COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 18 NOVEMBRE 2022
N°2022/341
Rôle N° RG 22/00845 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BIWVE
[L] [A]
C/
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA
S.C.P. SCP [J]-[G] PRISE EN LA PERSONNE DE MAITRE [F] [G]
Copie exécutoire délivrée
le : 18/11/2022
à :
Me Guillaume TATOUEIX, avocat au barreau de TOULON
Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 27 Avril 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00756.
APPELANT
Monsieur [L] [A], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Guillaume TATOUEIX, avocat au barreau de TOULON
INTIMEES
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON
S.C.P. SCP [J]-[G] prise en la personne de Maître [F] [G] ès-qualités de Mandataire ad’hoc de L’EURL KNS GLOBAL SOURCING (anciennement EURAFFAIRES SERVICE)., demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SILVAN, Président de chambre chargé du rapport, et Madame Estelle DE REVEL, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SILVAN, Président de chambre
Mme Dominique PODEVIN, Présidente de chambre
Madame Estelle DE REVEL, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2022..
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2022.
Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Selon contrat à durée indéterminée du 30 mai 2016, M.[A] a été recruté par la SARL Euraffaires Services en qualité de responsable d’agence, statut cadre.
Le 1er juin 2016, le siège de la SARL Euraffaires Services a été transféré de [Localité 6] à [Localité 4].
Le 5 juillet 2016, M.[A] a été victime d’un accident du travail.
A compter du 14 février 2017, la SARL Euraffaires Services a adopté la dénomination «’KNS Global Sourcing’»
Le 15 février 2017, la société KNS Global Sourcing et M.[A] ont signé une convention de rupture conventionnelle du contrat de travail de M.[A].
Le 10 avril 2017, la société KNS Global Sourcing a procédé à une déclaration de cessation des paiements auprès du tribunal de commerce de Toulon.
Parallèlement, par jugement du 20 avril 2017, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la société KNS Global Sourcing et désigné la SCP [G]-[J] en qualité de mandataire-liquidateur.
Par jugement du 25 avril 2017, le tribunal de commerce de Toulon a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société KNS Global Sourcing.
Le 22 juin 2017, le tribunal de commerce de Toulon a rétracté son jugement ouvrant une procédure de redressement judiciaire au profit de la société KNS Global Sourcing.
Le 16 octobre 2017, M.[A] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulon de demande en paiement d’un rappel de salaire pour le mois de mars 2017, de l’indemnité de rupture conventionnelle telle que fixée à la convention du 15 février 2017, de l’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages-intérêts en réparation des préjudices moral et financier et d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Par jugement du 27 avril 2018, le conseil de prud’hommes de Toulon a débouté M.[A] de ses demandes.
Le 24 mai 2018, M.[A] a fait appel de ce jugement.
Selon jugement du 16 décembre 2021, la clôture pour insuffisance d’actif de la procédure de liquidation judiciaire de la société KNS Global Sourcing a été prononcée.
La SCP Brouard-Daude a été désignée en qualité de mandataire ad hoc pour représenter la société KNS Global Sourcing.
A l’issue de ses conclusions du 1er mars 2019, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, M. [A] demande de’:
»infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de toulon en date du 27 avril 2018 en en ce qu’il l’a débouté de toutes ses demandes’;
et statuant à nouveau’;
»constater la validité de son contrat de travail et de la rupture conventionnelle’;
»fixer sa créance salariale à inscrire au passif privilégié de la société KNS Global Sourcingcomme suit’:
– salaire mois de mars 2017′:7’186,85’€’;
– indemnité de rupture conventionnelle telle que fixée à la convention du 15 février 2017′: 12’801,36’€’;
– indemnité compensatrice de congés payés’:9’625’€’;
– intérêts légaux à compter de la saisine’;
partant’:
»dire et juger sa créance salariale entrant dans le champ des créances à prendre en charge par le fonds national de garantie des salaires’;
»condamner les AGS au paiement de l’équivalent net de l’intégralité de la créance salariale au titre du régime de la garantie des salaires’;
»confirmer le jugement dont appel en ses autres dispositions’;
»débouter en tout état de cause l’Unedic délégation AGS CGEA Ile-de ‘ France Ouest de l’intégralité de ses demandes et prétentions’;
»condamner L’Unedic délégation AGS CGEA Ile-de ‘ France Ouest à lui payer la somme de 5.000’€ à titre de dommages-intérêts’;
»fixer au passif privilégié de la liquidation judiciaire de la société KNS Global Sourcingla somme de 2.000’€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;
»condamner l’unedic délégation AGS cgea ile-de-france ouest aux entiers dépens.
