Cour Administrative d’Appel de Marseille, 3ème chambre – formation à 3, 08/02/2007, 02MA02499, Inédit au recueil Lebon

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Cour Administrative d’Appel de Marseille, 3ème chambre – formation à 3, 08/02/2007, 02MA02499, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 20 décembre 2002, présentée pour M. Alain X, élisant domicile au cabinet de Me Mathieu et Me Dallest, 24 avenue du Prado à Marseille (13006), par Me Mathieu et Me Dallest ;

M. X demande à la Cour :

11) d’annuler le jugement n° 98-2753)en date du 21 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 ainsi que des pénalités ayant assorti ces impositions ;

22) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu la loi n° 79587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 11 janvier 2007 :

– le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

– les observations de Me Hidea substituant le cabinet Mathieu et Dallest pour M. X ;

– et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’à la suite d’une vérification de comptabilité de la SA Société Provençale d’Entretien portant sur la période du 1er avril 1989 au 30 septembre 1992, l’administration a réintégré dans les résultats sociaux le montant des loyers correspondant à la location de trois bateaux de plaisance réservés à l’usage exclusif de trois actionnaires de la société au nombre desquels figurait M. X, directeur général de l’entreprise ; que l’administration a regardé les sommes ainsi réintégrées comme des revenus distribués par la société aux trois associés concernés ; que, par une première notification de redressement datée du 21 décembre 1993, M. X a été avisé par l’administration fiscale de son intention de l’imposer sur le fondement de l’article 109-1-2° du code général des impôts ; que, par une seconde notification de redressement datée du 29 janvier 1996, l’administration fiscale a modifié le fondement légal des redressements en se référant aux dispositions de l’article 111-e du code général des impôts ; que, devant le Tribunal administratif de Marseille, saisi du litige par M. X, l’administration fiscale a entendu se prévaloir d’une nouvelle base légale constituée par les dispositions de l’article 109-1-1° du code général des impôts ; que, par jugement en date du 21 octobre 2002, le tribunal administratif a accueilli cette demande de substitution de base légale et rejeté la demande de M. X tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée auxquelles il avait été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 ainsi que des pénalités ayant assorti ces impositions ; que M. X relève appel de ce jugement ;

Sur régularité de la procédure d’imposition :

En ce qui concerne le moyen tiré du recours implicite de l’administration fiscale à la procédure de répression des abus de droit :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l’administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d’un contrat ou d’une convention à l’aide de clauses (…) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; (…) L’administration est en droit de restituer son véritable caractère à l’opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit (…);

Considérant que l’administration est fondée à considérer comme des revenus distribués les sommes désinvesties par une entreprise sans contrepartie et qui ne peuvent, dès lors, être regardées comme des dépenses engagées dans l’intérêt social ; que l’administration, pour réintégrer dans les bases d’imposition à l’impôt sur le revenu de M. X, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, une fraction du montant des loyers versés à la société Jet Loca Group pour la location de trois bateaux de plaisance par la SA Société Provençale d’Entretien en exécution de trois contrats conclus le 1er mai, le 22 mars et le 23 mars 1990 n’a pas entendu soutenir que les contrats en cause avaient dissimulé la nature véritable des biens pris en location mais s’est bornée à observer que les sommes versées par la société pour la location des bateaux n’avaient pas été exposées dans l’intérêt de l’entreprise ; qu’il suit de là que, pour établir les impositions contestées, l’administration ne s’est pas placée, même implicitement, sur le terrain de l’abus de droit et n’a pas privé M. X des garanties qui s’attachent à la procédure de répression des abus de droit prévue par les articles L. 64 et R. 64-1 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l’insuffisante motivation de la notification de redressement datée du 21 décembre 1993 :

Considérant que la notification de redressement datée du 21 décembre 1993 relative aux rehaussements apportés aux revenus de M. X au titre de l’année 1990 indique que les sommes versées par la SA Société Provençale d’Entretien à concurrence de 642 686 francs TTC pour la location du bateau de plaisance utilisé par le contribuable ont été réintégrées dans les résultats sociaux et ont été regardées comme des revenus distribués au sens de l’article 109-1-2° du code général des impôts imposables comme tels dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sans avoir fiscal ; que, contrairement à ce que soutient le contribuable, cette notification de redressement est suffisamment motivée en droit ; que le requérant n’est, par suite, pas fondé à soutenir que, du fait de l’insuffisance de motivation de cet acte, la procédure d’imposition serait irrégulière ou qu’il aurait été porté atteinte aux droits de la défense dans des conditions justifiant la décharge de l’imposition sur le fondement du deuxième alinéa de l’article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le moyen tiré de la prescription des impositions relatives à l’année 1990 :

