Cour Administrative d’Appel de Marseille, 3ème chambre – formation à 3, 02/04/2009, 06MA03192, Inédit au recueil Lebon

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Cour Administrative d’Appel de Marseille, 3ème chambre – formation à 3, 02/04/2009, 06MA03192, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2006, présentée pour Mme Françoise X, demeurant …, par Me Mondini ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d’annuler l’article 2 du jugement n° 0307874 en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir constaté un non-lieu à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d’instance, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997 à 1999 ainsi que des pénalités qui les ont assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 juin 2007, présenté par le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie qui conclut au rejet de la requête ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l’arrêté du vice-président du Conseil d’Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l’article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 12 mars 2009 :

– le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

– et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant qu’à la suite d’une vérification de comptabilité de la SARL Le Béton Industriel, dans laquelle Mme et M. X avaient successivement exercé les fonctions de gérant et d’un examen contradictoire de l’ensemble de la situation fiscale personnelle des intéressés, contrôles portant sur les années 1997 à 1999, l’administration fiscale a, d’une part, estimé que M. X avait bénéficié de revenus distribués par la société, imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers suivant la procédure de redressement contradictoire et, d’autre part, taxé d’office des revenus regardés comme d’origine indéterminée ; que Mme X demande à la Cour d’annuler l’article 2 du jugement en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir constaté un non-lieu à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d’instance, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie avec son époux, en conséquence de ces redressements, au titre des années 1997 à 1999 ainsi que des pénalités qui les ont assorties ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

En ce qui concerne la motivation des notifications de redressement :

Considérant qu’aux termes de l’article L.57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : L’administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (…) ;

Considérant que les notifications de redressement du 15 décembre 2000 et du 18 octobre 2001 adressées à M. et Mme X retracent les constatations effectuées par le vérificateur lors des opérations de vérification de comptabilité de la SARL Le Béton Industriel et exposent avec précision les motifs pour lesquels le vérificateur a estimé que les sommes versées en espèces et inscrites au crédit du compte courant détenu par M. X dans la comptabilité de la société devaient être regardées comme des produits d’exploitation, imposables au nom de l’intéressé en tant que revenus distribués sur le fondement du 1° du I de l’article 109 du code général des impôts ; qu’en outre était jointe à la notification de redressement du 18 octobre 2001 adressée à titre personnel aux contribuables la notification de redressement adressée à la société ; que le tribunal administratif a estimé à bon droit, même en ce qui concerne la notification de redressement du 15 décembre 2000, qui n’était pas accompagnée de la notification de redressement adressée à la société, que ces précisions étaient, par elles-mêmes, suffisantes pour éclairer les contribuables sur la nature et les motifs des redressements envisagés et leur permettre d’en discuter normalement le bien-fondé ; que, plus particulièrement, la circonstance que les notifications de redressement adressées à titre personnel aux contribuables ne comportaient aucune explication quant aux motifs qui avaient amené le vérificateur à regarder comme non probante la comptabilité de la société demeure sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation dès lors qu’un tel rappel n’était pas utile à la compréhension du redressement relatif aux revenus réputés distribués ; que, par suite, le moyen tiré de l’insuffisante motivation des notifications de redressement ne peut être accueilli ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l’imposition séparée des époux :

Considérant qu’aux termes de l’article 6 du code général des impôts : 1. Chaque contribuable est imposable à l’impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérées comme étant à sa charge au sens des articles 196 et 196 A bis. Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d’elles et ceux de leurs enfants et des personnes à charge mentionnés au premier alinéa ; cette imposition est établie au nom de l’époux, précédée de la mention Monsieur ou Madame . (…) 4. Les époux font l’objet d’impositions distinctes : a. Lorsqu’ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit (…) ;

Considérant que Mme X, mariée sous le régime de la séparation de biens, soutient que c’est à tort que les impositions ont été établies, au titre des années 1998 et 1999, au nom du foyer fiscal qu’elle formait avec son mari, dans la mesure où les époux ne vivaient pas sous le même toit et ont déposé au titre des deux années en cause des déclarations de revenus séparées ;

