Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2010, présentée pour M. Sisto , demeurant …, par la SCP Le Sergent – Roumier – Faure ;
M. demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0802048 du 30 septembre 2010 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu’il a rejeté sa demande tendant à décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et contributions sociales mises à sa charge à raison de la réintégration, dans ses revenus de l’année 2004, d’une somme de 10 560 euros, correspondant à sa quote-part du bénéfice de 13 200 euros regardé comme distribué par la SARL CLV, ainsi que sa demande tendant à la décharge des majorations pour manquement délibéré correspondant aux distributions en cause ;
2°) de prononcer la décharge des suppléments d’impositions en cause ;
Il soutient que :
– la somme de 13 200 euros considérée comme un revenu distribué et réintégrée pour partie dans son revenu constituait en réalité un prêt de la SARL dont il est le gérant à une SCI dont il détient 80% du capital ;
– l’administration n’établit pas son intention délibérée d’éluder l’impôt ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat ;
Le ministre soutient que :
– les conclusions de l’appelant sont irrecevables en tant qu’elles concernent les contributions sociales qui n’étaient pas en litige devant le tribunal administratif ;
– le versement d’une somme par la SARL Champagne Lorraine Viandes à la SCI La Vignotte constitue une distribution de bénéfices dont l’appelant, associé majoritaire de la SCI, doit être regardé comme ayant bénéficié, dès lors qu’il n’établit pas que la somme en question constituerait un prêt consenti par la première société à la seconde ;
– en sa qualité d’associé et de gérant des deux sociétés, l’appelant a intentionnellement éludé l’impôt correspondant au versement, par la SARL Champagne Lorraine Viandes, à la SCI La Vignotte, de la somme de 13 200 euros ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2012, présenté pour M. , qui conclut aux mêmes fins et soutient en outre que :
– l’administration a reconnu l’affectation effective de la somme de 13 200 euros à un compte de réserve ;
Vu la décision du directeur de contrôle fiscal Est du 24 juin 2008 rejetant la réclamation du 5 mars 2008 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 27 septembre 2012 :
– le rapport de Mme Dulmet, premier conseiller,
– et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;
Sur la recevabilité :
1- Considérant que si l’administration fiscale soutient que M. n’est pas recevable à contester pour la première fois en appel les contributions sociales qui n’étaient pas contestées en première instance, il ressort de l’examen de sa demande au tribunal administratif qu’il avait demandé au juge de prendre en compte sa réclamation, laquelle incluait les cotisations sociales, et de le décharger » des surplus d’impositions mises à sa charges au titre des revenus de 2004 « ; que, ce faisant, le requérant ne peut être regardé comme ayant exclu les cotisations sociales de sa contestation ; qu’ainsi l’exception d’irrecevabilité susmentionnée doit être écartée ;
Sur le bien fondé des impositions:
2 – Considérant qu’il résulte de l’instruction que la SARL CLV, société spécialisée dans le travail à façon de la viande, dont M. est le gérant et actionnaire à hauteur de 47% du capital, a versé par chèque, le 9 mai 2004, la somme de 13 200 euros (et non pas 15 000 euros) à la SCI La Vignotte dont M. est également le gérant et actionnaire à hauteur de 80% ; que l’administration a estimé que cette somme, versée sans contrepartie ni justificatif à la SCI La Vignotte, constituait une distribution occulte au sens de l’article 111 c) du Code général des impôts, et en a réintégré le montant dans le revenu imposable de M. , dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à proportion de ses droits dans la SCI La Vignotte, soit à hauteur de 10 560 euros ;
3- Considérant qu’aux termes de l’article 111 du code général des impôts : » Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d’avances, de prêts ou d’acomptes. / (…) /c. Les rémunérations et avantages occultes (…) » ;
4- Considérant qu’il résulte des dispositions précitées que l’administration ne peut en principe regarder l’existence d’un solde débiteur du compte courant ouvert dans les écritures d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés au nom d’une société civile immobilière, dont le contribuable est également associé, comme constituant pour ce dernier des rémunérations ou avantages occultes de nature à établir que le montant de ce solde a constitué pour l’intéressé un revenu distribué au sens du c de l’article 111 du code général des impôts qu’à la condition d’établir que la société civile immobilière en cause n’a fait que s’interposer entre la société soumise à l’impôt sur les sociétés et le contribuable, bénéficiaire réel de la distribution ; qu’en l’espèce, en se bornant à constater que M. n’avait pas justifié de l’existence d’un prêt entre la SARL CLV et la SCI La Vignotte, alors qu’il était à la fois associé et gérant des deux entités, l’administration fiscale n’a pas démontré que M. était le bénéficiaire réel des sommes dont il s’agit; que, par suite, M. est fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu qui lui ont été réclamées au titre de la distribution en cause, sur la base de 10 560 euros, ainsi que des contributions sociales correspondantes et des majorations pour manquement délibéré y afférentes ;
5- Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités, du redressement d’impôt sur le revenu et contributions sociales résultant de la réintégration de la somme de 10 560 euros dans ses revenus imposables de l’année 2004 ;
D É C I D E :
Article 1er : M. est déchargé, au titre de l’année 2004, des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu et contributions sociales, en droit et pénalités, qui lui ont été réclamées à raison de la réintégration dans son revenu imposable de la somme de 10 560 euros.
Article 2 : Le jugement n° 0802048 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 30 septembre 2010 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Sisto et au ministre de l’économie, des finances et du commerce extérieur.
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10NC01864