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Convention collective SYNTEC : 29 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/04661

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Convention collective SYNTEC : 29 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/04661

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRÊT DU 29 JUIN 2022

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/04661 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7X3T

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Mars 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F18/00733

APPELANT

Monsieur [X] [C]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Alexandra FRELAT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

SAS SLOW CONTROL

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0483

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe MICHEL, président, chargé du rapport, et M. Fabrice MORILLO, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Philippe MICHEL, président de chambre

Mme Valérie BLANCHET, conseillère

M. Fabrice MORILLO, conseiller

Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Monsieur Philippe MICHEL, président et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par contrat de travail à durée indéterminée du 24 septembre 2013, M. [C] a été engagé à compter du 26 septembre 2013 par la société Slow Control, en qualité de chef de projet, statut cadre moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 500 euros pour un forfait mensuel de 169 heures dont17,33 heures supplémentaires.

La société Slow Control est spécialisée dans la création d’objets connectés dans le secteur de la nutrition. Elle compte moins de 11 salariés et applique la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 (dite Syntec).

Par lettre du 29 juin 2017, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique fixé au 7 juillet 2017.

Il a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle le 28 juillet suivant.

Contestant le bien fondé du motif économique de la rupture de son contrat de travail et estimant ne pas avoir été intégralement rempli de ses droits durant la relation contractuelle de travail, M. [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 1er février 2018 pour obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, la condamnation de la société Slow Control à lui payer les sommes suivantes assorties des intérêts au taux légal capitalisés :

– Indemnité compensatrice de préavis : 10 336,35 euros,

– Congés payés afférents :1 033,64 euros,

– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 36 639,28 euros,

– Rappel de salaires sur la classification : 3 037,41 euros,

– Congés payés afférents : 303,75 euros,

– Heures supplémentaires 2015 : 6 413,14 euros,

– Congés payés afférents : 641,31 euros,

– Heures supplémentaires 2016 : 4 128,25 euros,

– Congés payés afférents : 412,82 euros,

– Heures supplémentaires 2017 : 7 571,03 euros,

– Congés payés afférents : 757,10 euros,

– Dommages et intérêts pour non information du droit à repos compensateur : 1 195,22 euros,

– Indemnité forfaitaire pour travail dissimulé (L.8223-1 CT) : 27 479,46 euros,

– Article 700 du Code de Procédure Civile : 3 000 euros.

La société Slow Control a conclu au débouté de M. [C] et à la condamnation de ce dernier au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour déloyauté du salarié dans la rupture du contrat de travail et de celle de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, à titre subsidiaire, a demandé que le rappel de salaires sur la classification ne pourrait s’élever qu’à 1 214,94 euros et que le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de condamnation ne pourrait s’élever à la somme réclamée par le salarié, a demandé que soit opérée une compensation entre les sommes dues de part et d’autre et a réclamé un délai de paiement de 12 mois pour l’exécution provisoire de droit.

Par jugement du 21 mars 2019, le conseil de prud’hommes de Paris a débouté M. [C] de ses demandes, la société des siennes, et a condamné le salarié aux dépens.

Par déclaration du 29 avril 2019, M. [C] a interjeté appel du jugement notifié le 1er avril 2019.

Par ordonnance du 7 janvier 2020, le conseiller de la mise en état a dit que les significations de le déclaration d’appel en date des 11 juillet et 31 juillet 2019 à la société Slow Control ne sont pas entachées de nullité, et que les déclarations d’appel formées par M. [C] ne sont pas caduques.

