Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 25 février 2008 sur télécopie confirmée le lendemain, présentée par Me Jean-François Poli, avocat, pour M. Patrick A, élisant domicile … ; M. A demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0601566 rendu le 20 décembre 2007 par le tribunal administratif de Bastia qui a rejeté sa demande d’annulation de la décision du 8 novembre 2006 par laquelle le président de la chambre de commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la
Corse du Sud a prononcé sa révocation ;
2°) d’annuler la décision précitée, d’enjoindre au président de ladite chambre de commerce et d’industrie de le réintégrer dans ses fonctions dans le délai de quinze jours à compter de l’arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard en application de l’article L. 911-3 du code de justice administrative ;
3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d’industrie la somme de
3 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
—————————————————————————————————————
Vu la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
Vu l’arrêté du 25 juillet 1997 ensemble le statut du personnel administratif des chambres françaises de commerce et d’industrie, des chambres régionales de commerce et d’industrie, et de l’assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l’audience devant ces juridictions ;
Vu l’arrêté du vice-président du Conseil d’État, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l’article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 28 septembre 2010 :
– le rapport de Mme Busidan, rapporteur,
– et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;
Considérant que M. Patrick A relève appel du jugement rendu le
20 décembre 2007 par le tribunal administratif de Bastia, qui a rejeté sa demande d’annulation de la décision du 8 novembre 2006 par laquelle le président de la chambre régionale de commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la Corse du Sud (CCIACS) l’a révoqué de ses fonctions de chef de section au service plaisance du port de plaisance Tino Rossi à Ajaccio, dont la CCIACS est concessionnaire ;
Considérant, en premier lieu, que l’article 37 du statut susvisé du personnel administratif des chambres de commerce et d’industrie prévoit qu’avant plusieurs sanctions, dont notamment la révocation, l’agent doit pouvoir prendre connaissance de son dossier, être informé des faits qui lui sont reprochés et pouvoir présenter sa défense devant le Président de la Commission Paritaire Locale ; que M. A soutient que, malgré ses demandes réitérées de communication de son dossier, il n’a pas été mis en mesure d’en prendre connaissance avant l’entretien avec le président de la CCIACS, auquel il a été convoqué le 21 août 2006, et qu’il a été contraint de faire appel, ce jour-là, à un huissier pour pouvoir le consulter ;
Considérant cependant que l’appelant ne prouve nullement l’existence des demandes qu’il prétend avoir adressées pour une consultation de son dossier avant le 21 août 2006, alors que, selon les attestations, établies respectivement les 4 septembre 2006 et 27 février 2007, par la directrice des ressources humaines et un chef de service de la CCIACS, M. A a pris connaissance de son dossier dès le 4 août 2006 ; que cette indication n’est pas invalidée par les autres pièces du dossier, et notamment par la lecture combinée du constat d’huissier dressé le
21 août 2006 à la demande de l’intéressé et des lettres que le président de la CCIACS a adressées à l’intéressé ou à son conseil les 22 août et 11 septembre 2006 ; que, dans ces conditions, la valeur probante de ces attestations ne pouvant être remise en cause sur le seul constat qu’elles émanent de personnes soumises au pouvoir hiérarchique du président de la CCIACS, le moyen tiré de ce que la sanction prononcée serait intervenue en méconnaissance de l’article précité dès lors que M. A n’aurait pu consulter son dossier avant son entretien avec le président de la commission paritaire locale et président de la CCIACS doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que la décision en litige indique que la mesure prise repose sur la méconnaissance de l’article 1er du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d’industrie et le fait que l’intéressé aurait favorisé la société Yachting Services en usant des facilités que lui procurait son poste et qu’il mettait ainsi en cause le bon fonctionnement des services de la CCIACS et portait atteinte à son image ; que, ce faisant, elle mentionne les circonstances de droit et de fait qui la fondent et répond à l’exigence de motivation prévue à l’alinéa 2 de l’article 37 du statut précité ;
Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 1er du statut du personnel administratif des compagnies consulaires : Le présent statut s’applique de plein droit à l’ensemble des agents ayant la qualité d’agent de droit public et qui occupent un emploi permanent à temps complet dans les services des (…) chambres de commerce et d’industrie (…), ci-après désignées compagnies consulaires.// Il s’applique également à tous les agents ayant la qualité d’agent de droit public et occupant un emploi permanent et travaillant à temps partiel, à condition que ces agents accomplissent un service au moins égal à la moitié de la durée hebdomadaire du travail d’un agent à temps complet. // Pour ces deux catégories d’agents (…) le cumul d’un emploi au sein d’une compagnie consulaire et d’une autre activité professionnelle est interdit, sous réserve des dispositions de l’article 1 bis du présent statut ;
Considérant qu’il est constant que les fonctions qu’exerce M. A en sa qualité de chef de section du service plaisance du port Tino Rossi, l’amènent à participer à l’exploitation du port et à répondre aux besoins des utilisateurs ; que, parallèlement à cet emploi, il détient 70 % du capital de la société Yachting Services, dont sa mère, propriétaire des 30 % restants, est la gérante, et dont l’activité consiste à louer, vendre et acheter des bateaux neufs ou d’occasion ; que même si la qualité d’actionnaire majoritaire est insuffisante à prouver, par elle-même, que M. A contribuerait à la gestion de la société au même titre que, ou à la place de, la gérante juridiquement désignée, elle lui en confère néanmoins la direction ; qu’il n’est pas contesté que la gérante en titre est salariée à temps plein d’un hypermarché ; que l’appelant n’établissant pas comment, en l’absence d’autre salarié de la société, l’emploi du temps de ladite gérante serait compatible avec l’activité, même saisonnière, de la société, la circonstance que la société exerce son activité de location de bateaux dans le même port que celui où M. A exerce ses fonctions d’agent administratif de la CCIACS constitue un indice fort que M. A participe concrètement à la gestion de la société sus-évoquée ; que cette participation est corroborée par le fait que M. A, photographié sur la brochure publicitaire de la société, a signé plusieurs chèques réglant à la CCIACS le paiement de places de bateaux que la société avait occupées dans le port ; que si M. A nie être le signataire de ces chèques, ses allégations selon lesquelles la signature de sa mère et la sienne seraient identiques ne sont assorties d’aucun début de preuve, et sont même contredites par les pièces du dossier ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient l’appelant, l’activité déployée par M. A au service de la société Yatching Services est suffisamment caractérisée pour devoir être regardée comme un cumul illégal d’emploi avec l’emploi qu’il exerçait au sein de la CCIACS, passible de sanction disciplinaire ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les faits justifiant la sanction prise n’auraient pas été établis doit être écarté ; qu’est sans incidence à cet égard la circonstance que la CCIACS n’ a mis en demeure M. A de cesser toute activité professionnelle autre que celle d’agent public que par lettre du
20 juillet 2006, peu de temps avant de lancer la procédure disciplinaire ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A n’est pas fondé soutenir que c’est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande d’annulation de la décision prise le 8 novembre 2006 par le président de la chambre de commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la Corse du Sud le révoquant de ses fonctions ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions afin que sa réintégration soit ordonnée sous astreinte et ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l’espèce, les conclusions présentées par la CCIACS sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. Patrick A est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par la chambre de commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la Corse du Sud est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrick A, à la chambre de commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la Corse du Sud et au ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.
»
»
»
»
N° 08MA009402