Considérant, en premier lieu, que, comme il vient d’être dit, la notification de redressement datée du 21 décembre 1993 est suffisamment motivée ; que, si M. X soutient que la référence faite par cet acte aux dispositions du 2° de l’article 109-1 du code général des impôts était erronée, l’effet interruptif de la prescription attaché à une notification de redressements ne dépend pas de la pertinence des motifs de ces redressements ; que, par suite, et alors même que l’administration a, dans la notification de redressements datée du 29 janvier 1996, modifié le fondement légal des redressements en se référant à l’article 111-e du code général des impôts puis demandé au tribunal administratif d’appliquer, par substitution de base légale, les dispositions

du 1° de l’article 109-1 du même code, cette circonstance n’a pas privé la notification du 21 décembre 1993 de son effet interruptif de prescription dès lors que les bases ayant servi à l’établissement des droits en litige ont été limitées aux montants initialement notifiés ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts qui, en vertu de l’article 108, est applicable aux revenus distribués par les personnes morales passibles de l’impôt sur les sociétés : «1. Sont considérés comme revenus distribués : – 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; – 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur le bénéfice» ; qu’aux termes de l’article 110 du même code : « Pour l’application de l’article 109-1-1°, les bénéfices s’entendent de ceux qui ont été retenus pour l’assiette de l’impôt sur les sociétés… » ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que toute somme qu’une société entrant dans le champ d’application de l’impôt sur les sociétés met à la disposition de l’un de ses associés et qui n’est la rémunération ni d’une prestation que celui-ci lui a faite, ni d’un service qu’il lui a rendu, ni d’un prêt qu’il lui a consenti, a le caractère d’un revenu distribué, sans qu’il y ait lieu de rechercher si la société a été, ou non, effectivement soumise à l’impôt à raison de la somme dont s’agit ; qu’est, par suite, inopérant à l’appui de la contestation de son imposition personnelle le moyen tiré par M. X de ce que l’administration a prononcé le dégrèvement de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle la SA Société Provençale d’Entretien avait été assujettie au titre de l’année 1990 ;

Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes du paragraphe 19 de la documentation administrative de base référencée 4 J-1213, dans le cas où le redressement a pour effet de substituer à des résultats bénéficiaires déjà déclarés un bénéfice plus élevé, c’est-à-dire de rehausser une base positive (…), le complément de bénéfice imposable à l’impôt sur les sociétés est considéré comme distribué par application de la présomption légale de distribution édictée par l’article 109, 1-1° du code général des impôts. Cette présomption de distribution, impérative, automatique, est applicable à l’encontre de la société. Mais si le service entend considérer un ou des associés comme bénéficiaires de la distribution présumée, il doit faire la preuve de l’appréhension par le ou les associés des sommes réputées distribuées. Lorsque le service n’est pas en mesure d’établir avec certitude l’identité des bénéficiaires de distributions occultes, il lui appartient de mettre en oeuvre la procédure prévue à l’article 117 du code général des impôts. Enfin, l’interprétation stricte des termes de l’article 109-1-1° dudit code exclut de la présomption légale de distribution les bénéfices non imposables à l’impôt sur les sociétés par suite d’amnistie (…), de prescription ou d’annulation (…) du redressement par exemple; qu’il résulte clairement de ces dispositions que la présomption légale de distribution qu’elles définissent et dont elles précisent les modalités d’application et les hypothèses d’exclusion ne concerne que les sociétés distributrices de bénéfices et non les bénéficiaires de ces distributions ; que le régime de preuve applicable en matière d’appréhension des revenus distribués par les bénéficiaires de ceux-ci, tel que décrit par la documentation précitée, ne diffère en rien du régime prévu par la loi fiscale, qui impose à l’administration, dans le cadre d’une procédure de redressement contradictoire, et sauf si le bénéficiaire des distributions s’est lui-même désigné comme tel, d’apporter la preuve de l’appréhension par le ou les associés des sommes réputées distribuées ; que, par suite, M. X n’est pas fondé à se prévaloir des termes de la documentation administrative précitée ;

En ce qui concerne le moyen relatif à l’annualité de l’impôt :

