Convention de rupture conventionnelle : 15 juin 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00701

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Convention de rupture conventionnelle : 15 juin 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00701

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 JUIN 2022

N° RG 21/00701

N° Portalis DBV3-V-B7F-ULEM

AFFAIRE :

[F] [P]

C/

S.A.S. C3F

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Septembre 2016 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Boulogne-Billancourt

N° Section : Encadrement

N° RG : F15/00143

Copies exécutoires et copies certifiées conformes délivrées à :

– Me Céline FABIE VERDIER

– Me Philippe CHATEAUNEUF

Le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

DEMANDEUR devant la cour d’appel de Versailles saisie le 26 février 2021 comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt n°840 F-P+B+I de la Cour de cassation (chambre sociale) du 17 septembre 2020 cassant et annulant l’arrêt n°205 rendu par la 17ème chambre de la cour d’appel de Versailles le 03 avril 2019

Monsieur [F] [P]

né le 07 Janvier 1975 à [Localité 5], de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Céline FABIE VERDIER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1897

****************

DÉFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

S.A.S. C3F

N° SIRET : 423 155 746

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe CHATEAUNEUF, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 643 et par Me Christian BROCHARD de la SCP AGUERA AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 8 substitué par Me Jean MIKOLAJCZAK, avocat au barreau de LYON

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 avril 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Perrine ROBERT, Vice-président placé,

Greffier, lors des débats : Madame Carine DJELLAL,

FAITS ET PROCÉDURE,

A compter du 1er septembre 2011 avec reprise d’ancienneté au 1er septembre 2006, Monsieur [F] [P] a été engagé en qualité de responsable développement social par la société par actions simplifiée C3F, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

La relation de travail était régie par la convention collective des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 (dite SYNTEC).

Par courrier daté du 3 décembre 2014 réceptionné le 4 décembre suivant, la société a notifié aux services de la DIRECCTE une convention de rupture conventionnelle conclue avec le salarié et datée du 17 novembre précédent aux fins d’homologation.

Par suite, le contrat de travail liant les parties a été rompu le 24 décembre 2014.

Par requête reçue au greffe le 29 janvier 2015, Monsieur [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin de contester la validité de sa rupture conventionnelle et d’obtenir le versement de diverses sommes.

Par jugement du 15 septembre 2016, auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, section encadrement, a :

– dit que la convention de rupture conventionnelle était régulière et débouté Monsieur [P] de toutes ses demandes indemnitaires ;

– ordonné à C3F de délivrer à Monsieur [P] un certificat de travail corrigé, avec une date d’embauche au 1er septembre 2006 ;

– condamné la SAS C3F aux entiers dépens.

Par déclaration d’appel du 3 novembre 2016, Monsieur [P] a interjeté appel de cette décision devant la cour d’appel de Paris.

Le 9 novembre 2016, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris a déclaré l’appel irrecevable.

Par déclaration d’appel du 3 avril 2017, Monsieur [P] a formé un nouvel appel devant la cour d’appel de Versailles.

Par arrêt du 3 avril 2019, la cour d’appel de Versailles a :

– déclaré l’appel interjeté par Monsieur [P] irrecevable ;

– débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné Monsieur [P] aux dépens.

Monsieur [F] [P] a formé un pourvoi contre cette décision.

Par décision du 17 septembre 2020, la chambre sociale de la Cour de cassation a :

– cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 3 avril 2019 par la cour d’appel de Versailles ;

– remis l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

– condamné la société C3F aux dépens.

Par déclaration du 26 février 2021, Monsieur [P] a saisi la cour d’appel de Versailles en tant que cour de renvoi pour que celle-ci statue sur le jugement rendu le 15 septembre 2016 par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 1er mars 2022 auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, le salarié expose notamment que :

– il n’a pas bénéficié de l’entretien qui lui aurait permis de convenir avec son employeur du principe d’une rupture conventionnelle selon l’article L. 1237-12 du code du travail, ce dernier lui ayant remis des documents antidatés ;

– il n’a pas bénéficié du délai de rétractation impératif de quinze jours à compter de la signature de la convention de rupture prévu par l’article L. 1237-13 du code du travail, en ce que l’employeur a envoyé la convention à la DIRECCTE le 3 décembre 2014, à savoir le lendemain du jour de sa signature par la DIRECCTE, la société ne l’ayant par ailleurs pas informé sur l’étendue de ses droits en la matière ;

– son consentement a été vicié en contradiction avec l’article L. 1237-11 du code du travail, en ce qu’il n’a ni bénéficié de l’entretien prévu par l’article L. 1237-12 du code du travail, ni été informé de ses droits par son employeur, outre le fait que ce dernier a exercé sur lui des pressions visant à le pousser au départ et qui caractérisent une violence morale ;

– dès lors que la rupture conventionnelle est nulle et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il est fondé à obtenir le paiement de différentes sommes ;

– bien que la société argue de ce qu’elle employait neuf salariés au moment de la rupture de son contrat de travail, elle a manipulé ses effectifs entre différentes filiales de façon à s’affranchir de ses obligations ;

– il a été embauché le 1er septembre 2006 et non le 1er septembre 2011 par la société C3F.

