24 février 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
21/03196
24/02/2023
ARRÊT N°114/2023
N° RG 21/03196 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OJD5
CB/AR
Décision déférée du 16 Juin 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F 19/01183)
MISPOULET M.
[G] [P]
C/
S.A.S.U MACADAM FRANCE
CONFIRMATION TOTALE
Grosse délivrée
le 24 02 2023
à Me Erick LEBAHR
Me Nadine EVALDRE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU VINGT QUATRE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANT
Monsieur [G] [P]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Erick LEBAHR, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEE
S.A.S.U MACADAM FRANCE
prise en la personne de son représentant légal , domicilié ès qualité audit siège sis [Adresse 3]
Représentée par Me Romain SUTRA de la SCP SUTRA CORRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS (plaidant) et par Me Nadine EVALDRE, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BRISSET, Présidente, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BRISSET, présidente
A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère
F. CROISILLE-CABROL, conseillère
Greffier, lors des débats : A. RAVEANE
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE
La SASU Macadam France assure des prestations pour les entreprises de louage ou de revente d’automobiles consistant en la photo inspection des véhicules lors de leur restitution. Elle emploie plus de 11 salariés.
La convention collective applicable est celle des bureaux d’études techniques dite Syntec.
M. [P] a été embauché par la société Macadam en qualité de photo inspecteur initialement dans le cadre d’un contrat à durée déterminée du 18 janvier 2016 au 30 avril 2016, renouvelé jusqu’au 31 août 2016. La relation de travail s’est poursuivie à durée indéterminée.
Selon lettre du 21 février 2019, la société Macadam a convoqué M. [P] à un entretien préalable au licenciement fixé au 7 mars 2019 puis l’a licencié selon lettre du 27 mars 2019 pour cause réelle et sérieuse.
Contestant son licenciement et invoquant des heures supplémentaires non rémunérées dans les conditions d’un travail dissimulé, M. [P] a, le 26 juillet 2019, saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse de demandes de rappels de salaires et d’indemnités à ce titre.
Par jugement du 16 juin 2021, le conseil a :
– dit que le licenciement prononcé à l’encontre de Monsieur [P] repose sur une cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
– rejeté l’ensemble des demandes de Monsieur [P],
– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
– laissé les dépens éventuels à la charge de Monsieur [P].
M. [P] a relevé appel de la décision le 15 juillet 2021, énonçant dans sa déclaration les chefs critiqués du jugement.
Dans ses dernières écritures en date du 14 octobre 2021, auxquelles il est fait expressément référence, M. [P] demande à la cour de :
Réformer totalement le jugement du conseil de Prud’hommes.
Allouer à M [P] 969 euros d’heures supplémentaires impayées avec les congés payés afférents de 97 euros.
Lui allouer une indemnité forfaitaire de dommages et intérêts pour travail dissimulé à hauteur de 10 644 euros (1774 euros X 6 mois).
Lui allouer 15 968 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif (9 mois x 1774 euros) (1774 euros étant la moyenne brute des 3 derniers mois).
Condamner la société Macadam aux dépens et à 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC, pour les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer pour la défense de ses intérêts, dans le cadre de la procédure d’appel.
Il soutient avoir été licencié suite à ses réclamations relatives aux heures supplémentaires. Il considère qu’il n’existe pas de débat sur le nombre d’heures réalisées mais que l’employeur ne pouvait les régler sous forme de primes, ce qui caractérise un travail dissimulé. Il conteste les griefs énoncés à la lettre de licenciement.
Dans ses dernières écritures en date du 22 décembre 2022, auxquelles il est fait expressément référence, la société Macadam demande à la cour de :
Confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et débouté Monsieur [P] de l’ensemble de ses demandes.
En conséquence, il est demandé à la cour de :
– Juger que Monsieur [P] a été rempli de ses droits au titre des heures de travail
– Juger que la société n’a commis aucun travail dissimulé
– Juger que le licenciement de Monsieur [P] repose sur une cause réelle et sérieuse
En conséquence, de débouter Monsieur [P] de l’ensemble de ses demandes.
Y ajoutant, condamner Monsieur [P] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC.
