9 juin 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
22/14102
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT
DU 09 JUIN 2023
N°2023/ 182
Rôle N° RG 22/14102 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKGYO
S.A.S. CLEEVEN SE
C/
[E] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le : 09/06/2023
à :
Me Raymond RUDIO de la SCP BRUNET – RUDIO – GRAVELLE, avocat au barreau de GRASSE
Me Philippe SANSEVERINO, avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Grasse en date du 07 Octobre 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 22/00069.
APPELANTE
S.A.S. CLEEVEN SE représentée par son président, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Raymond RUDIO de la SCP BRUNET – RUDIO – GRAVELLE, avocat au barreau de GRASSE
INTIME
Monsieur [E] [Z], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Philippe SANSEVERINO, avocat au barreau de NICE substitué pour plaidoirie par Me Mathieu MICHELON, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Avril 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SILVAN, Président de chambre, et Madame Estelle de REVEL, Conseiller, chargé du rapport.
Madame Estelle de REVEL, Conseiller, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SILVAN, Président de chambre
Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre
Madame Estelle de REVEL, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2023.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2023.
Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [E] [Z] a été engagé en qualité de consultant, statut cadre, par la société Cleeven Se selon contrat à durée indéterminée du 30 septembre 2021 prenant effet le 11 octobre 2021.
Le contrat stipulait une période d’essai de 4 mois renouvelable une fois pour une période identique.
Son contrat de travail prévoyait également une clause de non concurrence.
Le 7 février 2022, la société a informé le salarié du renouvellement de la période d’essai pour une durée de 4 mois.
Le 16 juin 2022, M. [Z] a rompu sa période d’essai avec effet au 18 juin suivant après avoir respecté le délai de prévenance de deux jours.
Estimant que le salarié avait violé la clause de non concurrence en travaillant pour une société cliente, la société Cleeven Se a saisi le juge des référés du conseil de prud’hommes aux fins de voir enjoindre à M. [Z] de cesser ses fonctions au sein de la société Virbac sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et d’interdiction d’intervenir à nouveau pour cette société jusqu’au terme de la période contractuelle de non concurrence.
Le 7 octobre 2022, le conseil de prud’hommes de Grasse, en sa formation des référés a dit qu’il n’y avait pas lieu à référé, a renvoyé les parties à se pourvoir devant le juge du fond si elles le souhaitaient et a condamné la société à payer à M. [Z] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société a relevé appel de la décision le 24 octobre 2022.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 avril 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des moyens, la société demande à la cour de :
‘INFIRMER l’ordonnance rendue par la formation des référés du Conseil de prud’hommes de Grasse le 7 octobre 2022 en ce qu’elle a :
– dit n’y avoir lieu à référé,
– renvoyé les parties à se pourvoir, si elles le souhaitent, devant le juge du fond,
– condamné la société Cleeven Se à payer à M. [Z] la somme de 500 Euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Et, statuant à nouveau,
CONSTATER que Monsieur [E] [Z] est lié par un engagement contractuel de non concurrence le liant à la société Cleeven Se d’une durée de 8 mois,
CONSTATER qu’en intervenant/collaborant au profit de la société VIRBAC au moins depuis le 19 juin 2022, Monsieur [E] [Z] a violé son engagement contractuel de non-concurrence,
CONDAMNER Monsieur [E] [Z] à payer à la société Cleeven Se une provision de 10.000 Euros à valoir sur l’indemnité pour violation de son engagement de non concurrence prévue par l’article 15 de son contrat de travail,
CONDAMNER Monsieur [E] [Z] à payer à la société Cleeven Se une indemnité de 2.500 Euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER Monsieur [E] [Z] aux entiers dépens.’
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 avril 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des moyens, M. [Z] demande à la cour de :
‘DECLARER que la Cour n’est saisie d’aucune demande de réformation de l’ordonnance
de référé
– CONFIRMER l’ordonnance du Conseil de prud’hommes de GRASSE en toutes ses dispositions
– DEBOUTER la société CLEEVEN SE de l’intégralité de ses fins, demandes et prétentions
– CONDAMNER la société CLEEVEN SE à payer à Monsieur [Z] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel
– CONDAMNER la société CLEEVEN SE aux dépens’.
