Cotisation foncière des entreprises : 8 novembre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 22/03281

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Cotisation foncière des entreprises : 8 novembre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 22/03281
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délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 08 NOVEMBRE 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 22/03281 – N° Portalis DBVK-V-B7G-POVE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 03 JUIN 2022

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2022005839

APPELANT :

Monsieur [H] [U]

né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 9] (34)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représenté par Me Eve BEYNET, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Charles SALIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur LE COMPTABLE DES FINANCES PUBLIQUES DU SERVICE DES IMPOTS DES ENTREPRISES COEUR D’HERAULT LITTORAL

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représenté par Me Christine AUCHE HEDOU, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Jacques henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représenté par Me Anne-Sophie TURMEL, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

S.E.L.A.S. OCMJ agissant par Me [X] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la société JJM désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 3 juin 2022

[Adresse 2],

[Localité 5]

Représentée par Me Marion DEJEAN, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER

PARTIE INTERVENANTE :

S.A.R.L. JJM

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me Eve BEYNET, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Charles SALIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 27 Septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 OCTOBRE 2022, en chambre du conseil, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller

M. Thibault GRAFFIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO

Ministère public :

L’affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

*

* *

FAITS et PROCÉDURE – MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES:

La SARL JJM, dont le gérant est [H] [U], a pour activité la maçonnerie générale et toutes activités connexes du bâtiment, son siège social étant situé à [Localité 3].

Par acte d’huissier en date du 25 février 2022, le comptable des finances publiques du service des impôts des entreprises Coeur d’Hérault littoral (le comptable des finances publiques) a assigné la société JJM devant le tribunal de commerce de Montpellier aux fins de voir constater la cessation des paiements et ouvrir une procédure de liquidation judiciaire.

Le tribunal, par jugement du 3 juin 2022, a :

‘- constaté l’état de cessation des paiements et prononcé la liquidation judiciaire prévue par les dispositions des articles L.640-1 et suivants du code de commerce, à l’égard de la SARL JJM,

– fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 25 février 2022,

– désigné pour cette procédure M. [D] en qualité de juge-commissaire, M. [M] et M. [C] en qualités de juges-commissaires suppléants et la SELAS OCMJ représentée par M. [O] en qualité de liquidateur,

– ordonné la désignation de la SCP Latour et Giuseppi, commissaires priseurs judiciaires, pour réaliser l’inventaire et la prisée prévue à l’article L.622-6 du code de commerce,

– invité s’il y a lieu les salariés de l’entreprise à désigner leur représentant dont le nom sera communiqué sans délai au greffe,

– fixé à 12 mois le délai d’établissement de la liste des créances déclarées,

– dit que conformément aux dispositions de l’article L. 643-9 du code de commerce, la clôture de la procédure devra être examinée par le tribunal dans le délai d’un an,

– dit que la publicité du présent jugement sera effectuée sans délai nonobstant toute voie de recours,

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit,

– dit que les dépens seront employés en frais de liquidation judiciaire.’

M. [U] a relevé appel le 20 juin 2022 de ce jugement.

M. [U] et la société JJM, intervenante volontaire, demandent à la cour, en l’état de leurs conclusions déposées et notifiées les 21 et 22 juillet 2022 via le RPVA, de :

‘- infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la liquidation judiciaire,

– ouvrir une procédure de redressement judiciaire,

– renvoyer devant le tribunal de commerce aux fins de désignation des organes de la procédure,

– statuer ce que de droit sur les dépens.’

Au soutien de l’appel, ils font essentiellement valoir que :

-la société JJM n’a pas été valablement citée à l’audience au cours de laquelle la liquidation judiciaire a été prononcée puisqu’elle n’a pas été touchée par l’assignation ; elle n’a pu comparaître et fournir des éléments,

-la société JJM est titulaire de plusieurs contrats pour des chantiers en attente de réalisation qui doivent lui permettre de se redresser dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire, les résultats provisoires de 2022 prévoient une augmentation de l’activité et un équilibre entre les produits et les charges.

Le comptable des finances publiques sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le biais du RPVA le 20 septembre 2022:

‘- vu les articles L 640-1 et suivants, L631-1 et suivants du code de commerce, confirmer en toutes ses dispositions la décision dont appel,

– A titre principal, prononcer la liquidation judiciaire de la SARL JJM,

– A titre subsidiaire, prononcer le redressement judiciaire de la SARL JJM,

– En tout état de cause, condamner l’appelant à payer 1 200 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction (…).’

Il expose en substance que :

-la société JJM n’a pas rempli ses obligations fiscales puisqu’elle est redevable de la somme de 45 326,76 euros (de 2014 à 2020), actualisée à la somme de 43 087,76 euros au 5 septembre 2022, toutes les actions en recouvrement ont été vaines,

– la société JJM n’apporte pas la preuve de l’existence d’un actif disponible lui permettant de solder le passif exigible, elle accroît son passif ayant déposé des déclarations de TVA (non réglées) de janvier à juillet 2021 en déclarant un chiffre d’affaires et utilise le défaut de reversement de la TVA comme trésorerie.

