Convention collective SYNTEC : 5 octobre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/07667

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Convention collective SYNTEC : 5 octobre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/07667

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/07667 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MVZE

[Y]

C/

Société ERAS

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 10 Octobre 2019

RG : 17/04665

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 05 OCTOBRE 2022

APPELANT :

[I] [Y]

né le 22 Juillet 1964 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Sara KEBIR de la SELARL WAVE AVOCATS, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Fatma FERCHICHI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉE :

Société ERAS

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Olivier GELLER de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Juin 2022

Présidée par Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Joëlle DOAT, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Antoine MOLINAR-MIN, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 05 Octobre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[I] [Y] a été embauché à compter du 1er septembre 2015 en qualité de responsable d’activités commerciales – statut cadre, position 3.1, coefficient 170 – par la SAS ERAS, suivant contrat de travail écrit à durée indéterminée du 22 juillet 2015 soumis à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs et des sociétés de conseil (IDCC 1486).

Par correspondance du 16 août 2017, la SAS ERAS a convoqué [I] [Y] à un entretien préalable à son éventuel licenciement pour motif disciplinaire, fixé au 28 août suivant, et l’a mis à pied à titre conservatoire.

La SAS ERAS a procédé au licenciement de [I] [Y] pour faute grave, par correspondance du 4 septembre 2017.

Le 27 décembre 2017, [I] [Y] a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires effectuées, ainsi que d’une contestation du licenciement dont il a ainsi fait l’objet et de demandes indemnitaires et salariales afférentes à la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 10 octobre 2019, le conseil de prud’hommes de Lyon ‘ section encadrement, a :

DIT ET JUGÉ que le licenciement pour faute grave de [I] [Y] était fondé ;

DIT ET JUGÉ que la convention de forfait était applicable à Monsieur [Y] ;

En conséquence,

DÉBOUTÉ [I] [Y] de l’intégralité de ses demandes ;

DÉBOUTÉ [I] [Y] et la SAS ERAS de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNÉ [I] [Y] aux entiers dépens de l’instance.

[I] [Y] a interjeté appel de cette décision le 8 novembre 2019.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 15 mars 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, [I] [Y] sollicite de la cour de :

DIRE recevable et bien fondé l’appel qu’il a interjeté ;

INFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Lyon en date du 10 octobre 2019 en ce qu’il a :

– dit et jugé que son licenciement pour faute grave était fondé ;

– dit et jugé que la convention de forfait lui était applicable ;

En conséquence,

– l’a débouté de l’intégralité de ses demandes ;

– l’a débouté, ainsi que la SAS ERAS de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– l’a condamné aux entiers dépens de l’instance ;

Et statuant à nouveau,

1. Sur le licenciement :

JUGER qu’aucune faute disciplinaire n’est caractérisée ;

JUGER que le motif exact de son licenciement est un motif économique ;

JUGER que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

CONDAMNER la société ERAS à lui payer les sommes suivantes :

– Rappel de salaires pour la période de mise à pied injustifiée (du 16/08/2017 au 04/09/2017) : 2 961,54 euros bruts

– Congés payés y afférents : 296,15 euros bruts

– Indemnité légale de licenciement : 3 650,21 euros bruts

– Indemnité de préavis : 16 425,96 euros bruts

– Congés payés sur préavis : 1 642,59 euros bruts

– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 32 851,92 euros

2. Sur la nullité de la convention de forfait :

JUGER que la convention de forfait-jours à laquelle il était soumis est nulle ;

En conséquence,

CONDAMNER la société ERAS à lui payer les sommes suivantes :

– Rappel de salaire au titre des heures supplémentaires : 32 810,02 euros

– Congés payés y afférents : 3 281 euros

– Indemnité pour travail dissimulé : 32 851,92 euros

ORDONNER la remise des documents de fin de contrat rectifiés ;

CONDAMNER la société ERAS à verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;

CONDAMNER la société ERAS à verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel ;

CONDAMNER la société ERAS aux entiers dépens de première instance et d’appel ;

ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2020, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS ERAS sollicite de la cour de :

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a :

– Dit et jugé que le licenciement pour faute grave de [I] [Y] est fondé,

– Dit et jugé que la convention de forfait est applicable à Monsieur [Y],

En conséquence,

– Débouté [I] [Y] de l’intégralité de ses demandes,

– Débouté [I] [Y] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamné [I] [Y] aux entiers dépens de l’instance ;

CONDAMNER Monsieur [Y] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER le même aux entiers dépens d’instance.

La clôture de l’instruction de l’affaire a été prononcée le 12 mai 2022 et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 15 juin suivant.