MOTIFS DE LA DECISION
1) Sur la recevabilité de l’acte d’appel
Moyens des parties:
Le salarié fait valoir que la cour n’est saisie d’aucun appel à l’encontre de l’ordonnance rendue par le juge des référés au motif que la déclaration d’appel ne comporte pas de demande d’infirmation ou de réformation de la décision mais énonce seulement les chefs de jugement critiqués ; que les conclusions tendant à la réformation sont par conséquent irrecevables.
La société réplique que l’intimé dénature les termes de l’article 562 du code de procédure civile dès lors que la déclaration d’appel qui mentionne les chefs du jugement critiqués est parfaitement suffisante et régulière.
Réponse de la cour :
Selon l’article 562 du code de procédure civile, l’appel ne défère à la cour que la connaissances des chefs de jugement qu’il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent.
La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs, lorsqu’il tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
En l’espèce, l’acte d’appel est rédigé comme suit :
‘appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués; en ce que la formation de référé du conseil de prud’hommes a:
– dit n’y avoir lieu à référé,
– renvoyé les parties à se pourvoir, si elles le souhaitent devant le juge du fond,
– condamné la société Cleeven Se à payer à M. [Z] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
En ce que la formation de référé n’a pas :
– constaté que M. [Z] violait son engagement contractuel de non concurrence,
– enjoint M. [Z] de cesser toute intervention/collaboration avec la société Virbac et d’en justifier, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,
– fait interdiction à M. [Z] d’intervenir de nouveau au profit de la société Virbac jusqu’au terme de la période contractuelle d’interdiction de non concurrence sous astreinte de 3 000 euros pour toute nouvelle infraction constatée,
– condamné M. [Z] à payer à la société Seeven Se une provision de 10 000 euros à valoir sur l’indemnité pour violation de son engagement de non concurrence prévue par l’article 15 de son contrat de travail,
– condamné M. [Z] à payer à la société Cleeven Se une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’.
Après analyse de ces éléments, la cour relève que l’acte d’appel mentionne les chefs de la décision qu’il critique expressément et qu’il opère en conséquence dévolution de ceux-ci. Le moyen tiré de l’absence de mention dans l’acte d’appel d’une demande de réformation ou infirmation est inopérant.
L’appel est par conséquent recevable.
2) Sur les demandes principales
Moyens des parties :
La société Cleeven Se fait valoir que le juge des référés est compétent au motif que :
– l’urgence est caractérisée : le salarié a commencé ses fonctions pour le compte d’une entreprise cliente, la société Virbac, le lendemain de la cessation de son arrêt de travail;
– il n’existe pas de contestation sérieuse : la clause de non concurrence est parfaitement régulière, le contrat de travail ne stipule pas que la clause de non concurrence est inapplicable pendant la période d’essai, il n’est pas contesté que la société Virbac est cliente de la société Cleeven Se, et M. [Z] exécute un travail pour le compte de la société Virbac tel que cela ressort notamment de la sommation interpellative faite par huissier de justice dans les locaux de la société Virbac;
– elle a subi un préjudice en raison des agissements du salarié ;
– la société Cleeven Se n’est pas une société de portage salarial excluant toute possibilité de stipulation de clause de non concurrence : elle n’est pas liée à ses clients par un contrat de prestation de portage salarial, elle n’est pas liée au salarié par un contrat de portage salarial mais par un contrat de travail à durée indéterminée; il n’y a pas de relation contractuelle tripartite;
– la sommation interpellative du 3 août 2022 est régulière étant réalisée dans un lieu ouvert au public dans lequel le salarié a répondu aux questions de l’huissier de justice.
