COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE LYON, 5ème chambre – formation à 3, 26/01/2012, 10LY02907, Inédit au recueil Lebon

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COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE LYON, 5ème chambre – formation à 3, 26/01/2012, 10LY02907, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2010 au greffe de la Cour, présentée pour la société civile immobilière (SCI) PARMA dont le siège est Le Montaly, 51 Vieille Route à Chaponost (69630) ;

La SCI PARMA demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0808509 du 30 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2004 et 2005 et des pénalités dont ces rappels ont été assortis ;

2°) de prononcer la décharge des impositions susmentionnées et des pénalités y afférentes ;

3) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, compte tenu de la chronologie des multiples achats et des deux seules ventes qui ont été réalisées depuis 2001, il est démontré qu’elle accomplissait une activité civile et non une activité de marchands de biens ; que les deux seules reventes, dont l’une provient d’une erreur de gestion, ont été réalisées dans le cadre de la gestion patrimoniale ; que, pour déterminer le profit réalisé par la SCI lors de la vente du bien, il faut retenir comme prix d’achat non le prix indiqué dans l’acte de vente mais la valeur soumise aux droits d’enregistrement, c’est-à-dire la somme de 47 502 euros ; qu’ainsi, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et d’impôt sur les sociétés sont irréguliers ; que, lors de la vérification de comptabilité du cabinet A, des documents concernant la SCI ont été emportés sans autorisation par la vérificatrice ; que le calcul du résultat qui a été taxé à l’impôt sur les sociétés est insuffisamment motivé ; que, pour déterminer le profit résultant de la vente des biens, il n’a pas été pris en compte tous les travaux qui avaient été réalisés par la SCI et qui devaient venir en augmentation du prix d’achat ; que n’a été calculée que la taxe sur la valeur ajoutée collectée sans prendre en compte la taxe sur la valeur ajoutée déductible concernant les frais de fonctionnement de la SCI ; que l’administration n’a pas précisé la qualification juridique et comptable qu’elle avait retenue pour les biens immobiliers dans son calcul du résultat ; que les lettres 3924 et 3926 ne sont pas suffisamment motivées ; que la majoration de 40 % des pénalités pour non souscription de déclaration n’est pas fondée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat ; il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la SCI PARMA a acquis du cabinet A, courant 2004, quatre biens immobiliers à des prix inférieurs à leurs prix d’acquisition ; que la vérification de comptabilité du cabinet A en 2004 ne saurait être regardée comme portant nécessaire adhésion de la part de l’administration sur les valeurs des transactions opérées en 2004 ; que M. A, conjoint collaborateur de son épouse au sein du cabinet, pouvait donc pallier les absences de cette dernière liées à son état de santé ; que l’intention spéculative résulte de la brièveté du délai existant entre l’achat et la vente, de la faiblesse du prix d’acquisition du bien et de l’existence de deux ventes importantes en valeur et rapprochées dans le temps ; que la double taxation du profit réalisé suite à la vente de la maison de Saint-Cyr-au-Mont-d’Or ne résulte que de la réalité des actes juridiques dûment enregistrés ; que l’irrégularité de la vérification de comptabilité du cabinet A n’est pas établie et ne constitue pas une irrégularité de la procédure de la vérification de comptabilité de la SCI PARMA ; que les lettres 3924 et 3926 sont suffisamment motivées ; que les pénalités pour non dépôt de déclaration sont justifiées ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 septembre 2011, présenté pour la SCI PARMA ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que les acquisitions des immeubles revendus ont été effectuées à des fins essentiellement familiales ; qu’un document concernant la SCI a été emporté à l’insu de Mme A lors des opérations de vérification sur place de son activité de marchand de biens ; que l’administration n’a pas répondu à sa demande concernant son assujettissement définitif ou non à l’impôt sur les sociétés ; qu’au regard du droit communautaire, les opérations d’achat-revente d’immeubles anciens n’étant imposables à la taxe sur la valeur ajoutée que sur option, il en résulte que le redressement portant sur la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge est illégal ; que la majoration de 40 % en matière de droits d’enregistrement est en cours de contestation devant le Tribunal de grande instance de Lyon, compte tenu du fait que les valeurs qui ont été retenues avaient été vérifiées et validées par l’administration fiscale ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 octobre 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat ; il conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; il conclut en outre qu’il n’y a pas lieu de statuer à concurrence du dégrèvement accordé ; il déclare faire droit aux prétentions de la requérante sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ; il soutient en outre que la société a été informée des motifs de droit et de fait conduisant l’administration à lui demander de souscrire des déclarations à la taxe sur la valeur ajoutée et des déclarations de résultats par deux courriers, l’un en date du 27 mars 2007 et l’autre du 17 avril 2007 ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 décembre 2011, présenté pour la SCI PARMA ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête et son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 5 janvier 2012 :

– le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

– les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

– et les observations de Me Chareyre, avocat de la SCI PARMA ;

Considérant que, par un jugement en date du 30 novembre 2010, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande en décharge de la SCI PARMA des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2004 et 2005 et des pénalités dont ils ont été assorties ; que la SCI PARMA relève appel de ce jugement ;

Sur l’étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 7 novembre 2011, le directeur régional des finances publiques a prononcé un dégrèvement de 66 689 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu’à concurrence de ce montant, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SCI PARMA ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

