Cour administrative d’appel de Nantes, 1e chambre, du 2 novembre 1999, 96NT01863, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Nantes, 1e chambre, du 2 novembre 1999, 96NT01863, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 27 août 1996, présenté par le ministre de l’économie et des finances ;

Le ministre de l’économie et des finances demande à la Cour :

1 ) de réformer le jugement n 93.398 – 93.399 en date du 14 mai 1996 par lequel le Tribunal administratif d’Orléans a réduit les bases imposables à l’impôt sur les sociétés de la SARL Sometaf au titre des exercices clos en 1989 et 1990 respectivement de la somme de 73 706 F et 67 851 F ;

2 ) de remettre à la charge de la SARL Sometaf les sommes déchargées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 5 octobre 1999 :

– le rapport de Mme MAGNIER, premier conseiller,

– et les conclusions de M. GRANGE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le ministre chargé du budget ne fait appel du jugement susvisé qu’en tant qu’il a réduit du montant de certains amortissements les bases de l’impôt sur les sociétés dû par la société Sometaf au titre des exercices clos en 1989 et 1990 ; que, pour sa part, la société Sometaf fait appel incident de ce même jugement en tant qu’il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la réduction de la base de cet impôt sur les sociétés à hauteur de 162 885 F au titre de l’année 1989 et de 80 929 F au titre de l’année 1990 ;

Considérant qu’il ressort des dispositions de l’article 39 du code général des impôts, applicable en matière d’impôt sur les sociétés en vertu de l’article 209 du même code, que ne peuvent être déduits du bénéfice imposable d’un exercice que les amortissements qui ont été effectivement portés dans les écritures comptables de l’entreprise avant l’expiration du délai de déclaration des résultats de cet exercice ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la société Sometaf a respectivement déduit du résultat des exercices clos les 31 décembre 1989 et 1990 les sommes de 73 706 F et 67 851 F au titre des amortissements ; qu’il est constant que toutes les opérations de la société étaient retracées sur des cahiers d’écoliers non cotés ni paraphés et que les amortissements portés sur les déclarations de résultats sont issus de tableaux figurant sur de simples « feuilles volantes » ; que ces documents, qui ne sauraient tenir lieu de documents comptables, n’établissent pas la comptabilisation régulière de ces amortissements avant l’expiration du délai de déclaration des résultats de chacun des exercices en litige ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que c’est à tort que le tribunal administratif a considéré que la preuve de la réalité des amortissements litigieux était rapportée pour réduire d’autant la base de l’impôt sur les sociétés de la SARL Sometaf ;

Considérant toutefois qu’il appartient à la Cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par la société Sometaf tant devant le Tribunal administratif d’Orléans que devant la Cour ;

Considérant, en premier lieu, qu’en vertu des dispositions du livre des procédures fiscales, les opérations de vérification de comptabilité doivent se dérouler chez le contribuable ou au siège de l’entreprise, et qu’au nombre des garanties que les contribuables tiennent des dispositions des articles L.47 et L.52 de ce même livre, figure la possibilité d’avoir sur place un débat oral et contradictoire ; qu’il résulte de l’instruction que le vérificateur a rencontré, lors de sa première visite dans les locaux de l’entreprise, le gérant de celle-ci, M. Pierre-Henri X…, après que celui-ci lui ait du reste demandé d’en reporter la date ; que lors de cette visite, le gérant a contresigné un procès-verbal constatant le défaut de présentation des pièces comptables requises ; que cinq autres visites se sont déroulées au siège de l’entreprise ; qu’il n’est pas allégué par la société Sometaf que le vérificateur n’aurait pas averti le gérant de ses visites et qu’il est constant qu’il l’a informé de la date de la dernière réunion au cours de laquelle il devait exposer les redressements qu’il envisageait ; que si M. Pierre-Henri X… n’a pas assisté à ces réunions, il résulte de l’instruction que son père, associé majoritaire et directeur technique, et son conseil étaient présents ; que, dans ces circonstances, la société Sometaf n’établit pas que le vérificateur se serait refusé, au cours de la vérification de comptabilité, à un véritable débat oral et contradictoire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 212 du code général des impôts : « Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues à l’article 39-1-3 . Toutefois : 1 ) la déduction n’est admise en ce qui concerne les associés ou actionnaires possédant en droit ou en fait la direction de l’entreprise … que dans la mesure où ces sommes n’excèdent pas, pour l’ensemble desdits associés ou actionnaires, une fois et demie le montant du capital social » ;