Elle soutient que les explications avaient été données au salarié sur le calcul de ses heures dans le cadre d’une annualisation du temps de travail et conteste devoir des sommes à titre de rappel de salaire. Elle estime que les griefs énoncés à la lettre de licenciement sont établis et justifiaient la rupture.
La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 10 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les heures supplémentaires,
Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Ainsi, si la charge de la preuve est partagée en cette matière, il appartient néanmoins au salarié de présenter à l’appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
En l’espèce, M. [P] sollicite une somme de 969 euros à titre de rappel de salaire. Il ne présente aucun véritable décompte mais soutient que sa revendication porte sur 67,46 heures supplémentaires, sans préciser à quelles périodes elles correspondent.
La cour observe tout d’abord que le calcul de M. [P] est nécessairement erroné. Il invoque ainsi un taux horaire de 11,49 euros qui ne peut correspondre à la réalité de la relation contractuelle et aboutirait à un rappel de salaire de 775,11 euros s’il était retenu des heures supplémentaires non rémunérées. Le taux horaire de M. [P] était de 10,9877 euros, soit un taux majoré à 25% de 13,7346 euros, de sorte que 67,46 heures supplémentaires aboutiraient à un rappel de 926,53 euros.
Le débat ne tient pas au volume d’heures de travail réalisées par le salarié puisque M. [P] soutient qu’elles résultent du relevé adressé par l’employeur et produit en pièces 10 et 11 mais aux modalités de leur rémunération. Il considère en effet qu’elles ont été réglées sous forme de prime. Une telle modalité est certes prohibée mais ne correspond pas, contrairement aux énonciations du salarié, à la réalité.
En effet, il résulte des stipulations contractuelles qu’il existait un dispositif d’annualisation du temps de travail avec un temps de travail modulé. La régularité de ce dispositif n’est pas remise en cause. Dès lors, les heures supplémentaires étaient nécessairement décomptées en fin d’année au regard de cette annualisation. Contrairement à ce que soutient M. [P], les heures supplémentaires étaient bien rémunérées comme telles et non pas sous forme de prime. Le courrier électronique dont il se prévaut pour l’année 2016 fait ainsi mention de ce que les heures supplémentaires de l’année seraient payées sur le bulletin de paie de janvier 2017. Il est expressément fait état d’une rubrique heures supplémentaires étant observé que M. [P] ne produit pas aux débats son bulletin de salaire de janvier 2017. Celui de janvier 2018 qu’il produit permet de constater des heures supplémentaires rémunérées comme telles pour l’exercice 2017. Le courrier électronique dont se prévaut M. [P], fait certes référence à une prime mais non pas pour rémunérer les heures supplémentaires mais pour tenir compte d’une augmentation du taux horaire en cours d’année. Seul le delta d’augmentation était ainsi concerné par la prime. Cette modalité pouvait certes être discutable, mais il n’est pas soutenu qu’elle concernait M. [P] qui n’invoque pas une évolution de son taux horaire et une absence de prise en compte de cette évolution par l’employeur au titre des heures supplémentaires. Au contraire, le taux horaire majoré retenu par l’employeur pour les heures supplémentaires de l’année 2017 est supérieur à celui invoqué par le salarié.
Au total, alors qu’il n’est pas produit de décompte et qu’il n’est pas invoqué d’autres heures que celles admises par l’employeur, la cour retient que les heures supplémentaires ont bien été rémunérées comme telles et que la prime exceptionnelle figurant sur le bulletin de paie de janvier 2018 (le bulletin de paie de janvier 2017 n’étant pas produit) ne correspondait pas à la rémunération d’heures supplémentaires mais à une véritable prime.
C’est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande de rappel de salaire à ce titre ainsi que du chef des congés payés afférents. Il n’y a pas davantage lieu à indemnité pour travail dissimulé et le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur le licenciement,
Il résulte des articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail que le licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse et résulte d’une lettre de licenciement qui en énonce les motifs.
En cas de litige reposant sur un licenciement��notifié pour cause réelle et sérieuse en raison d’un motif personnel, telle que l’insuffisance professionnelle, les limites en sont fixées par la lettre de licenciement. Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l’espèce, M. [P] a été licencié dans les termes suivants :
Pour rappel, vous êtes entré au sein de la société Macadam comme photo-inspecteur, le 18 janvier 2016 et votre passage en CDI a été effectif au 1er septembre 2016.
