Convention collective Syntec : 5 juin 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/01048

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Convention collective Syntec : 5 juin 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/01048

5 juin 2023
Cour d’appel de Rennes
RG
20/01048

8ème Ch Prud’homale

ARRÊT N°218

N° RG 20/01048 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QPJG

Mme [F] [I]

C/

S.A. SQLI

Réformation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me Stéphane LALLEMENT

– Me Roland RINALDO

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 05 JUIN 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Février 2023

En présence de Madame Laurence APPEL, Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 05 Juin 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [F] [I]

née le 28 Août 1985 à [Localité 2] (44)

demeurant [Adresse 3]

[Localité 2]

Ayant Me Stéphane LALLEMENT de la SELARL OCTAAV, Avocat au Barreau de NANTES, pour Avocat constitué

INTIMÉE :

La S.A. SQLI prise en la personne de ses représentants légaux et ayant son siège social :

[Adresse 1]

[Localité 4]

Ayant Me Roland RINALDO, Avocat au Barreau de NANTES, pour postulant

et représentée à l’audience par Me Ludovic SAUTELET, Avocat plaidant du Barreau de PARIS

Mme [F] [I] a été embauchée par la Société GROUPE SHAFT 15 novembre 2012, avec prise d’effet dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel au 20 novembre 2012 en qualité de responsable administrative et de gestion, statut cadre, position 2.1, coefficient 115.

Au terme d’un avenant du 4 mars 2013, la durée du temps de travail de Mme [F] [I] a été portée à 37,5 heures correspondant à un temps plein pour un maximum de 218 jours.

Par avenant du 17 juin 2013, le contrat de travail de M. [F] [I] a été transféré à la société SHAFT filiale du groupe.

Au terme d’un jugement du 5 février 2014, le Tribunal de commerce de Nantes a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la Société SHAFT. Le contrat de travail de M. [F] [I] a été transféré à la SA SQLI le 8 mai 2014, à la faveur du plan de cession du 7 mai 2014 intervenu dans ce cadre.

Dans le dernier état des relations contractuelles régies par la Convention collective dite SYNTEC, Mme [F] [I] occupait des fonctions d’ingénieur commercial depuis le 1er juillet 2017.

Mme [I] a été placée en arrêt de travail à compter du 8 février 2019 pour anxiété réactionnelle.

Le 13 mars 2019, Mme [I] s’est vue remettre par son employeur son plan de commissionnement pour l’année 2019.

Par courrier en date du 15 mars 2019, Mme [I] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, qu’elle motivait notamment par du harcèlement moral à son encontre.

Le 13 septembre 2019, Mme [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes aux fins de voir :

‘ Constater l’existence de faits de harcèlement moral ;

‘ Constater la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur en date du 15 mars 2019 ;

‘ Dire et juger que cette rupture produit les effets d’un licenciement nul ;

‘ Condamner la SA SQLI à verser :

– 30.737,46 € de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

– 15.368,74 € bruts d’indemnité compensatrice de préavis,

– l.536,87 € bruts de congés payés afférents,

– 11.218,23 € d’indemnité conventionnelle de licenciement,

– 61.474,96 € de dommages-intérêts pour licenciement nul,

‘ Intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil outre l’anatocisme,

‘ Ordonner la remise d’un bulletin de salaire, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes, sous astreinte de 75 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la décision à intervenir,

‘ Ordonner l’exécution provisoire (article 515 du Code procédure civile),

‘ Condamner la SA SQLI à verser 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ Condamner la SA SQLI aux entiers dépens.

La cour est saisie de l’appel formé le 13 février 2020 par Mme [F] [I] contre le jugement du 30 janvier 2020, par lequel le conseil de prud’hommes de Nantes a :

‘ Constaté l’absence de harcèlement moral à l’encontre de Mme [I],

‘ Dit que la rupture du contrat de travail par prise d’acte de Mme [I] doit s’analyser en une démission,

‘ Débouté Mme [I] de l’intégralité de ses demandes,

‘ Condamné Mme [I] à verser à la SA SQLI les sommes suivantes :

– 15.368,74 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la non-exécution par Mme [I] de son préavis suite à sa démission,

– 200 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

‘ Débouté la SA SQLI du surplus de ses demandes reconventionnelles,

‘ Condamné Mme [I] aux dépens éventuels.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 13 mai 2020, suivant lesquelles Mme [I] demande à la cour de :

‘ Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 février 2020 par le conseil de prud’hommes de Nantes,

‘ Condamner la SA SQLI à payer à Mme [I] les sommes suivantes :

– 30.737,46 € à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral,

– 15.368,74 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 1.536,87 € bruts au titre des congés payés afférents,

