un complément d’impôt sur le revenu, au titre de l’année 1990, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que, par le recours susvisé, le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie fait appel du jugement en date du 8 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a accordé à M. Jacques Y la décharge de ce complément d’imposition ;

Considérant que, pour faire droit aux conclusions du contribuable, le tribunal administratif a estimé, sans examiner les moyens de la demande, que la circonstance qu’il avait, par jugement du même jour, prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle avait été soumise la S.A.R.L. Société d’investissements Y devait entraîner, par voie de conséquence, la décharge du complément d’impôt sur le revenu auquel avait été assujetti M. Jacques Y ; qu’ainsi, les premiers juges ont ignoré le principe selon lequel la décision prise par la juridiction administrative dans un litige relatif à l’imposition d’une société à l’impôt sur les sociétés est, par elle-même, sans influence sur l’imposition du dirigeant ou de l’associé de cette société à l’impôt sur le revenu, alors même qu’il s’agit d’un excédent de distribution révélé par un redressement des bases de l’impôt sur les sociétés que l’administration entend imposer à l’impôt sur le revenu entre les mains du bénéficiaire ; que M. Jacques QERARD ne peut utilement se prévaloir, tant sur le fondement de l’article L.80 B du livre des procédures fiscales que sur celui de la charte du contribuable, de la circonstance que l’administration, dans un mémoire présenté en première instance, a écrit que le bien-fondé du redressement était lié au maintien du rappel d’impôt concernant la S.A.R.L. dès lors que cette mention ne saurait être regardée, en tout état de cause, comme constituant une prise de position formelle sur la situation de fait de l’intimé ; que c’est par suite à tort que le tribunal s’est fondé sur le motif sus-énoncé pour accorder à M. Jacques QUE-RARD la décharge de l’imposition supplémentaire qu’il contestait ;

Considérant, toutefois, qu’il appartient à la Cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les moyens invoqués par les parties tant en première instance qu’en appel ;

Sur la régularité de la procédure :

Considérant, en premier lieu, que les irrégularités qui auraient entaché la procédure d’établissement des suppléments d’impôt sur les sociétés dont la S.A.R.L. Société d’investissement Y a été l’objet au titre de l’année 1990 sont sans incidence sur l’imposition de M. Jacques Y à l’impôt sur le revenu ; qu’il suit de là que les moyens tirés par M. Jacques Y de l’incompétence du vérificateur de la société, de l’irrégularité de la vérification de la comptabilité de la société et de la motivation insuffisante de la notification de redressement adressée à la société sont inopérants ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 376, alors en vigueur, de l’annexe II au code général des impôts : … les fonctionnaires titulaires ou stagiaires appartenant à des corps des catégories A et B peuvent, dans le ressort territorial du service auquel ils sont affectés, fixer les bases d’imposition ou notifier des redressements. ; qu’il résulte de ces dispositions que M. Jacques Y, dont la déclaration de revenus au titre de l’année 1990 a été souscrite auprès du centre des impôts de Nantes-sud dont relève la commune de Bouguenais (Loire-Atlantique) où il est domicilié, n’est pas fondé à soutenir qu’un agent de la direction régionale des impôts des Pays de Loire, dont le ressort territorial comprend le département de la Loire Atlantique, n’avait pas compétence pour établir le redressement litigieux et le lui notifier, alors même que la résidence administrative dudit agent était située à La Roche-sur-Yon, dans le département de la Vendée ;

Considérant, en troisième lieu, que M. Jacques Y soutient que la notification de redressement en date du 26 mai 1992 qui lui a été adressée comporte une signature qui ne serait pas celle de l’agent dont le nom dactylographié et le titre figurent sur le document ; qu’il produit à l’appui de ses allégations, d’une part, un acte donnant décharge contre remise de documents comptables établi par le même agent dans le cadre de la procédure d’imposition suivie avec la S.A.R.L. Société d’investissement Y, sur lequel figure une signature différente de celle apposée sur la notification de redressement susmentionnée, d’autre part, les résultats de deux expertises effectuées à sa demande par deux experts en écriture près de Cours d’appel confirmant l’absence d’identité de main entre la signature de l’acte de décharge contre remise de documents et la signature de la notification ; que l’administration affirme que le signataire est l’inspecteur qui a procédé au contrôle de la société et dont le nom est dactylographié sur la notification, lequel inspecteur a établi une attestation selon laquelle il a apposé sa signature sur l’acte de décharge et son paraphe sur la notification ; que M. Jacques Y soutient que les modèles de signature et de paraphe figurant sur cette attestation sont des faux ; que les expertises, non contradictoires, qui n’ont pas tenu compte de cette attestation, ne suffisent pas à établir que la signature abrégée figurant sur la notification de redressement, qui ne se limite pas à un paraphe comportant les seules initiales de son auteur, ne serait pas authentique ; que M. Jacques Y ne saurait en tout état de cause utilement se prévaloir, sur le fondement de l’article L.80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative 13 L 1513 à l’appui d’un moyen tiré du caractère irrégulier de la procédure d’imposition ;

Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance invoquée par M. Jacques Y, selon laquelle le redressement de sa base d’imposition personnelle lui aurait été notifié avant que ne soit notifié à la S.A.R.L. Société d’investissement Y le redressement la concernant, à la supposer établie, est sans incidence sur la régularité de la procédure d’imposition de l’intéressé, en vertu du principe sus-rappelé d’indépendance des procédures d’imposition ;

Considérant, en cinquième lieu, que si la notification de redressement du 26 mai 1992 adressée à M. Jacques Y portait en première page la signature d’un inspecteur principal dans la case sanctions exclusives de bonne foi avec un renvoi en bas de page mentionnant pour les redressements notifiés aux associés des sociétés visées à l’article 8 du code général des impôts suite à vérification de comptabilité de ces sociétés, il ne saurait être déduit de cette circonstance, sans incidence sur la régularité de la procédure, que le rappel d’impôt mis à la charge de l’intéressé, qui n’a été assorti d’aucune pénalité de mauvaise foi, faisait suite à la vérification de comptabilité d’une société de personnes ; que, par suite, le moyen tiré de la non application par l’administration des dispositions de l’article L.48 du livre des procédures fiscales qui ne s’appliquent qu’aux redressements notifiés à l’issue d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du contribuable ou d’une vérification de comptabilité, doit être écarté, aucune de ces deux procédures n’ayant été mise en oeuvre ;

Considérant, en sixième lieu, qu’aux termes de l’article L.54 A du livre des procédures fiscales : Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l’un des deux conjoints ou notifiés à l’un d’eux sont opposables de plein droit à l’autre ; que, dès lors, M. Jacques Y n’est pas fondé à soutenir que la notification du 26 mai 1992 serait irrégulière, faute d’avoir été également adressée à son épouse ; que la circonstance que certains actes aient été adressés à M. ou Mme Y, d’autres à M. et Mme Y, est sans incidence sur la régularité de la procédure ;

Considérant, en septième lieu, qu’aux termes de l’article L.57 du livre des procédures fiscales : L’administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation… Lorsque l’administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée. ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, dans la notification de redressement du 26 mai 1992 adressée à M. Jacques Y, l’administration a mentionné l’origine et la nature des revenus distribués, l’article du code général des impôts sur lequel a été fondé le redressement ainsi que l’exposé détaillé des méthodes qu’elle a utilisées afin d’évaluer la valeur vénale des actions de la S.A. Transports Y cédées par la S.A.R.L. Société d’investissement Y à ses associés ; que dans ces conditions, sans qu’il puisse être reproché au service de n’avoir pas accompagné sa référence à l’acte anormal de gestion commis par la S.A.R.L., lequel ne repose pas sur un fondement légal précis, de la citation d’un article du code, et nonobstant la circonstance que l’administration n’a retenu en définitive qu’une seule des méthodes d’évaluation qu’elle a exposées, ladite notification a permis au contribuable de formuler utilement ses observations ; que, dès lors que la méthode retenue en définitive par le service est uniquement fondée sur la comparaison entre le prix d’achat en janvier 1990 et le prix de revente en juin de la même année des actions détenues par le contribuable, le moyen tiré de ce que le service n’aurait pas indiqué la nature et l’origine des documents utilisés pour appliquer les autres méthodes d’évaluation est dépourvu de portée utile ; que dans la réponse aux observations du contribuable en date du 6 août 1992, l’administration a opposé aux objections du contribuable tirées de la précarité de la situation juridique de la S.A. Transports Y à la date du 3 janvier 1990, le fait qu’il y avait unicité du loueur et du locataire ; que, dès lors, M. Jacques Y n’est pas fondé à soutenir que la notification de redressement et la réponse aux observations du contribuable qui lui ont été adressées, alors même que cette dernière serait entachée de quelques erreurs matérielles sans conséquence sur la bonne compréhension de son contenu, seraient insuffisamment motivées au regard des dispositions précitées de l’article L.57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en huitième lieu, qu’il résulte de l’instruction que l’administration n’a ni écarté, comme ne lui étant pas opposable, la cession d’actions intervenue le 3 janvier 1990 entre la S.A.R.L. Société d’investissement Y et ses associés, ni remis en cause la sincérité du procès-verbal de la réunion desdits associés tenue à cette même date, mais s’est bornée à soutenir, comme elle était en droit de le faire, que la minoration du prix de vente des actions n’avait pas de contrepartie réelle et constituait un acte anormal de gestion ; qu’il ne peut être soutenu qu’en mentionnant, dans sa réponse aux observations du contribuable, que les associés n’avaient aucune raison particulière de se rendre acquéreurs des actions de la S.A. Transports Y destinées à être en fin de compte cédées à la S.A. Transports BRONDU si ce n’est celle de voir la plus-value se réaliser entre leurs mains plutôt qu’au nom de la S.A.R.L., elle aurait cherché à démontrer que l’opération avait pour but exclusif d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que les associés, s’ils n’avaient pas procédé à cette acquisition d’actions, auraient normalement supportées eu égard à leur situation et à leurs activités réelles ; qu’ainsi, contrairement à ce que soutient M. Jacques Y, l’administration n’a pas entendu dénoncer implicitement un abus de droit et n’était par suite pas tenue de mettre en oeuvre la procédure prévue par les dispositions de l’article L.64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en neuvième lieu, que M. Jacques Y ne saurait en tout état de cause invoquer utilement les stipulations de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans un litige portant sur la contestation des droits supplémentaires d’impôt sur le revenu qui lui ont été assignés, et des intérêts de retard dont ils ont été assortis, dès lors que lesdites stipulations ne visent que les procès portant sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale ;

