Cour administrative d’appel de Nantes, 1e chambre, du 27 mars 2002, 98NT02309, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Nantes, 1e chambre, du 27 mars 2002, 98NT02309, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 septembre 1998, présentée pour M. Henri-Jean X…, demeurant …, par Me Y…, avocat au barreau de Nantes ;

M. X… demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 951008 du Tribunal administratif de Rennes en date du 6 novembre 1997 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d’impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre des années 1987 à 1990 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu’en appel ; Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 27 février 2002 :

-le rapport de M. ISAÏA, premier conseiller,

-et les conclusions de Mme MAGNIER, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la demande en ce qui concerne l’année 1987 :

Considérant qu’aux termes de l’article R.196-1 du livre des procédures fiscales : APour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l’administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle … de la mise en recouvrement du rôle … ;

Considérant qu’aux termes de l’article R.196-3 du même livre : ADans le cas où un contribuable fait l’objet d’une procédure de reprise ou de redressement de la part de l’administration des impôts, il dispose d’un délai égal à celui de l’administration pour présenter ses propres réclamations et qu’aux termes de l’article L.169 dudit livre : A Pour l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l’administration des impôts s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due … ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions qu’un contribuable qui a fait l’objet d’une procédure de reprise ou de redressement dispose, pour présenter ses propres réclamations, d’un délai égal à celui fixé à l’administration pour établir l’impôt, lequel expire le 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle les redressements ont été notifiés ;

Considérant, d’une part, que le complément d’impôt sur le revenu auquel M. Henri-Jean X… a été assujetti au titre de l’année 1987 a été mis en recouvrement le 29 novembre 1991 ; que la réclamation du contribuable ayant été reçue par l’administration le 15 avril 1994, elle était tardive au regard des dispositions précitées de l’article R.196-1 du livre des procédures fiscales ; que, d’autre part, la notification des redressements envisagés en ce qui concerne l’année 1987 a été faite le 20 décembre 1990 ; qu’il s’ensuit que le délai de prescription de l’action de l’administration interrompu par la notification de redressement susindiquée par application de l’article L.189 alinéa 1 du livre des procédures fiscales, et, corrélativement, le délai dont M. Henri-Jean X… disposait, en vertu des dispositions susrappelées, pour présenter ses réclamations, expiraient le 31 décembre 1993 ; que, contrairement à ce que soutient l’intéressé, la mise en recouvrement de l’imposition dont il s’agit n’a pas eu pour effet d’ouvrir à nouveau le délai particulier fixé à l’article R.196-3 précité ; que, par suite, la réclamation du requérant était également tardive au regard des dispositions dudit article ; que, dès lors, c’est à bon droit que le tribunal a rejeté les conclusions de sa demande en tant qu’elles concernaient l’année 1987, au motif qu’elles étaient irrecevables ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

Considérant qu’aux termes de l’article L.57 du livre des procédures fiscales : AL’administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation … ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la notification de redressement en date du 5 mars 1991, laquelle concerne les années 1988, 1989 et 1990 restant en litige, mentionne la nature des rehaussements envisagés par le service, les motifs ayant fondés chacun d’eux, la catégorie de revenus auxquels ils s’appliquent, leur montant et les modalités selon lesquelles ils ont été calculés ainsi que l’année d’imposition ; que le vérificateur a aussi indiqué que les sommes correspondant aux dépenses qui ont été réintégrées dans les résultats de la S.A. LENEVEU en l’absence de justificatifs permettant de les admettre en totalité en charges, constituent des revenus distribués imposables à l’impôt sur le revenu entre les mains de l’intéressé en application des dispositions des articles 109 à 111 du code général des impôts ; que, dans ces conditions, nonobstant la circonstance que le vérificateur n’a pas justifié avec précision les raisons pour lesquelles il retenait par mesure de bienveillance telle ou telle proportion de dépenses réintégrées, la notification de redressement litigieuse est suffisamment motivée pour permettre au contribuable de présenter ses observations ; que, par suite, le requérant n’est pas fondé à soutenir que la procédure d’imposition est entachée d’irrégularité ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