SUR CE :

– Sur les heures supplémentaires :

[I] [Y] fait principalement valoir, au soutien de ses demandes au titre des heures supplémentaires non rémunérées et du travail dissimulé, que :

– ainsi que l’a constaté la Cour de cassation dans son arrêt du 24 avril 2013 ayant invalidé les dispositions de la convention collective SYNTEC relatives aux conventions de forfaits, les stipulations de la convention collective, vagues et sans réelle portée et ne prévoyant aucune mesure de suivi de la charge de travail, ne sont pas de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé des salariés soumis à un décompte du temps de travail selon les modalités d’un forfait, alors que la SAS ERAS n’a mis en ‘uvre aucune mesure de suivi du temps et de la charge de travail en son sein ;

– la SAS ERAS n’a pas respecté les stipulations de l’accord d’entreprise relatif au temps de travail puisqu’aucun contrôle réel et effectif du nombre de jours travaillés et de la charge de travail n’existait au sein de la société, de sorte que la convention de forfait qu’ils avaient conclue sur ce fondement ne pouvait lui être opposée ;

– les compte-rendus versés par l’employeur ne permettent pas de s’assurer que l’entretien annuel prévu par l’accord collectif a bien eu lieu, et que l’ensemble des questions relatives à la santé et à la sécurité du salarié ont effectivement été évoquées, tandis que la société ERAS n’apporte aucun autre élément permettant de constater que d’autres entretiens périodiques auraient été organisés ;

– le volume des heures de travail effectuées ressort du tableau reprenant ses horaires de travail pendant l’exécution de son contrat de travail, détaillant le nombre d’heures effectuées par jours et par mois et le calcul exact des heures supplémentaires par semaine, par mois et par année sur la période de 2015 à 2017 ;

– le défaut de mention sur les bulletins de salaire des heures accomplies au-delà de la durée légale suffit à caractériser l’élément intentionnel du travail dissimulé ; en tout état de cause, l’élément intentionnel de cette pratique frauduleuse est bien caractérisé par le fait que l’employeur, qui a appliqué une convention de forfait sans respecter les dispositions de l’accord d’entreprise, ne pouvait ignorer la quantité des heures effectuées par le salarié.

La SAS ERAS soutient principalement, au soutien de ses demandes, que :

– le salarié est mal fondé à invoquer la nullité d’une convention de forfait régularisée au stade de l’embauche et qu’il a exécutée sans difficulté ni réclamation durant plusieurs années de relation de travail ;

– l’accord d’entreprise du 20 janvier 2014 prévoit la possibilité de conclure un forfait en jours sur la base de 216 jours par année civile, ainsi que les modalités de fonctionnement de la convention de forfait en jours, notamment la préconisation de deux jours de repos hebdomadaire consécutifs, le contrôle du nombre de jours travaillés, le suivi régulier de l’organisation et la charge de travail, la tenue d’un entretien annuel individuel, et l’adaptation du forfait en cas de contraintes familiales ou de santé.

– Les jours travaillés et non travaillés étaient suivis par l’établissement de relevés d’activité (Relevés FSA) remplis par ses propres soins, s’agissant d’un critère unique de présence ;

– Monsieur [Y] a bénéficié d’entretiens spécifiques « forfait jour » lors desquels étaient évoquées l’organisation et la charge de travail, notamment les 23 décembre 2015 et 4 janvier 2017 ; à ces occasions, le demandeur s’est dit en mesure d’adapter sa journée de travail à sa charge de travail ainsi que de concilier sa vie professionnelle et sa vie de famille, sans autre observation quant à sa charge de travail ; l’intéressé a bénéficié, de manière régulière, d’entretiens annuels d’évaluation, au cours desquels étaient évoqués et discutés ses objectifs, la charge de travail étant intrinsèquement liée ;

– subsidiairement, la demande de rappel d’heures supplémentaires n’est pas étayée puisque sont versés, en tout et pour tout, des « Feuilles de présence de l’employé » entre 2015 et 2017, qui ne permettent pas d’établir que Monsieur [Y] aurait réalisé des heures supplémentaires de manière quasi-invariable, sans qu’il ne soit fait état d’aucun horaire de travail ;

– par ailleurs, il n’est ni démontré, ni même allégué, que l’intéressé eut été sollicité par la société en dehors des horaires collectifs de travail, en sus de l’horaire collectif ;

– au demeurant, les décomptes produits contiennent de nombreuses erreurs, qui doivent nécessairement amener à réduire le quantum des heures de travail réellement effectuées par l’intéressé ;

– enfin, s’agissant d’une convention de forfait conclue entre les parties et les clauses indivisibles, il n’est ni contesté ni contestable que la rémunération servie l’a été, par référence à un forfait, tel que cela était mentionné sur les bulletins de paie, pendant toute la durée de la relation contractuelle de sorte que, si la clause « durée du travail » devait être annulée, les effets de la nullité auraient nécessairement à être étendues à la clause de rémunération ;

– le cas échéant, le salarié ne démontrant aucune volonté délibérée de l’employeur de minorer le nombre d’heures de travail déclarées devra être débouté de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé.

