ARRÊT N°
N° RG 21/00932 – N° Portalis DBV6-V-B7F-BIIRE
AFFAIRE :
[O] [Y]
C/
S.A.R.L. ALTRIA
JPC/TT
Demande de requalification du contrat de travail
Grosse délivrée le 30/11/2022
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE
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ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2022
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Le trente Novembre deux mille vingt deux, la Chambre économique et Sociale de la Cour d’Appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
[O] [Y], demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Anthony ZBORALA, avocat au barreau de LIMOGES,
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/007954 du 05/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANTE d’un jugement rendu le 26 Octobre 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LIMOGES
ET :
S.A.R.L. ALTRIA, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Audrey PASCAL, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
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L’affaire a été fixée à l’audience du 17 Octobre 2022, après ordonnance de clôture rendue le 14 Septembre 2022, la Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller et de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, assistés de Madame Line MALLEVERGNE, Greffier. Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 30 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
LA COUR
EXPOSE DU LITIGE
La société ALTRIA exerce une activité de prestations de services et de suivi de chantiers.
Elle a engagé Mme [Y] en qualité d’agent d’entretien, dans le cadre d’un contrat à durée déterminée à temps partiel de 20 heures hebdomadaires pour la période du 11 septembre 2017 au 10 octobre 2017.
Le contrat a fait l’objet de deux renouvellements successifs à la suite desquels Mme [Y] a été employée dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps partiel (30 heures hebdomadaires) ayant pris effet le 11 décembre 2017.
Le 30 mars 2018, le temps de travail de la salariée a été modifié de sorte qu’elle est passée à temps plein.
A partir du 17 janvier 2019, elle a été placée en arrêt maladie.
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Par requête en date du 19 février 2020, Mme [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Limoges aux fins d’obtenir notamment la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, ainsi que la résiliation judiciaire de son contrat aux torts exclusifs de l’employeur en raison de faits de harcèlement.
Le 3 décembre 2020, elle a été déclarée inapte à son poste par la médecine du travail. L’avis précise que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
Elle a été licenciée pour inaptitude le 22 décembre 2020.
Par jugement du 26 octobre 2021, le conseil de prud’hommes de Limoges a :
– dit que la demande en requalification de contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée est prescrite ;
– débouté Mme [Y] de ses demandes en :
paiement de l’indemnité de requalification ;
résiliation judiciaire du contrat de travail et des demandes afférentes ;
en remboursement d’amendes de stationnement ;
rappel de maintien de salaire ;
en paiement d’astreinte ;
en paiement d’heures supplémentaires ;
– débouté Mme [Y] et la société ALTRIA de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné Mme [Y] aux dépens.
Mme [Y] a interjeté appel de la décision le 4 novembre 2021. Son recours porte sur l’ensemble des chefs de jugement.
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Par conclusions notifiées par voie électronique le 1er février 2022, Mme [Y] demande à la cour de :
– infirmer le jugement dont appel en tout point ;
– juger que la société ALTRIA a gravement manqué à ses obligations contractuelles ;
Statuant à nouveau, à titre principal, de :
– juger que la société ALTRIA s’est rendue coupable d’harcèlement moral à son égard ;
– prononcer, en conséquence, la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société ALTRIA à la date du licenciement pour inaptitude intervenu le 22 décembre 2020 ;
– condamner la société ALTRIA à lui verser les sommes de :
9.288,12 € net de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité du licenciement ;
30.000 € net de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral ;
A titre subsidiaire, de :
– juger que la société ALTRIA s’est rendue coupable d’exécution déloyale du contrat de travail à son égard ;
– prononcer, en conséquence, la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société ALTRIA à la date du licenciement pour inaptitude intervenu le 22 décembre 2020 ;
– condamner la société ALTRIA à lui verser la somme de :
9.288,12 € net de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité du licenciement ;
30.000 € net de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral ;
A titre infiniment subsidiaire, de :
– juger que son licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison notamment des nombreux manquements de l’employeur ayant conduit à son inaptitude ;
– condamner la société ALTRIA à lui verser la somme de :
9.288,12 € net de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité du licenciement ;
30.000 € net de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral ;
En toute hypothèse, de :
– condamner la société ALTRIA à lui verser les sommes de :
3.096,04 € brut d’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 309,60 € brut de congés payés afférents ;
918,72 € brut au titre des heures supplémentaires réalisées et non rémunérées, outre 91,87 € brut de congés payés afférents ;
1.482,68 € net de rappel de maintien de salaire non versé par l’employeur ;
1.713,60 € brut au titre des astreintes effectuées et non rémunérées par l’employeur, outre 171,36 € brut au titre des congés payés y afférent ;
510 € au titre du remboursement des amendes de stationnement indûment réglées par la salariée ;
2.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
– ordonner l’exécution provisoire, par application de l’article 515 du code de procédure civile.
