Convention collective SYNTEC : 3 avril 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/05943

·

·

Convention collective SYNTEC : 3 avril 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/05943

8ème Ch Prud’homale

ARRÊT N°135

N° RG 22/05943 –

N° Portalis DBVL-V-B7G-TFSK

M. [E] [U]

C/

S.A.S. INOVAXO

Réformation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 AVRIL 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 02 Février 2023

devant Messieurs Rémy LE DONGE L’HENORET et Philippe BELLOIR, magistrats tenant l’audience en la formation rapporteur, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame [H] [M], Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 03 Avril 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANT et intimé à titre incident :

Monsieur [E] [U]

né le 14 Décembre 1967 à [Localité 4] (33)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

Ayant Me Matthieu KONNE de l’AARPI ASSOCIATION CHIRON-RAGUIN-KONNE JURILOIRE, Avocat au Barreau de NANTES, pour postulant et représenté par Me Bastien LABEYRIE substituant à l’audience Me Philippe PRADAL, Avocats plaidants du Barreau de PARIS

INTIMÉE :

La S.A.S. INOVAXO prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

demeurant [Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Katia CHELOUAH-LENERAND substituant à l’audience Me Stéphanie SERROR de la SCP LA GARANDERIE AVOCATS, Avocats au Barreau de PARIS

M. [E] [U] a été embauché par la société LOGIWIN, devenue la SAS INOVAXO, par un contrat à durée indéterminée à compter du 14 septembre 1998 en qualité d’analyste programmeur et depuis le mois de juillet 2001 en qualité de Chef de projet.

Le 1er juin 2019, la SAS INOVAXO a proposé à M. [U] de passer au statut 2.2. coefficient 130 de la Convention Collective Syntec.

Le même jour, M. [U] a refusé et revendiqué ‘la position 3.1 coefficient 170″.

Le 27 mai 2022, M. [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes en sa formation de référé, aux fins de :

‘ Condamner la SAS INOVAXO à lui communiquer sous peine d’astreinte de 100 € par jour de retard et par document non produit à compter du 15ème jour les documents suivants :

Pour les documents relatifs aux salariés embauchés dans des conditions similaires à la sienne :

– Un tableau récapitulatif présentant les salariés embauchés dans des conditions similaires (avec indication notamment de la date d’embauche et des diplômes similaires),

– Leurs contrats de travail et éventuels avenants,

– Leurs fiches de paie de mars 2017 à mars 2022,

– Un tableau présentant l’évolution de leur rémunération depuis leur embauche,

– Leurs fiches de poste ainsi que la fiche de poste de M. [U],

– L’ensemble de leurs fiches d’évaluation depuis leur embauche,

– Les tableaux d’avancement et de promotion,

– La classification qu’applique l’employeur à M. [U].

Pour les documents relatifs aux salariés avec une classification identique lors de son départ à date :

– Un tableau récapitulatif présentant les salariés qui avaient une classification identique à la sienne à date (avec indication notamment de la date d’embauche et des diplômes similaires),

– Leurs contrats de travail et éventuels avenants,

– Leurs fiches de paie de mars 2017 à mars 2022,

– Un tableau présentant l’évolution de leur rémunération depuis leur embauche,

– Leurs fiches de poste,

– L’ensemble de leurs fiches d’évaluation depuis leur embauche,

– Les tableaux d’avancement et de promotion,

Pour les documents internes à la SAS INOVAXO :

– Le livre de paie et tout autre document de nature à éclairer le Conseil, sur le montant du salaire de M. [U] depuis son engagement à ce jour,

– L’ensemble des accords d’entreprise ou du groupe de la SAS INOVAXO portant sur l’évolution salariale et/ou l’évolution de classification,

– L’ensemble des documents sociaux internes à la SAS INOVAXO portant sur l’évolution des compétences et des salaires au sein de la société et notamment :

* Les derniers rapports sur l’état de l’emploi et de son évolution,

* Les derniers rapports sur l’égalité Homme/Femme en entreprise,

* Les derniers rapports sur les rémunérations ;

‘ Condamner la SAS INVAXO à verser 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La cour est saisie d’un appel formé le 10 octobre 2022 par M. [U] à l’encontre de l’ordonnance du 21 septembre 2022, par laquelle le Conseil de prud’hommes de Nantes en sa formation de référé :

