Convention collective Syntec : 23 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 20/02846

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Convention collective Syntec : 23 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 20/02846

23 mars 2023
Cour d’appel de Versailles
RG
20/02846

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MARS 2023

N° RG 20/02846 –

N° Portalis DBV3-V-B7E-UGSP

AFFAIRE :

[L] [H] [V]

C/

S.A.S. DXC TECHNOLOGY FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Décembre 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : 15/01687

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Claude-laurence GOLTZMANN

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [L] [H] [V]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Claude-laurence GOLTZMANN, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R117

APPELANT

****************

S.A.S. DXC TECHNOLOGY FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 et Me Laurent GUARDELLI de la SCP COBLENCE ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0053 substitué par Me Léa FONSECA, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle CHABAL, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Domitille GOSSELIN,

La société DXC Technology France, dont le siège social est situé [Adresse 1], dans le département des Hauts-de-Seine, est spécialisée dans le conseil en management et technologies de l’information, le conseil, l’assistance et l’intégration de solutions applicatives et de systèmes d’information. Elle emploie plus de 10 salariés. Elle vient aux droits de la société CSC Computer Sciences.

La convention collective applicable est celle des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite Syntec du 15 décembre 1987.

M. [L] [H] [V], né le 7 janvier 1985, a été engagé par la société CSC Computer Sciences par contrat à durée indéterminée en date du 5 octobre 2010, qui a pris effet le 4 avril 2011, en qualité de consultant, statut cadre, classification 2.1.

Par courrier en date du 13 janvier 2015, la société CSC Computer Sciences a convoqué M. [V] à un entretien préalable qui s’est déroulé le 23 janvier 2015.

Par courrier en date du 27 janvier 2015, la société CSC Computer Sciences a notifié à M. [V] son licenciement dans les termes suivants :

‘A la suite de notre entretien en date du 23 janvier 2015, nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif personnel.

Nous constatons de votre part un certain nombre de manquements et d’insuffisances dans l’exécution des missions qui vous sont confiées en votre qualité de consultant. La qualité de votre travail et votre valeur ajoutée pour les clients sont insuffisants et démontrent que les fondamentaux du consulting et notamment l’analyse globale ne sont pas encore acquis.

Lors de votre dernière mission chez notre client Orange, vous avez, de par votre attitude, démontré votre incapacité à évoluer dans le métier de consultant.

Depuis la fin de votre mission chez Orange début novembre 2014, votre manager vous a demandé de réaliser un benchmark sur la distribution B2B dans les télécoms. Le document que vous avez produit et livré le 5 janvier se limite à 2 slides sans contenu à valeur ajoutée ce qui est tout à fait insuffisant.

D’une manière générale, vous ne savez pas rédiger correctement, ni structurer vos idées dans les exercices de présentations écrites et orales destinées au client, ce qui est parfaitement dommageable de la part d’un consultant.

Vous rejetez les axes d’amélioration qui vous sont donnés par votre management. Ainsi, lors de votre évaluation sur la mission Orange, vous avez contesté tous les axes d’amélioration allant même jusqu’à émettre des propos désobligeants voire inconvenants à l’égard de vos interlocuteurs et à adopter une attitude agressive ce qui n’est pas admissible.

Vous n’êtes pas assez proactif. Il en résulte notamment que vous n’avez jamais pris l’initiative de mettre à jour votre CV. Vous ne l’avez fait qu’à la demande de votre manager et après plusieurs relances de celui-ci.

De la même façon, après avoir refusé toutes les opportunités de mission à l’étranger qui vous ont été proposées sur FYI4 pour des raisons personnelles mais également un oral en anglais pour une opportunité sur un projet interne qui ne nécessitait pas de déplacements, vous avez indiqué que la raison de ces refus était que vous ne maîtrisiez pas l’anglais. Vous avez alors demandé à bénéficier d’une formation en anglais ce qui a été accepté via l’utilisation de l’outil Global English.

Malheureusement, votre manager reçoit les rapports mensuels d’activité qui montrent que vous ne vous connectez jamais à Global English et ce, même durant les périodes où vous n’êtes pas staffé.

Votre manque caractérisé de proactivité et de motivation associé au rejet de tout axe d’amélioration font qu’à ce jour aucune amélioration ne peut être constatée malgré les nombreuses alertes de votre management.