A l’appui de son recours, Mme [Y] soutient que son contrat de travail doit être résilié aux torts de l’employeur en raison des divers manquements. Ainsi, elle fait valoir qu’elle a été victime d’un harcèlement moral, d’une part, et de l’exécution déloyale son contrat de travail d’autre part.
Elle déclare avoir subi des critiques sur sa personne, notamment à connotation sexuelle ou sexiste, et avoir été ouvertement humiliée et dénigrée. Elle indique que ses conditions de travail se sont dégradées tout au long de la relation contractuelle, qu’elle a été contrainte de se déplacer dans un véhicule de service totalement insalubre et dénué de toute sécurité et d’accomplir de nombreuses heures supplémentaires.
A subsidiaire, elle soutient que son licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que l’inaptitude est la conséquence des manquements de l’employeur.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 avril 2022, la société ALTRIA demande à la cour de :
– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
– débouter Mme [Y] de l’intégralité de ses demandes ;
– condamner la même à lui verser la somme de 2.500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure.
En réponse, la société ALTRIA soutient que les faits de harcèlement moral invoqués par l’appelante ne sont pas établis. Elle souligne que la plupart des attestations produites par la salariée n’ont aucun lien avec l’affaire en cause ou ne répondent pas aux exigences des articles 200 à 203 du code de procédure civile. Elle conteste également tout fait de harcèlement sexuel ou agissements pouvant être qualifiés de sexistes.
Par ailleurs, elle conteste avoir commis les manquements évoqués par Mme [Y].
Enfin, elle fait valoir que l’inaptitude de Mme [Y] n’a pas une origine professionnelle et elle conclut que le licenciement est régulier.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 septembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.
SUR CE,
I. Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail
– Sur le harcèlement moral :
Aux termes de l’article L.1152-1 du Code du travail : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
L’article L. 1153-1 du même code prévoit qu’aucun salarié ne doit subir des faits:
1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
Par ailleurs, l’article L. 1154-1 du code du travail prévoit :
« Lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ».
En l’espèce, Mme [Y] prétend avoir été victime de remarques et propos blessants, humiliants, dégradants et parfois même à connotation sexuelle et sexiste tenus par son employeur. Elle déclare également que celui-ci lui aurait dit « Est-ce que tu suces bien ‘ ».
À l’appui de ses allégations, la salariée produit divers témoignages et justifie d’une dégradation de son état de santé puisqu’elle a bénéficié d’un arrêt de travail en raison d’un état dépressif. Au regard de ces éléments, il apparaît que cette dernière présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Mme [Y] produit plusieurs témoignages d’anciens salariés qui attestent principalement de ce qu’ils ont vécu, beaucoup moins de ce qu’a pu vivre la salariée au sein de l’entreprise. Un fait unique est décrit par trois salariés. Il s’agit d’une scène survenue sur le chantier situé [Adresse 4] au cours de laquelle le gérant de la société ALTRIA lui a demandé de nettoyer le sol en se mettant à quatre pattes.
Pour le reste, les témoins évoquent des paroles déplacées sans en préciser le contenu ce qui ne permet pas à la cour de contrôler la véracité et la qualification retenue par les témoins. Ils font également état de la mise à disposition d’un véhicule en mauvais état ce qui, en soi, ne peut caractériser un fait de harcèlement moral sauf à faire apparaître que les autres véhicules de l’entreprise étaient en bon état et que l’employeur a affecté ce véhicule à Mme [Y] dans le but de l’humilier, ce qui ne ressort pas des témoignages.
Par ailleurs, Mme [Y] produit divers certificats médicaux qui font apparaître qu’elle a fait l’objet d’un suivi par le docteur [T] [J], psychiatre, à compter du 19 septembre 2019, pour un état dépressif. Ce médecin indique dans son certificat médical du 28 janvier 2020 que sa patiente « souffre de gros soucis financiers en lien avec le retard de règlement de ses salaires avec une action juridique en cours».
Dans son certificat médical du 18 juillet 2019, le docteur [F] [V], généraliste, qui suit régulièrement Mme [Y], indique : « Depuis l’été 2018, elle parle de soucis à son travail où elle se sent rabaissée par des tâches qu’on lui donnerait et qui serait très ingrate. (…) Depuis 2019, elle est venue me reconsulter apparemment dans le même contexte, elle était épuisée, dormait mal et ressentait un sentiment d’injustice face à sa situation professionnelle ».
Le même médecin a attesté dans un certificat médical du 10 février 2020 que Mme [Y] lui a « expliqué à plusieurs reprise ses difficultés qu’elle rattache au cadre professionnel ».