Par arrêt du 14 janvier 2020 sur déféré d’une ordonnance du 7 janvier 2020, la cour d’appel de Paris a déclaré irrecevables les demandes de l’intimée tendant à l’irrecevabilité des appels du 29 avril 2019 et la demande de l’appelant tendant à la recevabilité de sa ‘déclaration d’appel réunie sous le numéro de RG unique 19/04661 à la suite de l’ordonnance de jonction du 3 octobre 2019 et a confirmé l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 avril 2022, M. [C] demande à la cour de :

– Infirmer le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté la société de ses demandes,

– Condamner la société Slow Control à lui payer les sommes suivantes :

° 10 336,35 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre 1 033,64 euros bruts au titre des congés payés afférents,

° 36 639,28 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

° 6 413,14 euros bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires pour l’année 2015, outre 641,31 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 4 128,25 euros bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires pour l’année 2016, outre 412,82 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 7 571,03 euros bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires pour l’année 2017, outre 757,10 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 1 195,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour non-information du droit à repos compensateur,

– 27 479,46 euros nets au titre du travail dissimulé,

– 3 037,41 euros bruts outre 303,74 euros de congés payés y afférents, à titre de rappels de salaire du fait de la classification en position 2.2 coefficient 130,

– Débouter la société de l’ensemble de ses demandes,

– Assortir les condamnations de l’intérêt au taux légal sous bénéfice d’anatocisme,

– Condamner la société au paiement de la somme de 6 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 octobre 2019, la société Slow Control demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [C] de l’ensemble de ses demandes, subsidiairement de limiter à 1 214,94 euros le rappel de salaire au titre de la classification pour la période du 1er octobre 2015 au 30 mars 2016, de condamner M. [C] à lui verser à titre de dommages et intérêts pour faute lourde une somme équivalente à celle qui serait mise à sa charge en cas de condamnation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, plus subsidiairement de lui octroyer un délai de paiement de 24 mois, de condamner M. [C] au paiement de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour déloyauté et demandes abusives, d’en ordonner la compensation avec toute somme due, et de condamner le salarié au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

L’instruction a été clôturée le 5 avril 2022, et l’affaire plaidée le 11 mai 2022.

MOTIFS

I. Sur l’exécution du contrat de travail

I.1 Sur la demande en rappel de salaire en raison de la classification applicable au salarié

M. [C] soutient qu’il relevait indiscutablement de la position 2.2 coefficient 130 de la convention collective nationale applicable en raison de son expérience passée et de ses fonctions au sein de la société. Il se réfère à l’annexe II, Classification des Ingénieurs et cadres de la convention collective Syntec définissant les correspondances entre fonctions et coefficients comme suit :

2.1 Ingénieurs ou cadres ayant au moins 2 ans de pratique de la profession, qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés, travaillant aux mêmes tâches qu’eux dans les corps d’état étudiés par le bureau d’études :

– âgés de moins de 26 ans

– âgés de 26 ans au moins

105 115

2.2. Remplissent les conditions de la position 2.1 et, en outre, partant d’instructions précises de leur supérieur, doivent prendre des initiatives et assumer des responsabilités que nécessite la réalisation de ces instructions ; étudient des projets courants et peuvent participer à leur exécution.

Ingénieurs d’études ou de recherches, mais sans fonction de commandement

130

La société Slow Control réplique qu’aucune des pièces versées au débat par l’appelant ne démontre qu’entre octobre 2015 et avril 2016, il devait prendre des initiatives et assumer des responsabilités concernant l’exécution des instructions données par l’employeur et qu’en tout état de cause, M. [C] ne peut se prévaloir d’une expérience de deux ans avant son embauche dès lors qu’il ne produit qu’une fiche de paie faisant état d’un emploi de ‘consultant junior’ non cadre.

Cela étant, la définition du poste de chef de projet occupé par M. [C] entre dans la classification 2.2, compte-tenu de la nature des missions et des responsabilités du salarié.

Toutefois, comme justement relevé par la société Slow Control, le statut de consultant junior non cadre exercé antérieurement par M. [C] ne permet pas de retenir une ancienneté du salarié dans sa pratique professionnelle antérieure à son entrée dans la société Slow Control.

En conséquence, M. [C] ne peut prétendre au coefficient 2.2 avant le 1er octobre 2015.

L’analyse des bulletins de paie de l’intéressé démontre que M. [C] a perçu, à compter du 1er avril 2016, un salaire brut mensuel, hors heures supplémentaires, de 3 014,85 euros, donc supérieur au minimum conventionnel, y compris pour le coefficient 2.2.

