03/02/2023
ARRÊT N° 2023/55
N° RG 21/03376 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OJWM
MD/KS
Décision déférée du 24 Juin 2021
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE
( 20/00591)
SECTION ENCADREMENT
[L] [F]
[V] [S]
C/
S.A SQLI
INFIRMATION PARTIELLE
Grosses délivrées
le 03/02/2023
à
Me Pascale BENHAMOU
Me Anne TUXAGUES
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 1
***
ARRÊT DU TROIS FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANT
Monsieur [V] [S]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Pascale BENHAMOU de la SCP CABINET DENJEAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉE
S.A SQLI
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Ludovic SAUTELET de l’AARPI LAFOND-SAUTELET, avocat au barreau de PARIS
Représentée par Me Anne TUXAGUES de la SELARL ALPHA CONSEILS, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. DARIES, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
S. BLUME, présidente
M. DARIES, conseillère
N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : A. RAVEANE
lors du prononcé : C.DELVER
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.
FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [V] [S] a été embauché à compter du 15 juillet 2008 par la SA SQLI, en qualité de développeur, statut cadre, position 1.1, coefficient 95, suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils, dite SYNTEC.
Aux termes d’un courrier en date du 24 mars 2014, M. [S] a sollicité une reclassification conventionnelle ainsi que la prise en charge de ses frais de déplacements et de formation.
Par courrier du 29 avril 2014, la société a accepté de le positionner au niveau 2.1, coefficient 115, et de porter sa rémunération à 2.324,15 €. Toutefois, elle n’a pas accepté de régulariser la situation du salarié de manière rétroactive, ni fait droit à ses demandes de remboursement de frais de déplacements et de formation.
Le salarié a notifié sa démission par courrier du 1er août 2014 et a quitté les effectifs de l’entreprise au 1er septembre 2014.
M. [V] [S] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse, le 16 mars 2016, pour obtenir un rappel de salaires au titre de la classification conventionnelle, faire requalifier sa démission en prise d’acte aux torts de l’employeur devant produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et solliciter le paiement de diverses sommes.
Par jugement du 24 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse, section encadrement, a :
– débouté M. [S] de ses demandes ;
– condamné M. [S] à verser à la société SQLI la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
– condamné M. [S] à payer 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné le salarié aux entiers dépens de l’instance ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
***
Par déclaration du 26 juillet 2021, M. [V] [S] a régulièrement interjeté appel de ce jugement dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.
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Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique au greffe
le 7 avril 2022, M. [V] [S] demande à la cour d’infirmer la décision et de :
– condamner la SA SQLI à lui payer :
*7.093,80 € à titre de rappel de salaire conventionnel sur la période non prescrite, du 2 septembre 2011 au 30 avril 2014, outre 709,38 € de congés payés y afférents,
*75,53 € au titre de la prime de vacances,
*2.812,30 € au titre du remboursement de ses frais de déplacements sur la période de janvier 2013 à septembre 2014,
*1.058,70 € au titre du remboursement de ses frais de formation ;
– requalifier sa démission en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– condamner la société à lui payer en conséquence :
*22.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*5.234,01 € à titre d’indemnité de licenciement ;
– condamner la société à lui remettre un certificat de travail et une attestation pôle emploi rectifiées, sous astreinte de 40 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;
– débouté la société de ses demandes ;
– condamner la société à lui payer 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.
***
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique au greffe
le 12 janvier 2022, la SA SQLI demande à la cour de confirmer le jugement, sauf sur le quantum des dommages et intérêts alloués au titre de la procédure abusive, et de :
– débouter M. [S] de ses demandes ;
– condamner M. [S] à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner le salarié aux entiers dépens.
***
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date
du 18 novembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer aux dernières écritures des parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la classification conventionnelle :
En cas de différend sur la catégorie professionnelle d’une convention collective qui doit être attribuée à un salarié, il convient de rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé et la qualification qu’elle requiert. En outre, il appartient au salarié d’apporter la preuve qu’il exerce effectivement les fonctions correspondant à la qualification qu’il revendique.
M. [S] a été embauché à compter du 15 juillet 2008 en qualité de développeur, statut cadre, position 1.1, coefficient 95, suivant contrat de travail régi par la convention collective nationale SYNTEC.
Le salarié revendique la position 2.1 et le coefficient 115 tels que prévus par l’annexe 2 de la convention collective relative à la classification des ingénieurs et cadres.
Il y est prévu que l’obtention de la position 2.1 et le coefficient 115 sont réservés aux ingénieurs ou cadres :
– ayant au moins « deux ans de pratique de la profession » ;
– ayant des « qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés, travaillant aux mêmes tâches qu’eux dans les corps d’état étudiés par le bureau d’études » ;
– étant âgés d’au moins 26 ans.