Selon ses conclusions du 13 juin 2022, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, la SCP [J]-[G], ès qualités, demande de’:
»en toute hypothèse’:
»débouter M. [A] de sa demande d’intérêts courus au taux légal’;
»debouter M. [A] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
à titre principal’:
»confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulon en ce qu’il a reconnu l’absence de lien de subordination juridique entre M. [A] et la société KNS Global Sourcing et l’absence de prestation de travail de M. [A], l’a débouté de ses demandes’;
»le réformer pour le surplus’;
»en conséquence, juger que M. [A] n’était soumis à aucun lien de subordination juridique ou que l’emploi allégué est fictif, ou, en tout état de cause, qu’il y a eu novation de la créance’;
»débouter M. [A] de ses demandes au titre du paiement de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, du salaire du mois de mars 2017, de l’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages et intérêts pour préjudice moral’;
»condamner M. [A] à lui payer la somme de 2’000.00’€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;
»condamner M. [A] au paiement des entiers dépens’;
subsidiairement’:
»débouter M. [A] de ses demandes au titre du paiement de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, du salaire du mois de mars 2017, de l’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages et intérêts pour préjudice moral’;
»débouter M. [A] de l’ensemble de ses autres demandes’;
»condamner M. [A] aux frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens.
Au terme de ses conclusions du 15 juin 2022, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, l’AGS-CGEA demande de’:
»en toute hypothèse’:
»débouter M.[A] de sa demande d’intérêts courus au taux légal’;
»exclure de la garantie de l’AGS la somme éventuellement allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
à titre liminaire’:
»declarer irrecevables les pièces visées par M.[A] dans ses écritures d’appel et listées à la fin de celles-ci en l’absence de communication en temps utile à l’AGS’;
»débouter M.[A] de ses demandes en l’absence de justificatif.’;
à titre principal’:
»confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de toulon en ce qu’il a reconnu l’absence de lien de subordination juridique entre M.[A] et la société KNS Global Sourcing et l’absence de prestation de travail de M.[A], l’a débouté de ses demandes’;
»le réformer pour le surplus’;
»en conséquence, juger que M.[A] n’était soumis à aucun lien de subordination juridique ou que l’emploi allégué est fictif, ou, en tout état de cause, qu’il y a eu novation de la créance’;
»débouter M.[A] de ses demandes au titre du paiement de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, du salaire du mois de mars 2017, de l’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages et intérêts pour préjudice moral’;
»condamner M.[A] à lui payer la somme de 2’000.00’€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;
»condamner M.[A] au paiement des entiers dépens’;
subsidiairement’:
»débouter M.[A] de ses demandes au titre du paiement de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, du salaire du mois de mars 2017, de l’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages et intérêts pour préjudice moral’;
»déclarer irrecevable la demande de condamnation d l’AGS au paiement de dommages et intérêts’;
»condamner M.[A] aux frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens’;
en tout état de cause’;
»En tout état de cause, fixer toutes créances en quittance ou deniers’;
»Dire et juger que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6 à 8 du code du travail (anciens articles L. 143.11.1 et suivants) que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15 (ancien article L. 143.11.7) et L. 3253-17 (ancien article L. 143.11.8) du code du travail’;
»Dire et juger que la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l’article D3253-5 du code du travail’;
»Dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 2 septembre 2022. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.
SUR CE’:
sur la demande de l’AGS-CGEA tendant à voir rejeter des débats les pièces de M.[A]’:
moyens des parties’:
L’AGS-CGEA expose que M.[A] lui a communiqué ses premières conclusions le 18 septembre 2018, que ces conclusions visent des pièces et comprennent en annexe une liste de pièces, que, toutefois, aucun bordereau ni aucune pièce ne lui ont été communiqués concomitamment aux écritures de M.[A], que le délai pour conclure de l’AGS-CGEA expirait le 18 décembre.2018, que les pièces visées par M.[A], qui ne lui ont pas été communiquées en temps utile en violation du principe de la contradiction, devront être déclarées irrecevables et qu’il conviendra d’en tirer toutes conséquences de droit.
M.[A] n’a pas conclu sur ce point.
réponse de la cour’:
L’article 15 du code de procédure civile prévoit que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense.
L’article 135 du même code précise que le juge peut écarter du débat les pièces qui n’ont pas été communiquées en temps utile.