Par conséquent, il demande à la cour de:

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 15 septembre 2016 en ce qu’il a ordonné à la société C3F de lui délivrer un certificat de travail corrigé avec une date d’embauche au 1er septembre 2006 ;

– infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions ;

– dire et juger que la rupture conventionnelle est nulle et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– condamner la société C3F à lui payer les sommes suivantes :

– indemnité conventionnelle de licenciement d’un montant de 22 930 euros ;

– indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 24 863 euros bruts ;

– congés payés sur préavis d’un montant de 2 486,30 euros bruts ;

– dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 100 000 euros ;

– dire que les condamnations prononcées produiront intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes ;

– condamner la société C3F à lui remettre un certificat de travail sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt ;

– fixer sa rémunération mensuelle moyenne à la somme de 8 288 euros bruts ;

– condamner la société C3F à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le18 juin 2021 auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, la société C3F, intimée, soutient essentiellement que :

– la rupture conventionnelle est parfaitement valable, en ce que le salarié a perçu une indemnité conventionnelle largement supérieure au minimum requis, en ce que son consentement était libre et éclairé et en ce qu’il a bénéficié du délai légal de rétractation, au cours des quinze jours qui se sont écoulés entre la signature des documents et l’homologation ;

– outre le fait qu’il a longtemps manqué d’invoquer l’un des vices du consentement énumérés par le code civil, le salarié ne fournit pas d’élément caractérisant la violence morale dont il prétend avoir été victime ;

– à titre subsidiaire, dans l’éventualité où il serait fait droit à la demande du salarié, il appartiendrait à ce dernier de restituer l’indemnité spécifique qu’il a perçue au moment de la rupture conventionnelle ;

– le salarié ne démontre aucun préjudice justifiant le montant des dommages et intérêts qu’il formule au titre de la rupture de son contrat de travail ;

– il n’y a pas lieu d’ordonner la rectification du certificat de travail de l’appelant, dans la mesure où celui-ci doit faire mention de la  » période d’emploi de l’entreprise  » ;

– elle employait moins de dix salariés, l’appelant ne démontrant pas en quoi elle aurait franchi ce seuil.

Elle demande donc à la cour de :

À titre principal,

– dire et juger que la rupture conventionnelle du contrat de travail du salarié est valable et doit produire ses effets ;

– dire et juger l’absence d’un quelconque vice du consentement ;

– constater que la convention de rupture conventionnelle est régulière ;

Partant,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que la convention de rupture conventionnelle était régulière et en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes indemnitaires ;

– l’infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau :

– débouter l’appelant de l’intégralité de ses demandes ;

À titre subsidiaire, si la cour devait prononcer l’annulation de la rupture conventionnelle,

– ordonner le remboursement de l’indemnité spécifique de rupture perçue par Monsieur [P] au profit de la société C3F, soit la somme de 58 960 euros ;

– ordonner la compensation de cette somme avec les éventuelles condamnations qui seraient mises à la charge de la société C3F ;

– réduire à de plus justes proportions le montant des dommages-intérêts sollicités en l’absence de démonstration du préjudice prétendument subi ;

En tout état de cause,

– condamner Monsieur [P] à payer à la société C3F une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure, ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Philippe Chateauneuf, Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 30 mars 2022.

MOTIFS

Sur la nullité de rupture conventionnelle

Selon l’article L. 1237-13, alinéa 3 du code du travail, à compter de la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation.

Par ailleurs, l’article L. 1237-14, alinéa 1er du code du travail dispose qu’à l’issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture.

Il résulte de l’application combinée de ces dispositions qu’une partie à une convention de rupture ne peut valablement demander l’homologation de cette convention à l’autorité administrative avant l’expiration du délai de rétractation de quinze jours prévu par le premier de ces textes .

En l’espèce, il est constant que la convention de rupture conventionnelle signée entre les parties a été notifiée pour homologation aux services de la DIRECCTE de la région Rhône-Alpes par courrier daté du 3 décembre 2014 réceptionné le jour suivant.

Le salarié soutient que, bien qu’elle mentionne qu’elle a été signée le 17 novembre 2014, il a en réalité signé cette convention avec la société le 2 décembre 2014, ce document ayant été antidaté.

