Cosmétique : 22 juin 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/02572

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Cosmétique : 22 juin 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/02572

22 juin 2023
Cour d’appel de Pau
RG n°
21/02572

PS/SB

Numéro 23/2177

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 22/06/2023

Dossier : N° RG 21/02572 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H6IU

Nature affaire :

Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

S.A.S.U. LES COMPTOIRS DE LA BIO [Localité 5] 2

C/

[K] [M]

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 22 Juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 22 Février 2023, devant :

Madame CAUTRES-LACHAUD, Président

Madame SORONDO, Conseiller

Madame PACTEAU, Conseiller

assistées de Madame LAUBIE, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

S.A.S.U. LES COMPTOIRS DE LA BIO [Localité 5] 2

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Maître GIRAL de la SELARL BAQUE-GIRAL, avocat au barreau de TARBES et Maître SARTOR-AYMARD, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME :

Monsieur [K] [M]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Maître BRUS loco Maître BEDOURET, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 28 JUIN 2021

rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : 20/00106

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [K] [M] a été embauché le 10 avril 2017 par la Sasu l’Épicerie verte en qualité de directeur de magasin, statut cadre, niveau 7, suivant contrat à durée indéterminée régi par la convention collective Fruits et légumes ‘ Epicerie et produits laitiers (commerce de détail) (3244), moyennant un salaire brut horaire de 16,81 € et mensuel de 2.549,57 € pour 151,67 heures.

Par «’avenant’» du 1er novembre 2017, le contrat de travail a été transféré à la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 avec le maintien du statut cadre, classification C 1 de la convention collective des fruits et légumes ‘ épicerie et produits laitiers.

M. [M] a été placé en arrêt de travail du 2 au 14 septembre 2019 puis du 23 septembre au 4 novembre 2019.

Le 23 septembre 2019, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 22 octobre 2019 et mis à pied à titre conservatoire.

Le 23 octobre 2019, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 4 novembre 2019.

Le 8 novembre 2019, il a été licencié pour faute grave.

Le 25 novembre 2019, il a demandé par le biais de son conseil des précisions sur les motifs de son licenciement.

Le 16 décembre 2019, la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 lui a répondu.

Le 14 mai 2020, il a saisi la juridiction prud’homale d’une contestation du licenciement et de demandes financières subséquentes.

Par jugement du 28 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Pau a :

– dit que le licenciement de M. [K] [M] est dénué de cause réelle et sérieuse,

– condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à verser à M. [K] [M] les sommes de :

. 264,52’€ au titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire,

. 26,45’€ au titre des congés payés sur le rappel de salaire,

. 7.849,59’€ au titre de l’indemnité de préavis,

. 784,95’€ au titre des congés payés sur préavis,

. 1 689,83’€ au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

. 8.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à remettre à M. [K] [M] un bulletin de salaire rectificatif et les documents de fin de contrat dont l’attestation Pôle Emploi prenant en compte le présent jugement,

– dit qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article L. 1235-4 du code du travail,

– débouté M. [K] [M] de l’ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions,

– débouté la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 de ses autres demandes,

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour les condamnations de remise de documents que l’employeur est tenu de délivrer et celles en paiement de créances salariales ou assimilées dans la limite de neuf mois de salaire calculée sur la moyenne des trois derniers mois de salaire (art R.’1454-28 du code du travail),

– dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire pour le surplus,

– rappelé que les intérêts légaux courent à compter de la saisine de la juridiction soit le 14 mai 2020, en matière de rémunération et à compter de la date de prononcé du présent jugement pour les dommages et intérêts,

– condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 aux entiers dépens.