Considérant, en dernier lieu, qu’aux termes de l’article L.80 CA du livre des procédures fiscales : La juridiction saisie peut, lorsqu’une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d’imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l’exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. (…) ;

Considérant qu’il est constant que le complément d’imposition en litige n’a été assorti que des seuls intérêts de retard ; que, par suite, M. Jacques Y n’est pas fondé, en tout état de cause, à demander l’application des dispositions précitées de l’article L.80 CA du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. Jacques Y et comme il a été indiqué ci-dessus, la notification de redressement du 26 mai 1992 qui lui a été adressée était régulière ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que le délai de prescription n’aurait pas été régulièrement interrompu ne saurait être accueilli ;

Considérant qu’en vertu du 3 de l’article 158 du code général des impôts, sont notamment imposables à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les revenus considérés comme distribués en application des articles 109 et suivants du même code ; qu’aux termes de l’article 111 : Sont notamment considérés comme revenus distribués… c) les rémunérations et avantages occultes ;

Considérant qu’en cas de vente par une société à un prix que les parties ont délibérément minoré par rapport à la valeur vénale de l’objet de la transaction, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l’avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d’une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l’article 111 c du code général des impôts, alors même que l’opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l’identité du co-contractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle même, la libéralité en cause ; que la preuve d’une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l’administration lorsqu’est établie l’existence, d’une part, d’un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d’autre part, d’une intention, pour la société, d’octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que les trois associés de la S.A.R.L. Société d’investissement Y, à savoir Mme Marie-Paule Y, qui exerçait en outre les fonctions de gérante, MM. Léon et Jacques Y, ont acquis auprès de ladite S.A.R.L., le 3 janvier 1990, 4 032 actions de la S.A. Transports Y représentant 80,64 % du capital de cette dernière, au prix unitaire de 450 F ; qu’en multipliant ce prix par le nombre d’actions composant le capital de la S.A., l’administration a pu déduire des conditions de cette cession que la valeur globale de la S.A. Transports Y avait été évaluée par les parties à 2 250 000 F ; que le 19 juin 1990, la S.A. Transports BRONDU a acquis la totalité des actions de la S.A. Transports Y, y compris celles ayant donné lieu à la cession du 3 janvier 1990, pour un prix global de 22 375 000 F ; que l’administration, pour soutenir que la S.A.R.L. avait minoré la valeur vénale des actions cédées par elle le 3 janvier 1990, s’est fondée sur la comparaison entre les deux cessions intervenues à moins de six mois d’intervalle ; qu’elle a tenu compte de ce que, le 27 février 1990, l’indivision Y, dont sont membres notamment les trois associés susnommés, avait fait apport du fonds de commerce à la S.A. Transports Y, qui exploitait celui-ci jusqu’alors en qualité de locataire-gérante, en soustrayant de la somme payée par la S.A. Transports BRONDU la valeur de cet apport estimée par les parties à 2 000 000 F ; qu’ayant ainsi fixé la valeur du capital de la S.A. Transports Y à 20 000 000 F, elle a estimé que la valeur vénale, avant l’apport du fonds de commerce, des 4 032 actions, représentant 80,64 % dudit capital, cédées par la S.A.R.L. le 3 janvier 1990, égale à 16 128 000 F, avait été minorée de 14 313 600 F et regardé ce montant comme un avantage attribué aux trois associés de la S.A.R.L. imposable entre leurs mains ; que M. Jacques Y qui avait acquis 1 344 des 4 032 actions cédées par la S.A.R.L. le 3 janvier 1990 a été assujetti, sur le fondement des dispositions susmentionnées, à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus mobiliers, sur la base de 4 771 200 F ; que l’administration a admis en compensation la déduction de l’imposition de la plus-value sur cession de droits sociaux déclarée par M. Y à la suite de la revente de ces mêmes titres le 13 juin 1990 ;

