Cour Administrative d’Appel de Nancy, 2ème chambre – formation à 3, 25/10/2007, 04NC00722, Inédit au recueil Lebon

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Cour Administrative d’Appel de Nancy, 2ème chambre – formation à 3, 25/10/2007, 04NC00722, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 3 août 2004, complétée par des mémoires enregistrés le 2 mai 2005 et le 28 septembre 2007, présentée pour la société G.H. MUMM et Cie, dont le siège est 29 rue du Champ de Mars BP 2712 à Reims (51053), représentée par son président-directeur général, conjointement avec la société PERRIER-JOUËT, dont le siège est 28 avenue de Champagne BP 31 à Epernay, représentée par son président-directeur général, par Me Rivière, de la société d’avocats Landwell et associés, puis par Me Schiele ; les sociétés G.H. MUMM et Cie et PERRIER-JOUËT demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 00-617, en date du 25 mai 2004, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés et contributions additionnelles, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles à été assujettie la SA G.H. MUMM et Cie en sa qualité de tête d’un groupe fiscalement intégré, au titre de l’exercice clos en 1992 de la société PERRIER-JOUËT, à la condamnation de l’Etat à lui verser des intérêts moratoires au taux légal sur la décharge ainsi accordée et 15 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 €, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société G.H. MUMM et Cie et la société PERRIER-JOUËT soutiennent que :

– la société PERRIER-JOUËT a respecté la procédure d’imputation fiscale des distributions codifiée à l’article 46 quater OD de l’annexe III au code général des impôts et n’a enfreint aucune disposition légale ou réglementaire en prélevant en totalité la fraction de distribution revenant aux actionnaires minoritaires sur les résultats du seul exercice 1987 ;

– l’administration ne peut invoquer à cet égard son instruction référencée sous le n° 4 J-3-92 du 4 septembre 1992 qui est illégale et en tout état de cause postérieure à la décision de distribution en litige ;

– le système de l’avoir fiscal et du précompte a été jugé illégal au regard du droit communautaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2004, présenté par le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ; le ministre demande le rejet de la requête, par le motif qu’aucun des moyens invoqués par la société G.H. MUMM et Cie et la société PERRIER-JOUËT n’est fondé ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 4 octobre 2007 :

– le rapport de M. Montsec, président,

– et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur l’autre moyen de la requête :

Considérant qu’aux termes de l’article 223 sexies du code général des impôts, alors applicable : « 1. Sous réserve des dispositions des articles 209 quinquies et 223 H, lorsque les produits distribués par une société sont prélevés sur des sommes à raison desquelles elle n’a pas été soumise à l’impôt sur les sociétés au taux normal prévu au deuxième alinéa du I de l’article 219, cette société est tenue d’acquitter un précompte égal au montant du crédit prévu à l’article 158 bis et attaché à ces distributions. Ce précompte est dû quels que soient les bénéficiaires des distributions. / Il est également exigible lorsque les produits distribués sont prélevés sur les résultats d’exercices clos depuis plus de cinq ans (…). / 2. Un décret fixe les modalités d’application du présent article. Il précise notamment les postes de bilan sur lesquels les répartitions doivent être imputées ainsi que l’ordre de cette imputation (…) » ; qu’aux termes de l’article 223 H du même code : « Les dividendes distribués à compter du 1er janvier 1992 par une société du groupe à une autre société du groupe ne donnent pas lieu au précompte prévu à l’article 223 sexies et n’ouvrent pas droit à l’avoir fiscal prévu à l’article 158 bis lorsqu’ils sont prélevés sur des résultats ou des plus-values nettes à long terme réalisés pendant la période au cours de laquelle la société distributrice est membre du groupe (…) » ; qu’aux termes de l’article 46 quater OD de l’annexe III au même code : « I. Les distributions qui n’ouvrent pas droit à l’avoir fiscal prévu à l’article 158 bis du code général des impôts sont prélevées, par priorité, sur les bénéfices soumis à l’impôt sur les sociétés ou exonérés de cet impôt au titre du dernier exercice clos et, en cas d’insuffisance de ces bénéfices, sur ceux des exercices antérieurs les plus récents. / II. Les distributions qui ouvrent droit à l’avoir fiscal sont prélevées ensuite dans l’ordre suivant : / D’abord, sur les bénéfices disponibles qui ont été soumis à l’impôt sur les sociétés au taux normal prévu au deuxième alinéa du I de l’article 219 du code déjà cité au titre du dernier exercice clos ; / Puis, sur les bénéfices disponibles qui ont été imposés à ce même taux au titre d’exercices antérieurs clos depuis cinq ans au plus ; / Enfin, sur tous autres bénéfices ou réserves disponibles (…) » ;