* * * * *

Les articles L. 3121-39 et suivants du code du travail, dans leurs rédactions applicables à la date de conclusion de la convention litigieuse, prévoient que les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée légale hebdomadaire, à la durée quotidienne maximale de travail ni aux durées hebdomadaires maximales de travail respectivement prévues aux articles L. 3121-10, L. 3121-34 et L. 3121-35 et L. 3121-36 du même code.

Et l’article L. 3121-39, dans sa rédaction alors applicable, dispose que la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche, qui détermine les catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions individuelles de forfait ainsi que les modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d’être conclues.

Il convient de rappeler, pour autant, que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles.

Et il résulte des articles 151 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, L. 3121-39 du code du travail, interprété à la lumière de l’article 17, paragraphes 1 et 4 de la directive 1993/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, paragraphe 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur.

Toute convention de forfait en jours doit ainsi être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

En l’espèce, l’article 3 – « temps de travail » du contrat conclu le 22 juillet 2015 entre [I] [Y] et la SAS ERAS, repris à l’identique à l’article 3 de l’avenant n°1 régularisé le 8 décembre 2016 entre les parties au contrat de travail, stipule que : « Il est notamment précisé ci-après les règles d’organisation du temps de travail en vigueur dans la société. Celles-ci sont mises en ‘uvre dans le cadre des dispositions légales, conventionnelles et des accords d’entreprise applicables au jour du présent engagement, notamment l’accord collectif relatif à l’aménagement du temps de travail en date du 20 janvier 2014. (‘) Compte-tenu du niveau de responsabilités qui est le sien et du degré d’autonomie dont il dispose dans son emploi du temps Monsieur [I] [Y] entre dans la catégorie des salariés soumis au régime du forfait jours dans les conditions prévues par l’accord relatif à l’aménagement du temps de travail en date du 20 janvier 2014. Par conséquent, la durée de travail de Monsieur [I] [Y] est de 216 jours travaillés par an, ce nombre étant fixé par l’accord susvisé par année complète d’activité et en tenant compte du nombre maximum de jours de congés défini par le code du travail. Monsieur [I] [Y] dispose d’une totale liberté dans l’organisation de son temps de travail à l’intérieur de ce forfait annuel, sous réserve de respecter les règles légales relatives au repos quotidien et au repos hebdomadaire. L’accord relatif à l’aménagement du temps de travail précité prévoit 12 jours de RTT par an et en stipule les modalités d’octroi et de prise ».

Il convient de constater à cet égard que l’accord d’entreprise « relatif à l’aménagement du temps de travail, au compte épargne temps et au compte temps disponible », conclu le 20 janvier 2014 entre la SAS ERAS et les organisations syndicales représentatives, prévoit effectivement (« 4.2 : salariés cadres soumis au forfait jours ») que les cadres de l’entreprise qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein du service ou de l’équipe auxquels ils sont intégrés, peuvent être soumis à une convention écrite de décompte du temps de travail selon les modalités d’un forfait en jours.

L’accord d’entreprise du 20 janvier 2014 prévoit à cet égard (« 4.2.4 : Garanties d’un équilibre entre charge de travail et durée du travail, protection de la santé et de la sécurité du salarié ») que :

« Le salarié en forfait jours est autonome dans l’organisation de son emploi du temps, et, corrélativement, dans la maîtrise de la charge de travail confiée par la société, qui doit être compatible avec le respect des différents seuils définis ci-dessous et rester dans les limites notamment définies par la législation en vigueur, les recommandations INRS et en conformité avec l’accord national interprofessionnel du 19 juin 2013 relatif à l’amélioration de la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle.

Le temps de travail peut être réparti sur certains ou sur tous les jours ouvrables de la semaine, en journées ou demi-journées de travail.

Cette répartition doit tenir compte de la prise des jours entiers de réduction d’horaire. Le comité d’entreprise devra être consulté sur cette répartition.

Afin de garantir la santé du salarié en forfait jours et de favoriser l’articulation de la vie privée et de la vie professionnelle, il est préconisé que la durée du repos hebdomadaire soit de 2 jours consécutifs. Afin de garantir une durée raisonnable de travail, le salarié en forfait jours devra toutefois organiser son travail pour ne pas dépasser 11 heures journalières.

Chaque salarié en forfait jours a droit au respect de son temps de repos, y compris par l’absence de communications technologiques.