Il sera donc fait droit à la demande de rappel de salaire de M. [C] pour la période du 1er octobre 2015 au 1er avril 2016, sur la base d’un rattrapage de 202,49 euros par mois, selon le calcul fait en concordance par la société et son ancien salarié, soit un montant de 1 214,94 euros.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a débouté M. [C] de sa demande de rappel de salaire et la société Slow Control sera condamnée au versement de la somme ci-dessus à ce titre.

I.2Sur les heures supplémentaires

En application de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Comme justement rappelé par M. [C], l’existence d’un forfait en heures ne dispensait pas l’employeur de décompter la durée de travail effectivement réalisée par son salarié.

À l’appui de sa demande en paiement d’heures supplémentaires non rémunérées, M. [C] produit :

– des mails mentionnant des horaires de travail ou des heures de rendez-vous professionnels,

– des tableaux d’heures de travail mentionnant pour chaque jour de travail une heure d’arrivée, une heure de départ, un temps de pause d’une heure et le décompte des heures ainsi accomplies, et ce sur l’année 2015, 2016, et 2017,

– trois attestations d’anciens salariés de l’entreprise (Mme [B], Mme [N], M. [L] [W]) qui témoignent que les horaires de l’entreprise étaient de 9h30 à 18h30 avec une heure de pause pour déjeuner, y compris pour M. [C] et que les salariés, dont l’intéressé, pouvaient être amenés à quitter les locaux de l’entreprise au delà de 18h30.

M. [C] présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La société Slow Control réplique que les attestations sur l’honneur d’anciens collègues ne sauraient emporter une quelconque conviction de la cour dès lors que les intéressés ont quitté la société au plus tard le 18 juin 2016 et ne sauraient donc attester pour la période postérieure, que le contrat de travail de M. [C] ne comportait aucun impératif d’horaires de travail de sorte que l’intéressé était libre d’organiser son emploi du temps à sa guise, n’était pas tenu de se conformer aux horaires d’ouverture de la société et n’était pas non plus astreint à une pause déjeuner d’une heure par jour, que M. [C] qui habitait Versailles ne se conformait pas aux prétendus horaires d’ouverture de la société, arrivant régulièrement à 10h00, voire plus tard, ce qui ne lui était en aucune façon reproché et qu’à compter du 1er février 2017, il travaillait de chez lui, qu’il ne lui a jamais été demandé de répondre immédiatement à des mails le week-end ou en soirée, que M. [C] n’a jamais fait état de la réalisation d’heures supplémentaires avant de saisir le Conseil de Prud’hommes alors que sa familiarité avec le dirigeant lui permettait aisément de le faire et enfin qu’il a conservé l’ordinateur portable mis à sa disposition par la société en dépit de la demande de restitution qui lui a été adressée, et s’est farouchement opposé à son expertise judiciaire qui aurait permis de vérifier dans le détail son temps de travail pour le compte de la société.

Cela étant, les contestations de la société Slow Control par simples affirmations ne peuvent être considérées comme des éléments de nature à répondre utilement à ceux avancés par le salarié sur le décompte de son temps de travail.

Toutefois, la société Slow Control verse la lettre de résiliation du contrat de location de son bureau datée du 23 novembre 2016 à effet au 1er janvier 2017, confortant ses déclarations sur l’absence de locaux pour l’entreprise impliquant l’exécution de sa prestation de travail par M. [C] à son domicile à compter du 1er février 2017.

Or, si pour 2015 et 2016, M. [C] est légitime à invoquer les heures d’ouverture des bureaux de l’entreprise pour asseoir ses tableaux récapitulatifs d’heures de travail, il en est différemment pour l’année 2017 où il travaillait à domicile et pour laquelle il ne verse que des mails envoyés ou reçus soit en matinée, soit en soirée, sans qu’il soit possible de constater une continuité de travail entre ces échanges.