A cela se rajoute le fait que vous ne respectez pas les horaires de travail et que vous refusez d’entendre les remarques faites par votre manager sur ce sujet. Ceci a notamment été le cas lors de votre dernière mission chez Orange durant laquelle vous arriviez fréquemment chez le client le matin vers 10h/10h30 au lieu de 9h/9h15 sans aucune justification d’autant plus que vous partiez le soir vers 18h30.

Enfin lorsque votre manager vous appelle pour vous demander de passer le voir, il arrive régulièrement que vous ne soyez pas à votre poste de travail et que vous lui appreniez, à cette occasion, que vous êtes souffrant produisant a posteriori les arrêts maladie correspondants. A plusieurs reprises, votre manager vous a demandé de le prévenir de vos absences sans attendre qu’il les découvre par lui-même. Malgré cela et contrairement aux dispositions contenues dans le règlement intérieur en vigueur au sein de notre société, vous ne respectez pas toujours cette consigne.

Ces manquements et insuffisances démontrent parfaitement que vous ne remplissez pas votre rôle de consultant et que votre profil est en inadéquation totale avec le métier de consultant. Malgré les multiples remarques de votre management aucune amélioration n’a pu être constatée à ce jour et elle n’est pas envisageable eu égard à votre manque de proactivité et de motivation mais surtout à votre attitude de rejet de tous les axes d’amélioration qui vous sont donnés.

En conséquence, nous vous informons, par la présente, que nous avons décidé de procéder à votre licenciement, en raison des motifs sus-énoncés, à dater de la première présentation du présent courrier.

Votre préavis, d’une durée de trois mois, que nous vous dispensons d’effectuer, débutera à la date de présentation du présent courrier. Bien entendu, ledit préavis vous sera payé à l’échéance normale de la paye.’

Par requête du 4 juin 2015, M. [V] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de contester son licenciement et a demandé la condamnation de la société DXC Technology France, venant aux droits de la société CSC Computer Sciences, à lui payer la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, outre 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sous le bénéfice de l’exécution provisoire.

La société DXC Technology France avait demandé paiement de la somme de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire rendu le 4 décembre 2020, la section encadrement du conseil de prud’hommes de Nanterre a :

– dit et jugé que le licenciement de M. [V] par la société DXC Technology France repose sur une cause réelle et sérieuse,

– débouté M. [V] de sa demande de dommages et intérêts,

– laissé les frais irrépétibles à la charge des parties,

– débouté M. [V] de ses autres demandes,

– débouté la société DXC Technology France de ses autres demandes,

– condamné M. [V] aux entiers dépens de l’instance.

M. [V] a interjeté appel de la décision par déclaration du 15 décembre 2020.

Par conclusions adressées par voie électronique le 11 mars 2021, M. [V] demande à la cour de :

– le recevoir en son appel, le déclarer recevable et bien fondé et ce faisant,

– réformer le jugement entrepris,

– dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– condamner la société DXC Technology France à payer à M. [V] la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L. 1235-3 du code du travail,

– condamner la société DXC Technology France à payer à M. [V] la somme de 6 000 euros au titre de la violation de l’obligation de formation et d’adaptation,

– condamner la société DXC Technology France à payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par conclusions adressées par voie électronique le 8 juin 2021, la société DXC Technology France demande à la cour de :

– recevoir la Société DXC Technology France en ses présentes conclusions,

– l’en dire bien fondée,

– débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes,

Par conséquent :

– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SAS DXC Technology France de sa demande ‘reconventionnelle’ formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– le confirmer en ses autres dispositions,

Par conséquent :

Statuant à nouveau :

– dire le licenciement pour motif personnel de M. [V] justifié,

– débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire :

– limiter son indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse à 16 534,98 euros, faute pour le demandeur de démontrer un quelconque préjudice,

En tout état de cause :

– condamner M. [V] à payer à la société la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Courtaigne avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 18 janvier 2023, le magistrat de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 27 janvier 2023.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur le licenciement

M. [V] conteste les manquements qui lui sont imputés et soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, tandis que la société DXC Technology France estime que les manquements sont établis.