Considérant que l’administration rappelle sans être contredite que les correspondances envoyées en Corse à l’adresse indiquée par M. X sur les déclarations fiscales séparées qu’il a souscrites ont été retournées aux expéditeurs avec la mention N’habite pas à l’adresse indiquée , que les contrats de bail, de téléphone et d’électricité de l’appartement occupé par Mme X à Aix-en-Provence ont été souscrits au nom du couple, que les courriers libellés au nom du couple ont été régulièrement distribués à l’adresse d’Aix-en-Provence et que l’adresse de r��expédition du courrier indiquée à la Poste à la suite du déménagement effectué en 2001 par Mme X vers Carry-le-Rouet était libellée au nom de M. et Mme X ; qu’il résulte en outre des pièces produites par la requérante que les factures d’eau du logement situé à Ajaccio dont elle affirme qu’il aurait été occupé par son époux en 1998 et en 1999 ont été émises à son nom ;

Considérant que si la requérante soutient que le bail, dont elle ne précise pas la durée, et les contrats souscrits avec divers opérateurs relatifs au logement qu’elle occupait à Aix-en-Provance étaient établis au nom de M. et Mme X parce qu’ils ont été souscrits en 1995, à une date à laquelle les époux disposaient encore d’une résidence commune, elle ne précise pas les raisons pour lesquelles elle acceptait de prendre en charge en 1998 et 1999 les dépenses d’eau du logement d’Ajaccio qui aurait été occupé par son époux ; que la correspondance adressée le 5 août 2002 à M. X par les services fiscaux à son adresse d’Ajaccio, à laquelle l’intéressé a répondu, n’implique pas que celui-ci ait occupé en 1998 et en 1999 le logement d’Ajaccio ; que, dans ces conditions, nonobstant les témoignages versés aux débats par la requérante qui ne sont pas de nature à infirmer les éléments de fait objectifs réunis par l’administration, il ne résulte pas de l’instruction que M. et Mme X n’auraient pas vécu sous le même toit au cours des années 1998 et 1999 ; que la circonstance que l’administration a admis l’existence de résidences séparées des époux pour les années 2000 à 2002 demeure sans incidence sur le régime d’imposition applicable aux années 1998 et 1999 ; que, par suite, l’administration était fondée au titre des deux années en cause, à assujettir M. et Mme X à une imposition commune ;

En ce qui concerne l’obligation d’information pesant sur l’administration :

Considérant qu’il incombe à l’administration, quelle que soit la procédure d’imposition mise en oeuvre et au plus tard avant la mise en recouvrement, d’informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d’arrêter d’office les bases d’imposition, de l’origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers, qu’elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l’intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ;

Considérant qu’ il résulte de l’instruction et notamment de l’examen de la notification de redressement datée du 18 octobre 2001 que le vérificateur, en indiquant que M. X était inconnu auprès des services de sécurité sociale, que le contrat de bail de l’appartement dont disposait le foyer fiscal ainsi que les contrats d’électricité et de téléphone étaient souscrits au nom de M. et Mme X, a suffisamment informé les contribuables de l’origine et de la teneur des renseignements recueillis auprès de tiers et utilisés pour remettre en cause le régime d’imposition sous lequel les époux avaient entendu se placer en se prévalant du a. du 4. de l’article 6 du code général des impôts et les a ainsi mis en mesure d’en demander communication avant la mise en recouvrement des impositions contestées ; qu’en outre, le vérificateur n’avait pas à préciser les modalités suivant lesquelles l’administration avait usé de son droit de communication ; que dès lors le moyen tiré de ce que l’administration aurait méconnu son obligation d’information doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les revenus réputés distribués :

Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (…) ; que l’article 110 du même code précise que : Pour l’application du 1° du 1 de l’article 109, les bénéfices s’entendent de ceux qui ont été retenus pour l’assiette de l’impôt sur les sociétés (…) ; qu’aux termes de l’article 112 du même code : Ne sont pas considérés comme revenus distribués : 1° Les répartitions présentant pour les associés ou actionnaires le caractère de remboursement d’apports ou de primes d’émission ; que les sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé ont, sauf preuve contraire apportée par l’associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu’en outre, contrairement à ce que soutient la requérante, l’administration fiscale n’a pas à établir, dans une telle hypothèse, que le titulaire du compte courant aurait été maître de l’affaire ;

