ARRÊT N°
N° RG 22/00185 – N° Portalis DBVH-V-B7G-IJ7S
CC
TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES
21 décembre 2021
RG:2021F619
[Adresse 8]
SARL LE FORUM DE BACCHUS
C/
S.E.L.A.R.L. SELARL BRMJ
AucuneMINISTERE PUBLIC
Grosse délivrée le 15 juin 2022 à :
– Me POMIES RICHAUD
– Me [Z]
+MP
COUR D’APPEL DE NÎMES
4ème CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 15 JUIN 2022
APPELANTS :
Monsieur [I] [F], [B] [N], gérant de la SARL LE FORUM DE BACCHUS
né le [Date naissance 5] 1959 à [Localité 10] (78)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
SARL LE FORUM DE BACCHUS, Immatriculée au RCS DE NIMES sous le N° 833.513.021, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié es-qualités au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
S.E.L.A.R.L. BRMJ représentée par Maître [S] [O], Société d’Exercice Libéral à Responsabilité Limitée, au capital de 10.000 €, immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 812 777 142, prise tant en sa qualité de Mandataire judiciaire au redressement qu’en sa qualité de Liquidateur Judiciaire de la SARL LE FORUM DE BACCHUS désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de NIMES du 21 décembre 2021,
[Adresse 6],
[Adresse 9]
[Localité 4]
Représentée par Me Stéphane GOUIN de la SCP LOBIER & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
AucuneMINISTERE PUBLIC Représenté devant la Cour d’Appel de NIMES par Madame la Procureure Générale domiciliée en son Parquet
Palais de Justice
[Adresse 7]
[Localité 2]
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre
Madame Corinne STRUNK, Conseillère,
Madame Claire OUGIER, Conseillère,
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée et qui a présenté ses observations écrites communiquées aux conseils constitués.
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
À l’audience publique du 02 Mai 2022 l’affaire a été mise en délibéré au 15 Juin 2022.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 15 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSÉ
Vu l’appel interjeté le 14 janvier 2022 par la SARL Le Forum du Bacchus et Monsieur [N] à l’encontre du jugement prononcé le 21 décembre 2021 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l’instance n°2021F619.
Vu l’avis du 25 janvier 2022 de fixation de l’affaire à bref délai à l’audience du 2 mai 2022.
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 28 avril 2022 par les appelants et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 26 avril 2022 par la SELARL BRMJ es qualités, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu la signification de la déclaration d’appel délivrée le 27 janvier 2022 à la SELARL BRMJ prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire et de liquidateur de la société Le Forum de Bacchus, par acte laissé à une personne, qui s’est déclarée habilitée à le recevoir pour son destinataire.
Vu la communication de la procédure au Ministère Public qui i a notifié aux parties constituées le 13 avril 2022 : « vu au parquet général qui s’en rapporte à l’appréciation de la cour ».
Vu l’ordonnance du 25 janvier 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 28 avril 2022.
* * *
Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l’égard de la société appelante, sur assignation d’un salarié, le 2 juin 2021. La date de cessation des paiements a été fixée au 1er mars 2020.
Depuis cette date, les co-gérants n’ont pas comparu aux audiences fixées par le tribunal de commerce lequel, par jugement du 18 août 2021 a ordonné la réouverture des débats et ordonné la convocation des parties pour poursuite de la période d’observation ou prononcé de la liquidation judiciaire immédiate.
Le dirigeant a comparu à l’audience de renvoi et la poursuite de la période d’observation a été ordonnée jusqu’à son terme initial, soit le 6 décembre 2021.
Constatant que le dirigeant n’avait toujours pas remis la comptabilité de la société au mandataire judiciaire, un résultat déficitaire en ce qui concerne les exercices 2018 et 2019, l’absence de toute information concernant l’exercice 2020, le tribunal, par jugement du 21 décembre 2021 a considéré que l’élaboration d’un plan de redressement était manifestement impossible et a prononcé la liquidation judiciaire de la société , maintenu la date de cessation des paiements et autorisé la poursuite d’activité jusqu’au 10 janvier 2022.
La société débitrice et le dirigeant ont relevé appel de ce jugement et demandent à la cour de :
Vu les dispositions des articles L 631- 1 à L 632- 4 et suivants du code de commerce.
Vu les pièces comptables versées aux débats,
Réformer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes rendu le 21 décembre 2021 qui a notamment mis fin à la période d’observation et prononcé la liquidation judiciaire de la société débitrice.
Juger n’y avoir lieu à liquidation judiciaire au regard de la possibilité de redressement de l’entreprise et de sa poursuite d’activité qui n’est pas compromise.
Ordonner la poursuite de la période d’observation.
Renvoyer la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Nïmes pour la reprise de la procédure de redressement et l’établissement d’un plan.
Rejeter toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Dire que les dépens seront passés en frais privilégiés dans la procédure collective.