– s’est déclaré compétent pour statuer sur la demande documentaire sollicitée par M. [U] ;

– a déclaré la demande irrecevable et renvoyé les parties à la procédure ordinaire ;

– a débouté M. [U] de sa demande d’article 700 du code de procédure civile ;

– a partagé les dépens par moitié entre les parties.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 10 janvier 2023, suivant lesquelles M. [U] demande à la cour de :

‘ Confirmer, sur la compétence, l’ordonnance Conseil de prud’hommes ;

‘ Infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a déclaré irrecevable les demandes documentaires de M. [U] ;

Statuant à nouveau,

‘ Condamner la SAS INOVAXO à lui communiquer, sous peine d’astreinte de 100 € par jour de retard et par document non produit à compter du 15ème jour suivant la notification de la décision à intervenir, les documents suivants :

– Un tableau récapitulatif présentant (i) les salariés embauchés soit dans des conditions similaires à celles de M. [U] pour exercer les fonction de chef de projet soit pour exercer directement des fonctions similaires (ii) les salariés ayant une ancienneté/classification identique à celle de M. [U], avec indication notamment de la date d’embauche et des diplômes sur une période allant de la date d’embauche de M. [U] à nos jours,

– Leurs contrats de travail et éventuels avenants,

– Leurs fiches de paie de mars 2017 à mars 2022, (biffées du taux d’imposition, des références bancaire et du numéro de sécurité sociale),

– Un tableau présentant l’évolution de leur rémunération depuis leur embauche,

– Leurs fiches de postes ainsi que la fiche de poste de M. [U],

– L’ensemble de leurs fiches d’évaluation depuis leur embauche,

– Les tableaux d’avancement et de promotion,

– La classification qu’applique l’employeur à M. [U],

– Le livre de paie et tout autre document établissant le montant du salaire de M. [U] depuis son embauche à ce jour,

– L’ensemble des accords d’entreprise ou du groupe de la SAS INOVAXO portant sur l’évolution salariale et/ou l’évolution de classification,

– L’ensemble des documents sociaux internes à la SAS INOVAXO portant sur l’évolution des compétences et des salaires au sein de la société, depuis l’embauche de M. [U] à nos jours à savoir :

– Les derniers rapports sur l’état de l’emploi et son évolution,

– Le registre unique du personnel,

– Les derniers rapports sur l’égalité Homme/Femme en entreprise,

– Les derniers rapports sur les rémunérations,

‘ Se réserver la liquidation de l’astreinte,

‘ Condamner la SAS INOVAXO à payer à M. [U] la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ Condamner la SAS INOVAXO aux dépens de première instance et d’appel.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 13 décembre 2022, suivant lesquelles la SAS INOVAXO demande à la cour de :

A titre liminaire,

‘ Infirmer l’ordonnance du Conseil de prud’hommes en ce qu’il s’est déclaré compétent en sa formation de référé,

‘ Constater l’incompétence de la formation de référé,

A titre principal et subsidiaire,

‘ Constater l’absence de motif légitime à la saisine en référé au titre de l’article 145 du code de procédure civile,

‘ Constater que la demande de communication en référé de documents est manifestement disproportionnée,

‘ Confirmer l’ordonnance du Conseil de Prud’hommes en ce qu’elle a déclaré irrecevable les demandes documentaires de M. [U],

‘ Débouter M. [E] [U] de l’ensemble de ses demandes,

A titre reconventionnel,

‘ Condamner M. [U] à hauteur de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée le 26 janvier 2023.

Par application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la compétence du juge des référés

M. [U] fait valoir que la formation de référé du Conseil de prud’hommes a le pouvoir d’ordonner la communication des documents sollicités. Il précise qu’il n’a pas introduit sa demande devant la formation des référés du Conseil de prud’hommes sur le fondement des articles R.1455-5, R.1455-6 et R.1455-7 du code du travail mais uniquement et seulement sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile. Il ajoute qu’il n’existe donc aucune condition « d’urgence », « d’évidence », de « trouble manifestement illicite » ou de « dommage imminent ».

De son côté la SAS INOVAXO soutient que la formation des référés du Conseil de prud’hommes était incompétente pour statuer dès lors, d’une part, que sur le fondement des articles R.1455-5, R.1455-6 et R.1455-7 du code du travail, aucune urgence ne justifiait la saisine de la formation des référés pour obtenir une mesure d’instruction pouvant être obtenue au fond et d’autre part, que le juge des référés étant le juge de l’évidence ne pouvait statuer en présence de la contestation sérieuse élevée comme en l’absence de trouble manifestement illicite.