Aux termes de l’article L. 1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

La cause du licenciement, qui s’apprécie au jour où la décision de rompre le contrat de travail est prise par l’employeur, doit se rapporter à des faits objectifs, existants et exacts, imputables au salarié, en relation avec sa vie professionnelle et d’une certaine gravité qui rend impossible la continuation du travail et nécessaire le licenciement.

L’article L. 1235-1 du code du travail prévoit que le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité objective et durable d’un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification. Elle se caractérise par une mauvaise qualité du travail due soit à une incompétence professionnelle, soit à une inadaptation à l’emploi.

Si l’appréciation des aptitudes professionnelles et de l’adaptation à l’emploi relève du pouvoir de l’employeur, pour justifier le licenciement, les manquements doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l’entreprise ou être préjudiciables aux intérêts de celle-ci.

En l’espèce, le licenciement est fondé sur une insuffisance professionnelle et repose sur deux manquements.

1 – sur l’insuffisance de qualité du travail et le manque de valeur ajoutée pour le client

Il est reproché au salarié des manquements et insuffisances dans l’exécution des missions qui lui ont été confiées et une absence de valeur ajoutée pour les clients.

L’employeur expose que les fondamentaux du consulting et notamment l’analyse globale n’étaient toujours pas acquis pour le salarié en janvier 2015 depuis son recrutement en avril 2011 ; que trois évaluateurs différents ont estimé que son travail était insuffisant sur trois missions ; que M. [V] n’était pas prêt à entendre qu’il avait des axes d’amélioration et n’acceptait ni ne mettait en pratique les consignes et conseils qui lui étaient donnés pour progresser dans son travail et évoluer dans le métier de consultant.

M. [V] conteste tous les motifs d’insuffisance en faisant valoir qu’il a obtenu de bonnes évaluations sur les missions qui lui ont été confiées, qu’il a été considéré comme conforme/parfois supérieur aux attentes lors de son évaluation 2012 et que son évaluation 2013 est subjective car contradictoire.

S’agissant de la mission ERDF/GDF qui a été confiée à M. [V] du 19 septembre 2011 au 17 février 2012, l’évaluation globale a été jugée ‘conforme/parfois supérieur aux attentes’, soit la position 3 sur 5 possible, correspondant à la moyenne, avec en points forts : ‘forte volonté d’apprendre. Envie de prendre en charge des sujets plus intéressants que ceux confiés dans son rôle de PMO’ et en axes d’amélioration : ‘être plus vigilant et rigoureux dans l’envoi des indicateurs (ce sujet étant très visible pour le client)’ (pièce 16 a de l’appelant).

Il a été estimé que M. [V] avait su tenir les délais dans l’ensemble des tâches qui lui étaient confiées et gérer en parallèle beaucoup de tâches très hétérogènes, qu’il était supérieur aux attentes dans sa capacité à progresser, par sa volonté d’apprendre et de s’améliorer, mais qu’il était seulement en partie conforme aux attentes sur la qualité de son travail, devant faire preuve de plus de rigueur notamment dans l’envoi des mails sur les indicateurs.

L’évaluation 2012 de M. [V] (pièce 17 de l’appelant) donnait une notation globale ‘conforme / parfois supérieur aux attentes’, avec une qualité du travail seulement ‘en partie conforme aux attentes’, dans un contexte reconnu difficile, et des attentes pour améliorer sa posture, la capacité à progresser ‘toujours supérieure aux attentes’ du salarié devant favoriser une adaptation rapide (pièce 17 de l’appelant).

S’agissant de la mission chez TDF qui s’est déroulée du 1er octobre 2012 au 30 juin 2013, l’évaluation globale a été également jugée ‘conforme / parfois supérieur aux attentes’, avec en points forts : ‘dynamique / bonne motivation. [H] a su apporter une contribution importante sur le projet sur des sujets complètement inconnus par lui au début du projet. [H] sur ce projet a réalisé des prestations du niveau d’un C2″ et en axes d’amélioration : ‘travailler ses méthodes et organisation de travail’ (pièce 16 b de l’appelant).

Il était souligné que M. [V] savait prendre en main un sujet, en être responsable et en assurer les livraisons avec un bon niveau de qualité, s’investir pour essayer de tenir les délais et qu’il avait une compétence reconnue par le client. Il était jugé supérieur aux attentes sur la communication orale et écrite, sachant se faire comprendre sans timidité et ayant su être plus attentif à sa communication écrite. Il était incité à plus solliciter son management pour vérifier son travail et à ne pas avoir d’appréhension à montrer qu’il n’a pas compris certains points.

