Cour Administrative d’Appel de Nantes, 1ère Chambre , 30/12/2009, 09NT00121, Inédit au recueil Lebon

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Cour Administrative d’Appel de Nantes, 1ère Chambre , 30/12/2009, 09NT00121, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2009, présentée pour M. et Mme Patrick X, demeurant …, par Me Prigent, avocat au barreau de Caen ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 07-1136 du 13 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1999 et 2000, des contributions sociales correspondantes, et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 14 décembre 2009 :

– le rapport de Mlle Wunderlich, premier conseiller ;

– et les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;

Considérant qu’à l’issue de la vérification de comptabilité de la société Abgor Search, qui exerce une activité de recrutement de personnel qualifié pour les entreprises, dont M. et Mme X sont respectivement associé salarié et dirigeant, l’administration a exclu des charges déductibles de ladite société au titre des années 1999 et 2000 les sommes de 240 234 francs (36 623,44 euros) et 237 996 francs (36 282,26 euros) remboursées à M. X à raison de l’utilisation de son véhicule personnel pour des déplacements professionnels, résultant de l’application d’un tarif kilométrique excédant celui du barème publié annuellement par l’administration ; que ces sommes ont été regardées comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. et Mme X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c. de l’article 111 du code général des impôts ; qu’ont en outre été réintégrés dans les traitements et salaires imposables du contribuable des remboursements de frais d’hôtel, restaurant, et autres en application de l’article 80 ter du même code ;

Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ; qu’aux termes de l’article 111 du même code : Sont notamment considérés comme revenus distribués : (…) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (…) ; qu’aux termes de l’article 79 dudit code : Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l’impôt sur le revenu. ; qu’aux termes de l’article 81 : Sont affranchis de l’impôt : 1° Les allocations destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l’emploi et effectivement utilisés conformément à leur objet. (…) ; et, enfin, qu’aux termes de l’article 80 ter : a) Les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais versés aux dirigeants de sociétés sont, quel que soit leur objet, soumis à l’impôt sur le revenu. b) Ces dispositions sont applicables : (…) 4° Dans toute entreprise : à toute personne occupant un emploi salarié dont la rémunération totale excède la plus faible des rémunérations allouées aux dirigeants de cette entreprise. (…) ;

Considérant, en premier lieu, qu’il est constant que les frais kilométriques de déplacements remboursés à M. X par la société Abgor Search, calculés en appliquant un tarif de 3,99 francs au nombre de kilomètres parcourus à titre professionnel par l’intéressé avec son véhicule personnel, ont été comptabilisés dans les écritures de cette dernière sous le libellé explicite de remboursement de frais avec indication du bénéficiaire ; que le service n’a par ailleurs pas remis en cause la réalité de ces frais pour la fraction des remboursements correspondant, pour chacune des années en litige, à l’application du tarif du barème kilométrique publié par l’administration (respectivement 2,479 francs et 2,529 francs pour un véhicule de 10 cv ayant effectué plus de 20 000 km dans l’année) ; que le remboursement à M. X du surplus des frais en litige ne pouvait dès lors être regardé comme constitutif d’une rémunération ou d’un avantage occulte au sens du c. de l’article 111 précité du code général des impôts, quand bien même la société Abgor Search n’aurait pas fourni le relevé détaillé de ses frais généraux à l’appui de la déclaration de ses résultats des exercices concernés comme l’y obligeaient les dispositions de l’article 54 quater du même code ;

Considérant que la substitution de base légale sollicitée par le ministre en vue de maintenir la taxation des sommes litigieuses entre les mains de M. et Mme X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en tant que revenus distribués sur le fondement des dispositions précitées du 1. de l’article 109 du code général des impôts ne peut être admise dès lors qu’il n’est pas soutenu que la prise en charge par la société Abgor Search de la fraction des dépenses engagées par son associé salarié excédant le montant résultant de l’application du tarif kilométrique du barème publié annuellement par l’administration aurait eu pour effet de porter la rémunération salariale à un montant excessif non déductible du bénéfice imposable ;

Mais considérant que le ministre est fondé à soutenir que lesdites sommes constituent un supplément de rémunération imposable dans la catégorie des traitements et salaires dans la mesure où les contribuables ne justifient pas, en se bornant à faire état du très grand nombre de kilomètres parcourus par M. X, de frais plus élevés que ceux que le prix de revient kilométrique du barème administratif, qui prend en compte la dépréciation du véhicule, plafonnée compte tenu du montant maximum de l’amortissement des voitures particulières, permet d’évaluer ; que M. et Mme X, auxquels les redressements litigieux ont été notifiés selon la procédure contradictoire, n’étant privés d’aucune garantie par la demande subsidiaire de substitution de base légale du ministre, il y a lieu d’y faire droit ; que M. et Mme X sont toutefois fondés à demander, dans ces conditions, la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, du prélèvement social de 2 % et de sa contribution additionnelle, dont le champ d’application est limité, en application des articles 1600-0 C et suivants du code général des impôts, aux revenus du patrimoine et aux produits de placements ;

Considérant, en second lieu, qu’il résulte de l’instruction que la société Abgor Search a également remboursé à M. X des frais d’hôtel, restaurant, et consommations diverses, pour un montant total de 75 927,10 francs en 1999 et 79 935 francs en 2000, récapitulés sur des états détaillés produits par le contribuable mais non assortis des factures ou tickets de caisse correspondants pour la totalité d’entre eux ; que le service a soumis à l’impôt sur le revenu entre les mains de M. X, dont il n’est pas contesté qu’il entre dans les prévisions du 4° de l’article 80 ter du code général des impôts, les remboursements non justifiés pour leur montant réel sur le fondement des dispositions précitées dudit article ; que les requérants soutiennent que M. X a bénéficié, s’agissant des dépenses engagées par lui au cours de déplacements professionnels dont la réalité n’a pas été contestée par l’administration, sans qu’il dispose d’une facture, de remboursements calculés par référence à un barème journalier sur une base de 184 francs pour les frais d’hôtel et de restaurant et de 100 francs pour les autres frais ; que le remboursement d’un tel tarif forfaitaire à la nuitée et au repas, dont il n’est pas établi qu’il ait été déterminé en fonction des frais réellement exposés, présente en l’espèce un caractère forfaitaire au sens et pour l’application des dispositions susrappelées de l’article 80 ter ; que c’est par suite à bon droit que le service a réintégré les sommes litigieuses dans les revenus imposables de M. et Mme X ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme X sont seulement fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande en totalité ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l’essentiel, la somme que M. et Mme X demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme X sont déchargés des compléments de contributions sociales au titre des années 1999 et 2000 mis en recouvrement le 30 avril 2005 et établis à raison de l’imposition d’une partie des remboursements de frais kilométriques.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Caen du 13 novembre 2008 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Patrick X et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat.

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N° 09NT00121 2

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