Considérant, en premier lieu, que, pour l’application des dispositions de l’article 109-1-1° du code général des impôts, les bénéfices sociaux qu’il vise sont présumés distribués à la date de clôture de l’exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si le contribuable ou l’administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date ; qu’en application de ce principe, le vérificateur a déterminé à bon droit, pour chacune des années 1990, 1991 et 1992, le montant des revenus distribués à M. X par la SA Société Provençale d’Entretien en se référant au montant total des loyers versés au 30 septembre de chaque année, date de clôture des exercices de la société, pour la location du bateau de plaisance réservé à l’usage privatif du contribuable ; que, par application du même principe, les sommes versées par la société en décembre 1989 ont été rattachées à bon droit à l’exercice clos le 30 septembre 1990 et donc imposées en tant que revenus distribués au titre de l’année 1990 ; que le requérant n’est pas fondé à soutenir que, compte tenu des spécificités des contrats de location avec option d’achat, la mise à sa disposition effective des revenus distribués ne serait intervenue qu’à la date à laquelle il est devenu propriétaire du bateau, dès lors que l’avantage qui lui était consenti par la SA Société Provençale d’Entretien qui prenait à sa charge chaque année le paiement des loyers constituait pour lui un revenu imposable au titre de chacune de ces années ;

Considérant, en second lieu, qu’il ne résulte pas de l’instruction que les sommes versées par la société pour la location du bateau de plaisance réservé à l’usage personnel de M. X se seraient rattachées, même pour partie, à l’exercice de ses fonctions et qu’elles auraient constitué pour l’intéressé un avantage en nature ; que, dans ces conditions, le requérant n’est pas fondé à soutenir que l’administration aurait dû tenir compte des règles de rattachement des revenus aux années d’imposition applicables aux avantages en nature ou, à supposer qu’il ait entendu invoquer ce moyen, que l’existence d’avantages en nature justifierait le cas échéant l’imposition d’une fraction des revenus contestés dans la catégorie des traitements et salaires ; que, pour le même motif, le requérant ne saurait se prévaloir utilement des termes de la documentation administrative de base référencée 5 I-321 à jour au 15 décembre 1991, relative aux revenus distribués sous la forme d’avantages en nature ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’administration fiscale a imposé à bon droit M. X au titre des années 1990, 1991 et 1992 à raison d’une fraction des revenus réputés distribués par la SA Société Provençale d’Entretien » dont le requérant ne soutient ni que l’administration fiscale en aurait fait une évaluation exagérée ni qu’il ne les aurait pas appréhendés ;

Sur les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

Considérant, en premier lieu, qu’il résulte des termes de la réponse aux observations du contribuable en date du 25 juillet 1994 que le vérificateur a indiqué à M. X que la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prévue à l’article 1729 du code général des impôts lui serait appliquée dès lors qu’il avait participé à un montage dissimulant des contrats de location de bateaux sous l’apparence de contrats de location de matériels industriels ; qu’ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, les manoeuvres frauduleuses qui lui étaient reprochées ont été suffisamment caractérisées et les pénalités pour manoeuvres frauduleuses qui lui ont été infligées ont été suffisamment motivées en droit, alors même que la notification de redressement ne comportait pas une définition d’ordre général de la notion de manoeuvres frauduleuses ;

Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : « Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Toutefois, lorsque la pénalité mise en recouvrement ne constitue pas l’accessoire d’une imposition ou lorsqu’elle sanctionne une infraction dont la qualification est fondée sur l’appréciation du comportement du contribuable, la motivation est portée à sa connaissance au moins trente jours avant la notification du titre exécutoire ou de son extrait. Durant ce délai, le contribuable peut présenter ses observations » ; qu’il résulte de ces dispositions que, lorsque la pénalité mise en recouvrement ne constitue pas l’accessoire d’une imposition ou lorsqu’elle sanctionne une infraction dont la qualification est fondée sur l’appréciation du comportement du contribuable, l’administration fiscale doit faire connaître à l’intéressé, au moins trente jours avant la notification du titre exécutoire ou de son extrait, les motifs de cette sanction et la possibilité dont il dispose de présenter ses observations ;

Considérant que la réponse aux observations du contribuable en date du 25 juillet 1994 indiquait à M. X qu’il disposait d’un délai de trente jours pour faire parvenir ses observations au sujet des sanctions fiscales applicables et précisait les motifs pour lesquels l’existence de manoeuvres frauduleuses était retenue à son encontre ; que, dans ces conditions, l’administration doit être regardée comme ayant régulièrement invité le contribuable à produire ses observations sur les pénalités auxquelles il était assujetti ; que le requérant n’est, par suite, pas fondé à soutenir que l’administration aurait méconnu les obligations prévues à l’article L. 80 D du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. X n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Alain X et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

Copie en sera adressée à Me Mathieu, Me Dallest et au directeur de contrôle fiscal sud-est.

2

N°0202499


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