Cour administrative d’appel de Nantes, 1e chambre, du 8 décembre 1993, 92NT00256, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Nantes, 1e chambre, du 8 décembre 1993, 92NT00256, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 avril 1992, présentée pour M. X…, demeurant … (49110) Saint-Pierre Montlimart, par la S.C.P. Demaille, Kerjean, Maze, Tourault, Ollivier, avocat à Angers ;

M. X… demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 30 janvier 1992 par lequel le Tribunal administratif de Nantes ne lui a accordé qu’une décharge partielle du complément d’impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l’année 1985 dans les rôles de la commune de Saint-Pierre Montlimart ;

2°) de lui accorder la décharge de l’imposition restant en litige ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts ;

VU le livre des procédures fiscales ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience,

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 10 novembre 1993 :

– le rapport de M. AUBERT, conseiller,

– les observations de Me Maze, avocat de M. Marcel X…,

– et les conclusions de M. ISAIA, commissaire du gouvernement,

Considérant qu’aux termes de l’article 151 septiès du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : « Les plus-values réalisées dans le cadre d’une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n’excèdent pas la limite du forfait ou de l’évaluation administrative sont exonérées, à condition que l’activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, et que le bien n’entre pas dans le champ d’application de l’article 691 … » ; qu’aux termes de l’article L.64 du livre des procédures fiscales alors en vigueur : « Ne peuvent être opposés à l’administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d’un contrat ou d’une convention à l’aide de clauses … qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus … L’administration est en droit de restituer son véritable caractère à l’opération litigieuse. Si elle s’est abstenue de prendre l’avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit ou ne s’est pas rangée à l’avis de ce comité, il lui appartient d’apporter la preuve du bien-fondé du redressement » ; que lorsque l’administration use des pouvoirs qu’elle tient de ce texte dans les conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle doit, pour pouvoir écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, établir que ces actes ont un caractère fictif ou, à défaut, qu’ils n’ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;

Considérant que, depuis 1971, date de sa création, la société M.G. Epuration a pris, d’une part, en location gérance le fonds de commerce exploité jusqu’alors par M. X…, actionnaire principal et président-directeur général de ladite société et, d’autre part, en location, le terrain appartenant également à l’intéressé et sur lequel ladite société a édifié les bâtiments nécessaires à son activité d’entreprise d’assainissement ; que, le 26 janvier 1984, M. X… a échangé ce terrain, situé à Saint-Pierre Montlimart (Maine-et-Loire) contre un terrain appartenant à la société M.G. Epuration et situé à Périgny (Charente-Maritime) ; que, le 1er décembre 1985, il a cédé à la même société le fonds de commerce, réalisant à l’occasion de cette vente une plus-value d’un montant non contesté de 1 371 736 F ; que, pour s’opposer à l’exonération dont a bénéficié cette plus-value sur le fondement des dispositions précitées de l’article 151 septiès du code général des impôts, l’administration a mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par les dispositions également précitées de l’article L.64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, jusqu’à l’exercice clos le 31 décembre 1983, M. X… était, à raison de la redevance annuelle versée par la société M.G. Epuration, d’un montant supérieur à 150 000 F pour les locations susmentionnées, soumis au régime réel d’imposition au titre des recettes dégagées par cette activité de loueur de fonds ; qu’il est constant que ce n’est que par l’effet de l’échange intervenu le 26 janvier 1984 et de ce que les loyers ont cessé d’être indexés sur le coût de la construction, à compter de 1983, que la redevance versée par la société M.G. Epuration a été réduite à un montant inférieur à 150 000 F, permettant ainsi à M. X… de déclarer des recettes d’un montant n’excédant pas la limite du forfait et, partant, de bénéficier de l’exonération prévue à l’article 151 septiès du code général des impôts, lors de la réalisation de la plus-value susmentionnée ; que si M. X… a envisagé de cesser ses activités professionnelles, dès 1983, pour raisons de santé, aucune nécessité propre à son projet de cession de ses titres dans la société M.G. Epuration ou du fonds de commerce ne justifiait qu’il procède au préalable à la vente au profit de celle-ci du terrain de Saint-Pierre Montlimart ; que cette cession d’un terrain qui, dès lors que les constructions qu’il supportait ont été édifiées avec l’accord de M. X…, était susceptible de bénéficier des garanties résultant du décret du 30 septembre 1953 sur les baux commerciaux, ne présentait pas un intérêt particulier pour la société M.G. Epuration en l’absence d’acquisition simultanée par celle-ci du fonds de commerce ; que l’opération d’échange des immeubles ne peut être regardée comme justifiée par l’intérêt patrimonial de M. X… qui se borne à faire état des seuls revenus bruts procurés par le terrain de Périgny et ne peut, dès lors, utilement soutenir, en s’abstenant ainsi de prendre en compte les charges de propriété afférentes à ce terrain, que les revenus de celui-ci seraient sensiblement supérieurs à ceux du terrain de Saint-Pierre Montlimart ; que le délai de 20 mois séparant la cession de ce terrain et celle du fonds de commerce ne saurait trouver son explication dans les difficultés qu’aurait alors rencontrées le requérant à régler les droits de mutation, dès lors que ceux-ci auraient été supportés par la société M.G. Epuration ; qu’en l’état de ces constatations, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que l’opération susmentionnée avait pour seul objet de permettre au requérant d’échapper à l’imposition de la plus-value réalisée lors de la vente du fonds de commerce, en réduisant le montant des recettes de son activité de loueur de fonds à un niveau inférieur à la limite du forfait ; que c’est, dès lors, à bon droit qu’a été mise en oeuvre la procédure prévue à l’article L.64 du livre des procédures fiscales, comme l’a précisé régulièrement la notification de redressements adressée le 20 février 1986 ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. X… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges, qui n’étaient pas tenus de répondre à l’ensemble des arguments invoqués par l’intéressé à l’appui de ses moyens, ont rejeté sa demande ;

Article 1er : La requête de M. X… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X… et au ministre du budget.


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