Le 15 juillet 2010, soit deux ans après son embauche, M. [S] avait les deux années d’ancienneté requises et 36 ans, de sorte que la première et la troisième condition pour obtenir la position et le coefficient revendiqués sont remplies.
L’analyse de ses bilans annuels de performance révèle que c’est à compter de l’année 2012 que M. [S] a fait preuve de polyvalence et d’adaptation en étant affecté sur plusieurs projets, pour y contribuer ou les réaliser, et qu’il est monté en compétences quant aux technologies utilisées. En outre, les bilans font état de ce qu’il est « agréable de travailler » avec M. [S], doté d’un « grand sens du service », et que celui-ci pourrait être davantage « moteur », voire source de propositions en apportant de « bonnes idées ».
Il s’en évince que M. [S] avait manifestement les qualités intellectuelles et humaines suffisantes lui permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études au sens de la classification conventionnelle revendiquée.
L’employeur oppose que le salarié n’avait pas l’autonomie et la faculté d’anticipation requises et qu’il avait besoin d’un encadrement l’empêchant d’être positionné au niveau revendiqué. Cependant, la société n’explique pas en quoi les dites insuffisances procéderaient d’un manque de qualités intellectuelles et humaines empêchant le salarié de se mettre rapidement au courant des travaux d’études.
Par conséquent, M. [S] sera positionné au niveau 2.1 coefficient 115 à compter du mois d’avril 2012, soit le mois suivant l’entretien d’évaluation de l’année 2012.
Ainsi, le rappel de rémunération alloué sera de 4.901,75 €, conformément au tableau de décompte précis du salarié annexé sur les grilles des salaires minimaux et dont les calculs ne sont pas spécialement contestés par l’employeur.
Il lui sera en outre alloué les sommes de 490,17 € à titre de congés payés et de 49 € au titre de la prime de vacances.
Le jugement sera réformé de ces chefs.
Sur les frais de déplacements :
M. [S] sollicite le remboursement des frais de déplacements effectués avec son véhicule personnel entre le lieu de son domicile et le site du client Edel sur lequel il était amené à se rendre depuis janvier 2013. Il précise qu’il devait faire 5,5 kilomètres pour se rendre dans l’établissement de [Localité 7], son lieu de travail habituel, et près
de 22 kilomètres afin de se rendre sur le site du client Edel dans la commune de [Localité 6].
La société oppose que le salarié ne précise pas le lieu de la mission, que l’agence à laquelle il était rattaché se situe à [Localité 7] et que le client Edel, sis à [Localité 6], est dans la même zone urbaine, à 19 km, de sorte qu’en vertu du guide de remboursement des notes de frais en vigueur au sein du groupe, M. [S] n’était pas éligible à un quelconque défraiement à ce titre.
Sur ce,
L’article 50 de la convention collective nationale SYNTEC prévoit que les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l’occasion d’une charge supplémentaire ou d’une diminution de salaire.
Le contrat de travail stipule en outre que :
« M. [V] [S] est engagé pour travailler dans notre établissement de [Localité 7], lieu de sa première affectation.
Compte tenu de la nature de l’activité de l’entreprise, le salarié pourra être appelé à effectuer de fréquents déplacements tant en France qu’à l’étranger. Ces déplacements hors du lieu de travail habituel, mais sans changement de résidence, ne seront l’occasion d’aucune charge supplémentaire pour lui et ils s’effectueront dans les conditions prévues par la convention collective ».
Il ressort des éléments de la procédure que le lieu de travail habituel de M. [S] a été fixé au [Adresse 4], à [Localité 7].
Or, à compter du mois de janvier 2013, l’appelant a été amené à se rendre sur un lieu de travail différent, sis dans la commune de [Localité 6], la société reconnaissant que cette ville est distante de 19 kilomètres de l’établissement toulousain.
Il s’en déduit que M. [S] a été amené à effectuer plusieurs déplacements sur un site éloigné de son lieu de travail habituel, avec son véhicule personnel, ce qui n’est pas utilement contesté par l’employeur. Ces déplacements ont nécessairement généré un surcoût pour M. [S], notamment des frais de carburant supplémentaires.
En outre, les termes de la convention collective et du contrat de travail prévalent sur la politique de remboursement interne en vigueur dans le groupe SQLI, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’appliquer le guide des procédures des remboursements des notes de frais, étant surabondamment ajouté que la société affirme, sans le démontrer, que la ville de [Localité 6] fait partie du périmètre dit « 0 » ne donnant pas lieu à remboursement.