Le salarié fait valoir la nullité de la clause de non concurrence dans le cadre d’un contrat de portage salarial dont il se dit bénéficiaire. Il soutient qu’en sa qualité de consultant avec un statut de cadre, il ne pouvait être soumis à une telle clause prohibée par l’accord conventionnel du 15 novembre 2007 relatif au portage salarial, à laquelle la convention collective SYNTEC, applicable en l’espèce, était rattachée.
Il soutient par ailleurs que la sommation interpellative sur laquelle se fonde la société est nulle et dépourvue de force probante et doit être écartée des débats s’agissant d’un procès verbal dressé par un huissier de justice dans un lieu privé, sans autorisation judiciaire.
Il fait valoir que la clause de non concurrence ne peut s’appliquer après rupture de la période d’essai puisqu’elle n’était pas encore définitive faute pour le contrat d’avoir produit ses effets au vu de la fin des relations contractuelles pendant la période d’essai.
A titre subsidiaire, le salarié soutient en conséquence que le juge des référés n’est pas compétent pour statuer en l’absence de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent ou à tout le moins, en présence de contestation sérieuse.
Réponse de la cour :
La société Cleeven Se sollicite qu’il soit constaté que M. [Z] n’a pas respecté la clause de non-concurrence, lui causant de ce fait un trouble manifestement illicite.
Alors qu’elle demandait en première instance qu’il soit ordonné en conséquence à M. [Z] de cesser toute intervention/collaboration avec la société Virbac et de lui interdire d’intervenir de nouveau au profit de cette société pendant toute la durée de la clause, sous astreinte, elle demande à hauteur d’appel, compte tenu de la fin de la période couverte, que M. [Z] soit condamné au paiement d’une indemnité provisionnelle à valoir sur les dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence.
Il est rappelé, s’agissant des pouvoirs de la formation de référé :
– qu’en application des dispositions de l’article R. 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
– qu’en application des dispositions de l’article R. 1455-6 du même code, la formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
– qu’en application des dispositions de l’article R. 1455-7 du même code, dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Au regard des pouvoirs ainsi définis de la formation de référé, il y a lieu de s’interroger sur le caractère non sérieusement contestable de la validité de la clause de non-concurrence et sur son non-respect.
S’agissant de la validité de la clause de non-concurrence
La clause de non concurrence était ainsi rédigée :
‘ Intérêt légitime :
Le salarié déclare être informé et comprendre que ses fonctions décrites au présent contrat de travail lui donneront un accès privilégié à un grand nombre d’informations strictement confidentielles sur les entreprises clientes de la société, sur leurs équipes, sur leurs besoins et sur le contenu confidentiel des missions qu’elles confient ou souhaiteraient confier à la société.
Les parties conviennent que ces informations confidentielles si elles devaient être dévoilées volontairement ou involontairement à une entreprise tierce susceptible de concurrencer la société, donneraient à cette dernière un avantage concurrentiel considérable et pourraient causer un dommage irréparable la société si bien qu’il est de l’intérêt légitime de la société de demander au salarié de s’engager à ne pas concurrencer la société pendant une période définie et sur un territoire défini en cas de rupture de son contrat de travail.
Le salarié déclare être également informé et comprendre qu’il est de l’intérêt légitime de la société de demander à ses anciens salariés de s’abstenir pendant une période contractuellement limitée, de la concurrencer en entrant au service d’une de ses entreprises clientes au sein de laquelle le salarié a accompli une ou plusieurs missions, sous quelque forme juridique que ce soit (mise à disposition, prestation de service, portage salarial).
Il est précisé que l’acceptation par le salarié de s’engager à ne pas concurrencer la société dans les termes et aux conditions ci-dessous, a été une condition déterminante de son recrutement par la société.