Considérant que, comme il a été dit, M. X disposait d’un compte courant dans les écritures de la SARL Le Béton Industriel, alimenté de façon continue au cours des trois années en litige par des versements en espèces qui ont atteint 205 000 francs en 1997, 238 750 francs en 1998 et 33 868 francs en 1999 ; que le vérificateur a estimé que ces versements correspondaient à des produits d’exploitation, les a réintégrés dans les bases imposables à l’impôt sur les sociétés de la SARL Le Béton Industriel, avant de les taxer au nom de M. X en tant que revenus distribués ; que si Mme X soutient que l’inscription au compte courant de son époux des sommes en cause aurait eu pour origine des apports de même montant qu’aurait effectués M. X et que les dites sommes n’auraient en conséquence pas le caractère d’un revenu, elle n’apporte, à l’appui de cette allégation, aucun élément de justification ; qu’en outre, la circonstance que l’administration a prononcé le dégrèvement d’un complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL Le Béton Industriel en rapport avec les sommes litigieuses demeure, en vertu du principe d’indépendance des procédures, sans incidence sur le bien-fondé des impositions assignées à Mme X ; qu’enfin, l’intéressée ne peut utilement soutenir que ces sommes étaient imposables au seul nom de son époux dès lors que, comme il a été dit, les conditions de l’imposition séparée des époux n’étaient pas remplies ;

En ce qui concerne les revenus d’origine indéterminée :

Considérant que les impositions contestées ont été établies, en tant qu’elles procèdent de la taxation de revenus d’origine indéterminée, selon la procédure de la taxation d’office prévue à l’article L.69 du livre des procédures fiscales, dont la régularité n’est pas contestée ; qu’aux termes de l’article L.193 du même livre : Dans tous les cas où une imposition a été établie d’office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l’imposition ;

Considérant, en premier lieu, qu’à supposer que les sommes de 4 800 francs, 61 279 francs et 18 147 francs portées respectivement le 16 décembre 1998, le 10 juillet 1999 et le 28 septembre 1999 au crédit du compte bancaire de Mme X ouvert à la Société Générale trouvent leur origine dans des versements effectués à son profit par la SARL Grand Sud Métallurgie, la requérante n’établit ni que ces sommes n’auraient pas le caractère de revenus ni, en l’absence de toute précision sur la cause des versements, que lesdites sommes devraient être rattachées à une catégorie particulière de revenus ; qu’il en va de même des cinq sommes dont la requérante affirme, sans l’établir par des documents probants, qu’elles lui ont été versées au cours de l’année 1999 par la SARL Diaster en remboursement de paiements de taxe foncière dont elle aurait fait l’avance au Trésor public ;

Sur l’application des pénalités de mauvaise foi :

Considérant, en premier lieu, que le vérificateur a suffisamment motivé dans la notification de redressement datée du 15 décembre 2000, les pénalités de mauvaise foi prévues à l’article 1729 du code général des impôts en rappelant notamment que M. X avait encaissé sur son compte courant des recettes non comptabilisées d’une société commerciale, attitude révélatrice d’une intention délibérée de se soustraire à l’impôt ; que, de même, les pénalités pour mauvaise foi ayant assorti les impositions procédant des redressements notifiés en matière de revenus d’origine indéterminée et de revenus de capitaux mobiliers ont été suffisamment motivées dans la notification de redressement datée du 18 octobre 2001 par le rappel de l’importance des sommes non déclarées, des manquements déjà constatés des contribuables à leurs obligations déclaratives et du fait que M. X avait encaissé sur son compte courant des recettes non comptabilisées, tous manquements que les contribuables ne pouvaient ignorer ;

Considérant, en second lieu, que les faits ainsi rappelés révèlent l’intention délibérée des contribuables d’éluder l’impôt ; qu’en ce qui concerne les pénalités également, la requérante ne peut utilement soutenir qu’elle ne saurait être tenue pour responsable des agissements de son époux dès lors que son époux et elle-même ont fait l’objet d’une imposition commune que, dans ces conditions, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que les pénalités de mauvaise foi ont été infligées à bon droit ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme X n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Françoise X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N° 06MA03192


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