Formant appel incident, la Selas OCMJ représentée par M. [O], en qualité de liquidateur de la société JJM, sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le biais du RPVA le 26 juillet 2022 :

‘-repoussant toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,

– faire droit à l’appel incident de la SELAS OCMJ, ès qualités,

– infirmer le jugement rendu en ce qu’il a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL JJM,

– ouvrir à l’égard de cette dernière une procédure de redressement judiciaire,

– renvoyer cause et parties devant le tribunal de commerce de Montpellier pour désignation d’un administrateur judiciaire au bénéfice de la SARL JJM,

– condamner la SARL JJM aux dépens qui seront dits frais privilégiés de procédure collective.’

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Le dossier de l’affaire a été communiqué au procureur général près la cour d’appel de Montpellier, qui a été informé de la date de clôture de l’instruction et de celle de l’audience de plaidoiries.

Instruite conformément aux dispositions de l’article 905 du code de procédure civile, la procédure a été clôturée par ordonnance du 27 septembre 2022, préalablement à l’ouverture des débats.

Par ordonnance de référé en date du 7 septembre 2022, le premier président de cette cour a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 3 juin 2022.

Sur demande de la cour, le conseil de M. [U] et de la société JJM a transmis, par message via le RPVA le 10 octobre 2022, une note en délibéré relative à l’irrecevabilité de l’appel, soulevée d’office, tenant la qualité de M. [U] figurant sur la déclaration d’appel et l’éventuelle régularisation de celui-ci par l’intervention volontaire de la société JJM.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Sur la recevabilité de l’appel

L’article L. 661-1 I 2° du code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2021-1193 du 15 septembre 2021, prévoit que sont susceptibles d’appel (…) les décisions statuant sur l’ouverture de la liquidation judiciaire de la part du débiteur, du créancier poursuivant, du comité social et économique ou, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, des membres de sa délégation du personnel et du ministère public.

Les dirigeants sociaux n’ont pas qualité pour interjeter appel en leur nom propre.

M. [U] a interjeté appel le 20 juin 2022 sans indiquer qu’il agissait en qualité de représentant légal de la société JJM et a donc agi en son nom personnel.

Ni les dispositions de l’article 54 3° du code de procédure civile, dans sa version issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, ni celles de l’article 901 du même code, dans sa version issue du décret n°2020-1452 du 27 novembre 2020, n’imposent que la déclaration d’appel mentionne la qualité d’une partie au titre des mentions obligatoires, dont le non-respect est susceptible de constituer un vice de forme, sanctionné par la nullité, à charge pour la partie, qui l’invoque, de prouver l’existence d’un grief.

La notion de partie à l’instance d’appel renvoie à l’objet du litige et la qualité dans laquelle une partie figure dans la procédure est liée aux prétentions émises par ou contre elle. Si l’acte d’appel délimite la dévolution, l’objet du litige dévolu est aussi déterminé par les prétentions des parties contenues dans leurs conclusions.

À cet égard, M. [U] a conclu en qualité de représentant légal de la société JJM dans les écritures déposées et notifiées le 21 juillet 2022 et signifiées le 29 juillet suivant tandis que ladite société est intervenue volontairement à l’instance dans ce même jeu de conclusions.

Les parties intimées, à savoir, le comptable des finances publiques et la Selas OCMJ, ès qualités, ont conclu au fond à l’encontre de la société JJM, qu’ils ont, de façon patente, implicitement, considéré être représentée par M. [U], son gérant.

De même, il résulte des mentions de l’en-tête de l’ordonnance de référé en date du 7 septembre 2022, versée aux débats, que M. [U] a agi en qualité de gérant de la société JJM (qui intervenait, également, volontairement) devant le premier président de cette cour afin d’obtenir l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement entrepris.

Ainsi, eu égard à l’objet du litige, s’agissant d’une action tendant à l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire de la société JJM à la demande d’un créancier, l’absence de précision, dans la déclaration d’appel de la qualité de dirigeant social de ladite société de M. [U] apparaît comme une erreur manifeste, qui n’est pas de nature à entraîner l’irrecevabilité de l’appel et n’opère pas un changement de partie, tel que prohibé par les dispositions de l’article 547 du même code.

Enfin et au surplus, le défaut de qualité à interjeter appel, qui constitue une fin de non-recevoir, peut être régularisé avant que le juge ne statue et la fin de non-recevoir est écartée si, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l’instance.

2- Sur l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire

Selon l’article L. 631-1, alinéa 2 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l’issue d’une période d’observation (…).