Le salarié en forfait jours qui le souhaite peut, avec l’accord préalable de son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire. Cet accord est formalisé par un avenant. Dans le souci de préserver la santé du salarié, le nombre de jours travaillés dans l’année civile ne peut excéder 228 jours.

Le forfait en jours s’accompagne d’un contrôle du nombre de jours travaillés. Afin de décompter le nombre de journées ou de demi-journées travaillées, ainsi que celui des journées de repos prises, l’employeur est tenu d’établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification des jours de repos en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail auxquels le salarié n’a pas renoncé. Ce document peut être tenu par le salarié sous la responsabilité de l’employeur.

Le document de comptabilisation (Feuille de Suivi d’Activité) du nombre de journées de travail annuelles effectuées sera tenu à la disposition de l’inspecteur du travail pendant une durée de trois ans.

Le supérieur hiérarchique du salarié assurera le suivi régulier de l’organisation du travail de l’intéressé et de sa charge de travail.

En outre, et ce en application des dispositions de l’article L. 3121-46 du Code du travail, un entretien annuel individuel est organisé par l’employeur et portera sur les points suivants :

– l’organisation et la charge de travail de l’intéressé ;

– l’amplitude de ses journées d’activité ;

– l’organisation du travail dans l’entreprise ;

– l’articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale ;

– la rémunération du salarié.

Lors de cet entretien le supérieur hiérarchique et le salarié en forfait jours devront avoir copie, d’une part, des documents de contrôle des 12 derniers mois et, d’autre part, le cas échéant, du compte-rendu de l’entretien précédent.

Le compte-rendu de l’entretien sera établi et remis au salarié en forfait jours.

Dans le souci de prévenir les effets d’une charge de travail trop importante sur la santé, il est proposé de mettre en place un dispositif de veille et d’alerte.

L’employeur ou son représentant devra analyser les informations relatives au suivi des jours travaillés au moins une fois par semestre. S’il apparaît que la charge de travail et l’organisation du salarié révèlent une situation anormale, il recevra le salarié en forfait jours concerné en entretien, sans attendre l’entretien annuel prévu ci-dessus, afin d’examiner avec lui l’organisation de son travail, sa charge de travail, l’amplitude de ses journées d’activité, et d’envisager toute solution permettant de traiter les difficultés qui auraient été identifiées.

Pour sa part, le salarié en forfait jours pourra alerter sa hiérarchie s’il se trouve confronté à des difficultés auxquelles il estime ne pas arriver à faire face.

L’avenant individuel rappellera au salarié les règles en matière de repos légaux auxquels il ne peut être dérogé et que le refus de déroger à ces règles sauf cas légal de dérogation ne pourra pas constituer un motif de sanction (‘) ».

Or, ces dispositions de l’accord collectif, qui se limitent à prévoir pour les salariés soumis à un forfait en jours, s’agissant de la charge et de l’amplitude de travail, la tenue d’un document de comptabilisation annuelle du nombre de journées travaillées, d’une part, l’analyse par l’employeur des informations relatives au suivi des jours travaillées au moins une fois par semestre, d’autre part, et l’établissement une fois par an par le salarié, avec son responsable hiérarchique, d’un bilan de sa charge de travail, enfin, sont insuffisants à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

Il en résulte que la convention de forfait en jours conclue le 22 juillet 2015 entre [I] [Y] et la SAS ERAS sur le fondement de cet accord, et réitérée à l’identique par avenant n°1 régularisé le 8 décembre 2016 entre les parties au contrat de travail, était nulle et ne pouvait recevoir valablement application.

Et il doit en tout état de cause être relevé que les mentions elliptiques et standardisées des deux compte-rendus d’« entretien forfait jour 2015 » des 23 décembre 2015 et 4 janvier 2017 que verse aux débats la SAS ERAS sont insuffisantes à établir que, conformément aux stipulations ci-dessus reprises de l’accord d’entreprise du 20 janvier 2014, l’employeur aurait effectivement organisé avec son salarié un entretien annuel portant sur l’organisation et la charge de travail de l’intéressé, l’amplitude de ses journées d’activité, l’organisation du travail dans l’entreprise, la rémunération et l’articulation entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle et familiale.

La SAS ERAS, qui s’abstient de justifier qu’elle aurait effectivement respecté les obligations pesant sur elle aux termes de la convention individuelle qu’elle avait conclue avec [D] [Y], pourtant destinées à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, ne peut dès lors lui opposer valablement les stipulations de cette convention prévoyant le décompte du temps de travail selon les modalités d’un forfait en jours.