Pour la période de janvier à février 2014, le salarié produit des fiches de frais avec l’entête du groupe SQLI lesquelles mentionnent notamment, pour chaque jour, le véhicule utilisé, sa puissance fiscale, le nombre de kilomètres parcourus ainsi que le montant journalier et mensuel de remboursement.
Contrairement à ce que soutient la société, le salarié n’a pas renseigné de déplacements durant ses congés paternité et parental du 2 septembre
au 12 octobre 2013.
M. [S] sollicite un remboursement de frais jusqu’au mois d’août 2014, mais il ne fournit plus de notes de frais à compter du mois de mars 2014.
Par conséquent, la cour considère que l’employeur demeure redevable d’une somme de 1.672,25 € à titre de remboursement de frais sur la période courant de janvier 2013 à février 2014.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur la prise en charge des frais de formation :
M. [S] sollicite la prise en charge par l’employeur d’une partie du montant de la formation à laquelle il s’est inscrit en 2013, le master IGSI, à hauteur de 64 heures dans le cadre du droit individuel à formation (DIF).
La société oppose que le salarié n’a pas respecté les formes prévues par le règlement intérieur de l’entreprise pour bénéficier du DIF : M. [S] aurait dû adresser sa demande au responsable du service formation, de sorte que le délai légal d’un mois laissé à l’employeur pour notifier sa réponse n’a jamais courru.
Les articles L. 6323-10 et D. 6323-2 du code du travail, dans leur version applicable à la cause, disposent que lorsque le salarié prend l’initiative de faire valoir ses droits à la formation dans le cadre du droit individuel à la formation, l’employeur lui notifie sa réponse dans le délai d’un mois. L’absence de réponse de l’employeur vaut acceptation du choix de l’action de formation.
Le salarié produit sa « demande d’imputation de formation au titre du droit individuel à formation », laquelle comporte notamment la formation envisagée (master IGSI), le nombre d’heures prises en charge au titre du DIF (64 heures), ainsi que l’accord et la signature de son manager en date du 9 janvier 2013.
L’employeur produit le règlement intérieur dont il se prévaut, lequel précise en son article 9 la procédure suivante :
« Toute demande au bénéfice du droit individuel à formation devra être adressée par tous moyens à son responsable hiérarchique ainsi que par courrier recommandé à l’attention du responsable formation interne au siège de l’entreprise.
Le délai d’un mois pour approbation tacite de la demande court à compter de la réception du courrier recommandé par le responsable formation interne au service formation ».
Or, la cour relève que ce règlement intérieur date du 2 janvier 2014, de sorte qu’il ne permet pas de vérifier si une telle procédure était en vigueur au cours du mois de janvier 2013, date à laquelle M. [S] a obtenu la demande auprès de son responsable hiérarchique.
En toute hypothèse, cette procédure prévue par l’employeur ajoute une condition de forme que la loi ne prévoit pas et qui a empêché M. [S] de faire valoir ses droits à formation, non contestés dans leur principe.
Ainsi, il ne peut être reproché au salarié de ne pas avoir régulièrement informé le service formation par lettre recommandée avec accusé de réception.
Par conséquent, la cour retient que l’employeur a donné son accord à la demande de formation du salarié le 9 janvier 2013.
La société a donc injustement refusé de prendre en charge les frais de formation litigieux, précision faite que M. [S] a obtenu le diplôme de la formation suivie d’un montant de 7.000 €, en partie financée par l’organisme Fongecif à hauteur
de 4.709,10 € (pièce salarié n° 14 : factures de l’université).
Ainsi, la société sera condamnée à payer au salarié la somme réclamée d’un montant de 1.058,70 €.
Le jugement sera réformé de ce chef.
Sur la requalification de la démission en prise d’acte :
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque le salarié remet en cause sa démission en raison de faits ou de manquements imputables à l’employeur, le juge doit, s’il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines à la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les manquements reprochés à l’employeur sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, ou, dans le cas contraire, d’une démission.
Au cas d’espèce, par courrier du 1er août 2014, M. [S] a remis sa démission en main propre contre décharge :
« (‘). J’ai l’honneur de porter à votre connaissance que je suis démissionnaire de mes fonctions de développeur que j’occupe depuis le 15 juillet 2008 au sein de votre société.
Bien que ma période de préavis normalement due en la matière me conduise à quitter l’entreprise le 31 octobre 2014 au soir, je souhaiterais que ma démission soit effective à compter du 2 septembre 2014 au soir. Je souhaiterais que mes congés payés déjà posés ne décalent pas d’autant le préavis et ainsi être libre de tout engagement
le 2 septembre 2014 au soir (‘) ».
Cette lettre ne fait état d’aucun reproche adressé à l’employeur, mais il résulte des éléments évoqués ci-dessus qu’il existait un différend entre M. [S] et la société SQLI à la date où cette démission a été remise.