Considérant que, d’une part, la SCI PARMA, qui ne conteste pas la procédure de rectification d’office dont elle a fait l’objet, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales, lesquelles sont relatives à la procédure contradictoire ; que le moyen tiré de l’insuffisante motivation de la réponse aux observations du contribuable est aussi inopérant ; que, d’autre part, il ressort de la proposition de rectification du 27 juin 2007 que celle-ci était suffisamment motivée au regard de l’article L. 76 du livre des procédures fiscales, qu’elle indiquait que la société PARMA n’a pas souscrit les déclarations de résultats imposables à l’impôt sur les sociétés afférentes aux exercices 2004 et 2005 et qu’en l’absence de production de tout livre comptable, ces bénéfices ont fait l’objet d’une taxation d’office ;

Considérant, enfin, que la société requérante ne peut utilement faire valoir, pour contester la régularité de la procédure d’imposition, la circonstance que, lors de la vérification de comptabilité du cabinet A, des documents auraient été emportés sans son accord par la vérificatrice ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que, d’une part, aux termes du 2 de l’article 206 du code général des impôts : Sous réserve des dispositions de l’article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt [sur les sociétés], même lorsqu’elles ne revêtent pas l’une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. (…) ; qu’aux termes de l’article 35 du même code : I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l’application de l’impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières (…) ; que, d’autre part, aux termes de l’article 257 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (…) 6° Les opérations qui portent sur des immeubles, des fonds de commerce ou des actions ou parts de sociétés immobilières et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux ; (…) ; qu’aux termes de l’article 268 du même code : En ce qui concerne les opérations visées au 6° de l’article 257, la base d’imposition à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par la différence entre : a. D’une part, le prix exprimé et les charges qui viennent s’y ajouter, ou la valeur vénale du bien si elle est supérieure au prix majoré des charges ; b. D’autre part, selon le cas : – soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l’acquisition du bien ; – soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu’il a effectués. ;

Considérant que la SCI PARMA a été créée le 28 décembre 2001 par Mme A qui exerce par ailleurs la profession d’agent immobilier et de marchand de biens au sein d’une agence immobilière et par son époux, conjoint collaborateur ; qu’elle a fait l’objet, courant 2007, d’une vérification de comptabilité portant sur les années 2004 et 2005 qui a conduit le service à considérer que la SCI exerçait une activité de marchand de biens et devait, à ce titre, être soumise aux impôts commerciaux ; que, par proposition de rectification du 27 juin 2007, la société a été informée des redressements envisagés en matière d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, notifiés selon la procédure de taxation d’office en raison de l’absence de dépôt de déclaration de résultat et de chiffre d’affaires, conformément aux articles L. 66, 2° et 3° et L. 68 du livre des procédures fiscales ; que les impositions supplémentaires en résultant ont été mises en recouvrement le 25 mars 2008 pour un montant total de 124 299 euros ;

Considérant qu’il est constant que la société requérante a acquis, au cours de l’année 2004, quatre biens du cabinet A à des prix très inférieurs aux prix auxquels ils avaient été achetés ; que, notamment, la SCI a acquis en 2004 une maison, située à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or, pour un montant de 47 502 euros qu’elle a revendue le jour même pour un montant de 266 800 euros ; que, le 29 avril 2005, elle a revendu une maison située à Aix-les-Bains pour un montant de 152 500 euros, alors que le cabinet A, qui la lui a cédée, l’avait achetée en 2001 pour un montant de 34 148 euros ; que la concomitance de l’achat et de la revente du bien sis à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or, la proximité dans le temps de la seconde vente, la plus-value dégagée lors de ces deux ventes et les conditions d’achat des quatre autres biens acquis du cabinet A révèlent que ces opérations procèdent d’une intention spéculative et qu’elles doivent être regardées comme présentant un caractère habituel ; que, dès lors, l’administration était en droit de considérer que la SCI n’exerçait pas une activité de gestion purement patrimoniale, mais agissait en tant que marchand de biens et devait, par suite, être soumise à l’impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de ces deux opérations, nonobstant la circonstance qu’elle procède à la location d’autres biens et alors qu’il n’est pas démontré que l’opération de revente de la maison de Saint Cyr-au-Mont-d’Or serait une erreur de gestion imputable au conjoint collaborateur de Mme A ; que, dans ces conditions, la SCI PARMA peut être regardée comme ayant procédé de façon habituelle à des opérations spéculatives au sens des dispositions du 1° du I de l’article 35 précitées ; qu’elle n’est, dès lors, pas fondée à contester, sur ce terrain, les impositions en litige ;

Sur les pénalités :

Considérant qu’aux termes de l’article 1728 du code général des impôts : 1. Lorsqu’une personne physique ou morale, ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s’abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter un acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l’acte déposé tardivement est assorti de l’intérêt de retard visé à l’article 1727 et d’une majoration de 10 % (…) 3. La majoration visée au 1 est portée à : – 40 % lorsque le document n’a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure notifiée par pli recommandé d’avoir à le produire dans ce délai ;

Considérant qu’il est constant que la SCI PARMA n’a pas souscrit les déclarations de résultats à l’impôt sur les sociétés afférentes aux exercices 2004 et 2005 et ce malgré des mises en demeure adressées le 27 mars 2007 ; qu’elle ne peut utilement faire valoir pour contester lesdites pénalités qu’elle a souscrit des déclarations sur un autre imprimé et acquitté l’impôt sur le revenu ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société PARMA n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat la somme que réclame la SCI PARMA au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 66 689 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SCI PARMA.

Article 2 : Le surplus de la requête de la SCI PARMA est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI PARMA et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat.

Délibéré après l’audience du 5 janvier 2012 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 janvier 2012.

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N° 10LY02907

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