Les éléments versés aux débats par les parties montrent que cette convention a effectivement été signée le 2 décembre 2014 et non le 17 novembre précédent, comme il n’est pas contesté.

Ainsi, il convient notamment de relever que le salarié produit un courrier électronique daté du 28 novembre 2014 envoyé par Madame [T] [U], responsable juridique de la société, par lequel elle lui transmettait  » la nouvelle version des documents dans le cadre de la rupture conventionnelle « . Figurent notamment en pièces-jointes à ce message le document Cerfa de rupture conventionnelle et formulaire de demande d’homologation ainsi qu’une convention de rupture conventionnelle.

Les documents ainsi transmis au salarié le 28 novembre 2014 apparaissent dépourvus de signature, alors que des versions signées de ces mêmes documents ont été envoyées à la DIRECCTE par courrier du 3 décembre 2014.

Par ailleurs, le courrier électronique adressé le 1er décembre 2014 par Madame [U] à l’appelant concernant une réunion fixée le jour suivant confirme la tenue d’une rencontre entre le salarié et sa hiérarchie le 2 décembre 2014. En ce sens, la signature de l’action de cession d’actions entre les parties le 2 décembre 2014 démontre finalement que ce jour correspond au règlement des modalités de la rupture du contrat de travail du salarié.

Alors que ce déroulement des faits permet de former un faisceaux d’indices selon lequel la convention de rupture conventionnelle n’a été signée que le 2 décembre 2014, il convient de relever que l’employeur ne remet pas en cause cette chronologie.

Ainsi, au soutien de son argumentation selon laquelle le salarié a pu exercer son droit à rétractation, la société indique notamment que celui-ci  » a[vait] en sa possession l’intégralité des documents relatifs à la rupture conventionnelle, à tout le moins depuis le 2 décembre 2014 « . L’intimée en déduit que le salarié disposait d’un délai de rétractation qui est arrivé à terme le 17 décembre 2014 et ajoute que l’homologation a été obtenue le 23 décembre 2014.

Outre le caractère erroné (au regard des articles L. 1237-13 et L. 1237-14 précités et de la date de demande d’homologation) du raisonnement de la société concernant l’arrivée à terme du délai de rétractation, son argumentation ne remet nullement en cause le fait que le salarié n’a signé la convention de rupture conventionnelle que le 2 décembre 2014.

Or, la cour relève, ainsi qu’il ressort des échanges de correspondances entre les parties, que la poursuite des négociations entre l’employeur et le salarié ne permettait pas à ce dernier de mesurer la portée de son engagement avant l’achèvement de ces dernières, le 2 décembre 2014. En particulier, le courrier électronique du 20 novembre 2014 révèle que le salarié a fait part à sa hiérarchie de son désaccord quant au prix de cession de ses actions et indique qu’  » il [serait] inutile d’envisager un rendez-vous de signature « , sans accord sur les conditions de cession, tout en regrettant par ailleurs d’avoir été privé de ses responsabilités.

Il en résulte que la signature de la convention de rupture conventionnelle par le salarié ne revêtait pas qu’une finalité formelle mais scellait l’accord finalement trouvé entre les parties sur les conditions de rupture, telles qu’elles avaient été négociées dans les semaines précédant cette dernière rencontre en date du 2 décembre 2014. A ce titre, la circonstance selon laquelle le salarié a, durant plusieurs semaines, négocié avec son employeur les conditions de sa rupture conventionnelle n’est pas de nature à remettre en cause l’irrégularité résultant du non-respect du délai de rétractation dont bénéficié le salarié à l’issue de la signature de ladite rupture.

En conséquence, en application des articles L. 1237-13 et L. 1237-14 du code du travail, la demande d’homologation ne pouvait être adressée qu’à l’issue du délai de rétractation de quinze jours suivant le 2 décembre 2014.

La constatation de l’envoi par l’employeur de la demande d’homologation de la rupture conventionnelle avant l’expiration du délai de rétractation suffit à entraîner la nullité de la rupture conventionnelle.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Sur les conséquences financières de la rupture du contrat de travail

Consécutivement à l’annulation de la convention de rupture, la rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’appelant, qui disposait d’une ancienneté de huit ans trois mois et vingt-quatre jours et percevait un salaire mensuel moyen de 8 287,66 euros bruts (au vu de ses bulletins de paie) au moment de la rupture, est fondé à percevoir différentes sommes.

Le salarié, qui n’a pu accomplir le préavis d’une durée de trois mois prévu par l’article 15 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, sera indemnisé par le versement d’une indemnité de préavis d’un montant de 24 862,98 euros, outre une somme de 2 486,30 euros au titre des congés payés y afférents.

