COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 09 MARS 2023
N° RG 21/01276 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UPDF
AFFAIRE :
[R] [L]
C/
S.A. SOPRA STERIA GROUP
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE
N° Section : E
N° RG : 18/01416
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Katia DEBAY de la SELARL DEBAY
Me Jérôme POUGET
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [R] [L]
née le 05 Mai 1989 à [Localité 4] (Maroc)
de nationalité Marocaine
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Katia DEBAY de la SELARL DEBAY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 541
APPELANTE
****************
S.A. SOPRA STERIA GROUP
N° SIRET : 326 820 065
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentant : Me Jérôme POUGET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1366
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 Janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Régine CAPRA, Présidente,
Monsieur Thierry CABALE, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame Juliette DUPONT,
Greffier lors du prononcé : Madame Sophie RIVIERE
Par contrat à durée indéterminée du 22 juin 2015, Madame [H] [L] a été embauchée par la société Sopra Steria Group en qualité d’ingénieur Etudes débutant.
La société Sopra Steria Group a comme objet social le conseil en systèmes et logiciels informatiques.’ La société compte plus de 50 salariés.
Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective Syntec.
La rémunération mensuelle de la salariée était de 2.650 euros.
Suite à plusieurs courriers mettant en demeure la salariée de justifier d’un titre de séjour l’autorisant à travailler, Madame [L] se voyait convoquer le 21 décembre 2016, à un entretien préalable à un éventuel licenciement.
Par courrier du 10 janvier 2017, la société notifiait à Madame [L] son licenciement.
Par requête reçue au greffe le 12 juin 2018, Madame [L] a saisi le conseil des Prud’hommes de Nanterre afin de contester la légitimité de son licenciement et d’obtenir le versement de diverses sommes.
Par jugement du 11 février 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil des prud’hommes de Nanterre a’:
– Dit et jugé que le licenciement de Mme [R] [L] par la société Sopra Steria repose sur une cause réelle et sérieuse,
– Dit que l’ensemble des demandes de Mme [R] [L] sont non fondées et irrecevables,
– Débouté Mme [R] [L] de toutes ses demandes,
– Débouté la société Sopra Steria Group de ses demandes reconventionnelles,
– Dit qu’il n’y a pas lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile,
– Mis les dépens respectifs à charge des parties.
‘
Par déclaration au greffe du 29 avril 2021, Madame [L] interjetait appel du jugement rendu le 11 février 2021.
‘
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 29 juillet 2021 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Madame [R] [L], appelante, demande à la cour de’:
– infirmer’ le’ jugement’ du’ conseil’ de’ prud’hommes’ de’ Nanterre’ du’ 11′ février 2021.
Statuant à nouveau,
-‘Condamner’ la’ société’ Sopra Steria Group’ à’ verser’ à’ Madame’ [R] [L] les sommes suivantes :
‘- dommages et intérêts pour licenciement abusif : 5 520,84 €
– indemnité compensatrice de préavis : 8 281,35 €
– congés payés sur préavis : 828,13 €
– article 700 : 4 000 €.
‘
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 25 octobre 2021 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Sopra Steria Group, intimée, demande à la cour de’:’
– »confirmer le jugement du conseil de prud’hommes,
– »En conséquence, débouter Madame [L] de l’intégralité de ses demandes.
– »Condamner Madame [L] au paiement de 2.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– »Condamner Madame [L] aux dépens.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 7 décembre 2022.