– 11.218,23 € au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

– 61.474,96 € à titre de dommages intérêts pour licenciement nul,

‘ Assortir les condamnations à intervenir des intérêts au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud’hommes,

‘ Ordonner la capitalisation des intérêts à échoir en application de l’article 1343-2 du code civil,

‘ Condamner la SA SQLI à remettre à Mme [I] un bulletin de salaire, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes sous astreinte de 75 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la décision à intervenir,

‘ Condamner la SA SQLI à payer à Mme [I] la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ Condamner la SA SQLI aux entiers dépens.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 23 juin 2020, suivant lesquelles la SA SQLI demande à la cour de :

‘ Dire recevable et bien-fondé la SA SQLI en ses présentes écritures, fins et conclusions,

‘ Constater l’absence de dénonciation du solde de tout compte,

‘ Constater que Mme [I] se contredit au détriment de la SA SQLI,

‘ Débouter, en conséquence Mme [I] de ses demandes,

‘ Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes le 30 janvier 2020 en ce qu’il a :

– constaté l’absence de toute situation de harcèlement moral,

– dit et jugé que la prise d’acte du contrat de travail de Mme [I] produisait les effets d’une démission,

En conséquence,

‘ Constater que :

– la rupture du contrat de travail de Mme [I] ne repose sur aucun grief imputable à la SA SQLI empêchant toute poursuite du contrat de travail,

– les prétendus faits de harcèlement moral sont injustifiés et infondés,

‘ Dire et juger, en conséquence, que la rupture du contrat de travail à l’initiative de Mme [I] produit les effets d’une démission,

‘ Constater que Mme [I] ne démontre aucun préjudice,

‘ Débouter, en conséquence Mme [I] de l’ensemble de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail,

‘ Débouter Mme [I] de ses demandes indemnitaires au titre du prétendu harcèlement moral,

‘ Débouter Mme [I] de toutes ses autres demandes,

‘ Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes le 30 janvier 2020 en ce qu’il a condamné Mme [I] au paiement de la somme de 15.368,74 € au titre de la réparation du préjudice subi de la non-exécution du préavis,

‘ Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes le 30 janvier 2020 en ce qu’il a condamné Mme [I] à verser à la SA SQLI la somme de 200 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

En conséquence,

‘ Condamner Mme [I] au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 2 février 2023

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire sur les fins de non recevoir :

– tirée des effets libératoire de la signature du solde de tout compte :

Pour infirmation et rejet des prétentions de la salariée, la SA SQLI soutient que cette dernière qui a signé son solde de tout compte le 27 mars 2019 ne l’a pas dénoncé dans le délai de six mois, de sorte qu’elle est irrecevable en ses demandes.

La salariée qui n’oppose aucun argument à ce titre est supposée s’approprier les motifs retenus par les premiers juges qui pour écarter le moyen invoqué par la société, ont retenu que la saisine de la juridiction prud’homale dans un délai inférieur à six mois, produisait les mêmes effets que celle définie par l’article D1234-8 du Code du travail.

L’article L1234-20 du Code du travail dispose que le solde de tout compte, établi par l’employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail, et précise que le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.

En l’espèce, le solde de tout compte signé par M. [F] [I] le 27 mars 2019 pour un montant total de 5.405,09 € n’est libératoire pour l’employeur que pour les sommes qui y sont mentionnées et dont aucune ne correspond aux demandes de la salariée qui de surcroît a saisi la juridiction prud’homale avant l’expiration du délai de six mois qui lui était imparti ainsi que l’ont relevé les premiers juges, l’exigence de l’envoi de la dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception n’ayant pour but que de lui donner date certaine.

Il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris de ce chef et d’écarter la fin de non recevoir invoquée à ce titre.

– tirée du principe de l’estoppel :

Par ce moyen non invoqué devant les premiers juges, la SA SQLI entend voir déclarer irrecevables les demandes de la salariée au motif qu’elle se serait contredite à ses dépens, en revendiquant ab initio une indemnisation minimale de 73.175 € dans le cadre de sa prise d’acte, qu’elle aurait accepté le solde de tout compte pour la somme de 5.405,09 € précitée, avant de réclamer un montant total d’indemnisation de 125.336 €.

Outre les développements qui précèdent concernant la nature différente des sommes visées au solde de tout compte, il ne peut être considéré que la majoration par la salariée du montant des sommes revendiquées entre celles figurant dans la prise d’acte et celles réclamées devant les premiers juges puis devant la cour, caractérise la contradiction invoquée par la SA SQLI.

Il y a lieu par conséquent d’écarter la fin de non recevoir invoquée par la SA SQLI à ce titre.