L’évaluation globale 2013 de M. [V] était ‘en partie conforme aux attentes’ avec le commentaire : ‘Les critères sur projet sont conformes. En dehors, pas de proactivité pour trouver une mission. Attention à ne pas devenir instaffable et ne pas prolonger les périodes d’inter contrat’ et la conclusion générale : ‘difficulté à monter sur une mission. Forte mobilisation du management pour aboutir à une montée sur projet en facturation à 50 %. Bon comportement sur projet. Trajectoire sur projet à poursuivre’ (pièce 18 du salarié).

S’agissant de la mission Orange France exécutée du 2 juin au 6 octobre 2014, l’évaluation globale a été jugée ‘conforme aux attentes’ (2ème position sur 4) avec pour points forts : ‘ [H] a très bien réalisé la mission en répondant aux besoins / attentes du client. Par conséquent il a pleinement satisfait le client d’un point de vue opérationnel’ et pour axes d’amélioration : ‘[H] doit désormais être en mesure de travailler sur des projets en ayant une supervision moindre afin d’acquérir encore plus d’autonomie et de développer sa capacité à être force de proposition. Il doit également développer ses connaissances et compétences sur les aspects de gestion de projet et être autonome en partie sur ces tâches inhérentes au métier de consultant’. M. [V] portait le commentaire suivant : ‘les axes d’amélioration évoqués sont contraires au mail reçu de la part du chef de projet ‘Migration Coriolis Orange’. Aucun axe d’amélioration n’a été mis en place par le management pendant la mission.’ (pièce 16 c de l’appelant).

Sur 10 items, M. [V] était considéré comme :

– ‘conforme aux attentes’ pour 5 : qualité du travail (avec nécessité d’être plus proactif et force de proposition face au client et non pas de se mettre uniquement dans un mode d’exécutant), tenue des délais (avec la nécessité d’être plus régulier dans la tenue et l’organisation des réunions projets (points flash)), quantité de travail (s’étant stabilisée à la baisse au fur et à mesure du projet, avec nécessité d’utiliser ce temps pour travailler à la capitalisation pour le client et pour CSC (process)), utilisation des ressources et esprit d’équipe, sans toutefois que la mission ait permis de faire une réelle évaluation sur ces deux points,

– ‘en partie conforme aux attentes’ pour 4 : valeur ajoutée aux clients (avec nécessité de réfléchir avec le client afin de trouver ensemble des solutions tout au long du projet et de ne pas rester dans l’exécution cadrée), autonomie (avec nécessité d’anticiper et organiser les points flash), organisation/méthodes de travail (avec nécessité de développer son esprit de synthèse afin de faire preuve de plus de concision en réunion) et communication orale et écrite (faire plus attention à son expression orale et écrite (orthographe, syntaxe)).

– l’item ‘capacité à progresser’ n’était pas renseigné.

Les deux courriels produits par M. [V], qui lui ont été envoyés le 16 octobre 2014 par M. [S] de la société Orange, le remerciant pour le support sur la mission, pour ce qu’il a apporté humainement et professionnellement et indiquant : ‘tu as su nous accompagner très vite dans cette mission de pilotage des OSM. Nous tenons à te remercier pour les résultats et surtout l’écoute, l’adaptabilité et l’agilité dont tu as fait part durant les 4 mois’, ne suffisent pas à contredire certaines insuffisances soulignées par l’employeur dans l’exécution de cette mission (pièce 15 de l’appelant).

L’évaluation 2014 de M. [V] a abouti à une notation ‘non conforme aux attentes’ car ‘le taux de staffing d'[H] est très faible cette année et imputable en partie à un problème de niveau d’anglais qui devra obligatoirement être amélioré très rapidement. Par ailleurs, les résultats obtenus lors de ses missions démontre que [H] est un bon exécutant mais que les fondamentaux du consulting dont l’analyse globale ne sont pas encore acquis. Enfin, malgré une attitude peu proactive, [H] a néanmoins fortement contribué au process de recrutement de la practice.’ (pièce 19 de l’appelant). Il était demandé au salarié de faire preuve de plus de motivation et d’initiative sans toujours attendre qu’on le sollicite et conclu qu’il fallait envisager d’autres types de missions pour lui permettre de s’épanouir davantage.