Votre responsable de région, M. [D] [X] a relevé régulièrement depuis 2017, tant lors de vos échanges informels, que lors des entretiens de mi-année et des entretiens annuels, que si vous avez les compétences et les capacités de faire votre travail de façon satisfaisante, pour autant, vous ne mettez pas suffisamment ces compétences à profit au quotidien et vous ne redressez la situation que quand vous êtes alerté par votre responsable.
Malgré les alertes en encouragements de votre hiérarchie, force a été de constater que les améliorations ont été de courte durée, et, depuis le début de l’année 2019, nous faisons le constat d’une nette dégradation tant dans l’exécution de vos missions auprès des clients, que dans votre attitude professionnelle, qui n’est plus acceptable.
1- Ainsi, pour ce qui concerne tout d’abord la dégradation dans l’exécution de vos missions d’expertise, nous avons constaté plusieurs manquements et négligences de votre part, qui ne sont pas acceptables car elles révèlent votre négligence persistante dans l’exercice de vos fonctions et le fait que vous n’entendez pas tenir compte des consignes et règles de l’entreprise.
Plusieurs faits se sont produits qui corroborent ces manquements, que nous avons évoqué lors de l’entretien préalable, et qui sont les suivants:
– Il en est ainsi de la qualité des expertises que vous avez effectuées.
Comme vous le saviez, car cela avait été évoqué et annoncé par votre responsable il a été décidé de réaliser des contre expertises sur les véhicules inspectés. Cette décision a été prise afin de travailler sur notre relevé de dommages, en fin d’année 2018 à la suite de plaintes clients.
Votre responsable avait annoncé à l’ensemble de l’équipe qu’il convenait d’accorder plus d’importance à la qualité des inspections, et de prendre le temps de les faire correctement, les planifications étant faites en considération d’un temps moyen suffisant pour respecter les critères de qualité attendus.
Vous avez par ailleurs été alerté à de nombreuses reprises sur le manque de qualité de vos expertises.
Pour ce qui vous concerne le résultat est que sur 7 véhicules que vous avez expertisées le 1er mars 2019 et qui ont été contre-expertisés le 4 mars 2019 par [Z] [N], photo inspecteur référent et manager adjoint de [D] [X], vous avez omis 24 dommages (dont 18 dommages facturables, et qui ne pouvaient plus l’être faute d’avoir figuré dans le compte rendu d’expertise).
Ce constat révèle, au-delà du manque à gagner financier, qu’il s’agit bien d’un manquement à votre obligation de réaliser une inspection de manière professionnelle et consciencieuse.
La contre-expertise a également révélé qu’au lieu de passer 23 minutes pour expertiser chaque véhicule, votre moyenne est de 10 à 15 minutes par véhicule, ce qui est insuffisant en entraîne le manque de qualité des expertises faites.
– Nous vous reprochons également la non réalisation de missions.
Plusieurs exemples ont été évoqués, qui corroborent le fait que vous n’effectuez pas votre travail de façon convenable.
-Votre responsable de région, vous avait mis en garde sur les trop nombreuses « indisponibilités » que vous déclariez.
Le vendredi 1er mars 2019, vous vous êtes rendu sur le parc de BTV à 31 620 Castelnau D Estrefonds, dont vous connaissiez le fonctionnement pour y avoir déjà fait des expertises depuis votre embauche.
Sur ce parc, les véhicules à inspecter sont alignés par 4 sur chaque rangée, les uns derrière les autres, dans des boxages identifiés par des chiffres et des lettres, permettant de positionner les véhicules. Au sein de chaque boxage, il y a donc 4 véhicules, parmi lesquels le(s) véhicules à expertiser dont vous avez le modèle et l’immatriculation.
Or, le 1er mars 2019, vous avez mis un véhicule en « indisponibilité » alors qu’il était bien présent à l’emplacement indiqué, en 2ème rang dans le boxage ce que vous n’avez manifestement pas pris la peine de chercher. Le client a, de bon droit, contesté cette décision et un autre photo-inspecteur a dû réaliser la mission de toute urgence le lendemain.