Considérant que, par une décision en date du 23 avril 1992, l’assemblée générale de la société PERRIER-JOUËT, ayant adhéré en 1988 au groupe fiscal intégré à la tête duquel est placée la société G.H. MUMM et Cie, a mis en distribution une somme de 203 000 000 F, dont une fraction, d’un montant de 2 249 675 F, revenant aux actionnaires minoritaires et leur ouvrant droit à l’avoir fiscal, a été par priorité imputée sur le bénéfice de l’exercice clos en 1987, qui était le dernier avant l’intégration de la société dans le groupe fiscal ; que, le bénéfice de cet exercice ayant été soumis à l’impôt sur les sociétés au taux normal et le reste de la distribution ayant bénéficié aux autres sociétés du groupe, la société PERRIER-JOUËT avait ainsi obtenu que la distribution soit faite en franchise de précompte mobilier ;

Considérant qu’il est constant que la société distributrice a respecté les conditions d’imputation fiscale de la distribution rappelées ci-dessus, telles que fixées à l’article 46 quater OD de l’annexe III au code général des impôts ; que les dispositions précitées de l’article 223 sexies du code général des impôts et en particulier la mention qu’excepté le cas prévu à l’article 223 H qui concerne les distributions à une autre société du groupe fiscal, le précompte mobilier est dû quels que soient les bénéficiaires de la distribution, ne peuvent être regardées comme s’opposant en elles-mêmes à ce que les distributions au bénéfice d’une catégorie d’actionnaires soit imputées par priorité et donc concentrées sur les bénéfices d’un même exercice ; que, dans ces conditions, l’administration ne pouvait légalement reprocher à la société d’avoir, pour l’exercice clos en 1987, imputé en priorité les dividendes versés aux actionnaires minoritaires non-membres du groupe sur les bénéfices distribuables en franchise de précompte ; qu’il suit de là qu’en soumettant pour ce motif la société PERRIER-JOUËT au précompte mobilier au prorata de la part des distributions en cause revenant à des actionnaires minoritaires, le ministre de l’économie des finances et de l’industrie a fait une inexacte application des dispositions des articles 223 sexies et 223 H du code général des impôts et de l’article 46 quater OD de l’annexe III audit code ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société G.H. MUMM et Cie et la société PERRIER-JOUËT sont fondées à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés et contributions additionnelles, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles à été assujettie la SA G.H. MUMM et Cie en sa qualité de tête d’intégration du groupe, au titre de l’exercice clos en 1992 de la société PERRIER-JOUËT, à raison du précompte mobilier mis à la charge de cette dernière ;

Sur les conclusions de la société G.H. MUMM et Cie et de la société PERRIER-JOUËT tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat une somme globale de 1 000 euros, à payer aux sociétés G.H. MUMM et Cie et PERRIER-JOUËT, à raison des frais exposés par elles dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 25 mai 2004 est annulé.

Article 2 : La société G.H. MUMM et Cie est déchargée des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés et contributions additionnelles, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles elle à été assujettie en sa qualité de tête d’un groupe fiscalement intégré, au titre de l’exercice clos en 1992 de la société PERRIER-JOUËT, à raison du précompte mobilier mis à la charge de cette dernière.

Article 3 : L’Etat versera à la société G.H. MUMM et à la société PERRIER-JOUËT une somme globale de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société G.H. MUMM et Cie, à la société PERRIER-JOUËT et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N° 04NC00722


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