En outre, en application de l’article 19 de la convention collective précitée, le salarié sera dûment indemnisé par le versement d’une somme de 20 148,09 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement (il est précisé que, conformément aux dispositions conventionnelles applicables, le salaire de référence pris en compte pour le calcul de cette indemnité conventionnelle s’élève à 7 267,85 euros, en ce qu’il exclut les majorations pour heures supplémentaires).

Enfin, compte tenu de son ancienneté au service de la société et du fait que la société emploie moins de onze salariés (les allégations liées à des manipulations d’effectifs entre filiales portées par le salarié ne suffisant pas à remettre en cause ce constat), une somme de 65 000 euros sera allouée au salarié à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l’article L. 1235-5 du code du travail.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il déboute le salarié de ses demandes sur ces différents points.

Sur les demande de restitution de l’indemnité spécifique de rupture et de compensation

La nullité de la convention de rupture emporte obligation à restitution des sommes perçues en exécution de cette convention.

En l’espèce, à l’occasion de la rupture conventionnelle, l’appelant a perçu une somme de 58 960 euros à titre d’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, ainsi qu’il résulte du document de rupture et formulaire d’homologation transmis aux services de la DIRECCTE.

Dans la mesure où la rupture conventionnelle est nulle, il sera fait droit aux demandes de l’intimée tendant, d’une part, à la restitution de cette somme de 58 960 euros, et d’autre part, à la compensation avec les sommes dues par la société en application de la présente décision.

Sur la demande de rectification du certificat de travail

L’article L. 1234-19 du code du travail impose à l’employeur de délivrer au salarié un certificat de travail à l’expiration du contrat de travail.

Le document intitulé  » avenant au contrat de travail conclu le 01/09/2006  » produit par le salarié et signé par les parties le 31 août 2011 mentionne que :

– Le salarié  » a conclu  » un contrat de travail à durée indéterminée avec la société C3F le 01 septembre 2006  » ;

–  » les parties conviennent qu’à partir du 01 septembre 2011 [le salarié] poursuivra son contrat avec la société C3F au lieu de la société  » LA VILLA DU CHENE D’OR. La société C3F sera considérée à partir de cette date employeur  » du salarié.

Au-delà des incohérences rédactionnelles dans la rédaction de cet avenant quant à l’employeur initial du salarié, il n’est pas établi que ce dernier a reçu un certificat de travail à l’issue de sa relation de travail initiale avec la société la Villa du Chêne D’or, qui appartient au groupe C3F.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a ordonné à la société de délivrer à l’appelant un certificat de travail corrigé faisant mention d’une date d’embauche fixée au 1er septembre 2006.

Sur les autres demandes

Les intérêts au taux légal avec capitalisation sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil sur les sommes susvisées seront dus dans les conditions précisées au dispositif.

La remise d’un certificat de travail conforme au présent arrêt s’impose, sans qu’il y ait lieu de prévoir une astreinte.

Il y a lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel et d’allouer à ce titre au salarié une somme de 4 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire:

INFIRME le jugement rendu le 15 septembre 2016 par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, sauf en ce qu’il a ordonné à la société par actions simplifiée C3F de délivrer à Monsieur [F] [P] un certificat de travail corrigé, avec une date d’embauche au 1er septembre 2006 et condamné la société par actions simplifiée C3F aux entiers dépens ;

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant :

DIT que la rupture conventionnelle convenue entre les parties est nulle et que la rupture du contrat de travail de Monsieur [F] [P] produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la société par actions simplifiée C3F à verser à Monsieur [F] [P] les sommes suivantes :

– 24 862,98 euros à titre d’indemnité de préavis ;

– 2 486,30 euros au titre des congés payés afférents à l’indemnité de préavis ;

– 20 148,09 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

– 65 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE la restitution au profit de la société par actions simplifiée C3F par Monsieur [F] [P] de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle perçue, à hauteur de 58 960 euros ;

DIT que la restitution de cette somme s’opérera par compensation avec les condamnations mises à la charge de la société par actions simplifiée au profit de Monsieur [F] [P] ;

ORDONNE à la société par actions simplifiée C3F à remettre à Monsieur [B] [P] un certificat de travail conforme au présent arrêt ;

DIT que les intérêts au taux légal avec capitalisation en application de l’article 1343-2 du code civil sont dus sur la créance salariale (indemnités de licenciement et de préavis) à compter du 30 janvier 2015, date de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et à compter du présent arrêt pour les autres sommes ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE la société par action simplifiée C3F aux dépens.

– Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– Signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,

 


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