Cotisation foncière des entreprises : 22 septembre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/02637

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Cotisation foncière des entreprises : 22 septembre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/02637

N° RG 21/02637 – N° Portalis DBVM-V-B7F-K5KU

C1

Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

Me David HERPIN

la SELARL HDPR AVOCAT HARTEMANN-DE CICCO PICHOUD

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 22 SEPTEMBRE 2022

Appel d’une décision (N° RG 2020J133)

rendue par le Tribunal de Commerce de Romans

en date du 19 mai 2021

suivant déclaration d’appel du 14 juin 2021

APPELANTS :

M. [O] [V]

né le 27.10.1966 à [Localité 1] ([Localité 1]),

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 2]

M. [H] [T]

né le 13.05.1961 à [Localité 7] e,

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentés par Me David HERPIN, avocat au barreau de DROME,

INTIMÉES :

S.A.S. AFTER WORK au capital de 200 €, immatriculée au RCS de ROMANS-SUR-ISÈRE sous le numéro B 829.788.645, prise de la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 4]

[Localité 6]

défaillante

S.A.S. LE BLUE NOTE au capital de 136 200 €, immatriculée au RCS de ROMANS-SUR-ISÈRE sous le numéro B 315.126.664, prise en la personne de son représentant légal en exercice,

[Adresse 5]

[Localité 6]

représentée par Me Marie-Christine HARTEMANN-DE CICCO de la SELARL HDPR AVOCAT HARTEMANN-DE CICCO PICHOUD, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me Joseph PALAZZOLO, avocat au barreau de LYON, substitué et plaidant par Me Anna JUNOD, avocat au barreau de LYON,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre,

Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 12 mai 2022, Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère, qui a fait rapport assistée de Mme Sarah DJABLI, greffière, en présence de M Gabriel PAGES, stagiaire, a entendu les avocats en leurs conclusions et Me JUNOD en sa plaidoirie, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour, après prorogation du délibéré

EXPOSE DU LITIGE :

Par acte authentique du 18 mai 2017, la Sas Le Blue Note a donné en location gérance pour trois années à la Sas After Work, un fonds de commerce de bar-discothèque situé à [Localité 6] et exploité sous l’enseigne Le Club.

Selon les termes de cet acte, MM. [O] [V] et [H] [T], associés au sein de la Sas After Work, se sont portés cautions solidaire de cette dernière dans la limite de 100.000 euros.

Par acte d’huissier du 16 novembre 2017, la société Le Blue Note a fait délivrer à la société After Work un commandement de payer la somme de 2553,91 euros et a vainement poursuivi l’exécution des engagements de caution, notamment par voie de saisie-attribution sur les comptes bancaires de MM. [V] et [T].

Sur son assignation et par jugement du 19 mai 2021, le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère a :

– dit la société Le Blue Note recevable et bien fondée en sa demande,

– condamné solidairement la société After Work et MM. [T] et [V] à payer à la société Le Blue Note la somme de 28.523, 46 euros ttc,

– condamné solidairement la société After Work et MM.[T] et [V] à payer à la société Le Blue Note la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– liquidé et mis les dépens solidairement à la charge de la société After Work, de M. [O] [V] et de M. [H] [T].

Suivant déclaration au greffe du 14 juin 2021, MM. [V] et [T] ont relevé appel de cette décision.

Prétentions et moyens de MM [V] et [T] :

Au terme de ses dernières écritures notifiées le 12 avril 2022, MM [V] et [T] demandent à la cour de :

– infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– statuant à nouveau,

– à titre principal :

– débouter la Sas Le Blue Note de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de M.[O] [V] et de M. [H] [T],

– décharger M. [O] [V] et M. [H] [T] de leur engagement de caution envers la Sas Le Blue Note,

– à titre subsidiaire,

– limiter l’éventuelle créance de la Sas Le Blue Note à la somme de 21.323,46 euros déduction faite du dépôt de garantie d’un montant de 7.200 euros,

– condamner la Sas Le Blue Note à payer à M. [O] [V] et M. [H] [T] la somme de 28 523,46 euros en réparation de leur préjudice,

– ordonner la compensation entre les sommes éventuellement mises à la charge de M. [O] [V] et de M. [H] [T] et la condamnation de la Sas Le Blue Note,

– en tout état de cause,

– condamner la Sas Le Blue Note à payer à M. [O] [V] et M. [H] [T] la somme de 3 000 euros chacun,

– condamner la Sas Le Blue Note aux entiers dépens de l’instance.