Or, il doit être rappelé à cet égard qu’aux termes de l’article L. 3171-1, alinéa 1er, du code du travail, applicable à la relation de travail entre [I] [Y] et la SAS ERAS à défaut d’applicabilité d’une convention de forfait, l’employeur est tenu d’afficher dans l’entreprise les heures auxquelles commence et finit le travail ainsi que les heures et la durée des repos.

Et, selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient à l’employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par son salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme alors sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Or, [I] [Y], qui soutient avoir effectué, dès son embauche par la SAS ERAS, des heures supplémentaires de travail qui ne lui ont pas été rémunérées, produit au soutien de ses affirmations des « feuilles de présence » détaillant, pour toute la durée de la relation de travail du 1er septembre 2015 au 4 septembre 2017, le nombre d’heures de travail effectuées quotidiennement, d’une part, et les journées non travaillées, d’autre part.

Pourtant, en dépit de ces indications précises de son salarié quant aux durées minimum de travail quotidien, la SAS ERAS, qui critique les heures de travail prétendument effectuées par son salarié, ne verse aux débats aucune pièce probante susceptible d’objectiver les heures de travail réellement effectuées par l’intéressé.

Il ressort ainsi de l’examen des seules pièces versées aux débats par les parties que, compte-tenu de la nature et de l’ampleur des missions confiées au salarié, telles qu’elles ressortent par exemple du courriel du directeur général de la SAS ERAS du 11 juillet 2016 ou de la lettre de mission établie à son intention le 10 mars 2017 par son employeur, le nombre d’heures supplémentaires effectuées par [I] [Y] au cours de la relation de travail ne peut être inférieur à 50 heures pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2015, 110 heures pour l’année 2016, et 75 heures pour la période du 1er janvier au 16 août 2017.

Il ressort à cet égard de l’article L. 3121-22 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 que les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l’article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires, quand les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

Il s’ensuit que le salarié qui a été soumis à tort à un forfait annuel en jours peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l’existence et le nombre conformément aux dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail et que le versement d’un salaire supérieur au minimum conventionnel ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires.

Il convient par conséquent de condamner la SAS ERAS à verser à [I] [Y] un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées au cours de la relation de travail à hauteur des sommes brutes, outre congés payés afférents, de :

– 1 916,17 euros pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2015,

– 4 215,57 euros pour l’année 2016,

– 2 874,25 euros pour la période du 1er janvier au 16 août 2017,

soit la somme totale de 9 005,99 euros bruts.

Pour autant, si l’article L. 8223-1 du code du travail réprime, par le versement au salarié qui en a été victime d’une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, le recours au travail dissimulé dans les conditions définies à l’article L. 8221-5 du même code, [I] [Y] ne produit aux débats aucune pièce susceptible d’établir ou d’accréditer ses allégations selon lesquelles c’est de façon délibérée que son employeur l’aurait soumis à une convention de forfait irrégulière et n’aurait pas mentionné sur les bulletins de salaire qui lui ont été délivrés un nombre d’heures conforme à celui réellement accompli.

Et, faute pour [I] [Y] de rapporter la preuve du caractère intentionnel de la minoration des heures de travail effectuées et rémunérées, le jugement déféré doit nécessairement être confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé.

– Sur le licenciement :

[I] [Y] soutient principalement, au soutien de ses demandes, que :

– La société ERAS était informée de sa condamnation pénale et, dès juillet 2016, de l’interdiction d’accès dont il faisait l’objet sur le site du CEA ;

– La société ERAS était informée de l’extension de cette interdiction d’accès,

– La société ERAS a légitimement considéré et constaté que les informations ainsi portées à sa connaissance ne l’empêchaient pas d’exercer ces fonctions ;

– L’interdiction d’accès à certains sites nucléaires constitue ainsi une conséquence d’un fait relevant de sa vie privée, porté à la connaissance de la société ERAS, de sorte qu’il ne saurait être considéré comme un manquement aux obligations découlant du contrat de travail ;

– Rien n’empêchait l’employeur de demander à son salarié d’intervenir sur d’autres secteurs dans le cadre de l’exercice de ses missions, le temps de contester l’interdiction d’accès sur les sites AREVA et CEA ;

– Il ne peut être soutenu qu’il aurait apporté le discrédit sur la société, alors que les sociétés clientes ignorent les raisons pour lesquelles il ne pouvait accéder sur le site ;

– La société ERAS souhaitait développer son activité dans le domaine du nucléaire, sans toutefois lui fournir les moyens de réaliser sa mission de sorte que la société ne disposait pas du personnel qualifié dans ce domaine et l’absence de résultat qui lui a été reprochée par son employeur ne lui était en réalité pas imputable ;

– Le motif réel du licenciement se trouve plutôt dans le souhait de la société de réduire ses effectifs en raison de la baisse de son activité dans le domaine du nucléaire, et de la perte de plusieurs marchés.