Le 28 juillet 2021, la Sasu Les Comptoirs de la bio [Localité 5] 2 a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 6 octobre 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 demande à la cour de :

– la dire et juger recevable et bien fondée en son appel,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que le licenciement de M. [K] [M] n’était pas nul,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que le licenciement de M. [K] [M] était dénué de cause réelle et sérieuse et par conséquent en ce qu’il l’a condamnée à lui payer la somme de 264,52’€ à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, la somme de 26,45’€ au titre des congés payés sur le rappel de salaire, la somme de 7.849,59’€ au titre de l’indemnité de préavis, la somme de 784,95’€ au titre des congés payés sur préavis, la somme de 1.689,83’€ au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement et la somme de 8.000’€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit qu’il n’y avait pas lieu à application de l’article L.’1235-4 du code du travail,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [K] [M] la somme 1.000’€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’il l’a condamnée aux entiers dépens,

– statuant à nouveau,

– débouter M. [K] [M] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner M. [K] [M] à lui payer la somme de 2.000’€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 4 janvier 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, M. [K] [M] demande à la cour de’:

– à titre principal,

– réformer le jugement de première instance en ce qu’il l’a débouté de l’ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions,

– statuant à nouveau,

– condamner la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 au paiement de la somme de 20.932,16’€ (8 mois de salaire) à titre d’indemnité pour licenciement nul, en lieu et place de la condamnation d’un montant de 8.000’€ de dommages et intérêts pour licenciement nul,

– confirmer le jugement en ce qu’il a’:

. condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à lui verser les sommes de :

264,52’€ au titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire,

26,45’€ au titre des congés payés sur le rappel de salaire,

7.849,59’€ au titre de l’indemnité de préavis,

784,95’€ au titre des congés payés sur préavis,

1.689,83’€ au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

1.000’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

. condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à lui remettre un bulletin de salaire rectificatif et les documents de fin de contrat dont l’attestation Pôle emploi prenant en compte le présent jugement,

. dit qu’il n’y a pas lieu à faire application de l’article L. 1235-4 du code du travail,

. débouté la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 de ses autres demandes,

. rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour les condamnations de remise de documents que l’employeur est tenu de délivrer et celles en paiement de créances salariales ou assimilées dans la limite de neuf mois de salaire calculée sur la moyenne des trois derniers mois de salaire (art R.’1454-28 du code du travail),

. dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire pour le surplus,

. rappelé que les intérêts légaux courent à compter de la saisine de la juridiction soit le 14 mai 2020, en matière de rémunération et à compter de la date de prononcé du présent jugement pour les dommages et intérêts,

. condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 aux entiers dépens,

– à titre subsidiaire,

– confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a :

. dit que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

. condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à lui verser les sommes de :

264,52’€ au titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire,

26,45’€ au titre des congés payés sur le rappel de salaire,

7.849,59’€ au titre de l’indemnité de préavis,

784,95’€ au titre des congés payés sur préavis,

1.689,83’€ au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

8.000’€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1.000’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

. condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à lui remettre un bulletin de salaire rectificatif et les documents de fin de contrat dont l’attestation Pôle emploi prenant en compte le présent jugement,

. dit qu’il n’y a pas lieu à faire application de l’article L. 1235-4 du code du travail,

. débouté la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 de ses autres demandes,

. rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour les condamnations de remise de documents que l’employeur est tenu de délivrer et celles en paiement de créances salariales ou assimilées dans la limite de neuf mois de salaire calculée sur la moyenne des trois derniers mois de salaire (art. R.’1454-28 du code du travail),

. dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire pour le surplus,

. rappelé que les intérêts légaux courent à compter de la saisine de la juridiction soit le 14 mai 2020, en matière de rémunération et à compter de la date de prononcé du présent jugement pour les dommages et intérêts,

. condamné la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 aux entiers dépens,

– condamner la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à lui verser la somme de 3.000’€ que le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I Sur la cause du licenciement

L’employeur soutient que le licenciement est fondé sur une faute grave tandis que le salarié fait valoir qu’il est nul au motif qu’il est en lien avec son état de santé, et subsidiairement, qu’il est sans cause réelle et sérieuse.

La lettre de licenciement, complétée par le courrier du 16 décembre 2019, fixe les limites du litige.

Elle est rédigée ainsi’:

«’Vous êtes employé au sein de notre société en qualité de directeur de magasin et, à ce titre, plusieurs obligations vous incombent.

Dans le cadre de notre visite du magasin le jeudi 19 septembre 2019, nous avons eu la stupeur de constater que celui-ci était dans un état déplorable.

Les rayons n’étaient absolument pas réapprovisionnés mais, pire, la saleté y régnait.