MM [V] et [T] contestent la créance invoquée par la société Le Blue Note à l’encontre de la société After Work et soutiennent que :

– la société After Work n’était pas redevable de la contribution foncière des entreprises pour l’année 2017 ayant été créée en cours d’année et n’étant redevable des impôts et taxes qu’à compter de son entrée en jouissance,

– la contribution foncière des entreprises est en outre un impôt personnel à la société Le Blue Note, qui exploitait précédemment le fonds, exclu du contrat de location-gérance,

– la taxe locale sur la publicité extérieure a fait l’objet d’un règlement intégral auprès de l’huissier de justice chargé du recouvrement.

Ils font valoir qu’ils sont déchargés de leur engagement de caution, que l’acquéreur de leurs titres de la société After Work s’est engagé à les substituer dans leurs obligations à ce titre et que la société Le Blue Note a accepté cette substitution, n’opposant aucune contestation à leur courrier l’informant de leur volonté de révoquer leur cautionnement.

Ils considèrent en conséquence ne pas être tenus des dettes postérieures au 1er avril 2018, en loyers et taxes et notamment de la taxe foncière qu’aucune stipulation du contrat ne permet de mensualiser et qui n’était exigible qu’au 15 octobre 2018.

Subsidiairement, ils invoquent le paiement des redevances de mai et juin 2018, rappelant que n’étant plus aux affaires depuis le 20 mars 2018, ils n’ont plus accès aux documents sociaux.

Ils soutiennent qu’ils ont versé le dépôt de garantie ainsi qu’en font foi les termes de l’acte notarié de location gérance et reprochent à la société Le Blue Note d’avoir commis une faute en laissant la dette de la société After Work s’aggraver sans entreprendre aucune démarche de recouvrement de sa créance à son encontre, ni destinée à mettre fin à la location-gérance, préférant engager des actions à l’encontre des cautions.

Ils relèvent qu’entre les mois de mars et octobre 2018, l’exploitation du fonds de commerce a été entravée par une fermeture administrative suite à l’intervention de la commission de sécurité.

Prétentions et moyens de la société Le Blue Note :

Selon ses dernières conclusions notifiées le 23 juillet 2021, la société Le Blue Note entend voir :

– confirmer le jugement en tous points,

– condamner solidairement la sociéte After Work, M. [O] [V] et M. [H] [T], en qualité de caution solidaire de la société After Work, à payer à la société Le Blue Note la somme de 28 523,46 euros ttc au titre de l’exécution du contrat de location gérance, outre intérêts légaux à compter du commandement de payer du 16 novembre 2017,

– débouter M.[O] [V] et M. [H] [T] de l’ensemble de leurs moyens, fins et prétentions,

– condamner solidairement la société After Work, M. [O] [V] et M. [H] [T] à payer à la société Le Blue Note la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement la société After Work, M. [O] [V] et M. [H] [T], aux entiers dépens de l’instance,

La société Le Blue Note expose que la société After Work ne s’est pas acquittée des sommes qu’elle était tenue de lui verser en exécution des termes du contrat de location-gérance.

Elle soutient que :

– la taxe locale sur la publicité extérieure et la cotisation foncière des entreprises avaient été contractuellement mises à la charge de la locataire, même si elle était établie au nom du loueur,

– le justificatif de paiement auprès de l’huissier ne démontre pas le règlement de la taxe due pour le second semestre 2017,

– il n’est pas rapporté la preuve du règlement des redevances des mois de mai et juin 2018.