La SAS ERAS fait valoir, au soutien de ses prétentions au titre de la rupture du contrat de travail, que :

– En dépit du rôle prépondérant que Monsieur [Y] exerçait auprès du client AREVA, l’intéressé a fait l’objet d’une interdiction d’accès aux sites de cette société à compter du mois d’avril 2017, sans qu’il n’ait cru devoir en informer son employeur alors même qu’il n’a pas pu tenir un certain nombre de réunions commerciales, ce dont la société n’a eu connaissance qu’à posteriori ;

– Il en est résulté un discrédit porté à la société, non informée, outre la désorganisation des réunions planifiées ;

– Le salarié ne peut soutenir qu’il serait porté atteinte à sa vie privée alors que la lettre de licenciement ne retient nullement la condamnation pénale dont il aurait faire l’objet comme fondement du licenciement, et ne l’évoque d’ailleurs même pas, tandis que l’habilitation COSSEN ne porte aucune mention ni référence au motif de refus, de sorte que la condamnation pénale dont se prévaut l’intéressé reste totalement étrangère au litige ;

– l’appelant ne peut pas plus valablement soutenir que la société aurait fait preuve de négligence lors de son embauche puisque la condamnation pénale dont il fait état n’a fait l’objet d’aucune inscription sur son casier judiciaire, de sorte que toute recherche aurait été infructueuse ;

– Par ailleurs, il apparaît que les résultats commerciaux de Monsieur [Y], déjà en-deçà de l’objectif entre janvier et avril 2017, ont continué de se dégrader entre mai et juillet 2017.

* * * * *

Il résulte des dispositions combinées des articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-2 du code du travail qu’il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement, d’une part, et de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis, d’autre part.

Les motifs invoqués par l’employeur doivent être précis, objectifs et vérifiables et il ressort de l’article L. 1235-1 du code du travail qu’il appartient au juge d’apprécier non seulement le caractère réel du motif du licenciement disciplinaire mais également son caractère sérieux. Et, en cas de saisine du juge, la lettre de licenciement fixe les limites du litige à cet égard.

Au cas particulier, la SAS ERAS a procédé au licenciement de [I] [Y] pour faute grave par correspondance du 4 septembre 2017 rédigée dans les termes suivants :

« Conformément aux dispositions légales en vigueur, nous vous avons reçu en entretien le 28 août 2017 en nos locaux sis au [Adresse 1] à [Localité 3] (Rhône) à 15 heures 00.

Vous étiez assisté au cours dudit entretien par M. [R] [W], salarié de l’établissement ERAS [Localité 3].

M. [K] [S], salarié de l’établissement ERAS [Localité 3] Siège, nous assistait en sa fonction de Directeur Commercial.

Pour rappel, la présente procédure a été mise en ‘uvre suite à la prise de connaissance de faits par nos soins dans un délai inférieur à deux mois par rapport à la date de la convocation à entretien préalable et ne saurait donc, de facto, pouvoir être considérés comme étant entachés de forclusion.

Ledit entretien avait pour finalité de recueillir vos explications concernant les points détaillés ci-après.

– Rappel des faits.

En date du 27 juin 2017, nous avons été informés par un courriel interne du fait que vous n’aviez pas été convié à une réunion programmée pour le 27 juillet 2017 par notre client AREVA NC sur le site de Malvési, ce au motif que l’accès audit site vous était interdit (refus confirmé par l’officier de sécurité du site concerné).

En date du 30 juillet 2017, M. [K] [S] vous a sollicité, en tant que votre hiérarchique, afin de vous demander d’organiser des rendez-vous commerciaux avec la société AREVA, ce pour les sites de [Localité 6], [Localité 8] et sites sis en région parisienne.

En l’absence de réponse de votre part, il vous a relancé en date du 01 août 2017 (avec ajout de demande de rendez-vous pour le site de Malvési notamment.

Aucune réponse n’a été apportée par vos soins.

En date du 27 juillet 2017, notre Directeur Général ainsi que le Directeur Régional ERAS pour la région [Localité 3] Sus Ouest, participaient à une réunion avec des représentants de la société SOGETI, en l’occurrence le Vice President Engineering et le le Practice Manager.

Au cours de ladite réunion, il a été rapporté par les deux dernières personnes précitées que vous n’aviez pu participer au comité de pilotage du mois de mai 2017 du site AREVA sis à [Localité 7] (site dit de [Localité 10] en Yvelines), ce au motif que vous étiez interdit d’accès.