En ce qui concerne la plus-value imposable au titre de l’année 1988 ;

Considérant qu’aux termes de l’article 160 alors en vigueur du code général des impôts : AI. Lorsqu’un associé, actionnaire, commanditaire ou porteur de parts bénéficiaires cède pendant la durée de la société, tout ou partie de ses droits sociaux, l’excédent du prix de cession sur le prix d’acquisition … de ces droits est taxé exclusivement à l’impôt sur le revenu au taux de 16 % … L’imposition de la plus-value ainsi réalisée est subordonnée à la seule condition que les droits détenus directement ou indirectement dans les bénéfices sociaux par le cédant ou son conjoint, leurs ascendants ou leurs descendants, aient dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années … ; que, pour l’application de ces dispositions, la cession des actions d’une société anonyme doit être regardée comme réalisée à la date à laquelle s’opère entre les parties le transfert de propriété des titres et que les modalités de paiement du prix de la cession sont sans influence sur la date de réalisation de la cession elle-même ;

Considérant que M. Henri-Jean X…, qui a accepté le redressement ayant donné lieu à l’imposition de la plus-value de cession de titres établie au titre de l’année 1988, supporte la charge de prouver l’exagération de cette imposition ;

Considérant que le prix de 1 981 950 F correspondant à la cession consentie en 1988 par M. Henri-Jean X… des 3 039 actions qu’il détenait dans la S.A. LENEVEU a été inscrit à son compte courant d’associé dans les écritures de la société SOFIPER, cessionnaire des actions, et ce alors qu’il ne résulte pas de l’instruction et qu’il n’est d’ailleurs pas allégué par le requérant que la situation de trésorerie de cette société rendait tout prélèvement impossible entre la date d’inscription en compte et le 31 décembre 1988 ; que par cette inscription, la somme dont il s’agit doit être regardée comme ayant été mise à la disposition du cédant, sans que puisse y faire obstacle la circonstance qu’elle n’a jamais été retirée par M. Henri- Jean X… ; qu’en outre la circonstance que l’opération de cession n’a pas eu un caractère spéculatif est sans incidence ; que les avenants relatifs au protocole d’accord du 20 décembre 1991 ne concernent pas la cession d’actions intervenue en 1988 et ne peuvent, en tout état de cause, avoir d’influence sur la détermination de la plus-value litigieuse ; que, dès lors, M. Henri-Jean X… n’apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré de l’évaluation de l’administration ;

En ce qui concerne les revenus distribués au titre de 1988, 1989 et 1990 ;

Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : A1. Sont considérés comme des revenus distribués :

1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve dans le capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ;

Considérant que M. Henri-Jean X… demande la décharge des compléments d’impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1988, 1989 et 1990 et correspondant à des revenus distribués ; que s’il soutient que les frais de carburant, de téléphone personnel, de réparation de son propre véhicule ainsi que les frais de mission et de réception que la S.A. LENEVEU, dont il était associé, lui a remboursés ont réellement été engagés dans l’intérêt de l’entreprise, il n’apporte à l’appui de sa requête aucune pièce justificative de nature à établir la réalité de cette allégation, notamment en ce qui concerne l’utilisation pour les besoins de l’exploitation du véhicule Mercédès équipé au gaz et l’existence de relations commerciales avec des clients ou des fournisseurs à proximité de sa résidence personnelle ; que, par suite, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe dès lors que les redressements ont été refusés par le contribuable, de l’existence et du montant des revenus distribués à M. Henri-Jean X… par la S.A. LENEVEU ; qu’ainsi, c’est à bon droit qu’elle a imposé les sommes litigieuses dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions précitées de l’article 109-1 du code général des impôts ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Henri- Jean X… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de M. Henri-Jean X… tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Henri-Jean X… la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Article 1er : La requête de M. Henri-Jean X… est rejetée.

Article 2 :Le présent arrêt sera notifié à M. Henri-Jean X… et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.


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