En l’espèce, le 31 mai 2018, M.[B] a déposé une premier jeu de conclusions comprenant un bordereau de communication de pièces. Il l’a communiqué à l’AGS-CGEA le 18 septembre 2018. Dans le cadre de ses premières conclusions au fond du 4 décembre 2018, l’AGS-CGEA a conclu à l’irrecevabilité des pièces de M.[A] , faute de communication de celles-ci par l’appelant. Elle a réitéré cette demande dans ses secondes conclusions au fond du 28 novembre 2019 puis ses dernières conclusions au fond du 15 juin 2022.
Il ne ressort ni du dossier WinciCa de la procédure ni des pièces produites aux débats par M. M.[A], alors que l’AGS-CGEA conteste expressément la communication des pièces invoquées par M.[B] à son égard, que ce dernier s’est acquitté envers l’AGS-CGEA de son obligation de communication de pièces. Dès lors, conformément à l’article 135 du code de procédure civile, il conviendra, non pas de déclarer irrecevables les pièces de M.[A], mais de les écarter des débats concernant l’AGS-CGEA.
L’absence de communication régulière par M.[A] de ses pièces à l’AGS-CGEA n’a pas permis à celle-ci de préparer utilement sa défense. M.[A] sera par conséquent déboutée de ses demandes à son encontre.
sur le fond’:
moyens des parties’:
M.[A] soutient que la SCP [J]-[G], ès qualités, et l’AGS-CGEA ne peuvent contester l’existence d’une relation de travail entre lui et la société KNS Global Sourcing aux motifs que son embauche a fait l’objet d’une déclaration auprès de l’Urssaf, qu’il dispose d’un contrat de travail régulier tant sur la forme que sur le fond et qui prévoit notamment la rémunération convenue, sa qualification, ses horaires de travail et son lieu d’affectation, qu’il s’est vu remettre périodiquement les bulletins de salaire correspondant à ses fonctions et reprenant les éléments contractuels, qu’il a déclaré les revenus perçus auprès de l’administration fiscale, que la CPAM n’a pas contesté l’origine professionnelle de l’accident dont il a été la victime le 5 juillet 2016 et que l’existence d’une relation de travail est confirmée par les mentions figurant notamment dans le certificat de travail remis à l’occasion de la rupture de son contrat de travail.
Il indique en outre qu’il a accompli une prestation de travail sous la subordination de la société KNS Global Sourcing que, cependant, en raison de ses problèmes médicaux, et particulièrement à la suite de l’accident du travail dont il a été victime et ayant donné lieu à sept mois d’arrêt de travail, il n’a pu pleinement occuper ses fonctions que durant une partie réduite de son contrat, diminuant proportionnellement les éléments de preuve susceptibles de confirmer l’existence d’une prestation de travail, que son poste impliquait une large autonomie d’organisation, que durant la période ayant précédé son accident de travail, la taille et l’effectif très réduits de l’entreprise ne justifiaient pas un formalisme excessif dans l’expression des relations de travail entre les parties, des consignes, des décisions ou des directives de la direction générale, des comptes-rendus d’activité ou de mise en place et d’animation de l’agence par ses soins et que le lien de subordination peut encore être valablement déduit du déménénagement de [Localité 6] sur [Localité 4] du siège de la société, des pouvoirs qui lui ont été donnés pour agir à la place du gérant en son absence, de ses déplacements en région parisienne, du témoignage du nouveau gérant de la société.
Il expose que ses créances salariales à l’encontre de la société KNS Global Sourcing ont été régulièrement déclarées, sans contestation, aux organes de la procédure, savoir d’abord Maître [R] [H] puis Maître [G]-[J], que sa créance, incontestable et exigible, ressort du champ de garantie de l’AGS, qu’il est donc en droit de solliciter la prise en charge par celle-ci du salaire du mois de mars 2017, de l’indemnité compensatrice de congés payés et de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle.
Il expose en outre que le préjudice moral et financier qu’il a subi en raison du refus de prise en charge justifie sa demande en dommages-intérêts distincte.