Elle conteste le versement du dépôt de garantie et la possibilité d’une compensation entre sa créance et ce dernier qui a vocation à garantir l’exécution des obligations locatives et particulièrement la remise en état des lieux.

Elle considère que l’acte de cautionnement est parfaitement valable et fait valoir que :

– s’agissant d’un engagement solidaire, il ne peut lui être imposé d’exercer préalablement son action à l’encontre de la débitrice principale,

– elle a fait délivrer un commandement de payer à la société After Work, avant de mettre fin au contrat le 10 octobre 2018.

Elle conteste avoir tardé à résilier la location-gérance au détriment des cautions, comme avoir accepté la substitution de caution suite à la cession des actions de la société After Work, ayant toujours recherché l’exécution du cautionnement auprès de MM [V] et [T].

Elle estime qu’en qualité de dirigeants de la société After Work, ces derniers étaient informés de l’évolution de la créance garantie, les factures et relances leur ayant été adressées comme à la débitrice principale.

Par acte d’huissier du 25 août 2021, transformé en procès-verbal de recherches infructueuses, la société After Work a été assignée mais n’a pas constitué avocat devant la cour dont la décision sera prononcée par défaut.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 14 avril 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

1°) sur la créance de la société Le Blue Note :

Le contrat de location-gérance du 18 mai 2017 stipule que le locataire-gérant acquittera à compter de son entrée en jouissance les impôts et contributions, taxe locale sur la publicité extérieure et contribution économique territoriale, ainsi que les taxes diverses auxquelles le fonds est assujetti même si elles sont établies au nom du loueur, ce dernier conservant à sa charge ses impôts et taxes strictement personnels.

Le contrat met également à la charge du locataire-gérant 36% de la taxe foncière.

Il résulte de ces stipulations que la société After Work a accepté, dès son entrée en jouissance, de supporter la charge d’une partie des impositions auxquelles était soumise la société Le Blue Note, notamment la taxe locale sur la publicité extérieure et la contribution économique territoriale dont la contribution foncière des entreprises est une des composantes, et ce indépendamment de ses propres obligations fiscales.

Elle ne peut en conséquence être valablement exonérée du remboursement à la société Le Blue Note de la contribution foncière des entreprises 2017 aux motifs qu’elle-même n’y était pas assujettie durant l’année de sa création, ni qu’elle n’est entrée dans les lieux que le 18 mai 2017, alors que cette contribution n’est devenue exigible qu’en octobre suivant.

La somme de 548 euros à ce titre est donc justifiée.

M. [V] justifie s’être acquitté de la somme de 609,06 euros entre les mains de l’huissier chargé du recouvrement, le décompte du procès-verbal de saisie à l’encontre de M. [T] permettant de constater que ce montant correspond bien à la taxe locale sur la publicité extérieure.

Il n’est pas rapporté la preuve d’autres règlements, notamment au titre des redevances de location gérance des mois de mai à juin 2018, une simple promesse de paiement émise par sms du 9 mai 2018 étant insuffisante à établir le règlement effectif.

En conséquence, la créance de la société Le Blue Note sur la société After Work est justifiée à concurrence de 27.914,40 euros.

2°) sur le dépôt de garantie :

Le contrat de location-gérance prévoit le versement d’un dépôt de garantie de 7200 euros en garantie du paiement des redevances en principal, frais, accessoires et taxes et de l’exécution des charges et conditions de la location gérance.

L’acte précise que le loueur reconnaît avoir reçu cette somme et en donne quittance au locataire-gérant.

Par ces seules mentions d’un acte authentique, MM. [V] et [T] rapportent la preuve du versement du dépôt de garantie dont la vocation contractuellement définie est bien de garantir le paiement des sommes dues en exécution de la location-gérance.

C’est à bon droit que MM. [V] et [T] entendent voir déduire de la dette de la société After Work, qui au surplus a déjà restitué les lieux, la somme de 7200 euros.