Nous nous sommes, en outre, aperçus que la réserve était grande ouverte, et là encore, sale et non rangée.

Cette situation n’est pas acceptable et ne peut être tolérée.

Elle nuit à l’image de notre magasin.

Par ailleurs, nous avons été contraints à plusieurs reprises de vous rappeler vos obligations s’agissant de la tenue des plannings et la gestion des stocks.

Vous n’avez pas pris la pleine mesure de nos alertes puisque les difficultés ont persisté.

Nous ne pouvons aujourd’hui envisager de maintenir notre collaboration au regard des fonctions et responsabilités qui sont les vôtres.

Nous n’avons pu recueillir vos explications compte tenu de votre absence à l’entretien préalable.

Nous vous informons donc que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave’».

Le courrier du 16 décembre 2019 du conseil de l’employeur l’a complétée comme suit’:

«’Je ne pense pas que le premier grief, à savoir l’état déplorable du magasin constaté lors d’une visite en date du 19 septembre 2019, doive donner lieu à de plus amples explications.

S’agissant des reproches au titre de la tenue des plannings, ma cliente a été amenée à alerter M. [M] à plusieurs reprises verbalement, mais également par mails.

Or, les semaines précédant sa convocation à l’entretien préalable, ma cliente devait encore faire le constat de plannings non datés, non signés, et non conformes aux attentes.

Pour exemple, la demi-heure de pause demandée par la direction au delà de 6 heures de travail consécutif n’était pas visible sur les plannings.

De la même manière, il s’est avéré que des heures d’inventaire avaient été récupérées par anticipation.

Encore, la semaine du 26 au 31 août 2019, M. [M] a fait travailler Mme [Z] 5 heures le vendredi pendant son jour de repos ce qui a conduit à ce que cette salariée n’ait aucun jour de repos hebdomadaire cette semaine là.

S’agissant de la gestion des stocks, force est de constater que M. [M] n’a nullement suivi les prescriptions de ma cliente.

En début d’année 2019, il lui avait été demandé une réduction rapide de stock à 280.000 €.

Or, au 31 juillet 2019, le stock était toujours supérieur à 300.000 €’».

En application des articles L.1132-1 et L.1132-4 du code du travail, aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé et un tel licenciement est nul.

Suivant l’article L.1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige concernant l’application de ces dispositions, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie adverse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

M. [M] invoque les éléments suivants :

– il a été en arrêt de travail du 2 au 15 septembre 2019 et a repris son poste le 17 septembre 2019 : il est constant qu’il a été en repos le lundi 16 septembre 2019 et a repris son poste le 17 septembre 2019′;

– la visite du magasin du 19 septembre 2019 est intervenue deux jours après sa reprise de poste’;

– il a de nouveau été en arrêt de travail du 23 septembre au 4 novembre 2019′;

– ses arrêts de travail sont en lien avec ses conditions de travail’: il ne fournit aucun élément de nature à caractériser un lien entre ses deux arrêts de travail et ses conditions de travail’;

– il a été recruté sur une promesse d’un salaire annuel fixe de 30.000 € brut et d’une rémunération variable de 6.000 € annuels selon des objectifs annuels à définir’; ces objectifs n’ont jamais été définis’; il a sollicité de sa hiérarchie la mise en place d’une rémunération variable ou à tout le moins de primes visant à récompenser ses bons résultats et s’est vu opposer un refus.

Sur ce point, il justifie qu’il a été destinataire d’un mail du 28 mars 2017 contenant promesse d’embauche moyennant un salaire fixe de 30.000 € brut annuel et un salaire variable de 6.000 € sur objectifs à définir. Pour autant, il est constant qu’il a souscrit ensuite un contrat de travail mentionnant uniquement un salaire fixe, et non établi qu’il a sollicité sa hiérarchie aux fins d’obtention d’une rémunération variable ou de primes.