En conséquence, au vu du salaire mensuel brut de l’intéressé et du décompte précis des heures effectuées, il sera fait partiellement droit à la demande de rappel d’heures supplémentaires de M. [C] à hauteur de 6 413,14 euros bruts, outre 641,31 euros bruts au titre des congés payés afférents, pour l’année 2015 et de 4 128,25 euros bruts outre 412,82 euros bruts au titre des congés payés afférents, pour l’année 2016, M. [C] devant être débouté du surplus de ses demandes à ce titre.

La société Slow Control sera condamnée à verser ces montants à M. [C], par infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de rappel d’heures supplémentaires.

I.3 Sur le repos compensateur

M. [C] fait valoir que les nombreuses heures supplémentaires effectuées auraient dû lui ouvrir droit à des repos compensateurs, repos dont il n’a par hypothèse jamais été informé et dont il n’a dès lors pu bénéficier.

La société Slow Control réplique que son salarié était bien mieux informé qu’elle-même de l’existence d’un droit à repos compensateur puisqu’il était diplômé d’un master en droit des affaires et qu’il gérait les relations juridiques de la société, se permettant de pointer les lacunes du cabinet comptable sur ce point.

Cela étant, les compétences du salarié ne dispensent pas l’employeur du respect de ses obligations.

Compte-tenu des développements ci-dessus relatifs aux heures supplémentaires, il apparaît que M. [C] a dépassé le contingent d’heures supplémentaires de 73 heures 16 en 2015, de sorte que la société sera condamnée, par infirmation du jugement, à lui verser la somme de 648,58 euros à ce titre.

I.4 Sur l’indemnité pour travail dissimulé

L’article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié.

L’article L.8221-5, 2° dispose notamment qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Aux termes de l’article L.8223-1, le salarié auquel l’employeur a recours dans les conditions de l’article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé est due quelle que soit la qualification de la rupture

Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

M. [C] soutient que la société Slow Control ne pouvait à l’évidence ignorer ses horaires de travail dès lors qu’il devait répondre aux sollicitations de son employeur y compris pendant les weekends et ses congés et, par voie de conséquence, savait pertinemment qu’il accomplissait de manière régulière des heures supplémentaires, raison pour laquelle elle l’avait soumis à un

forfait mensuel de 169 heures.

Il en conclut que le manquement de la société ne peut donc qu’être intentionnel.

La société Slow Control réplique qu’à défaut pour M. [C] de rapporter la preuve de l’existence d’heures supplémentaires et surtout du caractère volontaire de leur dissimulation, la demande d’indemnité pour travail dissimulé doit être rejetée.

Cela étant, les développements ci-dessus relatifs aux heures supplémentaires démontrent que l’absence de paiement de celles-ci repose sur un contentieux entre employeur et salarié sur la réalité même de l’accomplissement de ces heures né de l’absence de mise en place par cet employeur d’un système de décompte fiable des heures travaillées et non d’une volonté de dissimulation.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté M. [C] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé.

II. Sur la rupture du contrat de travail

M. [C] soutient que son licenciement devra être déclaré sans cause réelle et sérieuse faute pour Slow Control de lui avoir exposé les motifs de son licenciement et les conséquences de la situation économique de la société sur son emploi avant qu’il n’adhère au Contrat de sécurisation professionnelle.

Il ajoute qu’en outre, la société ne démontre pas le motif économique justifiant son licenciement puisque sa situation économique s’est en réalité améliorée entre 2016 et 2017.

La société Slow Control réplique que M. [C] était particulièrement bien informé des difficultés économiques de la société et de leurs conséquences sur son poste par la procédure d’alerte engagée en décembre 2016 par le comptable de la société, l’assemblée générale du 11 mars 2017 à laquelle il était présent, le mail adressé au potentiel investisseur le 3 juillet 2017 qui lui a été transféré le jour-même, son statut d’actionnaire, unique salarié et homme de confiance de M. [K], président, et le refus d’un des investisseurs de la société de procéder à un nouvel apport de trésorerie le 28 juin 2017.