Il ne résulte pas des informations recueillies par les médecins que la dégradation de l’état de santé de la salariée soit consécutive à des faits de harcèlement moral puisque cette dernière a évoqué devant eux des soucis financiers ainsi que le fait de se sentir rabaissée en raison de tâches jugées ingrates.
Mme [Y] a été engagée en qualité d’agent d’entretien. Il est constant qu’elle a dû intervenir sur des chantiers et la scène du chantier situé [Adresse 4] telle que décrite par M. [M], témoin, fait apparaître que le nettoyage est intervenu après passage des peintres. Il s’ensuit qu’il y avait nécessairement des salissures de peinture sur les sols et qu’un tel nettoyage ne peut qu’être effectué dans la position décrite par les témoins.
Concernant les propos sexistes ou à connotation sexuelle, il n’est produit aucun élément de preuve puisque les témoins attestent en des termes généraux qui ne peuvent être vérifiés.
Mme [Y] affirme pour la première fois en cause d’appel que le gérant de la société ALTRIA lui a dit : « Est-ce que tu suces bien ‘ ». Ce fait qui est contesté, n’est corroboré par aucun élément.
Il apparaît donc que les faits dénoncés par Mme [Y] ne sont pas constitutifs d’un harcèlement.
En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges en ce qu’ils ont rejeté ce chef de demande.
– Sur les heures supplémentaires :
Il résulte des dispositions des articles L. 3121-27 à L. 3121-29 du code du travail que la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine, que toute heure accomplie au-delà de la durée
légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent et que les heures supplémentaires se décomptent par semaine.
Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1er, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
En l’espèce, Mme [Y] demande la condamnation de l’employeur à lui payer la somme de 918,72 € brut. À l’appui de sa demande, elle produit les pièces n°25, 26 et 27 intitulés « détail des heures supplémentaires » selon son bordereau de pièces. Il est indiqué de manière manuscrite sur le tableau correspondant à la pièce n°25 que la salariée a accompli des heures supplémentaires à hauteur de 40h40, sur le tableau correspondant à la pièce n°26 des heures supplémentaires à hauteur de 19h00 et sur le tableau correspondant à la pièce n°27 des heures supplémentaires à hauteur de 47h00.
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.
Le tableau constituant la pièce n°25 reprend l’ensemble des lieux d’intervention. La salariée a renseigné les dates des prestations qu’elle a réalisées en chacun de ces lieux pour la période du 5 mars au 28 juin 2018. Ainsi, par exemple, elle prétend avoir accompli 30 heures de travail dans l’immeuble situé [Adresse 1] dans lequel elle est intervenue à 5 reprises au cours des mois de mars et d’avril 2018. L’ensemble de ce tableau est rempli de la sorte sans qu’il soit possible de déterminer à quelle date ont été accomplis précisément les heures prétendument effectuées dans tel ou tel immeuble.
Le tableau constituant la pièce n°26 a été établi sur la base de la même trame que la pièce n°25. Il n’est mentionné aucune heure de travail. Seule figure dans ce document les lieux et les dates d’intervention.
La pièce n°27 concerne la semaine du 14 au 18 janvier 2019. Les données figurant sur cette pièce sont incohérentes puisque la salariée indique avoir travaillé du lundi au mercredi inclus à raison de 7 heures par jour, soit 21 heures de travail hebdomadaire mais elle indique que le total des heures effectuées est de 35 heures et que les heures supplémentaires BNB Atria sont de 47 heures.
L’employeur ne fournit aucun décompte du temps de travail de sa salariée et il convient de constater que les éléments produits par la salariée ne révèlent pas l’existence d’heures supplémentaires non rémunérées.
En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges en ce qu’ils ont débouté la salariée de ce chef de demande.
– Sur les astreintes :
Mme [Y] prétend avoir effectué des astreintes illégales dans la mesure où elle devait rester à la disposition de son employeur et qu’elle réalisait, notamment, des missions les samedis et les dimanches en fonction de demandes formulées la veille. Elle demande donc la condamnation de l’employeur à lui payer la somme de 1.713,60 € brut correspondant à la rémunération de deux jours de travail par week-end au cours des mois de juin à août 2018.
Les pièces n°19 à 21 invoquées par la salariée ne la concernent pas dans la mesure où ni son nom ni son prénom ne figure sur ces documents. Par ailleurs, les pièces n°22 à 27 qu’elle invoque également ne permettent pas davantage d’établir qu’elle a travaillé les fins de semaines au cours des mois de juin à août 2018.
La décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu’ils l’ont déboutée de ce chef de demande.
– Sur l’absence de maintien de salaire pendant l’arrêt maladie :
Il résulte des dispositions de l’article 43 de la convention collective SYNTEC (IDCC 1486) que dans les cas de maladie ou d’accident d’origine non professionnelle, les ETAM ayant plus de 1 an d’ancienneté et moins de 5 ans ont droit à 100 % d’appointements bruts pour le premier mois et 80 % de ses appointements bruts pour les deux mois suivants.