La SCP [J]-[G], ès qualités, conclut à l’absence de contrat de travail entre M.[A] et la société KNS Global Sourcing aux motifs’que le transfert du siège social de l’employeur de Paris vers Bandol, qui a été décidé après l’embauche de M.[A], a été acté avant la cession des parts sociales de cette société à la société Samson’&’Morin gérée par l’épouse de M.[A], que, de même, la cession des parts sociales de la société Euraffaires Services à un M. [T] a eu lieu avant la rupture conventionnelle du contrat de travail de M.[A], que ces montages étaient destinés à éviter tout lien entre Mme [A] et l’embauche de son mari ou la rupture conventionnelle du contrat de travail de ce dernier, que M.[A], par la détention de 20 mandats sociaux au sein de différentes structures ayant leur siège social dans différentes régions et ayant des activités distinctes, dont au moins l’une a fait l’objet d’une procédure collective connaît parfaitement le mécanisme des procédures collectives et le dispositif de garantie des salaires, que M.[A] ne justifie pas de l’exécution d’une prestation de travail, qu’il ne rapporte pas la preuve d’un lien de subordination et que la décision de la CPAM qui a reconnu l’origine professionnelle de l’accident dont il a été la victime le 5 juillet 2016 ne permet pas d’établir l’existence de la relation de travail dès lors que la CPAM n’a pas compétence pour juger de la réalité d’un contrat de travail,
Subsidiairement, concernant les sommes réclamées par M.[A], le mandataire liquidateur fait valoir’ qu’il ressort du bulletin de paie de M.[A] du mois de mars que l’ensemble des sommes réclamées par ce dernier lui ont été versées par virement en date du 31 mars 2017, qu’il est curieux de constater que M. [A] n’ait adressé aucune réclamation en ce sens à son employeur mais ait préféré attendre l’ouverture de la procédure collective pour porter réclamation en mai 2017 auprès de Maître [H], puis fin juillet auprès du mandataire liquidateur, que, concernant les dommages-intérêts sollicités, M.[A] ne dispose d’aucun lien de droit direct à l’encontre de l’AGS, celle-ci ayant été appelée en première instance en qualité d’intervenante forcée sur le fondement des dispositions de l’article L. 625-1 du code de commerce, que cette demande est irrecevable et que M.[A] ne justifie pas de l’existence de son préjudice ni du montant des dommages-intérêts sollicités.
La SCP [J]-[G], ès qualités, expose enfin, concernant la demande au titre des intérêts au taux légal’que cette prétention est irrecevable, car formée pour la première fois en cause d’appel, qu’il résulte des dispositions de l’article L 622-28 du code de commerce que le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels et qu’en l’état de la liquidation judiciaire en date du 20 avril 2017 et de la clôture pour insuffisance d’actif en date du 16 décembre 2021, cette demande sera écartée.
Sur le fond, l’AGS-CGEA conclut à l’absence de contrat de travail entre M.[A] et la société KNS Global Sourcing et à l’irrecevabilité de la demande de M.[A] au titre des intérêts au taux légal et reprend les mêmes moyens que ceux développés par la SCP [J]-[G], ès qualités, au soutien des mêmes prétentions.
réponse de la cour’:
Il est de jurisprudence constante qu’en présence d’un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve.
Selon contrat à durée indéterminée du 30 mai 2016, M.[A] a été recruté par la société Euraffaires, devenue KNS, en qualité de responsable d’agence, statut cadre, moyennant un salaire mensuel de 8’341,85’€ brut. Il a fait l’objet d’une déclaration préalable à l’embauche le 27 mai 2016. Le 5 juillet 2016, il a été placé en arrêt de travail pour accident du travail. Il verse aux débats des bulletins de paie émis par son employeur entre mai 2016 et mars 2017. Le 15 février 2017, M.[A] et son employeur ont signé une convention de rupture conventionnelle du contrat de travail de celui-ci. Le certificat de travail et l’attestation Pôle Emploi ont été signés par la société KNS le 12 avril 2017.
Il en ressort en conséquence que M.[A] justifie d’un contrat de travail apparent et qu’il ne lui appartient pas de rapporter la preuve de l’existence d’une prestation de travail sous la subordination de la société KNS. Au contraire, il incombe à la SCP [J]-[G], ès qualités, de démontrer le caractère fictif de ce contrat de travail.
En l’espèce, la SARL Euraffaires Services a été constituée par acte du 15 octobre 1991.
Courant octobre 2014, les associés de la SARL Euraffaires Services ont cédé l’intégralité de leurs parts sociales à la société Réduction Groupe dont le président et associé majoritaire était M. [D]. Ce dernier est devenu gérant de la SARL Euraffaires Services.
Le 1er juin 2016, le siège de la SARL Euraffaires Services a été transféré de [Localité 6] à [Adresse 5].