Le solde de la créance s’élève donc à 20.714,40 euros.

3°) sur le cautionnement :

L’acte notarié du 18 mai 2017 contient l’engagement de caution solidaire pris par MM. [V] et [T] en garantie du paiement des redevances, des impôts directs liés à l’exploitation du fonds et l’exécution de chacune des conditions de la location gérance dans la limite de 100.000 euros.

Par courriers du 21 mars 2018, la société Le Blue Note a été informée d’une part que M [F], acquéreur des titres de la société After Work, entendait se substituer à compter du 1er avril 2018, dans l’engagement de caution de MM.[V] et [T], d’autre part que ces derniers souhaitaient révoquer leur cautionnement à compter de cette même date.

Il n’est cependant pas démontré que la société Le Blue Note a accepté cette novation du cautionnement par changement de garants, qui ne peut lui être imposé. En l’absence de son acceptation, MM. [V] et [T] ne peuvent être déchargés de leurs obligations.

4°) sur la faute de la société Le Blue Note :

En application des dispositions de l’article 2314 du code civil, la caution est déchargée de son engagement lorsque par le fait du créancier, elle se trouve privée du bénéfice de subrogation dans ses droits.

Il en résulte que le créancier, qui, par sa faute ou sa négligence, a aggravé le passif de la société cautionnée engage sa responsabilité à l’égard dela caution.

Il résulte du décompte de la société Le Blue Note que les difficultés de règlement des redevances de location gérance par la société After Work ont en réalité commencé en novembre 2017, se sont amplifiées en janvier 2018 pour conduire à un arrêt des paiements en juin de la même année.

La société Le Blue Note a fait délivrer un commandement de payer en novembre 2017, puis à mis en oeuvre des procédures de recouvrement forcé à l’encontre des cautions en avril 2018.

Si elle ne justifie d’aucune démarche postérieure à l’encontre de la débitrice principale, notamment après le dernier paiement partiel du 15 mai 2018, il ressort néanmoins des pièces que le contrat de location-gérance a été résilié d’un commun accord et les lieux restitués le 10 octobre 2018, soit dans un délai de trois mois après l’interruption de tout paiement, qui ne saurait être constitutif d’une inertie fautive du loueur.

Par ailleurs, l’arrêté de fermeture des établissements installés sur le site du  » Blue Note  » à [Localité 6] n’est intervenu que bien postérieurement à cette restitution, le 15 mars 2019, suite à des mises en demeure du 21 septembre 2018, et la précédente fermeture administrative du 9 mars 2018 n’a concerné qu’un seul des établissements dénommé le Pharaon, sans qu’elle fasse manifestement obstacle à l’exploitation de la société After Work qui, le 9 mai, annoncait un règlement du loyer : « grâce à la clientèle du Blue Note qui sera déviée sur le Legend », nouvelle dénomination de l’établissement.

MM. [V] et [T] ne rapportent pas la preuve de fautes commises par la société Le Blue Note de nature à entrainer indirectement la décharge des cautions.

– – – – – – –

En conséquence, le jugement sera confirmé sauf dans le montant de la condamnation au paiement prononcée à l’encontre de MM. [V] et [T], qui sera ramené à la somme de 20.714, 40 euros.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt de défaut, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère du 19 mai 2021 sauf en ce qu’il a condamné MM. [T] et [V], solidairement avec la société After Work à payer à la société Le Blue Note la somme de 28.523, 46 euros ttc,

statuant à nouveau,

CONDAMNE MM. [O] [V] et [H] [T], solidairement avec la Sas After Work, à payer à la Sas Le Blue Note la somme de 20.714, 40 euros ttc,

y ajoutant,

CONDAMNE solidairement MM. [O] [V] et [H] [T] à payer à la Sas Le Blue Note la somme complémentaire en cause d’appel de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE solidairement MM. [O] [V] et [H] [T] aux dépens de l’instance d’appel.

SIGNÉ par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme Alice RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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