Renseignement pris auprès de notre Responsable d’Agence à [Localité 9], il s’est avéré effectif que vous n’aviez pu participer au comité de pilotage du 10 mai 2017, ce au motif que vous faisiez l’objet d’une interdiction d’accès.

Il en a été de même pour celui du 21 juin 2017.

Vous avez demandé à notre Responsable d’Agence à [Localité 9] de vous remplacer invoquant le fait que vous rencontriez un problème d’accès sur le site suite à un procès-verbal pour excès de vitesse !

Compte tenu des éléments précités et afin de clarifier la situation, nous avons pris contact par courriel avec la société AREVA en son site de Malvési (officier de sécurité), ce en date du 01 août 2017.

En date du 10 août 2017, nous avons eu une réponse écrite explicite de ladite société, nous confirmant que vous n’étiez pas autorisé à entrer sur site.

Nous avons alors contacté téléphoniquement ledit officier de sécurité afin d’obtenir plus d’explications. Celui-ci nous a confirmé que vous étiez interdit d’accès sur l’ensemble des sites et établissements des sociétés CEA, AREVA et EDF (en sa partie activité nucléaire), ce depuis la date du 25 avril 2017 suite à une enquête diligentée par le Commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire (CoSSeN).

Ainsi, depuis le 25 avril 2017, vous êtes dans l’impossibilité d’accéder à l’ensemble des sites des sociétés CEA, AREVA et EDF (en sa partie activité nucléaire, id est les acteurs majeurs de l’activité nucléaire en France, ce alors même que vous êtes, au sein de la société ERAS, le Responsable d’activités commerciales, en charge du développement de ce secteur (sociétés CEA et AREVA) comme le stipule votre feuille de route applicable depuis le 1er janvier 2016.

– Les faits reprochés.

1) Le manque de loyauté à l’égard de votre employeur

Alors même que vous aviez parfaitement connaissance de la portée d’une telle interdiction d’accès (notamment du fait – de votre connaissance des modalités de la société AREVA dont vous avez été salarié de nombreuses années), vous avez sciemment caché votre situation.

A aucun moment, vous n’avez informé votre hiérarchie, M. [K] [S] en l’occurrence, de la situation.

Au cours de notre entretien, vous avez confirmé être parfaitement au fait de votre situation, nous signifiant même que votre avocat menait une action auprès de la société AREVA).

Il est irréfragable que vous avez fait montre d’un manque de loyauté et de probité à l’égard de la société ERAS.

Vous n’avez pas hésité à faire montre de la plus grande tromperie à l’égard de votre employeur et ce depuis plusieurs mois.

En l’absence d’investigations de notre part, vous auriez continué à taire votre incapacité à exercer pleinement vos fonctions.

2) Le discrédit porté à notre société

Alors même que vous étiez présenté par la Direction Générale, votre hiérarchie et l’ensemble des intervenants ERAS dans le domaine nucléaire, comme l’interlocuteur commercial majeur auprès de la société AREVA et de nos partenaires commerciaux, vous étiez (et vous êtes toujours) sous le coup d’une interdiction d’accès vous discréditant totalement en tant qu’interlocuteur et discréditant, de facto, la société ERAS.

Comment pouvez-vous représenter notre société alors même que vous êtes persona non grata ‘

Cette question demeure sans réponse de votre part.

3) L’incidence directe de votre interdiction d’accès sur vos résultats commerciaux

Il est indéniable que votre situation ne vous permettait pas d’exercer pleinement vos fonctions commerciales.

Vos résultats, au demeurant, bien en deçà de vos objectifs pour l’année 2017, sur la période de janvier à d’avril 2017 inclus (en moyenne, 57 500 euros de chiffre d’affaires obtenu, se sont encore détériorés sur la période de mai à juillet 2017 inclus (en moyenne 18 000 euros de chiffre d’affaires obtenu).

Il est déplorable que vous n’ayez pris aucune disposition, et en premier lieu en informer le directeur Commercial, ce afin de pouvoir mettre en ‘uvre un plan d’action permettant à notre société d’assurer le développement du compte client AREVA.

Vous avez porté préjudice à notre société et fait montre d’un manque d’honnêteté que nous ne pouvons accepter.

Notre entretien ne nous a permis de modifier notre appréciation des faits.

Nous vous signifions par la présente votre licenciement pour faute grave.

Votre licenciement est effectif à la date du 04 septembre 2017.

Vous ne percevrez ni indemnité de préavis ni de licenciement.

Nous vous ferons parvenir dans les plus brefs délais l’ensemble des documents vous revenant.

La période de mise à pied à titre conservatoire, nécessaire au bon déroulement de la présente procédure, ne vous sera pas rémunérée ».