Au terme d’une assemblée générale du 14 octobre 2016, Mme [A] a pris la gérance de la société Réduction Groupe en remplacement de M.[D]. Cette société a en outre adopté la dénomination SAS Samson et Morin. Son siège social était à [Adresse 5]. Elle exerçait une activité de prise de participations et d’intérêts sous toutes formes dans toutes sociétés de droit français et étrangers (holding) et de gestion, contrôle et mise en valeur de ces participations et intérêts. Elle utilisait le nom commercial «’Euraffaires Services’».
L’extrait RCS de la société KNS Services du 18 novembre 2016, mentionne à cette date M.[T] en qualité de gérant.
Au 31 décembre 2016, le capital social de la société Samson Morin était détenu à 80’% par M.[T] et à 20’% par Mme [A].
Le 14 février 2017, M.[T] a cédé l’intégralité de ses parts sociales au sein de la société Samson Morin à Mme [A].
L’extrait RCS de la société KNS Services du 15 mars 2017, mentionne à cette date M.[T] en qualité de gérant.
La déclaration de cessation des paiements de la société KNS Services du 10 avril 2017 a été signée par M.[T], agissant en qualité de gérant de cette société.
Il en ressort ainsi que, lors de l’embauche de M.[A], la société Réduction Groupe, associée unique de M.[A], était gérée par M.[D] qui détenait la totalité de son capital social, que cette société, devenue ultérieurement la société Samson et Morin n’a été gérée par Mme [A] qu’à compter du 14 octobre 2016 et que celle-ci a eu la qualité d’associée minoritaire de cette société Samson et Morin jusqu’au 31 décembre 2016.
L’historique des changements de siège social de la société KNS, de la présidence de son associé unique ou de la répartition du capital social de ce chef ne permet pas de relever un mécanisme frauduleux. Par ailleurs, le mandataire liquidateur ne verse aux débats aucun élément de nature à rapporter la démonstration de la fictivité du contrat de travail de M.[A].
Il sera en conséquence retenu que M.[A] avait la qualité de salarié de la société KNS.
Il est de jurisprudence constante qu’il incombe à l’employeur de rapporter la preuve du paiement du salaire.
En conséquence, la seule mention sur le bulletin de paie du mois de mars 2017 du paiement des sommes dues, en l’absence de tout autre justificatif attestant de la réalité de ce virement, ne suffit pas à en démontrer le paiement.
Selon l’article 1330 code civil, la novation ne se présume pas ; la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte.
Il est exact que M.[A] n’a pas sollicité le paiement des sommes dues avant l’ouverture d’une procédure collective à l’égard de son employeur. Cependant, il ne peut se déduire de cette seule absence de réclamation, en l’absence de toutes autres circonstances, la démonstration de la volonté non équivoque de M.[A] de nover sa créance salariale à l’égard du passif de la société KNS.
M.[A] est en conséquence bien fondé à solliciter la fixation de sa créance au passif de de liquidation judiciaire de la société KNS au titre de son salaire du mois de mars 2017, de l’indemnité de rupture conventionnelle et de l’indemnité compensatrice de congés payés.
M.[A] a été débouté de ses demandes à l’égard de l’AGS-CGEA. Il n’y a donc pas lieu à se prononcer sur l’existence du préjudice qu’il invoque à l’appui de sa demande en dommages-intérêts distinces.
Conformément à l’article L 622-28 du code de commerce, le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels. La demande formée de ce chef par M.[A] sera donc rejetée.
sur le surplus des demandes’:
Il a été partiellement fait droit aux demandes de M.[A]. La SCP [J]-[G], ès qualités, sera en conséquence déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles. Enfin, il sera alloué à M.[A] la somme de 1’500’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement,
DECLARE M.[A] recevable en son appel,
ECARTE des débats les pièces de M.[A] en ce qui concerne l’AGS-CGEA uniquement’;
INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Toulon du 27 avril 2018 en ce qu’il a débouté M.[A] de ses demandes à l’encontre de la société KNS’;
LE CONFIRME pour le surplus,
STATUANT à nouveau sur les chefs d’infirmation et y ajoutant’;
FIXE la créance de M.[A] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL KNS Global Sourcing aux sommes suivantes’:
– 7’186,85’€ au titre du salaire mois de mars 2017′;
– 12’801,36’€ à titre d’indemnité de rupture conventionnelle telle que fixée à la convention du 15 février 2017′:
– 9’625’€ à titre d’ indemnité compensatrice de congés payés’;
– 1’500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
DIT que les dépens seront fixés au passif de la liquidation judiciaire de la SARL KNS Global Sourcing.
Le Greffier Le Président