Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 septembre 1994 sous le n 94NC01253, présentée par M. X… demeurant à Le Mesnil-Théribus, Chaumont-en-Vexin (Oise) ;
M. X… demande à la Cour :
1 – d’annuler le jugement n 89-1484 en date du 31 mai 1994 par lequel le tribunal administratif d’Amiens a rejeté ses demandes en décharge des compléments d’impôt sur le revenu et des pénalités afférentes auxquels il a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981 ;
2 – de prononcer les décharges demandées ;
3 – de condamner l’Etat à lui payer 5 000 F sur le fondement de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 30 mars 1999 :
– le rapport de M. PAITRE, Président,
– et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. X… fait appel d’un jugement en date du 31 mai 1994 par lequel le tribunal administratif d’Amiens a rejeté ses demandes en décharge des compléments d’impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981, par suite de la réintégration, dans ses bases d’imposition, d’une part, de diverses dépenses prises en charge par la S.A. Central nord restauration, dont M. X… était le président-directeur général, d’autre part, du montant des intérêts que la S.A. Central nord restauration a renoncé à percevoir sur le solde débiteur, en 1979 et 1981, du compte courant de M. X…, l’administration regardant ces dépenses et cette non-perception comme autant d’avantages accordés à M. X…, ayant le caractère de revenus distribués au sens des dispositions des articles 109 et 111 du code du code général des impôts ;
Sur la régularité de la procédure d’imposition :
Considérant que la notification de redressement du 7 octobre 1983 indique, dans la rubrique « I – redressements consécutifs à la vérification de comptabilité de la S.A. Central nord restauration », que « différentes dépenses personnelles … concernant M. X… ont été réintégrées dans les résultats de la société. Ces dépenses constituent une distribution de bénéfices imposables à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sans avoir fiscal », et mentionne, par année et par fournisseur, les montants cumulés des factures d’alimentation des différents fournisseurs dont il est constant que la liste avait été préalablement remise au contribuable ; qu’une telle motivation, suffisamment explicite quant à la nature et au détail du montant du redressement envisagé pour permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation, apparaît conforme aux prescriptions de l’article L.57 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des compléments d’imposition :
Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : « Sont considérés comme revenus distribués : … 2 Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices … » ; qu’aux termes de l’article 111 du même code : « sont notamment considérés comme revenus distribués : … c) les rémunérations et avantages occultes … » ;
Sur les chefs de redressement afférents à des dépenses prises en charge par la S.A. Central nord restauration :
En ce qui concerne l’application de la loi fiscale :
Considérant, en premier lieu, que si, comme le soutient M. X…, 297 kilos de noix d’entrecôte congelée ont été acquis le 14 septembre 1978 dans le magasin « Métro » de Gennevilliers pour les besoins de l’exploitation de la S.A. Central nord restauration, il ne résulte pas de l’instruction que le montant, s’élevant à 8 742 F toute taxe comprise, de cette acquisition, a été regardé comme un revenu distribué à M. X… ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. X… soutient que la caméra vidéo et les cassettes dont le coût d’acquisition a été pris en charge par la S.A. Central nord restauration en 1979 ont été utilisées pour des actions de formation au sein de l’entreprise, à la disposition de laquelle il aurait mis, pour ces mêmes actions, un téléviseur et un magnétoscope qu’il a acquis en même temps que la caméra, il n’assortit ces allégations d’aucune justification ; que ni les factures de magasins d’alimentation établies au nom de certains clients de la S.A. Central nord restauration, ni les attestations de clients ou d’employés de la société, rédigées en 1990 en termes généraux, ni la circonstance que des prélèvements de marchandises ont figuré comme avantages en nature sur les bulletins de salaire de M. X… durant l’ensemble de la période, ne sont de nature à établir que le surplus des factures de magasins d’alimentation en litige, relatives à des quantités achetées faibles, et comportant occasionnellement des denrées ne figurant pas dans les menus proposés par la société, se rapportaient à des achats faits dans le cadre de l’exploitation de celle-ci ; qu’enfin, aucune pièce du dossier n’établit que les frais de restaurant engagés certains samedis et dimanches de 1978 et 1980 avaient un caractère professionnel justifiant leur prise en charge par la S.A. Central nord restauration, que deux services de verres, un pichet et des objets en cuivre achetés en 1978 étaient destinés à être offerts en cadeau à des clients de la société, et qu’un radio-cassette et un poste de radio achetés en 1980 étaient destinés à être offerts en cadeau de fin d’année à des salariés ; que, dans ces conditions, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe dès lors qu’il n’est pas allégué que M. X… avait accepté ces redressements, du bien-fondé de ceux-ci ;
En ce qui concerne le bénéfice de l’interprétation de la loi fiscale donnée par l’administration :
Considérant que, du seul fait qu’elle n’a notifié à M. X… aucun redressement de même nature que ceux évoqués ci-dessus à la suite de la nouvelle vérification de comptabilité dont la S.A.R.L. X…, qui a succédé à la S.A. Central nord restauration, a fait l’objet en 1994, l’administration ne saurait être regardée comme ayant pris, sur les situations de fait à l’origine des redressements, une position dont M. X… pourrait se prévaloir sur le fondement des dispositions de l’article L.80-B du livre des procédures fiscales ;
Sur les intérets sur avances consenties à M. X… par la S.A. Central nord restauration :
Considérant qu’il est constant que le compte courant de M. X… dans les livres de la S.A. Central nord restauration a dégagé un solde débiteur durant huit mois de l’exercice 1979 sans que la société réclame aucun intérêt à son président-directeur général ; que si M. X… fait valoir qu’il a prêté à la société, durant cet exercice, une somme de 200 000 F qui lui a été remboursée, sans intérêts, à hauteur de 75 000 F le 29 juin 1979 et de 125 000 F le 6 juillet 1979, il ne donne aucune précision sur la date de ce prêt, ne permettant pas à la Cour d’apprécier dans quelle mesure l’absence d’intérêts sur ce prêt pourrait être regardée comme la contrepartie de la renonciation de la société à réclamer des intérêts sur les soldes débiteurs de son compte courant ; que, dans ces conditions, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, que cette renonciation avait le caractère d’un acte anormal de gestion, et que le montant des intérêts auxquels la S.A. Central nord restauration a renoncé avait le caractère de revenus distribués au titulaire du compte courant ;
Sur les pénalités :
Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles 1728 et 1729, alors en vigueur, du code général des impôts, que le contribuable qui déclare ou fait apparaître une base ou des éléments d’imposition insuffisants ou incomplets est soumis, lorsque sa mauvaise foi est établie, à une majoration de 50 % ou de 30 % des droits correspondants, selon que ceux-ci excèdent ou non la moitié du montant des droits réellement dus ;
Considérant que, compte tenu des fonctions de président-directeur général de la S.A. Central nord restauration qu’il occupait, M. X… ne pouvait ignorer que les dépenses susmentionnées, prises en charge par la société, ne présentaient pas un caractère professionnel, et que l’absence d’intérêts sur les soldes débiteurs de son compte courant dans les livres de la société en 1979 n’avait aucune contrepartie ; que l’administration a, dès lors, à bon droit appliqué aux compléments d’impôt sur le revenu assignés à M. X… les majorations prévues par les dispositions susmentionnées lorsque la mauvaise foi du contribuable est établie ;
Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que M. X… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d’Amiens a rejeté ses demandes en décharge des compléments d’impôt sur le revenu et des pénalités afférentes auxquels il a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981 ;
Sur les conclusions de M. X… tendant à l’application des dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel :
Considérant que les dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X… une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X… est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X…, et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.