Considérant qu’à la date de la création de la société Sometaf, M. Henri X… possédait 85 % des parts de la société alors que son fils, M. Pierre-Henri X…, gérant statutaire, n’en possédait que 5 % ; que sa rémunération était supérieure à celle du gérant ; qu’il disposait d’une procuration bancaire et postale et avait le pouvoir d’engager la société à l’égard de l’administration fiscale et des tiers ; qu’il se présentait enfin, ainsi que cela ressort notamment d’un courrier produit par le ministre, comme le responsable exerçant un contrôle effectif et constant sur la marche de l’entreprise ; qu’ainsi, l’administration doit être regardée comme établissant que M. Henri X… était gérant de fait de la société Sometaf ; que l’administration a pu, par suite, à bon droit, en application des dispositions précitées de l’article 212-1 du code général des impôts, limiter la déduction des intérêts afférents aux sommes laissées par M. Henri X… à la disposition de la société ;

Considérant, en troisième lieu, que l’administration a réintégré dans la base imposable de l’exercice clos en 1989 une somme de 50 259 F correspondant à une insuffisance de l’actif du bilan de clôture de l’exercice clos en 1988, dernier exercice prescrit ; que pour obtenir la réduction de la base de l’impôt sur les sociétés ainsi redressée, la société Sometaf fait état d’erreurs comptables commises au cours des années antérieures et qu’elle a corrigées dans les comptes du bilan de clôture de l’exercice clos en 1988 ; que, toutefois, et alors même qu’il n’est pas contesté par l’administration que cette insuffisance d’actif n’était que le résultat d’une simple erreur d’intitulé de compte, ces corrections ne pouvaient intervenir que dans le bilan de clôture du premier exercice non prescrit, soit l’exercice clos le 31 décembre 1989, entraînant de ce fait une augmentation corrélative de l’actif net et, par suite, de la base imposable de la société au titre de ce même exercice ; que ce moyen doit dès lors être écarté ;

Considérant, enfin, qu’il est constant que la société Sometaf a procédé au cours de l’exercice clos en 1989 à l’amortissement d’un bien qu’elle avait cédé ; que si elle soutient que cette erreur doit être compensée par d’autres écritures erronées, sa demande doit être rejetée dès lors qu’elle ne produit que des documents sans valeur probante à l’appui de ses allégations ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, d’une part, que le ministre chargé du budget est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d’Orléans a réduit la base de l’impôt sur les sociétés dû par la société Sometaf de 73 706 F au titre de l’exercice clos le 31 décembre 1989 et de 67 851 F au titre de l’exercice clos le 31 décembre 1990, et, d’autre part, que la société Sometaf n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par ce même jugement, le Tribunal administratif d’Orléans a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur les conclusions de la société Sometaf tendant à l’application des dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel :

Considérant que les dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société Sometaf la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Article 1er : Le bénéfice de la société Sometaf sera calculé, pour l’assiette de l’impôt sur les sociétés, en ajoutant au montant des résultats la somme de soixante treize mille sept cent six francs (73 706 F) au titre de l’exercice clos le 31 décembre 1989 et la somme de soixante sept mille huit cent cinquante et un francs (67 851 F) au titre de l’exercice clos le 31 décembre 1990.

Article 2 : L’impôt sur les sociétés dû par la société Sometaf au titre des années 1989 et 1990 calculé conformément aux bases définies à l’article 1er est remis à sa charge.

Article 3 : Le jugement en date du 14 mai 1996 du Tribunal administratif d’Orléans est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions de la société Sometaf sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et à la société Sometaf.


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