Il résulte des dispositions combinées des articles L. 631-19 I et L. 626-1 de ce code qu’un plan de redressement doit être arrêté lorsqu’il existe une possibilité sérieuse pour l’entreprise d’être redressée et le plan, ainsi arrêté, qui met fin à la période d’observation, peut comporter, s’il y a lieu, l’arrêt, l’adjonction ou la cession d’une ou de plusieurs activités.

Selon l’article L. 631-15 II, à tout moment de la période d’observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, d’un contrôleur, du ministère public ou d’office, peut ordonner la cessation partielle de l’activité ou prononcer la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.

Enfin, l’article L. 640-1, alinéa 1er du même code énonce qu’il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l’article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

Il appartient au créancier sollicitant l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire de son débiteur d’établir, outre le caractère certain, liquide et exigible de sa créance, que la situation financière du débiteur ne lui permet pas de faire face à son passif exigible ; s’agissant d’un fait juridique, l’état de cessation des paiements peut se prouver par tous moyens.

La société JJM a été assignée par acte d’huissier, déposé à l’étude, en date du 25 février 2022 par le comptable des finances publiques, pour une créance d’un montant de 45 325,76 euros ; elle ne s’est pas présentée à l’audience sans en expliquer les motifs considérant ‘ne pas avoir été valablement citée et ne pas avoir été touchée’ sans en tirer aucune conséquence juridique.

La créance, constituée du non-paiement par la société JJM de la taxe sur la valeur ajoutée et de la cotisation foncière des entreprises, est exigible, et s’établit à la date du 5 septembre 2022 à la somme de 43 087,76 euros, du fait de la remise des pénalités eu égard à l’ouverture de la procédure collective.

La société JJM, qui présente un caractère familial, ne conteste ni le passif exigible, établi par le créancier poursuivant à l’appui d’avis de mises en recouvrement délivrés depuis le 14 octobre 2014 jusqu’au 29 mai 2020 et de mises en demeure de payer sur cette même période, ni l’absence d’actif disponible, tel qu’il ressort des nombreuses tentatives d’exécution forcée effectuées par ce dernier [procès-verbaux de perquisition en date des 4 juin 2015 et 8 mars 2018 (local sans nom de la société et vide), procès-verbal de carence en date du 10 septembre 2019 (biens insaisissables), avis à tiers détenteur infructueux sur le seul compte bancaire existant en 2019 et 2020].

Elle se contente de produire, pour étayer ‘une augmentation de l’activité en 2022 et un équilibre des produits et charges’ sur cet exercice, un échange de courriels entre la société Veolia et elle-même en date des 30 juin et 13 juillet 2020, relatifs à un ‘poteau incendie’ avec l’accord-cadre signé le 1er juillet 2020 et les tarifs de la société Veolia, un courriel en date du 6 juillet 2022 dans lequel elle indique à son conseil qu’elle dispose d’un chantier en cours (M. [Y] – devis joint à hauteur de 23 200 euros TTC non signé) et de deux chantiers à venir (Mme [G] et Mme [W] – devis joint seulement pour la seconde et également non signé) et qu’elle ‘travaille tous les jours pour la société Veolia’ ainsi qu’un projet de bilan et des soldes intermédiaires pour l’exercice arrêté au 31 mai 2022.

Ces documents comptables provisoires sur cinq mois d’activité mentionnent un actif immobilisé à hauteur de 45 026 euros (‘autres immobilisations corporelles’ : 44 026 euros, poste inexistant l’année précédente), un actif circulant avec des créances clients de 21 272 euros et des disponibilités de 4589 euros, des capitaux propres négatifs à hauteur de – 247 670 euros, des dettes principalement fiscales et sociales à hauteur de 287 870 euros avec un résultat de – 98 euros (2021 : – 55 468 euros). En outre, ils montrent que les charges du personnel (73 944 euros) représentent 77 % du chiffre d’affaires (95 751 euros).

Les autres pièces produites ne permettent pas, compte tenu de leur caractère incomplet, de retenir la matérialité de chantiers en cours ou futurs et, encore moins, un équilibre de la situation financière et économique eu égard au passif important déjà existant, la société JJM ne contestant pas, de surcroît, que dans le cadre de la poursuite de son activité, elle a déposé des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée sans effectuer de paiement.

En conséquence, le redressement de la société JJM apparaît manifestement impossible, en sorte qu’il y a lieu de confirmer le jugement.

3- Sur les autres demandes

Les dépens afférents à la procédure d’appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective et au vu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la société JJM sera condamnée à payer au comptable des finances publiques la somme de 1 200 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, après débats en chambre du conseil,

Déclare l’appel recevable,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 3 juin 2022 en toutes ses dispositions,

Condamne la SARL JJM à payer au comptable des finances publiques du service des impôts des entreprises Coeur d’Hérault littoral la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

le greffier, le président,

 


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