D’après la lettre de licenciement et le courrier du 16 décembre 2019, le licenciement est motivé par trois griefs allégués comme constitutifs d’une faute grave, sans rapport avec l’état de santé de M. [M], dont il n’est pas question, et les faits qu’il caractérise, à savoir un arrêt de travail du 2 au 15 septembre 2019, un second arrêt de travail postérieurement à la mise à pied conservatoire et à la première convocation préalable à un éventuel licenciement, ainsi que la mise en ‘uvre par l’employeur d’une visite du magasin le 19 septembre 2019, deux jours après sa reprise de poste le 17 septembre 2019, ne laissent pas supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte en raison de l’état de santé. Le licenciement n’est donc pas nul. Le jugement sera confirmé sur ce point.

En application de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse. La cause réelle est celle qui présente un caractère d’objectivité et d’exactitude. La cause sérieuse suppose une gravité suffisante.

Suivant l’article L.1232-5 du code du travail, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Il incombe à l’employeur d’en rapporter la preuve.

Concernant le grief tenant à l’état du magasin lors de la visite du 19 septembre 2019, sale, aux rayons non approvisionnés, la réserve ouverte, sale et non rangée, l’employeur soutient sans le démontrer que cette visite était programmée et produit’:

– des photographies :

. la première, horodatée du 19 septembre 2019 à 13 h 27, d’un étal de pains emballés, dont certaines références sont absentes’;

. la seconde, horodatée du 19 septembre 2019 à 13 h 26, d’une balance à la disposition des clients sur une table dans le magasin’; sur la table, en bois, une étiquette autocollante en principe destinée aux produits pesés par les clients est apposée, et il existe en quelques endroits des restes d’étiquettes autocollantes que l’on a manifestement tenté de retirer sans y parvenir complètement ;

. la troisième, horodatée du 19 septembre 2019 à 13 h 26, de l’entrée du magasin, avec d’un côté une caisse n’amenant aucune observation, et de l’autre un grand casier en bois contenant des cartons mis à la disposition des clients’; quelques cartons sont au sol rangés le long du mur et un est à proximité de la caisse’;

. la quatrième, horodatée du 19 septembre 2019 à 13 h 25, du plateau d’une balance, dont il n’est pas permis de déterminer l’emplacement dans le magasin ou la réserve ou ailleurs’; le plateau semble recouvert d’un peu de poussière particulièrement mise en valeur par le soleil’;

. la cinquième, en noir et blanc et non horodatée, du bas d’un mur, vraisemblablement à l’arrière d’un bâtiment, avec une bouteille en plastique peut-être destinée à recevoir des mégots et des mégots au sol autour ;

– deux factures de prestations de nettoyage de janvier et septembre 2019, d’un même montant de 769,06€’;

– un mail du 2 septembre 2019 de Mme [ST] [B] à M. [H] [S]’: «'[K] en arrêt maladie pour 2 semaines, je suis chargée de faire un point sur les plannings de [Localité 5] 2 à la demande de [E] [G]. Plusieurs anomalies sont présentes sur le planning de cette semaine, mais aussi sur ceux du mois d’août qu’on doit corriger. C’est pourquoi je passe demain matin à 9 h 00 afin que nous fassions un point toutes les deux et que nous organisions les plannings des semaines à venir. Je t’informe avoir déjà prévu avec l’équipe des changements pour cette semaine, c’est à dire’: [C] sera de matin le mercredi 04/09 et [W] sera de matin samedi 07/09. Ils seront 3 à l’ouverture et 3 à la fermeture.’»

– un mail du 3 septembre 2019 de Mme [ST] [B], à M. [E] [G], directeur d’exploitation’: «” Par contre pour la semaine prochaine’:

. [K] en arrêt, [F] en congé et [J] en congé à partir du mardi…

. Ils vont se retrouver à deux le mercredi soir et samedi après-midi, il est préférable de leur prévoir un renfort responsable pour fermer.

. J’irai tous les 2 jours faire les caisses, la monnaie caisse et les remises en banque.

. [D] passera à l’improviste 2 fois dans la semaine.’»

– un mail du 14 septembre 2019 de M. [G] ‘: «’Pendant l’absence de M. [M] à compter du 16/09/2019, [D] [T] prend la direction du magasin et se fait seconder sur Nobel par [V] [X] et [L] [O]. Merci de sensibiliser les équipes à ce sujet. Un gros travail est à fournir sur ce magasin en terme de suivi commercial, d’organisation du personnel, et du suivi administratif. Merci de me remonter la moindre difficulté sur la mise en place de cette organisation.’»