– Vous avez également à plusieurs reprises refusé de réaliser des missions planifiées.
o Vous deviez ainsi réaliser l’inspection d’un véhicule immatriculé [Immatriculation 4] le 12 février 2019 à 8h15 à [Localité 6]. Vous aviez un second rendez-vous pour l’expertise d’un autre véhicule à 9h00 dans le même garage.
Vous ne vous êtes pas présenté au rendez-vous de 8h15, ce qui n’est pas acceptable, et vous avez remis une fiche d’inspection affirmant que le garage était fermé. Or, tel n’est pas le cas, l’ouverture étant bien à 8h00. De plus, en mettant ce véhicule en indisponibilité, vous vous générez un temps de travail effectif de 12 minutes, alors qu’en l’espèce, vous n’avez fourni aucun travail, puisque vous êtes arrivé sur place à 9h09.
o La même situation s’est renouvelée le 14 février 2019 pour un rendez-vous fixé à 8h15 à [Localité 5] que vous n’avez pas fait arguant du fait que vous ne voyez pas l’intérêt de « perdre 45 minutes (non payées) à attendre devant un grille fermée… »….encore une fois, vous décidez seul de ne pas vous présenter au RV fixé ; vous datez et signez le runsheet.
Or, là encore, l’atelier de ce garage ouvre à 8h du matin. Il vous était encore une fois possible de réaliser l’inspection. Mais vous avez décidé de ne pas le faire, de ne pas avertir votre responsable de région, et de mettre le client en difficulté pour des inspections à nouveau pas réalisées.
Cela a exaspéré notre client, auquel on a répondu que le garage n’ouvrait qu’à 9h alors que l’atelier était ouvert à 8h….
o Le 19 février, au garage de [Localité 7], vous mentionnez que le véhicule n’était pas présent à 8h15 et à 8h45 (RV client contradictoire) il est classé en « indisponible » car le garage serait fermé ; cela est attesté par un runsheet daté, signé et tamponné du garage. Vous pourrez partager notre étonnement de constater qu’un garage prétendument fermé signe, date et tamponne un runsheet….
o Enfin, le vendredi 1er février, vous êtes parti de chez vous à 7h59 pour y revenir à 13h26. Or ce jour, vous aviez un véhicule de programmé à 14h45 mais vous ne vous êtes pas rendu chez le client pour faire cette mission.
2- Sur les manquements à vos obligations et la dégradation de votre attitude professionnelle.
Lors de l’entretien préalable, nous vous avons fait part également du constat d’une nette dégradation de votre attitude, au-delà de vos manquements dans l’exécution de vos missions évoquées précédemment.
Vous persistez dans une attitude non conforme et irrespectueuse, tant à l’égard de votre responsable que des règles de l’entreprise en général.
Vous outrepassez régulièrement les règles en ne rendant aucunement compte à votre responsable de région, et en décidant de vous-même de prendre les décisions de ne pas aller travailler, ou de ne pas respecter les règles internes.
Pourtant, étant sur le terrain, c’est à vous de remonter les informations à votre RR, dans le but d’améliorer le service.
– Ceci est corroboré par le fait nous avons constaté le 5 mars dernier que vous n’aviez pas utilisé votre TPC la veille. Interrogé sur ce point, vous avez indiqué qu’elle était inutilisable car, selon vous, la mise à jour avait eu comme conséquence que vous n’aviez plus de batterie pour réaliser vos missions, ce qui est pour le moins surprenant. En outre, il suffisait de la remettre à charger pour qu’elle soit en état de fonctionner. Mais vous ne l’avez pas fait et, le 4 mars 2019, vous avez réalisé les inspections sur des Car check papier pour encoder plus tard sur votre TPC, ce qui a entraîné des erreurs.
Là encore, vous ne prenez pas en considération l’impact que de telles négligences ont par rapport à nos clients, et vous auriez dû prévenir de suite votre Responsable de région ou le manager adjoint afin de trouver une solution et réaliser des missions de qualité.
– Ce non-respect s’accompagne de l’utilisation réitérée d’un ton déplacé et irrespectueux à l’égard de votre responsable de région « cela me manquait un peu ce genre de discussions de sourds » (mail du 20/02 à 19h09), « tu réponds ce que tu veux » (mail du 6 février 2019).
– De la même façon, vous persistez à ne pas utiliser le TOM-TOM mis à votre disposition, de façon conforme.
