Convention de rupture conventionnelle : 1 février 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/00130

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Convention de rupture conventionnelle : 1 février 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/00130

N° RG 22/00130 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LSOW

N° Minute :

Copies délivrées le

Copie exécutoire

délivrée le

à

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

C O U R D ‘ A P P E L D E G R E N O B L E

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE DU 01 FEVRIER 2023

ENTRE :

DEMANDERESSE suivant assignation du 03 novembre 2022

S.A.R.L. STAPI représentée par son gérant en exercice

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Thierry MONOD de la SELARL MONOD – TALLENT, avocat au barreau de LYON

ET :

DEFENDERESSE

Mme [M] [W]

née le 10 septembre 1973 à [Localité 4] ([Localité 4])

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Elodie BORONAD de la SELARL FAYOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de VALENCE

DEBATS : A l’audience publique du 11 janvier 2023 tenue par Isabelle DEFARGE, conseillère déléguée par le premier président de la cour d’appel de Grenoble par ordonnance du 6 janvier 2023, assistée de Marie-Ange BARTHALAY, greffier

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 01 février 2023 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

signée par Isabelle DEFARGE, conseillère déléguée par le premier président et par Marie-Ange BARTHALAY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 28/10/2019, Mme [W] a été embauchée en qualité de peintre industriel par la société de traitement et revêtement de métaux STAPI, le contrat de travail prévoyant la soucription d’une assurance mutuelle, auprès de la compagnie Via Santé, totalement prise en charge par l’entreprise.

A compter du 30/01/2020, elle a observé une arrêt de travail pour maladie.

Après refus d’homologation par la DIRECCTE d’une première convention de rupture conventionnelle le 03/06/2020, une seconde convention est intervenue, le contrat de travail prenant fin le 26/06/2021.

Saisi par la salariée le 19/01/2022, le conseil des prud’hommes de Valence a, par jugement réputé contradictoire du 13/09/2022, l’employeur n’ayant pas comparu, condamné la société STAPI à payer à Mme [W] les sommes suivantes, avec exécution provisoire et intérêts au taux légal capitalisés :

– 18 453,42 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice du fait de l’absence de garantie invalidité obligatoire ;

– 5 000 euros de dommages-intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail ;

– 1 500 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 23/09/2022, la société STAPI a interjeté appel de cette décision.

Par acte du 03/11/2022, elle a assigné en référé Mme [W] devant le premier président de la cour d’appel de Grenoble aux fins de voir ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement déféré et à titre subsidiaire, voir ordonner la constitution d’une garantie bancaire à première demande à hauteur du montant des sommes allouées, outre 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose en substance que :

– elle justifie de moyens sérieux de réformation du jugement entrepris en ce que l’ancienneté de sa salariée était insuffisante pour lui permettre de bénéficier des indemnités complémentaires de l’article L.1226-1 du code du travail, et qu’un contrat de prévoyance a été souscrit auprès de la compagnie MUTEX ;

– en outre, aucune garantie invalidité temporaire n’était souscrite ;

– aucun lien de causalité n’est démontré entre le préjudice allégué et ses prétendues fautes ;

– la situation de Mme [W] étant inconnue à ce jour, ses facultés de remboursement des sommes versées, en cas de réformation de la décision attaquée, sont insuffisantes ;

– à titre subsidiaire, il convient de permettre le remboursement de ces sommes par une garantie bancaire.

Pour conclure au rejet de la demande et réclamer reconventionnellement 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, Mme [W] réplique que :

– la convention collective prévoit que l’invalidité temporaire complète de travail doit faire l’objet d’une assurance par l’employeur, ce qui n’est pas le cas, le préjudice étant égal à la différence entre les indemnités journalières perçues et le salaire mensuel brut ;

– l’exécution du contrat de travail est fautive, la convention relative aux frais de santé n’ayant été conclue que tardivement ;

– elle a retrouvé un travail de peintre le 18/10/2021, ce qui exclut tout risque d’insolvabilité ;

– l’aménagement de l’exécution provisoire n’a pas lieu d’être, en raison de l’absence de moyens sérieux de réformation et de conséquences manifestement excessives.

MOTIFS DE LA DECISION :

Selon l’article 514-3 du code de procédure civile, ‘en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives’.

Sur les moyens sérieux de réformation :

* l’absence de garantie invalidité temporaire

Selon l’article L.1226-1 du code du travail, ‘tout salarié ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière prévue à l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale (..)’.

En l’espèce, Mme [W] embauchée le 28 octobre 2019 a été placée en arrêt pour maladie le 30 janvier 2020. A cette date, son ancienneté était donc insuffisante pour bénéficier d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière, étant observé qu’il est de principe que les périodes de suspension du contrat de travail pour maladie non professionnelle sont exclues par la loi du calcul de l’ancienneté. Ainsi, la période consécutive à l’arrêt maladie ne peut non plus être prise en compte, et aucune indemnité complémentaire ne pourra être due, sauf appréciation contraire du juge du fond, à partir du 28 octobre 2020.

Dans ces conditions, la requérante justifie d’un moyen sérieux de réformation du jugement concernant ce chef de demande.

* l’absence de souscription d’un contrat d’assurance complémentaire Via Santé

Dans une lettre du 06 octobre 2021, adressée au conseil de la salariée, la société STAPI reconnaît n’avoir pas procédé à l’inscription immédiate de Mme [W] à ce contrat d’assurance. Par ailleurs, elle ne conteste pas qu’elle n’a pas délivré au moment de la rupture du contrat de travail de document concernant la portabilité de cette même assurance.

Il est de principe qu’en cas de rupture conventionnelle, le salarié bénéficie des allocations d’aide au retour à l’emploi (ARE). Il peut ainsi demander la portabilité de la complémentaire santé.

Toutefois, dans ses conclusions, Mme [W] déclare qu’elle a finalement obtenu la communication d’un certificat de travail portant les mentions relatives à la portabilité ainsi que les documents lui permettant de faire valoir ses droits, suite à une ordonnance de référé du 22 octobre 2021.

Or, elle ne démontre pas en quoi le retard de l’employeur lui a causé un préjudice, tout manquement à l’exécution d’une obligation ne causant pas nécessairement un dommage.

Là encore, la société requérante justifie d’un moyen sérieux de réformation.

Sur les conséquences manifestement excessives :

Ces conséquences peuvent s’apprécier tant au regard de la solvabilité du débiteur que de celle du créancier, qui doit être en mesure de pouvoir restituer les sommes versées en exécution de la décision attaquée en cas de réformation de celle-ci.

En l’occurrence, le montant des condamnations s’élève à 24 953,42 euros. Si Mme [W] déclare avoir retrouvé un travail de peintre, produisant une attestation sur laquelle le nom de son nouvel employeur a été oblitéré, son salaire mensuel est de 1 839,15 euros. Si ce revenu permet à la défenderesse de faire face aux charges courantes de la vie quotidienne, il n’est pas suffisant pour permettre le cas échéant de rembourser les sommes versées, en cas de dépense de celles-ci. Dans ces conditions, la société STAPI justifie d’un risque de conséquences manifestement excessives en cas d’exécution de la décision.

Il convient donc d’ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement déféré.

En revanche, à ce stade de la procédure, il n’y a pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Isabelle Defarge, conseillère déléguée par le premier président, statuant en référé, publiquement, par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe :

Arrêtons l’exécution provisoire du jugement du conseil des prud’hommes de Valence du 13 septembre 2022 ;

Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Mme [W] aux dépens.

Le greffier La conseillère déléguée

M.A. BARTHALAY I. DEFARGE

 


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