Objet :
Aussi le salarié consent à s’engager à l’égard de la société, aux obligations de non concurrence suivantes:
– Au sein du même département que celui du siège de la société, ne pas entrer au service d’une entreprise concurrente ou créer une entreprise concurrente ou s’intéresser directement ou indirectement à une entreprise concurrente,
– Au sein de la même région que celui du siège de la société, ne pas s’intéresser à une entreprise cliente de la société, que ce soit sous forme de salariat, prestation de service, détachement, mise à disposition, portage salarial, mandat social, mission de travail temporaire ou bénévolat ou sous tout autre statut juridique. Par entreprise cliente de la société, il convient d’entendre une entreprise pour laquelle le salarié est intervenu en qualité de salarié de la société au cours des douze derniers mois précédant la date de cessation du présent contrat.
Il est rappelé l’activité et les prestations offertes par la Société :
– L’exercice de la profession d’ingénieur conseil dans les domaines des technologies de l’information, des technologies innovantes en milieux tertiaires et industriels, en stratégie et management en milieux tertiaires et industriels.
– La fourniture de prestations de services dans tous les domaines des Sciences de l’Ingénieur et notamment dans la fourniture de prestations de services dans le conseil et l’ingénierie dans les domaines de la recherche et du développement
– Le recrutement et la formation.
– Le conseil et l’assistance aux entreprises dans leur organisation, leur gestion, leur administration, leur développement.
– La ,prise en charge, soit directement, soit indirectement, de tous travaux relatifs à la gestion de l’entreprise et au traitement de l’information.
– La création, la conception, le développement, la commercialisation, la location, l’installation, l’adaptation, la maintenance de logiciels.
– L’acquisition, la souscription de droits sociaux et valeurs mobilières de toutes sociétés, leur gestion ainsi que toutes prestations d’assistance dans tous domaines.
– L’acquisition et la gestion de tous droits de propriété industrielle.
– Et plus généralement toutes opérations industrielles, commerciales ou financières, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher, directement ou indirectement, à l’objet social et à tous objets similaires ou connexes ou en faciliter le développement ou la réalisation.
Limitation dans le temps :
Cet engagement de non concurrence s’appliquera durant une éventuelle période de préavis si le salarié est dispensé de son exécution et pendant une durée limitée à 8 mois à compter du terme du contrat.
Contrepartie financière :
En contrepartie de son engagement de non concurrence et du respect de celui-ci, la société versera au salarié pendant la période d’application de l’interdiction de concurrence, aux échéances habituelles de paie, au prorata en cas de mois incomplet, une contrepartie financière mensuelle brute, indemnité de congés afférente comprise, de 25 % de la moyenne des 6 derniers mois de salaire brut (fixe + variable) précédant le mois de la notification de la rupture (ou de la conclusion de la rupture conventionnelle).
Faculté de délier le salarié :
La société pourra délier le salarié de son engagement de non concurrence et s’exonérer corrélativement de tout versement d’une contrepartie, en lui notifiant sa décision dans les quinze jours de la notification de la rupture du contrat ou lors de la conclusion d’une rupture conventionnelle.
Dans les hypothèses de rupture du contrat de travail générant un préavis, si ce dernier est dispensé d’exécution, la renonciation à l’application de la clause de non concurrence interviendra au plus tard à la date de départ effectif du salarié.
Le salarié sera quant à lui tenu de respecter son obligation de non concurrence à compter de cette même date (départ effectif) et le règlement de la contrepartie financière débutera également compter de de départ effectif (paiement en fin de mois).
Clause pénale :
En cas de violation de son engagement de non concurrence, le salarié perdrait le bénéfice du versement de la contrepartie financière, et serait automatiquement redevable d’une indemnité forfaitaire à titre de clause pénale, d’un montant égal à 6 derniers mois de salaire brut (fixe + variable) précédant le mois de la notification de la rupture.’
Il est constant qu’une clause de non-concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives. Elle est valable dès lors qu’elle est nécessaire à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et qu’elle ne porte pas atteinte à la liberté du travail.
Au cas d’espèce, la clause apparaît répondre aux conditions de validité définies précédemment, tant en ce qui concerne la limitation dans le temps et dans l’espace qu’en ce qui concerne l’existence d’une contrepartie financière, ces deux éléments n’étant pas remis en cause par le salarié.