Or, il apparaît que la SAS ERAS a été informée le 22 juin 2017, par courriel d’un chargé d’affaires de la société cliente AREVA NC, que [I] [Y] ne pourrait participer à une réunion prévue le 27 juillet suivant dès lors que l’intéressé faisait l’objet, sans autre précision, d’une décision de refus d’accès à son site de Malvési.

Sollicité le 1er août, l’officier de sécurité du site AREVA NC de Malvési a fait savoir à la SAS ERAS par courriel du 10 août 2017 que, pour des motifs dont il n’était pas rendu destinataire, [I] [Y] faisait alors l’objet d’une décision d’interdiction d’entrée sur les sites nucléaires du groupe AREVA situés en France.

Et, s’il ressort des termes du courriel d'[T] [B] du 27 juillet 2017, comme des termes du compte-rendu de l’entretien préalable à un éventuel licenciement du 28 août 2017, établi le 29 août 2017 par la SAS ERAS et transmis au salarié, que le directeur général de la SAS ERAS « était au courant depuis avril 2016 de l’interdiction d’intervention de R. [Y] sur les sites du CEA mais pas pour AREVA », il apparaît que, ainsi que l’expose expressément l’appelant dans les conclusions dont il saisit la cour, [I] [Y] avait été informé dès la fin du mois d’avril 2017 qu’il faisait l’objet d’une interdiction générale d’accès aux sites nucléaires des sociétés du groupe AREVA.

Il apparaît ainsi au terme des énonciations qui précèdent que [I] [Y], qui venait de régulariser, le 8 décembre 2016, un avenant au contrat de travail qu’il avait conclu avec la SAS ERAS portant mutation à compter du 1er janvier suivant à [Localité 3], siège du groupe AREVA, pour y exercer les fonctions de responsable du développement commercial nucléaire de la société, n’a pas estimé devoir porter à la connaissance de son employeur l’interdiction d’accès aux sites nucléaires exploités par les sociétés représentant l’acteur majeur de son secteur d’activité dont il a fait l’objet, ni les démarches qu’il expose – sans pour autant en justifier – avoir entrepris pour faire rapporter cette décision.

Et la manquement caractérisé de [I] [Y] à l’obligation de loyauté à laquelle il était tenu envers son employeur était d’une gravité telle, au regard de l’incidence majeure de la décision dont il faisait l’objet pour l’organisation et l’exercice de son activité et l’atteinte, indirecte mais réelle, à la crédibilité et à l’image de la société auprès de certains de ses principaux clients, qu’il empêchait toute poursuite de la relation de travail, même pendant la durée limitée du préavis.

C’est par conséquent par une juste appréciation de fait et de droit des circonstances de l’espèce, que la cour fait sienne, que les premiers juges ont débouté [I] [Y] des demandes indemnitaires et salariales qu’il formait à l’encontre de son employeur au titre de la procédure de licenciement et de la rupture de la relation de travail.

– Sur les demandes accessoires :

La présente décision étant exécutoire de droit, nonobstant l’exercice éventuel par les parties des voies de recours exceptionnelles susceptibles de leur être ouvertes, la demande de [I] [Y] tendant à ce que soit ordonnée « l’exécution provisoire du jugement à intervenir » ne peut prospérer.

La SAS ERAS, partie perdante au sens des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, doit être condamnée à supporter les dépens de première instance et d’appel.

Et il serait inéquitable de laisser à la charge de [I] [Y] l’intégralité des sommes qu’il a été contraint d’exposer en justice pour la défense de ses intérêts, en première instance puis en cause d’appel, de sorte qu’il convient de condamner la SAS ERAS à lui verser la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a débouté [I] [Y] de la demande de rappel de salaire qu’il formait au titre des heures supplémentaires et l’a condamné au paiement des dépens de première instance ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS ERAS à verser à [I] [Y] les sommes de :

– neuf mille cinq euros et quatre-vingt-dix-neuf centimes (9 005,99 euros) bruts à titre de rappel de salaires ;

– neuf cents euros et soixante centimes (900,60 euros) bruts au titre des congés payés afférents ;

CONFIRME le jugement dont appel pour le surplus de ses dispositions ;

ORDONNE à la SAS ERAS de remettre à [I] [Y] les documents de fin de contrat (bulletin de salaire et attestation destinée à Pôle Emploi) rectifiés conformément au présent arrêt, dans le délai d’un mois à compter du prononcé de la décision ;

DÉBOUTE [I] [Y] de sa demande tendant à ce que soit ordonnée l’exécution provisoire du jugement à intervenir ;

CONDAMNE la SAS ERAS à verser à [I] [Y] la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SAS ERAS de la demande qu’elle formait en cause d’appel sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

CONDAMNE la SAS ERAS au paiement des dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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