Les appelants exposent que le dirigeant a été victime d’un « burn-out », raison pour laquelle les éléments de comptabilité n’ont pas été remis plus tôt mais que la cour dispose maintenant de tous les données comptables établissant que l’exercice 2020 est excédentaire. Le passif comportant des créances contestées, notamment les taxations d’office, l’excédent dégagé permettre d’apurer le passif de la société. Ils versent aux débats la comptabilité de l’exercice 2021 et ils communiquent un prévisionnel qui justifie de la possibilité d’arrêter un plan de redressement, de sorte que la période d’observation doit être poursuivie afin de permettre l’établissement de ce projet de plan.
L’intimée demande à la cour, dans ses dernières conclusions, au visa de l’article L.640-1 du code de commerce de :
Dire et juger que les appelants ne contestent pas l’état de cessation des paiements au jour où la cour statue et sollicitent le bénéfice d’un redressement judiciaire,
Pour le surplus,
Dire et juger que le redressement de la société est manifestement impossible le jour où la cour statue,
En conséquence, débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Condamner le dirigeant à lui payer une somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Passer les dépens en frais privilégiés de procédure collective.
L’intimée observe que l’état de cessation des paiements n’est pas contesté puisqu’il est conclu à un redressement judiciaire. Elle expose que la comptabilité de l’exercice 2020 démontre une dégradation des disponibilités financières, que la comptabilité de l’exercice 2021 démontre que le prévisionnel de cet exercice n’était pas sérieux car les achats de marchandises ont été deux fois plus importants que ceux escomptés et les achats de matières premières trois fois plus importants. En outre l’excédent brut d’exploitation résulte uniquement des subventions perçues par la société intimée en raison de la pandémie. Le prévisionnel d’activité sur 3 exercices qui pronostique une augmentation du chiffre d’affaires de 185% sur la partie restauration pour la seule année 2023 tandis que les charges d’exploitation diminueraient de 13% ne sont pas crédibles. Elle ajoute que le passif déclaré est de l’ordre de 498 000 euros dont 448 881 euros définitivement admis, qu’il existe un passif postérieur à l’ouverture de la procédure collective pour environ 52 000 euros. L’état de la trésorerie n’est pas connu. La démonstration est ainsi faite d’une activité chroniquement déficitaire, ce qui rend le redressement manifestement impossible.
Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
DISCUSSION
Sur le passif :
Il ressort du dossier de première instance communiqué en application de l’article 968 du code de procédure civile, que le passif de la société débitrice, selon rapport du mandataire judiciaire pour l’audience du 14 décembre 2021 s’élève à la somme de 478 984,50 euros. Les opérations de vérification sont en cours et le principal créancier est la banque CIC en raison d’une créance de 365 154,27 euros à échoir.
Les appelants ne contestent pas leur état de cessation des paiements puisqu’ils concluent au maintien du redressement judiciaire au motif que le redressement de la société n’est pas manifestement impossible. Ils en veulent pour preuve la comptabilité de l’exercice 2021 qui dégage un excédent brut d’exploitation de 59 498 euros et un bénéfice de 37 293 euros, outre une trésorerie positive de 72 904 euros. Ils présentent un prévisionnel intégrant une reprise des activités au plus tard à janvier 2023 et s’orientent vers un plan impliquant un versement de dividendes constants de 25 631 euros.
Compte tenu de la pandémie de Covid 19, il est difficile de faire une analyse de la comptabilité de l’exercice 2021 car le restaurant de la société a été partiellement fermé et, en contrepartie, la société a perçu des subventions d’un montant de 56 087 euros.
Si l’on suit les explications des appelants, l’année 2022 serait une année sans activité, donc sans rentrée financière.
L’année 2023 verrait, selon le prévisionnel, augmenter le chiffre d’affaires de la partie restauration de 185%, ce qui implique une augmentation corrélative des achats de matières premières. Il est pourtant prévu une diminution de celles-ci dans le prévisionnel d’activité. De même, il est prévu une
Le passif, hors prêt bancaire, s’élève à 113 830,23 euros. Les appelants indiquent en outre qu’ils se conformeraient à l’échéancier de l’emprunt de 365 154,27 euros dans le cadre du plan.
Il s’agit là d’un passif important à apurer pour une société dont l’excédent brut d’exploitation ressort à 59 498 euros. Surtout, les appelants ne donnent aucune explication sur l’apparition de dettes en cours de redressement judiciaire (ouvert le 2 juin 2021). En effet, la cotisation foncière des entreprises n’a pas été payée en 2021 (admise pour 789 euros et 620 euros), la dette Urssaf s’est accrue entre juin et décembre 2021 pour atteindre la somme de 28 296,25 euros qui a été admise. Ces dettes sociales et fiscales, admises, n’ont pas vocation à être réduites, contrairement à ce que soutiennent les appelants.
L’apparente bonne santé financière de la société débitrice en 2021 s’est fait donc au détriment du paiement des charges fiscales et sociales, lesquelles n’étaient déjà pas payées auparavant (pour la TVA) au vu de l’état des créances produit.
L’apparition de ces nouvelles dettes en cours de redressement judiciaire démontre que le redressement de l’entreprise est manifestement impossible et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
L’équité et la situation économique des appelants imposent de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
Les dépens seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de procédure collective.
Arrêt signé par Mme CODOL, Présidente de Chambre et par Monsieur LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,