M. [Z] conteste en revanche que la clause soit valable soutenant qu’il travaillait dans le cadre d’un portage salarial.
Les deux parties produisent néanmoins aux débats le contrat liant M.[Z] à la société Cleeven Se expressément dénommé ‘contrat de travail à durée indéterminée consultant’ à l’exclusion de tout autre quelconque contrat commercial qui aurait été conclu entre la société Cleeven Se et une entreprise cliente dans le cadre d’une opération de portage salarial. Le contrat stipule clairement que le salarié sera amené à exercer des responsabilités techniques et organisationnelles dans le cadre de projets et de missions qui lui sont confiées au sein de la société, des sites d’un clients ou en assistance technique chez un client et que son activité sera habituellement et principalement exercée au sein des établissements des clients de la société situés en France et à l’étranger.
Ce faisant, la validité de la clause de non-concurrence liant les parties n’est pas sérieusement contestable.
S’agissant de la violation de la clause de non-concurrence par M. [Z]
La cour relève en premier lieu qu’il n’y a pas lieu d’écarter des débats ou de déclarer irrecevable le procès verbal du 3 août 2022 par lequel Maître [O], huissier de justice, a fait une sommation interpellative de M. [Z] à la demande de la société Cleeven Se, d’avoir à répondre à des questions dès lors que dans le dispositif de ses conclusions, le salarié ne le demande pas et que le juge ne statue que sur les demandes énoncées au dispositif conformément à l’article 954 du code de procédure civile.
Il ressort de ce procès verbal que M. [Z] a répondu aux questions alors qu’il se trouvait dans les locaux de la société Virbac. Dans ses conclusions, le salarié indique qu’il a accepté de répondre aux questions et que l’huissier auquel il a répondu a pénétré dans les locaux de la société Virbac situés à [Localité 2].
La société Cleeven Se se présente comme une société de conseil en ingénierie, fournisseur de services d’accompagnement dans la création de valeur ajoutée technique et technologique.
Elle a conclu plusieurs bons de commande/achat avec la société Virbac pour des prestations de travaux qui ont été réalisées par M. [Z] entre les mois de octobre 2021 et mai 2022.
Il se déduit de ces éléments que cette société était une entreprise cliente de la société Cleeven Se.
La cour relève par ailleurs que les stipulations de la clause de non concurrence ne permettent pas, sous réserve d’une meilleure appréciation que pourrait avoir le juge du fond s’il était saisi, de considérer qu’elle ne s’appliquait qu’à compter de la fin de la période d’essai.
Il n’est dès lors pas sérieusement remis en cause que M. [Z], en travaillant pour le compte de la société Virbac, après avoir rompu sa période d’essai, dans les conditions rappelées ci-dessus, a violé son obligation de non-concurrence.
Il sera en conséquence condamné à payer, à titre provisionnel, à la société Cleeven Se la somme de 1 000 euros.
L’ordonnance de référé dont appel, qui a rejeté les demandes de la société Cleeven Se, sera infirmée en toutes ses dispositions.
3) Sur les autres demandes
Compte tenu de la teneur de la décision rendue, M. [Z] supportera les dépens de première instance et d’appel en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Il sera en outre condamné à payer à la société Cleeven Se une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, que l’équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 1 500 euros et sera débouté de sa demande présentée sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,
DECLARE l’appel recevable,
INFIRME l’ordonnance rendue par le conseil des prud’hommes de Grasse le 7 octobre 2022,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
CONDAMNE M. [E] [Z] à payer à titre provisionnel à la SAS Cleeven Se la somme de 1 000 euros,
CONDAMNE M. [E] [Z] au paiement des entiers dépens,
CONDAMNE M. [E] [Z] à payer à la SAS Cleeven Se une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE M. [E] [Z] de sa demande présentée sur le même fondement.
LE GREFFIER LE PRESIDENT