Convention collective SYNTEC : 25 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/03558

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Convention collective SYNTEC : 25 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/03558

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRÊT DU 25 MAI 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/03558 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7RKS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Septembre 2018 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F15/01086

APPELANTE

Madame [Z] [O]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Charlotte HUBAU, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 505

INTIMÉE

SA GENERIX

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédéric GRAS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1051

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Françoise SALOMON, présidente, et Mme Valérie BLANCHET, conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise SALOMON, présidente de chambre

Mme Valérie BLANCHET, conseillère

M. Fabrice MORILLO, conseiller

Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Madame Françoise SALOMON, présidente de chambre, et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée, Mme [O] a été engagée à compter du 16 mai 2011 par la société Generix, en qualité de consultant, statut cadre, position 1.2.

La société Generix compte plus de onze salariés et applique la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite convention Syntec du 15 décembre 1987.

Du 5 septembre 2014 au 28 octobre 2014, Mme [O] a été placée en arrêt maladie.

Le 19 novembre 2014, la salarié a été convoquée à un entretien préalable le 28 novembre 2014 et licenciée pour insuffisance professionnelle le 5 décembre 2014.

Contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [O] a saisi le 26 janvier 2015 la juridiction prud’homale.

Par jugement du 25 septembre 2018, le conseil de prud’hommes de Paris l’a déboutée de ses demandes et l’a condamnée aux dépens.

Par déclaration du 13 mars 2019, Mme [O] a interjeté appel du jugement notifié le 13 février 2019.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 juin 2019, Mme [O] demande à la cour d’infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau, de condamner la société Generix au paiement des sommes de 56 322 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal et de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 août 2019, la société Generix demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter la salariée de ses demandes, et de la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’instruction a été clôturée le 22 février 2022 et l’affaire fixée au 23 mars 2022.

MOTIFS

Sur la rupture du contrat de travail

La salariée soutient que l’employeur l’a affectée au  » run services » sans son accord et lui a confié des missions WMS pour lesquelles elle n’était pas formée et que le grief de manque d’autonomie énoncé dans la lettre de licenciement n’est pas sérieux.

L’employeur répond que son poste n’a pas évolué et qu’il a satisfait à son obligation de formation afin de permettre à la salariée de maitriser le logiciel WMS.

L’article L.1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l’existence d’une cause réelle et sérieuse. En vertu des dispositions de l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné au besoin toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

L’insuffisance professionnelle se caractérise par l’incapacité du salarié à exercer ses fonctions de façon satisfaisante par manque de compétences. Si l’insuffisance professionnelle relève de l’appréciation de l’employeur, ce dernier doit néanmoins s’appuyer sur des faits précis, matériellement vérifiables et personnellement imputables au salarié.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi libellée :

« Pour répondre, à votre souhait d’affectation sur des projets WMS et aux besoins de l’entreprise, vous avez été affectée au « run services» à compter d’avril 2014. Lors de votre prise de fonction dans ce service, pour faciliter votre montée en compétence, nous vous avons proposé la mise en place d’un plan de développement, prévoyant votre accompagnement fonctionnel et technique sur la solution WMS. Ce plan de développement fixait également un taux d’activité progressif, comparable à celui appliqué aux consultants juniors en· phase d’intégration.

Or nous constatons, plus de 6 mois après votre intégration au « run services », que vous rencontrez toujours des difficultés dans l’acquisition et la mise en ‘uvre des compétences de base pour votre métier ainsi qu’un manque d’autonomie, qui impactent directement vos résultats. Nous constatons que pour la plupart des réalisations qui vous sont demandées, vous alertez systématiquement votre manager sur votre manque de connaissance du sujet et sollicitez le support de consultants experts ou exigez un temps de préparation anormal compte tenu de votre expérience dans l’entreprise.

A titre d’exemple, nous vous avons confié l’animation d’une Formation WMS standard pour notre client Carrefour Nord Pas de Calais, le 18 novembre 2014. Votre manager avait prévu 2 jours de préparation, correspondant au temps habituel laissé aux consultants pour ce type de mission. Vous avez immédiatement réagi en demandant des précisions sur la mission, considérant que vous n’êtes pas suffisamment autonome sur le sujet et vous avez sollicité l’accompagnement d’un consultant sur la préparation de cette formation, alors qu’il s’agit de flux simples du logiciel WMS standard sur lequel vous travaillez depuis plusieurs mois.

De la même manière, le 17 novembre 2014, dans le cadre de la demande d’assistance du client Norbert Dentressangle Logistic, vous avez une nouvelle fois, immédiatement interrogé votre manager pour que le sujet vous soit expliqué en détail, attendant de lui qu’il organise l’aide d’un consultant expérimenté pour réaliser le cadrage du besoin alors que vous étiez tout à fait en mesure d’organiser et gérer seule cette mission.

Ce type de situation se reproduit fréquemment, déjà en septembre 2014, pour l’animation d’une formation Carrefour, alors que votre manager vous avait attribué 3 jours de préparation, vous avez opposé que cette formation était spécifique et demandé l’aide d’un consultant senior. Finalement cette session de formation a été prise en charge par 2 consultants juniors, préparée en un peu plus d’un jour et animée de façon très satisfaisante.

Votre manque d’autonomie et les difficultés que vous rencontrez dans la mobilisation de vos compétences sont d’autant plus injustifiés que vous avez bénéficié d’un temps de formation individuel particulièrement fourni. En effet, aux 10 jours de formation interne sur le produit WMS que vous avez reçu fin 2013, s’ajoutent plus de 400 jours d’auto formation depuis votre intégration. Il est à noter qu’habituellement un consultant junior y consacre une cinquantaine de jours pour devenir opérationnel.