SUR CE,
Sur le licenciement
En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;
Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;
L’article L.8251-1 du code du travail dispose que « nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France. Il est également interdit à toute personne d’engager ou de conserver à son service un étranger dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles qui sont mentionnées, le cas échéant, sur le titre prévu au premier alinéa. »’;
L’irrégularité de la situation d’un travailleur étranger constitue une cause objective justifiant la rupture de son contrat de travail’;
L’article R.5221-32 du code du travail dispose que « le renouvellement d’une autorisation de travail mentionnée au I de l’article R.5221-1 est sollicité dans le courant du deuxième mois précédant son expiration. La demande de renouvellement est accompagnée de documents dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’immigration et du travail. L’autorisation de travail est renouvelée dans la limite de la durée du contrat de travail restant à courir ou de la mission restant à accomplir en France. »’;
En l’espèce, le titre de séjour de Madame [L] expirait le 18 novembre 2016, de sorte que celle-ci devait effectuer les démarches en vue du renouvellement de son titre entre le 18 septembre et le 18 octobre 2018′;
Par courriels des 3 et 8 novembre 2016, la société Sopra Steria Group rappelait à Madame [L] que son titre de séjour se terminait le 18 novembre 2016 et lui demandait de la transmission d’un récépissé à ce titre’; Madame [L] répondait ne pas avoir encore trouvé le temps’; il ressort toutefois des rapports d’activité produits que Madame [L] a été notamment en congés payés (ou en inter-contrat) au cours de l’été 2016 et du 12 au 28 septembre 2016′;
La société Sopra Steria Group justifie avoir adressé à Madame [L] le 16 novembre 2016 un courrier de mise en demeure de lui remettre sous un délai de 8 jours soit le nouveau titre de séjour soit un récépissé régularisant sa situation et l’autorisant à travailler au-delà du 18 novembre 2016, puis en l’absence de justificatif le 18 novembre 2016 un courrier la dispensant d’activité non rémunérée à compter du 18 novembre 2016 et le 28 novembre 2016 une nouvelle mise en demeure concernant le renouvellement de son titre de séjour sous un délai de 8 jours’;
Madame [L] verse aux débats une attestation de la Préfecture des Hauts de Seine indiquant qu’elle «’s’est présentée le 13 décembre 2016 pour le motif suivant’: suivi dossier de renouvellement de son titre de séjour qu’elle aurait déposé le 10/11/2016. Le dossier sera examiné sous un délai de 6 à 8 semaines après réception et le cas échéant le délivrance d’un récépissé’»’;
Ce document s’analyse, comme l’indique d’ailleurs l’appelante dans ses écritures, en une simple attestation de passage’; il atteste d’un passage de Madame [L] à la Préfecture à la date du 13 décembre 2016 et utilise le conditionnel lorsqu’il évoque un dépôt le 10 novembre 2016 d’un dossier de renouvellement de séjour’;
Le récépissé de demande de carte de séjour, autorisant son titulaire à travailler est daté du 13 janvier 2017 et Madame [L] indique l’avoir reçu à cette même date’; cette date est cependant postérieure à son licenciement en date du 10 janvier 2017’et à sa convocation le 21 décembre 2016 à un entretien préalable tenu le 5 janvier 2017 ;
Il s’ensuit que, comme le fait justement valoir l’intimée, Madame [L] n’a effectué de démarches utiles que postérieurement à l’expiration du délai fixé par l’article R.5221-32 du code du travail et même à l’expiration de son titre de séjour et qu’elle n’avait pas présenté jusqu’à son licenciement un titre lui permettant d’exercer une activité salariée au-delà du 18 novembre 2016′; de sorte qu’au jour de son licenciement, en application des dispositions d’ordre public de l’article L.8251-1 du code du travail, la société Sopra Steria Group ne pouvait conserver la salariée dans ses effectifs’;
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;
Sur les autres demandes
Madame [L] sollicite la condamnation de la société Sopra Steria Group à lui verser la somme de 8.281,35 euros bruts au titre du préavis et les congés payés y afférents’;
Elle se réfère à nouveau au récépissé l’autorisant à travailler depuis le 13 janvier 2017′;
Toutefois, à cette date, son contrat de travail avait déjà été rompu en l’absence de justification à ce titre et, comme le soulignait la lettre de licenciement, cette situation rendait aussi impossible d’effectuer le préavis’;
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté Madame [L] de sa demande formée de ce chef’;
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs’;
Il convient, au regard des circonstances de l’espèce, de laisser à la charge de chacune des parties les dépens qu’elles ont exposé en cause d’appel ;
En outre, il est conforme à l’équité de laisser également à leur charge les frais par elles exposés en cause d’appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme, dans les limites de l’appel, le jugement entrepris,
Laisse à la charge de chacune des parties les dépens ainsi que les frais qui ne sont pas compris dans les dépens exposés en cause d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, la Présidente,