– un SMS adressé le 19 septembre 2019 à 13 h 45 par M. [U] [Y], président de la société Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2, à Mme [I] [Y], ainsi rédigé’: «’13 h pas de [K] il ne revient que samedi, La réserve est grande ouverte en bordel et dégueulasse, Le magasin est blindé de ruptures dans un état pitoyable le sol est crade des cartons par terre etc… Le meuble de pesée j’en parle même pas…’»

Il n’est pas établi, comme allégué par l’employeur, que la visite du magasin par M. [Y], président de la société Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2, était programmée et que M. [M] en avait été informé, ni qu’elle a eu lieu en sa présence, et il est à considérer que cette présence n’était pas souhaitée puisque l’employeur soutient, sans étayer ses dires d’un quelconque élément, que M. [Y] est arrivé sur les lieux peu avant 13 heures, ce que le SMS de celui-ci contredit puisqu’il mentionne «’13 h’», et qu’il savait pour connaître les horaires de travail de M. [M] que celui-ci travaillait le 19 septembre 2019 de 7 h à 13 heures. Le SMS de M. [Y] est une preuve que l’employeur se fait à lui-même et aucun élément ne permet d’exclure une intervention de M. [Y] sur les lieux avant la prise de photographies, par exemple concernant le carton au sol près de la caisse. Au demeurant, ces photographies ne sont pas celles d’un magasin particulièrement sale aux rayons non approvisionnés ni d’une réserve non fermée et également sale mais, à un instant T, de quelques grains de poussière sur une balance dont il n’est pas permis de déterminer si elle est en service dans le magasin, de cartons dont un seul de nature par son emplacement à gêner le passage, et qui peut être rangé aussi vite qu’il a été abandonné, d’un seul étal, de pains, dont certaines références sont absentes, et d’une balance à la disposition des clients sur une table en bois inadaptée à son usage puisqu’il est manifestement impossible d’en retirer complètement de façon aisée les étiquettes autocollantes de prix que certains clients y apposent. Ainsi, ce grief n’est pas établi, ce sans qu’il soit besoin de déterminer si M. [M] était à même de faire en sorte que le magasin soit en bon état d’entretien et correctement approvisionné, eu égard à son absence du 2 au 16 septembre 2019 et à celle de deux salariés, en congés la semaine du 9 au 14 septembre, et aux mesures prises par l’employeur, s’agissant, de «’faire les caisses, la monnaie caisse et les remises en banque’» tous les deux jours, et du remplacement de M. [M] dans ses fonctions de directeur par M. [D] [T] le 16 septembre 2019, soit pendant un jour.

Relativement au grief de mauvaise gestion du stock, l’employeur produit’:

– un mail adressé le 29 janvier 2019 par M. [G], directeur d’exploitation, au salarié : «’Il faut absolument surveiller le niveau stock théorique du magasin (aujourd’hui 323000 €), notamment sur’: compléments alimentaires, cosmétiques, boissons non alcoolisées, boissons chaudes, vrac, confitures/pâtes à tartiner. Il faut rapidement passer sous la barre des 280.000 €.’»’;

– un mail adressé le 11 février 2019 par M. [G] au salarié : «’Suite à notre conversation de ce jour, merci de faire le nécessaire afin de réduire rapidement et considérablement les stocks sur le vrac, compléments alimentaires, confitures/pat ainsi que sur les huiles’»’;

– un mail adressé le 10 mai 2019 par M. [G], directeur d’exploitation, au salarié : «’Les objectifs de stocks fixés en début d’année, ne sont toujours pas atteints. De grosses commandes ont été passées en compléments et cosmétiques et le niveau de stock PGC ne descend pas (en dehors des flux poussés). Il est impératif de corriger la tendance sans plus attendre.’»