Sur le fond :

– Quant au harcèlement moral :

Pour infirmation et bien fondé de ses prétentions à ce titre, Mme [I] impute à M. [Y], son responsable hiérarchique de mettre en doute ses compétences, de multiplier les remarques et mesures vexatoires à son égard et d’exercer sur elle une pression psychologique continue, dépourvue de toute justification professionnelle mais également d’avoir remanié en profondeur à son détriment son plan de commissionnement en la privant de compte LA POSTE, attribué à son supérieur hiérarchique et en lui confiant des comptes clients dépourvus de potentiel commercial.

La salariée précise que le comportement de son employeur à son égard a affecté son état de santé, comme a pu constater le médecin du travail, au point d’être placée en arrêt de travail.

L’employeur objecte que les contraintes liées au travail et l’existence d’une ambiance tendue ne peuvent recevoir la qualification de harcèlement moral, qu’il résulte des échanges de mails en octobre et novembre 2018 qu’elle a été conviée à une réunion d’équipe pour échanger sur les résultats, que les dires de la salariée ne sont confirmés par personne et ont fait l’objet d’une rectification de son supérieur M. [Y] sans susciter de réaction immédiate de sa part, qu’il est établi qu’elle traversait une situation personnelle compliquée au point de bénéficier d’absences autorisées par son supérieur compréhensif de manière bienveillante.

La SA SQLI ajoute que les pièces médicales et certificats médicaux produits ne font que rapporter les propos de la salariée, qu’antérieurement à sa prise d’acte, elle n’a formulé aucune alerte, suscité aucune enquête, que les attestations de proches émanent de la famille ou de salariés en procédure avec la société, constituant parfois des attestations croisées mais aussi contradictoires et sans apporter la moindre précision sur les faits reprochés.

La SA SQLI estime par ailleurs que la salariée ne peut invoquer une démission contrainte ou un avenant imposé unilatéralement dans la mesure où elle ne l’a jamais signé et a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

En application des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L.1152-1 du code du travail.

Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d’exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

L’article L.1152-4 du même code oblige l’employeur à prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ;

L’article 26 de la Charte sociale européenne dispose que :

« En vue d’assurer l’exercice effectif du droit de tous les travailleurs à la protection de leur dignité au travail, les Parties s’engagent, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs :

[…]

2. à promouvoir la sensibilisation, l’information et la prévention en matière d’actes condamnables ou explicitement hostiles et offensifs de façon répétée contre tout salarié sur le lieu de travail ou en relation avec le travail, et à prendre toute mesure appropriée pour protéger les travailleurs contre de tels comportements ».

Il suit de ces dispositions que l’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, notamment de harcèlement moral ; l’absence de faute de sa part ou le comportement fautif d’un autre salarié de l’entreprise ne peuvent l’exonérer de sa responsabilité à ce titre ; les méthodes de gestion mises en oeuvre par un supérieur hiérarchique ne peuvent caractériser un harcèlement moral que si elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l’article L.1152-3 du code du travail, un licenciement intervenu dans ce contexte est nul.

En l’espèce, Mme [I] produit un échange de courriels des 24 et 31octobre 2018 ainsi que du 1er novembre 2018 avec son responsable hiérarchique concernant la restitution par M. [F] [I] du contenu d’une réunion dans des termes contestés par M. [Y], des attestations de collègues de travail sur ses qualités professionnelles et sa souffrance au travail ainsi qu’une attestation de sa mère à ce sujet, outre un compte rendu de visite à la médecine du travail.

Il doit être observé que les attestations de ses anciens collègues, outre les qualités professionnelles louées de la salariée, sont formulées en termes généraux et que celle de sa mère reprend les propos de sa fille, de même que les termes consignés dans le dossier médical par le médecin du travail constituent la reproduction des propos de la salariée.

Il n’en demeure pas moins qu’il est établi que le plan de commissionnement de la salariée a été remanié le 13 mars 2019, le compte LA POSTE ayant été attribué à son supérieur hiérarchique, alors qu’il lui était confié des comptes clients selon elle dépourvus de potentiel commercial.

Cette circonstance pour avérée qu’elle soit, même appréciée avec les autres faits rapportés par la salariée dans leur ensemble, ne permet pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral, tout au plus une exécution déloyale du contrat de travail qui n’est pas invoquée, aucun des autres manquements ou faits invoqués n’apportant de précision suffisante sur les termes employés, les attitudes et comportements adoptés de nature selon la salariée à mettre en doute ses compétences, de multiplier les remarques et mesures vexatoires à son égard et d’exercer sur elle une pression psychologique continue, dépourvue de toute justification professionnelle.

Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris de ce chef et de débouter Mme [F] [I] de la demande formulée à ce titre.

