Cosmétique : 28 mars 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/14806

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Cosmétique : 28 mars 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/14806

28 mars 2017
Cour d’appel de Paris
RG n°
16/14806

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 28 MARS 2017

(n° 255 ,6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/14806

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Juin 2016 -Tribunal de Grande Instance de Paris – RG n° 16/51629

APPELANTE

Madame [J] [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1] ALGERIE

Représentée et assistée de Me Eléonore VOISIN de la SELEURL ELEONORE VOISIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1829

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/032850 du 10/10/2016 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

Madame [Q] [M] veuve [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1927 à [Localité 2]

Représentée et assistée de Me Benoît LE PAPE de la SARL LE PAPE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0447

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Février 2017, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Mireille QUENTIN DE GROMARD, Conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente de chambre

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Mme Mireille QUENTIN DE GROMARD, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Martine ROY-ZENATI, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 2 mars 2000 M. [S] [X] et son épouse Mme [Q] [M] ont donné à bail à M. [A] [U] et à Mme [J] [D] divorcée [U] un local commercial sis [Adresse 2]) afin d’y exploiter une activité de ‘vente de parfumerie-cosmétiques-perruques et autres articles de coiffure-bazar-import et export.

Le bail a été renouvelé au 1er avril 2008, par acte sous seing privé du 24 novembre 2008, entre Mme [Q] [M] veuve [S] [X] et venant à ses droits et Mme [D].

Aux termes de ce bail il est notamment stipulé au titre des conditions à la charge du locataire ‘de ne pouvoir se substituer quelque personne que ce soit, ni prêter les lieux loués, même temporairement à des tiers, ni de mettre en gérance libre, sans autorisation préalable du mandataire du bailleur’ ;

Le 7 octobre 2015 Mme [M] a fait délivrer au preneur un commandement, visant la clause résolutoire insérée au bail et reproduisant les dispositions de l’article L. 145-41 du code de commerce, de faire cesser la location gérance libre du fonds de commerce exploité dans les locaux loués, consentie à la société Huamza Beauté, interdite par le bail, dans le mois du dit commandement.

Ce commandement étant demeuré infructueux Mme [M] a, par acte du 24 décembre 2015 assigné Mme [D] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins notamment de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail, ordonner l’expulsion du preneur et de le voir condamner au paiement d’une indemnité d’occupation.

Par ordonnance contradictoire du 22 juin 2016 ce juge des référés a :

– constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 8 novembre 2015,

– ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de Mme [J] [D] et de tout occupant de son chef des lieux sis [Adresse 3]) avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier,

– dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte,

– dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désignée par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois non renouvelable à compter de la signification de l’acte, à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément à ce que prévoient les articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

– fixé à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par Mme [J] [D], à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires,

– rejeté le surplus des demandes,

– condamné Mme [J] [D] aux dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.

Mme [D] a interjeté appel de cette ordonnance le 6 juillet 2016.

Par conclusions transmises le 31 janvier 2017 Mme [D] demande à la cour, sur le fondement des articles 808 et 809 du code de procédure civile, L. 110-4 I et L. 145-41 du code de commerce et 2224 du code civil, de :

– réformer l’ordonnance attaquée en toutes ses dispositions,

– dire et juger que les demandes de Mme [X] sont irrecevables,

– dire n’y avoir lieu à référé,

– débouter Mme [X] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner Mme [X] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.

Elle fait valoir que Mme [M] est prescrite à invoquer la gérance libre sans consentement alors que le juge du tribunal de grande instance de Paris a notamment consenti au changement d’affectation du local et que les époux [X] étaient au courant de l’exploitation du fonds de commerce en location-gérance depuis 2003 au moins, attitude valant acquiescement.

Par ses conclusions transmises le 7 février 2017 Mme [Q] [M] demande à la cour sur le fondement des articles 808 et 809 du code de procédure civile, L. 145-41 du code de commerce et 2224 du code civil de :

– confirmer l’ordonnance en toutes ses dispositions,

– débouter Mme [D] de l’ensemble de ses demandes,

– la condamner au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle réplique n’avoir jamais donné son autorisation, ni son époux, à la mise en location gérance libre du fonds de commerce que ce soit en 1999 ou en 2009, et que l’existence d’un accord tacite à la location gérance consentie à la société Huamza Beauté n’est pas établie et soutient en conséquence l’absence de prescription de son action.