– un document «’stock théorique au 31 mai 2019’» avec un montant total de 324.633,912 €’;

– un mail du 13 décembre 2019 de M. [R] [P], à Mme [Y]’: «’Ci-joint le mail de [E] de janvier demandant une réduction de stock à 280.000 €. Le stock au 31/07/2019 est de 301.356 €. Ce stock théorique fait apparaître un grand nombre de stocks négatifs (plus de 400) preuve de la mauvaise gestion des stocks. Cette problématique a été validée par un inventaire rayon «’compléments et cosmétique’» réalisé le 06/12/2019 qui fait apparaître un écart de 15.834 €.’»

– plusieurs mails informant des directeurs de magasin dont M. [M] de livraisons de produits en sus de leurs commandes’:

. le 4 juin 2019 pour une livraison le 7 juin 2019, de biscuits fourrés à la noix de coco et de sirops,

. le 16 juillet 2019 pour une livraison à une date indéterminée de 20 kg de sucre de fleur de coco destiné à la vente en vrac,

. le 18 juillet 2019 pour une livraison à une date indéterminée de 2 colis de taboulé aux raisins,

. le 9 août 2019, pour une livraison le 13 août, de riz de diverses références destiné à la vente en vrac,

. le 2 septembre 2019, pour une livraison le 3 septembre, de gourdes et d’un colis de chaque produit d’une gamme de poissons en conserve.

– les première et cent-treizième et dernière page d’une facture d’achat du 30 juin 2019 relative au transfert le 18 avril 2019, suite à la fermeture du magasin de [Localité 6], d’une partie du stock de ce magasin à celui dont M. [M] était directeur, pour un montant de 35.187.64 € HT et 39.278,90 € TTC.

Ce grief ne peut-être retenu étant observé’:

– que le mail du 13 décembre 2019 de M. [R] [P] n’est accompagné d’aucun document notamment comptable propre à permette de s’assurer de l’état du stock du magasin lors de la mise à pied conservatoire ;

– que l’employeur a reproché au salarié le 10 mai 2019 de ne pas avoir atteint l’objectif fixé sans tenir compte du transfert quelques semaines auparavant, le 18 avril 2019, d’une partie du stock du magasin de [Localité 6] à celui dont M. [M] était directeur’;

– que même à considérer un stock de 301.356 € au 31 juillet 2019, compte tenu du transfert subi en avril 2019 d’une partie du stock du magasin de [Localité 6] à hauteur de 35.187.64 € HT et 39.278,90 € TTC, l’objectif d’un stock de 280.000 € est atteint et même dépassé’;

– que M. [M] était régulièrement livré par la société Les Comptoirs du Bio [Localité 5] 2 de marchandises dont il n’avait pas passé commande, livraisons dont il était informé dans des délais tels qu’il lui était difficile d’ajuster ses propres commandes’;

– que même à supposer l’objectif non atteint, aucun élément ne permet de retenir que cela résulterait d’une mauvaise volonté délibérée du salarié et serait donc susceptible de constituer une faute.

Concernant la mauvaise tenue des plannings, l’employeur produit’:

– un mail adressé le 10 mai 2019 par M. [G], directeur d’exploitation, au salarié : «” Merci de revoir également les plannings, beaucoup de présence sur les horaires creux…’»’;

– un mail adressé le 3 septembre 2019 par Mme [ST] [B], salariée, à M. [G], directeur d’exploitation’: «’Les dernières semaines d’août, [K] a fait récupérer les heures d’inventaire initialement prévu le 31/08 par anticipation à son équipe. Or, il a été dit à plusieurs reprises que les heures supplémentaires sont récupérées une fois qu’elles sont acquises. Aussi, sur la semaine du 26/08, il a fait travailler Mle [N] [Z] (CDD en cours) le jour de son repos hebdo, elle n’a pas eu de repos dans la semaine en dehors du dimanche’»’;

– les plannings du 19 au 24 août 2019, du 26 au 31 août 2019, du 2 au 7 septembre, du 9 au 14 septembre et du 16 au 21 septembre, qui permettent de déterminer’:

. que Mme [Z] a travaillé le 30 août alors qu’elle était initialement mentionnée en congé et a eu en remplacement un congé le 4 septembre’;

. que quatre salariés ont travaillé quelques heures en moins la semaine du 19 au 24 août en prévision d’un inventaire prévu le samedi 31 août.