Sur la prise d’acte de rupture :

Pour infirmation et bien fondé de sa demande de requalification de sa prise d’acte aux torts de l’employeur en licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [F] [I] impute à faute à son employeur le harcèlement moral qu’elle aurait subi, la modification unilatérale de son contrat de travail sans son accord au travers d’un nouveau plan de commissionnement communiqué le 13 mars 2019, avec effet rétroactif au 1er janvier 2019, prévoyant notamment le retrait de ses comptes clients les plus rémunérateurs (modification complète du périmètre commercial), à son insu et au profit de son supérieur hiérarchique, le non-respect des usages en vigueur tel que la mise à disposition des tickets restaurant dès leur réception à l’agence.

Reprenant ses arguments relatifs à l’absence de harcèlement moral, la SA SQLI fait en outre valoir que la modification du contrat n’a pas été imposée, qu’il s’agissait d’une proposition d’avenant mais que la salariée a pris acte de la rupture sans l’avoir signé, qu’elle ne peut se prévaloir du seul retrait du client la Poste, dès lors que lui était confiée la responsabilité de plusieurs clients, que le tableau Excel du 18 mars 2019 qu’elle produit est dénué de portée dès lors qu’à cette date le contrat de travail était déjà rompu, qu’en ce qui concerne la mise à disposition des tickets restaurant, il n’est pas fait la démonstration de la gravité du manquement allégué.

Lorsqu’un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit soit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifiaient, soit dans le cas contraire d’une démission.

L’écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, ne fixe pas les limites du litige, dès lors le juge est tenu d’examiner les manquements de l’employeur invoqués devant lui par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

En l’espèce, c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré du grief relatif au harcèlement moral est identique à l’argumentation précédemment développée au titre du harcèlement moral et qu’antérieurs de plus de six mois, il est établi qu’il n’a pas empêché la poursuite du contrat de travail.

Par ailleurs, il résulte des pièces produites au débat que la SA SQLI a communiqué le 13 mars 2019 à Mme [F] [I] pour signature un plan de commissionnement applicable de manière rétroactive à compter du 1er janvier 2019, mais que la salariée n’a pas signé, de sorte qu’il ne peut être soutenu qu’il lui aurait été imposé.

S’agissant l’absence de mise à disposition des tickets restaurant dès leur réception à l’agence, la cour observe que la salariée ne développe aucun argument relatif à ce grief contenu dans la lettre de prise d’acte de rupture.

Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [F] [I] de sa demande de requalification de la prise d’acte et des demandes indemnitaires subséquentes, y compris celle relative à la remise des documents sociaux.

Sur la demande reconventionnelle de la SA SQLI :

Pour infirmation, Mme [F] [I] soutient que dès lors que la rupture est imputable à la SA SQLI, cette dernière ne saurait prétendre à l’indemnisation du préjudice dont elle se prévaut à ce titre.

La SA SQLI réfute l’argumentation de la salariée à ce titre, arguant de ce que la rupture du jour au lendemain de son contrat de travail lui a été préjudiciable, notamment en termes d’image vis à vis des clients dont certains se sont plaints de sa défection.

En l’espèce, il est établi qu’à la suite de sa prise d’acte, M. [F] [I] n’a pas exécuté son préavis, que sa prise d’acte n’ayant pas été requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’intéressée est tenue d’indemniser le préjudice subi à ce titre par la SA SQLI, laquelle produit au débat un courrier du département des Côtes d’Armor.

Cependant au terme de ce courrier du 26 mars 2019, le directeur des systèmes d’information du département interroge la société sur sa capacité à remplir ses obligations résultant d’un contrat de TMA 2019, du fait du départ simultané de plusieurs salariés dont Mme [F] [I] mais surtout de M. [L], les accès dont il disposait en tant que chef de projet ayant été supprimés.

Le préjudice de la SA SQLI ne peut donc s’apprécier qu’au regard de l’atteinte à son image et à sa crédibilité à l’égard de ses partenaires commerciaux, sans s’étendre aux conséquences directes alléguées à l’égard du département des Côtes d’armor, telles qu’invoquées par l’employeur.

Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi à ce titre, en condamnant Mme [F] [I] à verser à la SA SQLI la somme de 6.500 € à ce titre, le jugement entrepris étant réformé dans cette limite.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la salariée appelante qui succombe en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser la société intimée des frais irrépétibles qu’elle a pu exposer pour assurer sa défense en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné Mme [F] [I] à verser à la SA SQLI la somme de 15.368,74 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la non-exécution de son préavis,

et statuant à nouveau de ce seul chef,

CONDAMNE Mme [F] [I] à payer à la SA SQLI la somme de 6.500 € net à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la non-exécution de son préavis,

y ajoutant,

CONDAMNE Mme [F] [I] à payer à la SA SQLI la somme de 1.800 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [F] [I] aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

 


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