Il ressort du courriel de M. [T], supérieur hiérarchique de M. [V], du 7 janvier 2015 (pièce 7 de l’intimée) que cette évaluation, faite en présence de Mme [Y], qui le surveillait avec lui sur place chez le client pendant l’exécution de la mission, s’est très mal passée, M. [V] contestant tous les axes d’amélioration, se montrant agressif, vociférant et tenant des propos désobligeants voire inconvenants à l’égard de ses interlocuteurs, s’en excusant en séance.

M. [T] indique que la mission chez Orange était très opérationnelle et destinée à relancer M. [V] ; que s’il a correctement exécuté ses missions, il a refusé au début de faire des rapports flash et ne l’a fait qu’après des relances toutes les semaines ; qu’il a démontré par son attitude une incapacité à évoluer dans le métier de consultant.

M. [T] indique que depuis la fin de cette mission début novembre 2014, il a demandé à M. [V] de réaliser un benchmark sur la distribution B2B dans les télécom et que le salarié a livré le 5 janvier un document se limitant à 2 ‘slides’ sans contenu à valeur ajoutée, ce qui est tout à fait insuffisant. Il concluait qu’aucun plan d’amélioration n’était possible car le salarié ‘n’était pas prêt à entendre qu’il a des axes d’amélioration ni à accepter ni mettre en pratique les consignes et conseils qui lui sont donnés pour progresser dans son travail et évoluer dans le métier de consultant’, de sorte qu’il fallait procéder à son départ.

Les insuffisances de M. [V] dans la qualité de son travail sont ainsi démontrées.

2 – sur le manque de proactivité du salarié

La lettre de licenciement reproche à M. [V] de ne pas être assez proactif.

M. [V] estime que la société ne peut lui reprocher de ne pas procéder à des recherches de missions puisqu’il appartient à son employeur de rechercher des missions compatibles avec ses compétences. Il fait valoir que la maîtrise de l’anglais n’était pas une condition de son embauche et que l’employeur devait lui proposer une formation adéquate et souligne que son taux de staffing n’était pas insuffisant puisqu’il était de 95 %.

La société DXC Technology France répond qu’il n’est pas reproché à M. [V] de ne pas avoir trouvé de missions mais uniquement de manquer de proactivité et de motivation, résultant notamment de l’absence de mise à jour de son CV malgré les relances de son manager. Elle fait valoir qu’un bon niveau d’anglais est indispensable dans la mesure où le salarié travaille pour une société appartenant à un groupe américain et que M. [V] n’a pas mis en pratique la formation qu’il avait acceptée. Elle conteste le taux de staffing auquel se réfère le salarié.

Il ressort de l’évaluation 2014 de M. [V] qu’un ‘staffing’, c’est-à-dire un recrutement en mission, de 95 % était un objectif assigné au salarié mais non sa réalisation effective, son taux de staffing ayant au contraire été jugé ‘très faible’ et imputable en partie à un problème de niveau d’anglais.

S’il appartient à l’employeur de confier des missions au salarié et d’assurer la formation de ce dernier, le salarié doit être en mesure de pouvoir assumer le travail proposé par l’employeur, correspondant à ses compétences.

Il ressort du courriel de M. [T] que M. [V], bien que très peu staffé sur les deux dernières années, n’a pas mis de lui-même son CV à jour et qu’il ne l’a fait que sur la demande de son supérieur hiérarchique, après plusieurs relances.

M. [T] indique en outre que M. [V] a refusé toutes les opportunités de mission à l’étranger qui lui ont été proposées en 2014 pour des raisons personnelles ; qu’il a refusé au dernier moment un oral en anglais pour une opportunité sur un projet interne qui ne nécessitait pas de déplacements, indiquant ensuite à son supérieur que le point de blocage était l’anglais qu’il ne maîtrisait pas et demandant une formation en anglais. Après échange avec le service formation, les formations plus coûteuses étant réservées aux profils ‘HighPo’, M. [V] a été orienté vers une formation Global English en ligne, à laquelle il ne se connectait cependant jamais, même pendant les périodes où il n’était pas staffé.

Ce faisant, M. [V] ne s’est pas montré proactif pour être en mesure de répondre aux attentes de son employeur concernant son employabilité et se voir confier des missions.