Elle ajoute que M. [C] était également parfaitement au courant des conséquences des difficultés sur son poste dès lors qu’il a cherché un nouveau travail dès le mois de mai 2017, ce que la société a découvert grâce à la procédure prud’homale et qu’il avait rédigé les lettres de licenciement de ses anciens collègues dont les postes ont été supprimés en raison du même motif.

Elle fait valoir que ses difficultés économiques sont établies au vu d’une perte comptable de plus de 670 000 euros au 1er semestre 2016, de l’affectation de celle-ci au compte ‘report à nouveau’ qui était dès lors débiteur de plus de 1 855 000 euros, du compte de résultat simplifié versé au débat par la société qui démontre qu’au 30 juin 2017, la situation est identique, le compte ‘report à nouveau’ étant également débiteur de plus de 1 855 000 euros. Elle relève que si ses pertes ont diminué, elles restent très élevées puisque de plus de 365 000 euros, et qu’en outre, ses fonds propres sont passés de ‘ 760 468 euros en 2016 à – 1 074 851 euros en 2017.

Cela étant, lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’un contrat de sécurisation professionnelle, l’employeur doit énoncer le motif économique de celle-ci ainsi que le bénéfice de la priorité de réembauche dans tout document écrit porté à la connaissance du salarié, au plus tard au moment de son acceptation. À défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Les connaissances que peut avoir un salarié, y compris par ses fonctions et son implication dans la vie de l’entreprise, de la situation économique de la société qui l’emploie ne déchargent pas l’employeur de son obligation d’information.

En l’espèce, la lettre de convocation à l’entretien préalable invoque simplement la mise en oeuvre d’une procédure de licenciement pour motif économique sans autre précision et la société Slow Control ne démontre pas – et d’ailleurs ne prétend pas- avoir donné un document d’information à M. [C] sur ses difficultés économiques, l’incidence de celles-ci sur l’emploi du salarié et la priorité de réembauche.

Cette circonstance, à elle seule, prive le licenciement pour motif économique de M. [C] de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté M. [C] de toutes ses demandes liées à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l’article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l’ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur.

Selon l’article L.1234-5 du même code, lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, ou si l’inexécution résulte du commun accord des parties, à une indemnité compensatrice.

L’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle n’exonère pas l’employeur de son obligation de préavis.

La durée du préavis est fixée à trois mois pour les ingénieurs, cadres par l’article 5 de la convention collective nationale applicable

En conséquence, la société Slow Control sera condamnée à verser à M. [C] la somme de 10 336,35 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 1 033,64 euros au titre des congés payés afférents.

En application de l’article L1235-3 du code du travail dans sa version applicable au présent litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Aux termes de l’article L.1235-5 du code du travail, les dispositions relatives à l’absence de cause réelle et sérieuse prévues à l’article L1235-3 du même code selon lesquelles il est octroyé au salarié qui n’est pas réintégré une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, ne sont pas applicables au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté et au licenciement intervenant dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés. En cas de licenciement abusif, le salarié peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Compte tenu de l’ancienneté (3 ans et 10 mois), de l’âge (32 ans) et de la rémunération (3 696,69 euros) du salarié à la date de la rupture et compte-tenu également du fait que l’intéressé justifie avoir perçu des indemnités de chômage au moins jusqu’en octobre 2018 et s’être livré à de nombreuses recherches d’emploi, il convient d’allouer à M. [C], la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

III. Sur les intérêts

En vertu des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les sommes ci-dessus de nature salariale, produiront des intérêts au taux légal à compter du 14 février 2018, date de réception par l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation valant mise en demeure et celles, de nature indemnitaire, à compter du présent arrêt.

Conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du même code, les intérêts dus depuis plus d’une année entière produiront eux-mêmes des intérêts.

IV. Sur les demandes reconventionnelles

IV.1 Sur la demande reconventionnelle de la société pour déloyauté du salarié dans l’exécution de la relation de travail constitutive d’une faute lourde

La société Slow Control soutient que M. [C], qui maîtrisait l’ensemble des règles du licenciement, s’est sciemment préconstitué des motifs de saisine de la juridiction prud’homale, au détriment de la société, qu’une telle attitude démontre une parfaite mauvaise foi et une déloyauté dans l’exécution et particulièrement dans la rupture du contrat de travail qui unissait le salarié à l’entreprise.