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu’aux termes de l’article 809 du code de procédure civile ‘Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire’ ;

Qu’aux termes de l’article L. 110-4 I du code de commerce ‘Les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes’ ;

Considérant qu’aux termes du bail du 24 novembre 2008 il est notamment prévu au titre des conditions à la charge du locataire ‘de ne pouvoir se substituer quelque personne que ce soit, ni prêter les lieux loués, même temporairement à des tiers, ni de mettre en gérance libre, sans autorisation préalable du mandataire du bailleur’ ;

Considérant en l’espèce que Mme [M] a fait délivrer à Mme [D] le 7 octobre 2015 un commandement visant la clause résolutoire insérée au bail et reproduisant les dispositions de l’article L. 145-41 du code de commerce de faire cesser la location gérance du fonds de commerce exploité dans les locaux loués consentie à la société Huamza Beauté, interdite par le bail, dans le mois dudit commandement ;

Considérant que Mme [D] ne communique aucune autorisation préalable de Mme [M] l’autorisant à mettre les lieux loués en gérance libre notamment au profit de la société Huamza Beauté visée au commandement précité ;

Qu’au soutien de son argumentation sur la connaissance par les bailleurs de ce qu’en raison de son handicap elle n’exploitait plus directement les lieux depuis le mois de juin 1999 et que M. et Mme [X] en avaient connaissance depuis l’origine, Mme [D] appelante invoque plusieurs décisions de justice ; que cependant l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris du 16 mars 1999 l’autorisant à modifier la destination du bail commercial, sans l’autorisation de son ex-mari, a été rendue dans le cadre de son divorce, procédure à laquelle les bailleurs n’étaient pas parties ; qu’il en est de même de l’ordonnance du 7 décembre 1999 rendue par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris, dans le cadre de la liquidation des régimes matrimoniaux, autorisant Mme [D] à régulariser seule le nouveau bail commercial portant sur le fonds de commerce sis [Adresse 4] ou encore de l’ordonnance rendue sur requête par le président du tribunal de grande instance de Paris du 5 novembre 1999 autorisant Mme [D] à supprimer le délai d’exploitation de deux années du fonds de commerce qu’elle entend mettre en location-gérance ; que l’appelante ne justifie même pas avoir signifié ces décisions à ses bailleurs alors qu’elle ne conteste pas l’existence de la clause du bail lui interdisant, même temporairement, de mettre les lieux loués en gérance libre sans leur autorisation préalable, le courrier du 25 mars 1999 de son conseil, Maître [H]- au mandataire des époux [X] -la société GFF Patrimoine- ne concernant que la modification de l’activité du bail ;

Qu’en outre si dans son attestation du 16 janvier 2016 M. [H] [I] indique avoir reçu à trois reprises la visite de M. [X] alors qu’il exploitait sous couvert de la société Nounou SARL un commerce de parfumerie et cosmétique et prétend que M. [X] ‘était parfaitement au courant du fait qu’-il- était locataire-gérant’, cette allégation n’est corroborée par aucun élément objectif et la présence de M. [I] et d’une société Nounou SARL dans les lieux loués étant insuffisante à elle seule à le démontrer ;

Considérant que Mme [D] communique également, à titre de preuve de la connaissance par les bailleurs de la location-gérance, un courrier du 2 avril 2003 de M. [X] adressé à ‘Mme [D] et ST Nounou’ relativement à un rideau mécanique ; que cependant contrairement à ce qu’affirme l’appelante aucun des termes de ce courrier ne démontre que le bailleur connaissait la qualité de locataire-gérant de la société Nounou ;

Qu’il convient par ailleurs de relever que les avis d’échéance de loyer ont toujours été établis par les époux [X] au nom de Mme [D] ;

Qu’il s’ensuit que l’existence d’un accord tacite donné par les époux [X], puis par Mme [M] après le décès de son époux, à la mise en location gérance du fonds de commerce en 1999 ou en 2009 au profit de la société Nounou ou de la société Huamza Beauté -seule visée par le commandement délivré le 7 octobre 2015- n’est pas établie avec l’évidence requise devant le juge des référés ; qu’ainsi l’action de Mme [M] relativement à l’infraction au bail commise par Mme [D] suite à la mise en location gérance du fonds au profit de la société Huamza Beauté n’est pas prescrite et est recevable ;

Considérant que la délivrance de mauvaise foi du commandement ne saurait s’apprécier qu’à la date de délivrance de cet acte ou résulter d’agissements fautifs de la part du bailleur à une période contemporaine à celle-ci ; que l’allégation de l’appelante d’une fraude de la bailleresse Mme [M] à ses droits de locataire afin de vendre le local commercial sans lui permettre de faire usage de son droit de préemption n’est manifestement pas démontrée par les pièces qu’elle communique ;

Considérant que, faute d’avoir fait cesser la location gérance prohibée ou d’avoir contesté les causes du commandement dans le délai imparti, prévu au contrat du bail, la clause résolutoire est dès lors acquise ; qu’il convient en conséquence de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit du bail à la date du 8 novembre 2015, ordonné l’expulsion de Mme [D] et fixé l’indemnité d’occupation mensuelle provisionnelle due à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux à une somme égale au montant du loyer contractuel outre les taxes, charges et accessoires ;

Considérant que le sort des dépens et de l’indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge ;

Qu’à hauteur de cour, il convient d’accorder à Mme [M], contrainte d’exposer des frais pour se défendre, une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que Mme [D], partie perdante, doit supporter les dépens de l’instance d’appel lesquels seront recouvrés conformément à la loi sur l’aide juridictionnel et ne saurait bénéficier d’une somme au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable l’action de Mme [M],

Confirme l’ordonnance attaquée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Mme [D] à verser à Mme [M] une somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de Mme [D] au titre des frais irrépétibles,

Condamne Mme [D] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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