Le manquement est donc avéré.

En outre, il ressort du courriel de M. [T] que M. [V] a posé des problèmes de comportement lors de l’accomplissement de sa mission chez Orange, arrivant souvent tard au travail ; qu’il est arrivé plusieurs fois qu’il ne soit pas présent au travail lorsque M. [T] demandait à le voir, expliquant qu’il était souffrant et ne produisant les arrêts de travail qu’a posteriori. Les courriels produits par le salarié, qui avisent son employeur de certains arrêts de travail, sans produire les arrêts de travail correspondant, sont insuffisants à établir qu’il a toujours prévenu à temps de ses arrêts de travail.

La société DXC Technology France apportant ainsi la preuve de l’insuffisance professionnelle alléguée, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a retenu que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a débouté M. [V] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la violation de l’obligation de formation et d’adaptation

L’article L. 1222-1 du code du travail dispose que ‘le contrat de travail est exécuté de bonne foi.’

L’article L. 6321-1 du code du travail dans sa version applicable au litige dispose que ‘L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail.

Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences ainsi qu’à la lutte contre l’illétrisme.

Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l’article L. 6312-1.’

M. [V] soutient au visa de ces deux textes que son employeur ne lui a pas permis d’évoluer dans sa fonction et ses compétences pendant les quatre années d’activité et ne peut donc lui reprocher de ne pouvoir être staffé ; que cette carence procède d’une exécution fautive et déloyale du contrat de travail qui a limité ses capacités de reprise d’activité professionnelle après le licenciement.

La société DXC Technology France réplique qu’elle a parfaitement respecté son obligation de formation et d’adaptation par le bénéfice de séminaires d’intégration en 2011, en effectuant un suivi régulier lors et à l’issue des missions du salarié et en lui proposant des formations en anglais. Elle ajoute que M. [V] ne justifie pas du préjudice qu’il a subi.

L’employeur justifie que M. [V] a suivi plusieurs formation en mai 2011 au titre de son intégration dans la société (pièce 8) et qu’il n’a pas suivi la formation en anglais en ligne à laquelle il était inscrit, alors qu’il n’était pas en mission chez un client.

En outre, les manquements qui ont été mis en évidence dans l’accomplissement de ses missions ne ressortent pas d’un défaut de compétence auquel il pouvait être remédié par une formation, mais d’un défaut de qualité du travail et d’un manque de proactivité auxquels il pouvait être remédié par des axes d’amélioration proposés par l’employeur mais rejetés par le salarié.

Enfin, il n’est pas établi que c’est en raison d’un défaut de formation limitant son employabilité que M. [V] n’a pas retrouvé de travail dans son domaine de compétence après son licenciement, dès lors que ne sont produites que deux candidatures de la part de M. [V] à des postes proposés par Pôle emploi, en décembre 2015 et en juin 2016, toutes les autres candidatures datant de juin ou juillet 2017 ayant été faites de manière automatique par le site de l’Apec (pièce 33 de l’appelant).

Le refus du 29 juin 2017 opposé par l’ECAM de [Localité 5] concernant une thèse dans un laboratoire d’informatique et de télécommunications ne tenait pas aux qualités personnelles et à la formation de M. [V], étant relevé que dans le CV accompagnant sa candidature, M. [V] avait indiqué qu’il parlait un ‘anglais courant’.

En conséquence, M. [V] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts, la décision de première instance n’ayant pas statué sur cette demande.

Sur les demandes accessoires

La décision de première instance sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

M. [V], qui succombe à nouveau en ses prétentions, supportera les dépens de l’instance d’appel, avec distraction au profit du conseil de l’intimé en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Il sera condamné à verser la somme de 300 euros à la société DXC Technology France au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sa demande formée du même chef devant être rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 décembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Nanterre,

Y ajoutant,

Déboute M. [L] [H] [V] de sa demande de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de formation et d’adaptation,

Condamne M. [L] [H] [V] aux dépens de l’instance d’appel,

Autorise la SCP Courtaigne, avocat, à recouvrer les dépens d’appel dont elle a fait l’avance par application de l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne M. [L] [H] [V] à payer à la société DXC Technology France une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [L] [H] [V] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, présidente, et par Mme Domitille Gosselin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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