De plus, lors du bilan de votre plan de développement en juillet, pour faciliter votre prise d’autonomie, nous avons poursuivi votre formation sur le produit WMS en vous affectant temporairement au support, sur la gestion d’interactions client.

Nous constatons que votre performance est très en dessous du niveau attendu, à ce titre nous notons un taux d’activité réalisé d’avril à juillet 2014 de 22,98 jours pour un objectif à 37 jours. Votre mission au support n’a pas été non plus satisfaisante puisque vous n’avez traité que 3 interactions là ou habituellement un consultant junior en traite 7 à 10.

Enfin, nous avons été surpris, lors de l’entretien avec votre manager, le 6 novembre dernier, que vous persistiez à solliciter encore un accompagnement et du support, considérant vous même que vous ne disposez pas encore des compétences de bases nécessaires à l’exécution de vos missions.

Il est notable que l’entreprise a consacré un temps de montée en compétence adapté et nettement supérieur au temps habituel nécessaire à l’intégration d’un consultant junior, l’ensemble des dispositifs mis en place aurait dû vous permettre d’exécuter vos missions en toute autonomie et de façon efficace. Malgré les alertes qui vous ont été adressées, nous ne notons aucune amélioration. Nous rappellerons enfin que notre convention collective Syntec prévoit que le personnel cadre en position 2.1, coefficient 115, correspondant à votre position, « a au moins deux ans de pratique de la profession et les qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études … ». Cette situation devient préjudiciable à votre activité et celle du service. En effet, nous ne sommes pas en mesure de vous confier l’intégralité des missions relevant normalement de votre poste, votre incapacité à acquérir les compétences de base, nous limite dans les sujets que vous êtes en mesure de traiter de façon autonome et efficace. Ceci impacte directement votre taux d’activité très inférieur à ce qui est normalement attendu compte tenu de votre expérience dans l’entreprise.

Le temps que consacrent d’autres collaborateurs à votre aide, impacte significativement leur temps d’activité, de façon bien supérieure à une coopération normale. Enfin, cette situation tend les relations avec votre manager, qui consacre un temps considérable à votre pilotage, au cadrage de vos missions et au contrôle de vos réalisations, ceci étant préjudiciable à la poursuite d’une relation de confiance et au fonctionnement normal du service. »

La société a pour activité l’édition de logiciels spécialisés pour la gestion de la chaîne logistique de fournisseurs. Il ressort du contrat de travail que la salariée a été engagée en qualité de consultante. Son poste est défini comme suit : analyser les besoins des utilisateurs et les formaliser avant de proposer des solutions les mieux adaptées, réaliser des transferts de compétence vers le client final, assurer les recettes des développements réalisés.

La salariée, après avoir été chargée au sein de la société du projet TMS, a été affectée au département Run services en mars/avril 2014 dans le cadre d’une restructuration des équipes. Ses fonctions de consultante n’ont pas varié, le changement de logiciel n’entraînant pas un changement de poste. Seules ses conditions de travail ont été modifiées, ce qui relève du pouvoir de direction de l’employeur.

L’employeur qui allègue un manque d’autonomie de la salariée verse aux débats :

– le compte rendu d’évaluation pour 2012-2013 qui montre que ni l’objectif individuel quantitatif ni l’objectif quantitatif marge business unit n’ont été atteints. Il est noté par le manager de la salariée que son intégration est difficile et qu’elle n’est pas vue comme une actrice à part entière dans les projets.

– le compte rendu d’évaluation 2013-2014 qui montre que l’objectif individuel quantitatif n’est atteint qu’à hauteur de 50%. Il est noté par son manager qu’elle n’a pas eu d’affectations de projets du fait de l’organisation et qu’on « doit lui affecter un projet pour se lancer dans le consulting avec un accompagnement approprié pour être autonome ».

Le manager mentionne qu’elle a suivi des formations WMS en 2013 dont la salariée a reconnu qu’elles lui avaient permis de se remettre à niveau, mais l’employeur relève que « les compétences sont acquises mais rarement mises en pratique » et que ce manque d’appropriation des compétences par la salariée se traduit par un défaut d’autonomie dans l’exercice de ses fonctions qu’il justifie par les échanges de mails entre la salariée et son manager et des résultats inférieurs par rapport à la progression attendue. Ainsi, en juillet 2014, son score était de 6, 63 TFC pour un TFC attendu de 19.

Il justifie ainsi d’une insuffisance dans l’exercice de ses missions par la salariée qui n’a pas accompli de réels progrès dans la maîtrise fonctionnelle WMS et dans le paramétrage et configuration de la solution WMS en dépit des actions de formation sous forme d’un plan de développement mis en place, de journées de formation et de son accompagnement que l’employeur qualifie de « hors norme » compte tenu du nombre de jours de formation dont elle a bénéficié largement supérieur à ceux dont bénéficie habituellement un consultant junior ( 400 jours pour la salariée contre 50 jours en moyenne pour un consultant junior).

Le manque d’autonomie de la salariée tel que reproché dans la lettre de licenciement est établi.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, la cour confirme le jugement en ce qu’il a dit le licenciement pour insuffisance professionnelle de la salariée justifié et l’a débouté de sa demande indemnitaire.

Sur les autres demandes

L’appelante qui succombe est tenue aux dépens.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser chacune des parties supporter ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

– Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

-Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamne Mme [O] aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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