Il est précisé que l’employeur ne devra verser que les sommes nécessaires pour compléter ce que verse la sécurité sociale et, le cas échéant, un régime de prévoyance, ainsi que les compensations de perte de salaire d’un tiers responsable, jusqu’à concurrence de ce qu’aurait perçu, net de toute charge, l’ETAM malade ou accidenté s’il avait travaillé à temps plein ou à temps partiel, non compris primes et gratifications.
En l’espèce, Mme [Y] bénéficie donc en vertu de ce texte d’une garantie de salaire durant les trois premiers mois de son arrêt de travail. Elle est donc pas fondée à réclamer le bénéfice de cette garantie pour l’ensemble de la période d’arrêt de travail du mois de décembre 2019 au mois d’août 2020.
Concernant les trois premiers mois de son arrêt maladie, il apparaît que le complément de salaire a été versé par l’employeur avec un retard d’un mois.
Mme [Y] qui conteste le montant des sommes versées par l’employeur ne produit aucun justificatif de versement des indemnités journalières par l’assurance-maladie de sorte qu’elle ne rapporte pas la preuve que le complément de salaire versé par son employeur ne correspond pas à ce qui lui est dû.
La décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu’ils l’ont déboutée de cette demande.
– Sur le paiement des amendes :
Mme [Y] avait à sa disposition un véhicule de l’entreprise et, comme le relève l’employeur, ceux-ci sont immatriculés à son nom et, dans ces conditions, les amendes lui sont envoyées directement et non à Mme [Y].
Pour établir la réalité des faits qu’elle invoque, la salariée produit la copie des talons de chèques sur lesquels il est mentionné « amende » mais ces documents ne permettent pas de prouver que les amendes ainsi payées correspondent à des stationnements irréguliers durant son temps de travail.
Par ailleurs, elle affirme que ces stationnements irréguliers seraient la conséquence de l’absence de prise en charge des frais de stationnement par l’employeur. Or, il résulte des pièces produites par ce dernier que celui-ci prenait en charge de tels frais. Il produit d’ailleurs la copie de tickets de stationnement remis par la salariée.
Il n’est donc pas établi que Mme [Y] a été verbalisée en raison d’un manquement de son employeur.
Au regard de ces éléments, La décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu’ils ont rejeté ce chef de demande.
II. Sur la demande de résiliation du contrat de travail
À l’appui de sa demande de résiliation de son contrat de travail, Mme [Y] invoque les manquements de son employeur à ses obligations, lesdits manquements correspondants à ceux examinés ci-dessus au titre des demandes liées à l’exécution du contrat de travail. L’ensemble des demandes présentées par Mme [Y] à ce titre ayant été rejetées, il apparaît qu’elle ne rapporte pas la preuve des manquements qu’elle invoque.
En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges en ce qu’ils l’ont déboutée de sa demande de résiliation de son contrat de travail aux torts de l’employeur.
III. Sur le licenciement
Mme [Y] a été licenciée pour inaptitude le 20 décembre 2020. Elle prétend que son inaptitude est directement liée à la dégradation de ses conditions de travail, au harcèlement moral dont elle a été victime et l’exécution déloyale de son contrat de travail cette dernière étant caractérisée par les manquements de son employeur examinés ci-dessus.
Les demandes de la salariée présentées au titre du harcèlement moral et des manquements de son employeur à ses obligations ont été rejetées. Elle ne peut donc prétendre que son inaptitude est en lien avec ceux-ci.
Les éléments invoqués à l’appui de dégradation des conditions de travail sont les mêmes que ceux invoqués au titre du manquement de l’employeur à son obligation d’exécuter loyalement le contrat de travail. Il a été jugé qu’ils ne sont pas établis.
Au surplus, les éléments figurants dans les pièces médicales du dossier font apparaître que Mme [Y] a surtout fait état de problèmes financiers et du mal-être que lui causait l’exercice de tâches qu’elle juge dégradantes alors même qu’elles étaient liées à son emploi.
En conséquence, la décision des premiers juges sera également confirmée en ce qu’ils ont débouté la salariée de sa contestation de son licenciement.
Sur les autres demandes :
A la suite de la présente procédure, la société ALTRIA a exposé des frais non compris dans les dépens. L’équité commande de l’en indemniser. Mme [Y] sera condamnée à lui payer la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Limoges en date du 26 octobre 2021 en ses dispositions soumises à la cour ;
CONDAMNE Mme [Y] aux dépens de l’appel et à payer à la société ALTRIA la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Line MALLEVERGNE Pierre-Louis PUGNET