Considérant que la valeur vénale d’actions non cotées en bourse sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l’ensemble permet d’obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu’aurait entraîné le jeu normal de l’offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

Considérant que si M. Jacques Y soutient que l’administration ne pouvait établir de comparaison entre les deux cessions des 3 janvier et 13 juin 1990, la première ayant consisté en l’acquisition de parts minoritaires du capital de la S.A. alors que la seconde a porté sur l’acquisition de la totalité du capital, il est constant que la vente des actions par la S.A.R.L. à ses trois associés a eu lieu à la même date, selon des conditions financières identiques et à raison d’une répartition égalitaire entre les trois associés ; que par suite, cette cession devant être regardée comme une prise de contrôle de la S.A. par les trois associés, l’administration a pu à bon droit effectuer une comparaison entre deux cessions de même nature ; que si M. Jacques Y soutient que le prix payé par la S.A. Transports BRONDU reposait non sur une évaluation de l’entreprise suivant des normes couramment admises mais sur l’application d’une stratégie prenant en compte des impératifs subjectifs de pérennité et de développement, cette affirmation n’est pas assortie de précisions chiffrées permettant d’en apprécier la portée ; que M. Jacques Y soutient qu’en se fondant sur la comparaison entre les deux cessions des 3 janvier et 13 juin 1990, l’administration n’a pas suffisamment tenu compte, d’une part, de l’augmentation considérable de la valeur vénale des actions de la S.A. Transports Y qu’aurait entraînée l’apport à cette dernière du fonds de commerce de transports le 27 février 1990, d’autre part, du caractère nécessairement précaire d’une indivision successorale grevée d’un usufruit, enfin, du risque d’une remise en cause, au terme de chaque période annuelle, par l’indivision, du contrat de location-gérance ; que, toutefois, il résulte de l’instruction que les actionnaires de la S.A. étaient également membres de l’indivision familiale propriétaire du fonds et que la S.A., propriétaire de l’ensemble des moyens physiques d’exploitation, exploitait le fonds depuis près de vingt ans ; que ces circonstances étaient de nature à atténuer tant le risque d’une dissolution de l’indivision que l’incidence sur la valeur des actions de la S.A. de l’apport du fonds de commerce ; que, par suite, M. Jacques Y n’établit pas que l’administration aurait sous-estimé ladite augmentation en la limitant à la valeur, non contestée, dudit apport ; que s’il soutient que l’administration ne pouvait se fonder sur des évènements postérieurs à la cession du 3 janvier 1990, qu’il ne pouvait prévoir à cette date, il ne fournit aucune indication sur les motifs de la revente à la S.A. Transports BRONDU ; que dans ces conditions, l’administration a pu, à bon droit, en raison du court laps de temps qui a séparé les deux transactions, et après avoir pris en compte les circonstances particulières de l’espèce, se fonder sur la seule comparaison des prix de cession appliqués les 3 janvier et 13 juin 1990 pour établir le redressement litigieux ; qu’ainsi, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve que le prix auquel les actions de la S.A. Transports Y ont été cédées par la S.A.R.L. Société d’investissement Y à M. Jacques Y a été minoré ; qu’il en résulte que la S.A.R.L. a délibérément consenti à M. Jac-ques Y une libéralité, représentant un avantage occulte constitutif d’une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l’article 111 c du code général des impôts ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a fait droit à la demande de M. Jacques Y tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 1990 à raison de l’imposition de revenus distribués ;

Sur les conclusions présentées par M. Jacques Y tendant au remboursement des frais d’expertise :

Considérant que les frais exposés par M. Jacques Y, pour la réalisation d’expertises, dont il est constant qu’elles n’ont pas été ordonnées par le juge, ne peuvent être regardés comme compris dans les dépens ; que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. Jacques Y la somme que celui-ci demande au titre des frais susmentionnés ;

DÉCIDE :

Article 1er :

Le jugement du Tribunal administratif de Nantes en date du 8 décembre 2000 est annulé.

Article 2 :

La cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle M. Jacques Y a été assujetti au titre de l’année 1990 à raison de l’imposition de revenus distribués est remise intégralement à sa charge.

Article 3 :

Les conclusions de M. Jacques Y tendant à la condamnation de l’Etat à lui rembourser ses frais d’expertise sont rejetées.

Article 4 :

Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et à M. Jacques Y.

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