M. [M] produit ses plannings personnels de mars 2018 à avril 2019 et ses bulletins de paie pendant toute la relation de travail. Il est à constater que rien n’est prévu sur les plannings pour pouvoir mentionner une pause et qu’il a régulièrement accompli des heures supplémentaires dont, au vu de ses bulletins de paie, aucune ne lui a été payée.

Ce grief ne peut non plus être considéré comme établi, étant observé’:

– que l’employeur ne justifie que d’une seule observation concernant les plannings antérieurement à la mise à pied, le 10 mai 2019, relativement à la présence trop importante de salariés aux heures creuses, et non à un quelconque manquement aux règles impératives en matière de durée du travail ;

– que l’employeur ne produit aucune note de service relativement à l’organisation du temps de travail, aux heures supplémentaires, au temps de pause… ni aucun élément permettant de déterminer qu’il a été communiqué aux directeurs de magasin dont M. [A] que l’entreprise interdit la prise de repos compensateur de remplacement avant les heures supplémentaires,

– qu’au vu des plannings produits, il sont tels qu’il n’est pas permis d’y mentionner un temps de pause ;

– qu’il n’est pas déterminé que le temps de pause n’était pas pris par les salariés travaillant sous les ordres de M. [M]’;

– qu’il n’est pas interdit de faire travailler un salarié 6 jours par semaine, l’article L.3132-1 du code du travail prohibant de faire travailler un salarié plus de 6 jours par semaine’; il n’est pas non plus interdit, comme allégué par l’employeur, qui reproche à M. [A] d’avoir fait travailler Mme [Z] 39,75 h la semaine du 26 au 31 août, de faire travailler un salarié au-delà de la durée légale hebdomadaire de 35 heures, la durée maximale hebdomadaire de travail étant de 48 h en application de l’article L.3121-32 du code du travail.

Il résulte de ces éléments qu’aucun grief n’est établi de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

II Sur les conséquences du licenciement

M. [A] a droit’:

– à un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée, outre les congés payés afférents,

– en application de l’article 3.7 de la convention collective nationale du commerce de détail des fruits et légumes, épicerie et produits laitiers, à une indemnité compensatrice d’un préavis de trois mois, outre les congés payés afférents,

– en application des articles L.1234-9 et R.1234-1 et suivants du code du travail, à une indemnité de licenciement égale à un quart de mois de salaire par année d’ancienneté.

Le quantum des condamnations prononcées en première instance n’est pas discuté et est justifié au regard des bulletins de salaire et attestation destinée à Pôle Emploi produits par M. [M]. Le jugement sera confirmé sur ces points. Il doit être également confirmé en ce qu’il a condamné la société Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à remettre au salarié un bulletin de salaire (novembre 2019) et une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiés.

En application de l’article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.

Pour un salarié ayant deux années complètes d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés, cette indemnité est comprise entre un montant minimal de 3 mois de salaire brut et un montant maximal de 3,5 mois de salaire brut.

C’est par une juste appréciation des faits de la cause tenant notamment à l’âge du salarié (54 ans) et à sa situation de chômage postérieurement au licenciement que le premier juge a fixé l’indemnisation du préjudice résultant du licenciement à la somme de 8.000 €. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2020, date de réception de la lettre de convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation, valant sommation de payer au sens de l’article 1231-6 du code civil, pour les créances de nature salariale, et à compter de la décision en fixant le montant concernant les créances indemnitaires, en application de l’article 1231-7 du code civil. Le jugement sera infirmé relativement à la date du point de départ des intérêts des créances de nature salariale.

La société Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 emploie habituellement moins de 11 salariés. Les dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail ne sont donc pas applicables.

Sur les autres demandes

La Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2, qui succombe, sera condamnée aux dépens exposés en appel, ainsi qu’à payer à M. [M] une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Pau du 28 juin 2021 hormis sur le point de départ des intérêts des créances de nature salariale,

Statuant de nouveau sur ce point et y ajoutant,

Dit que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2020,

Condamne la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 aux dépens exposés en appel,

Condamne la Sasu Les Comptoirs de la Bio [Localité 5] 2 à payer à M. [K] [M] une somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande de ce chef.

Arrêt signé par Madame CAUTRES-LACHAUD, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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