En effet, par courrier antérieur du 24 mars 2014, le salarié a reproché à son employeur de ne pas l’avoir positionné au niveau 2, coefficient 115, dès le mois de juillet 2010.
Il ressort de ce courrier et des courriels versés aux débats que M. [S] a revendiqué à plusieurs reprises une telle classification depuis l’année 2010.
Si au jour de la démission, le salarié avait enfin obtenu la position et le coefficient souhaités suivant courrier de l’employeur en date du 29 avril 2014, l’entreprise persistait à refuser la régularisation de sa situation sur les années précédentes.
La cour a fait partiellement droit à la demande de rappel de salaires en considérant que M. [S] aurait dû obtenir la classification supérieure depuis le mois d’avril 2012.
Au 1er août 2014, date de sa démission, ce manquement de l’employeur persistait donc depuis plus de deux ans.
Quant aux refus de l’employeur de prendre en charge les frais de déplacements et de formation, griefs reprochés par le salarié suivant courrier du 24 mars 2014 précité, ces différends demeuraient également au jour de la démission.
Analysés dans leur ensemble, ces manquements, qui touchent à la classification et aux frais déboursés par le salarié dans le cadre de ses missions, amplifiés par le refus de l’employeur de les régulariser, sont d’une gravité suffisante de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
Par conséquent, la démission s’analyse en une prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur les conséquences du licenciement injustifié :
Sur l’indemnité de licenciement
En vertu de l’article 19 de la convention collective SYNTEC, l’ingénieur ou cadre est en droit de prétendre à une indemnité de licenciement calculée comme suit :
« Après 2 ans d’ancienneté, 1/3 de mois par année de présence de l’ingénieur ou du cadre, sans pouvoir excéder un plafond de 12 mois.
(…) Pour les années incomplètes, l’indemnité de licenciement est calculée proportionnellement au nombre de mois de présence ».
En application de l’article R. 1234-4 du code du travail, dans sa version en vigueur à la date du litige, le salaire à prendre en considération est, selon la formule la plus avantageuse pour M. [S], le tiers des trois derniers mois de rémunération.
Il ressort des éléments de la procédure que l’ancienneté de M. [S] à la date de son départ de l’entreprise était de 6 ans et 5 mois, de sorte que, compte tenu de sa rémunération moyenne conformément à la classification attribuée (2.324,15 €), l’indemnité de licenciement est évaluée à 4.971,06 €.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, le licenciement sans cause réelle et sérieuse donne droit à l’octroi d’une somme à titre de dommages et intérêts ne pouvant être inférieure aux salaires des six derniers mois.
La cour constate que M. [S] a notifié sa démission, avec demande de réduction du préavis, dans le but d’être embauché au sein de la société Ausy, le 14 octobre 2014, en qualité d’ingénieur, position 2.1, coefficient 115 suivant contrat régi par la convention collective SYNTEC.
À défaut d’établir un préjudice économique découlant de la rupture du contrat de travail, ou une baisse de rémunération, M. [S] est seulement fondé à obtenir une indemnité d’un montant au moins équivalent à six mois de salaire, soit14.000 € (2.324,15 € x 6 mois).
Le jugement sera réformé de ces chefs.
Sur les documents de fin de contrat :
La société SQLI sera condamnée à remettre au salarié un certificat de travail et une attestation pôle emploi conformes aux condamnations prononcées, sans qu’une astreinte ne soit nécessaire.
Le jugement sera réformé de ce chef.
Sur les demandes annexes :
Les demandes de M. [S] sont partiellement fondées et aucun abus dans le droit d’agir n’est caractérisé, de sorte que la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sera rejetée.
La société SQLI, partie principalement perdante, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d’appel.
M. [S] est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens exposés à l’occasion de cette procédure. La société sera donc tenue de lui payer la somme de 2.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera réformé de ces chefs.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Et, statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne la SA SQLI à payer à M. [V] [S] les sommes suivantes :
*4.901,75 € à titre de rappel de salaires au titre de la reclassification,
*490,17 € à titre de congés payés afférents,
*49 € au titre de la prime de vacances correspondante,
*1.672,25 € à titre de remboursement des frais de déplacements ;
*1.058,70 € au titre des frais de formation non pris en charge ;
Juge que la rupture du contrat de travail s’analyse en une prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne en conséquence la SA SQLI à payer à M. [V] [S] les sommes suivantes :
*4.971,06 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
*14.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Déboute M. [V] [S] du surplus de ses demandes ;
Condamne la SA SQLI aux entiers dépens de première instance et d’appel ;
Déboute la SA SQLI de ses demandes ;
Condamne la SA SQLI à payer à M. [V] [S] la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
C.DELVER S.BLUMÉ
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