Vous avez pourtant 3 ans d’ancienneté dans l’entreprise ; lors de votre embauche vous avez signé les documents vous informant des règles d’utilisation du TOM TOM ; ces dernières sont rappelées régulièrement par mail et lors des conférences téléphoniques, et encore, pour la dernière en date, le jeudi 28 février 2019 à laquelle vous avez assisté.
Il est rappelé systématiquement la nécessité que vous activiez le TOM TOM en mode privé en dehors du temps de travail.
Or, ce n’est toujours pas le cas, puisque le 1er mars 2019, soit le lendemain de cette conférence téléphonique, vous avez laissé le TOM TOM en mode professionnel durant la pause du midi, générant ainsi, à tort, du temps de travail effectif.
– Votre persistance à ne pas respecter les règles et consignes est également corroborée par la difficulté rencontrée dernièrement concernant le message vocal de votre téléphone portable professionnel.
Vous disposez d’un téléphone professionnel, réservé à l’usage professionnel, et sur lequel l’entreprise et les clients peuvent vous contacter. Il est bien sur évident que vous devez enregistrer un message vocal professionnel en cas d’absences, ce qui vous a été rappelé à de nombreuses reprises.
Il a fallu de longs mois et 3 demandes réitérées de votre responsable de région pour que vous réalisiez cette tâche accessoire ; le tout accompagné du mail condescendant « j’exécute ta demande « ma fonction chez Macadam ne semblant pas avoir pour vocation ni la réflexion, ni le questionnement…» suivi de « la messagerie, pour ton plus grand plaisir, a été modifiée ce jour».
– Enfin, nous vous avons remis, en attente de la livraison de votre nouveau véhicule, une Fiat 500. Vous l’avez utilisée 15 jours ; force est de constater qu’en 15 jours cette voiture a été restituée dans un état lamentable, elle était très sale, sentait la cigarette froide et l’intérieur de l’habitacle étant constellé de cendres.
Par respect des obligations vous incombant, de l’image de la société véhiculée notamment par votre voiture de fonctions, et du collègue auquel vous avez restitué le véhicule, vous deviez entretenir ce véhicule dans un état de propreté et procéder à un nettoyage, et rendre un véhicule propre. L’obligation de maintenir les outils de travail dans un état de propreté est d’ailleurs rappelée à l’article 11 du règlement intérieur.
Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que notre collaboration ne peut se poursuivre. Nous vous notifions en conséquence par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.
1er grief, il est fait reproche à M. [P] d’une mauvaise qualité de ses expertises. L’employeur s’appuie sur les résultats d’une contre-expertise de son inspecteur référent. Si ainsi que le fait valoir M. [P], il ne s’agit bien évidemment pas d’expertises au sens qu’une juridiction peut donner à ce terme, il n’en demeure pas moins que l’employeur produit un document faisant ressortir des dommages non relevés par le salarié qui étaient facturables et ce à chaque fois en faisant référence à l’immatriculation de sorte que le véhicule était identifiable. Ce document n’est certes pas parfait mais doit être mis en perspective avec les énonciations des entretiens d’évaluation alertant le salarié sur la qualité de ses prestations. Toujours au titre de ce grief, l’employeur fait valoir qu’il s’explique par le peu de temps passé sur chaque véhicule, 10 à 15 minutes au lieu du temps prévu de 23 minutes. M. [P] conteste cette partie du grief en considérant qu’il existe une contradiction dans les directives de l’employeur qui lui cadençait des analyses de véhicule toutes les 15 minutes. La cour ne peut cependant suivre une telle interprétation. En effet, les bons que produit M. [P] font certes apparaître un début de créneau horaire toutes les 15 minutes. Mais après analyse et en tenant compte du nombre de véhicules pour chaque lieu, du delta d’organisation prévu et du temps total, c’était bien un temps de 23 minutes qui était prévu pour chacun des véhicules. Ce premier grief est donc établi.