En l’espèce, il sera observé que M. [U] n’a pas introduit sa demande devant la formation des référés du Conseil de prud’hommes sur le fondement des articles R.1455-5, R.1455-6 et R.1455-7 du code du travail mais uniquement et seulement sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile lequel énonce : ‘s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé’.

Il doit être rappelé que l’instance engagée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile est un référé probatoire autonome au regard des articles du code du travail qui donne expressément compétence à la formation de référé du conseil de prud’hommes.

Ainsi, ce référé probatoire n’est nullement soumis aux conditions d’urgence, de l’existence d’un trouble manifestement illicite ou de contestations sérieuses.

Par conséquent, le Conseil de prud’hommes statuant en référé est bien compétent pour connaître de la demande documentaire présentée par M. [U] sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile. L’ordonnance du 21 septembre 2022 sera donc confirmée à ce titre.

===

Sur le bien-fondé de la mesure d’instruction sollicitée

Pour infirmation, M. [U] fait valoir qu’il justifie d’un motif légitime pour obtenir la communication des documents réclamés en considération du rapport d’expertise [X] qui fournit des éléments crédibles et plausibles d’une discrimination salariale. Il ajoute que sa demande documentaire est proportionnée à l’exercice du droit de la preuve et à la vie privée des autres salariés.

La SAS INOVAXO réplique que la salariée chef de projet avec laquelle se compare M. [U] n’est pas dans une situation comparable car ils n’occupent pas le même périmètre d’activité (pièces détachées c/ pneumatique). A titre subsidiaire, l’employeur invoque le caractère disproportionnée de la demande en ce que M. [U] sollicite pas moins de 15 types de catégories de documents qui ne sont pour la majorité, ni limités dans leur objet, ni leur lieu et ni leur temps.

Sur l’existence d’un motif légitime, il doit être rappelé que la procédure prévue par l’article 145 précité n’est pas limitée à la conservation des preuves et peut aussi tendre à leur établissement.

À cet égard, et à ce stade, il est inopérant d’invoquer la charge de la preuve en matière de discrimination.

L’appréciation du motif légitime relève du pouvoir souverain de la juridiction saisie de la demande.

À cet égard, il convient de relever que si M. [U] soutient ‘avoir subi une discrimination en raison de son activité syndicale’ pour solliciter du Conseil de prud’hommes de Nantes, sur le fondement de l’article 145 précité, la communication par la SAS INOVAXO des éléments concernant la classification et la rémunération des salariés placés dans une situation similaire à la sienne au sein de la société (§8, p. 3 de ses conclusions), force est de constater à la lecture de son bordereau de communication de pièces qu’il ne justifie pas détenir un quelconque mandat syndical.

En effet, la Cour relève qu’il se borne seulement à alléguer avoir été élu le 24 mars 2017 représentant du personnel au sein de la Délégation Unique du Personnel, d’avoir été élu le 5 décembre 2019 membre du comité social et économique de l’entreprise ainsi que d’occuper le poste de Délégué Syndical depuis le 1er janvier 2020.

Il résulte de ces allégations qui ne peuvent être vérifiées, qu’au regard des éléments dont il a et/ou peut avoir communication, M. [U] ne justifie pas de l’utilité et de l’intérêt de la mesure sollicitée.

Dans ces conditions, le motif légitime n’est pas établi et la demande de communication telle qu’elle est formulée doit être rejetée en application de l’article 145 du code de procédure civile. L’ordonnance du 21 septembre 2022 sera donc confirmée par substitution de motifs.

M. [U], qui succombe sur les mérites de son appel, doit être condamné aux dépens et débouté en sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera fait application de cet article au profit de l’intimé en cause d’appel.

* * *

*

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

Confirme l’ordonnance déférée sauf en sa disposition ayant déclaré le référé irrecevable,

Statuant à nouveau du seul chef de la disposition infirmée et y ajoutant,

Rejette la demande de production de pièces formulée en application de l’article 145 du code de procédure civile,

Condamne M. [E] [U] aux dépens d’appel,

Condamne M. [E] [U] à payer à la SAS INOVAXO la somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x