Elle relève que :

– M. [C] était ami du gérant et actionnaire de la société, et était de ce fait au courant de la situation financière de l’entreprise sans aucune dissimulation,

– il avait géré le licenciement économique d’un de ses collègues, lui expliquant les raisons de la réception d’une lettre de licenciement alors que le salarié avait adhéré au CSP,

– il a piloté son propre licenciement, expliquant à l’employeur quelles pièces la comptable devrait établir et à qui elle devrait les envoyer dans le cadre de la mise en place de son CSP,

– il a cherché un nouvel emploi dès le mois de mai 2017,

– il voulait profiter de son licenciement et du CSP pour effectuer une reconversion professionnelle,

– il a cependant intenté une procédure judiciaire contre la société quatre mois à peine après sa sortie des effectifs, sollicitant plus de 100 000 euros de dommages et intérêts alors qu’il ne peut ignorer qu’une telle condamnation entraînerait la liquidation judiciaire de l’entreprise.

M. [C] réplique qu’il est aisé de comprendre la stratégie de la société consistant à essayer de ‘neutraliser’ une condamnation qu’elle sait inévitable au titre de la rupture du contrat de travail alors qu’il n’a commis aucune faute lourde dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail, une telle faute ne lui ayant jamais été reprochée, si ce n’est dans le cadre de l’instance prud’homale qu’il a introduite pour faire valoir ses droits et alors qu’il revenait à la Société de s’assurer de la mise en ‘uvre conforme de la procédure de licenciement.

Il ajoute que la société Slow Control ne démontre aucune manipulation de sa part dans cette affaire dont il est la seule victime.

Cela étant, la reconnaissance partielle du bien fondé de M. [C] en ses réclamations à l’encontre de la société Slow Control prive de tout caractère fautif son comportement tant durant l’exécution que lors de la rupture de son contrat de travail, étant précisé que le respect de la procédure de licenciement est de la seule responsabilité de l’entreprise.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Slow Control de sa demande indemnitaire reconventionnelle.

IV.2 Sur la demande de délais de paiement

En vertu de l’article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Toutefois, les créances salariales, en raison de leur nature alimentaire, ne peuvent faire l’objet d’un report et l’ancienneté de la rupture du contrat de travail rend inopportun l’octroi de délais de paiement supplémentaires en ce qui concerne l’indemnisation de celle-ci.

V. Sur les frais non compris dans les dépens

Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la société Slow Control sera condamnée à verser à M. [C] la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par l’appelant qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [C] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé et en ce qu’il a débouté la société Slow Control de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail et de la faute lourde du salarié,

INFIRME le jugement entrepris pour le surplus,

Statuant à nouveau,

DIT que le licenciement de M. [C] est sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Slow Control à verser à M. [C] les sommes suivantes :

° 1 214,94 euros à titre de rappel de salaire en raison de la classification du salarié en position 2.2 coefficient 130 à compter du 1er octobre 2015,

° 6 413,14 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires sur l’année 2015, outre 641,31 euros au titre des congés payés afférents,

° 4 128,25 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires sur l’année 2016, outre 412,82 euros au titre des congés payés afférents,

° 648,58 euros au titre du repos compensateur,

° 10 336,35 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 1 033,64 euros au titre des congés payés afférents,

° 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

DIT que les sommes ci-dessus de nature salariale produiront des intérêts au taux légal à compter du 14 février 2018 et celles, de nature indemnitaire, à compter du présent arrêt,

DIT que les intérêts dus depuis plus d’une année entière produiront eux-mêmes des intérêts,

CONDAMNE la société Slow Control à verser à M. [C] la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE M. [C] du surplus de ses demandes,

DÉBOUTE la société Slow Control de ses demandes reconventionnelles,

CONDAMNE la société Slow Control aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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