2ème grief, il est fait reproche à M. [P] d’une non réalisation de missions. S’agissant du 1er mars, il existe un doute sur l’imputabilité à M. [P] de cette non réalisation de missions alors qu’il produit un courrier électronique adressé le jour même et faisant état d’un mauvais zonage des véhicules qu’il devait inspecter et qu’il produit des photos confortant cette assertion. L’employeur fait certes valoir que le véhicule était juste derrière mais il n’en demeure pas moins que ceci conforte une difficulté de zonage. Cette première partie du grief n’est pas établie. Il en est de même pour la question de l’inspection du 1er février, M. [P] justifiant de sa réalité. En revanche la question des indisponibilités mal renseignées avant 9 heures est établie. En effet, M. [P] ne conteste pas avoir mis des véhicules en indisponibilité, ce qui correspond à l’impossibilité de réaliser sa mission, mais entre dans le domaine des explications en faisant valoir que la mission était programmée à 8 heures alors que l’établissement du client n’ouvrait qu’à 9 heures. Toutefois, l’employeur justifie que si les services commerciaux des établissements en question ouvraient à 9 heures, l’atelier était lui bien ouvert à 8 heures. Or, M. [P] procède par affirmations lorsqu’il soutient de manière générale que seuls les services commerciaux disposaient des clés des véhicules et ce en s’appuyant sur des éléments concernant une autre concession automobile. Ce grief est ainsi pour partie établi.
3ème grief, il est fait reproche à M. [P] d’une dégradation de son comportement et de son attitude professionnelle générale.
M. [P] ne conteste pas qu’il n’a pas utilisé son terminal le jour visé par l’employeur. Il fait valoir qu’il n’avait plus de batterie à raison de la mise à jour. Outre que l’explication n’apparaît pas parfaitement cohérente, il n’en demeure pas moins que le point est matériellement établi.
Il est également établi que M. [P] adoptait bien un ton peu respectueux dans sa communication avec son supérieur. Ceci est bien démontré par les échanges produits. M. [P] se contente d’indiquer qu’il aurait adopté un ton plutôt plaisant avec une note d’humour. La cour ne saurait retenir une telle analyse alors que les échanges démontrent que M. [P] répondait à son supérieur à tout le moins de façon arrogante à ses légitimes interrogations et ce alors qu’il avait été alerté en 2016 sur la nécessité de faire attention à son relationnel. Le fait qu’il indique, à juste titre, que les échanges sont dénués d’injures est inopérant puisque l’employeur n’a jamais invoqué d’injures.
Dans ses écritures, M. [P] admet avoir, certes exceptionnellement, omis d’éteindre son Tom Tom.
Il est encore établi qu’il a fallu plusieurs demandes pour que M. [P] modifie sa messagerie professionnelle ce qu’il n’a fait que le 21 février 2019 pour substituer sa voix à ce qui était auparavant une voix de robot. Il l’a fait en admettant un échange houleux avec son supérieur (pièce 24) de sorte qu’il ne saurait se contenter d’invoquer un ton « taquin » qui légitimerait sa réticence à exécuter des consignes portant sur une messagerie professionnelle.
Enfin s’agissant du véhicule qui lui avait été remis, M. [P] justifie certes que tous les dommages ne lui sont pas imputables et qu’il en avait pris possession dans un état déjà peu satisfaisant. Ce grief ne peut donc être considéré comme établi.
Au total, tous les griefs énoncés à la lettre de licenciement ne sont certes pas retenus par la cour. Il n’en demeure pas moins, ainsi qu’analysé ci-dessus, que certains sont bien matériellement établis. Aucun ne pourrait à lui seul justifier la rupture. Mais leur réunion, en considération d’une ancienneté qui demeurait réduite, d’alertes qui avaient déjà été faites au salarié sur les mêmes thèmes, permettait à l’employeur, sans disproportion, de prononcer un licenciement sur le terrain de la cause réelle et sérieuse alors qu’il ne peut être retenu qu’il s’agissait d’une mesure de rétorsion quant aux heures supplémentaires non retenues. De même, le fait qu’occasionnellement le salarié ait pu être félicité sur ses résultats ne saurait ôter aux faits retenus ci-dessus leur caractère de cause réelle et sérieuse de licenciement dans leur globalité. C’est à juste titre que les premiers juges ont écarté la demande indemnitaire.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
La situation respective des parties conduit à exclure l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Partie perdante, M. [P] sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 15 juillet 2021 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n’y avoir lieu à indemnité au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [P] aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.
La greffière La présidente
A. Raveane C. Brisset.