Convention collective Syntec : 22 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02299

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Convention collective Syntec : 22 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02299

22 juin 2023
Cour d’appel de Versailles
RG
21/02299

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

RÉPUTÉ

CONTRADICTOIRE

DU 22 JUIN 2023

N° RG 21/02299 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UUOS

AFFAIRE :

[U] [V]

C/

S.A.S. AMAYAS CONSULTING

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mai 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : 18/01408

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Amandine GARCIA

Expédition numérique délivrée à : PÔLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [U] [V]

né le 14 Mars 1977 à [Localité 4] (MAURITANIE)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentant : Me Amandine GARCIA, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G407

APPELANT

****************

S.A.S. AMAYAS CONSULTING

N° SIRET : 803 205 657

[Adresse 2]

[Localité 3]

INTIMEE DEFAILLANTE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 Mai 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, en présence de M. LAKHTIB Nabil, greffier

Par contrat de travail à durée indéterminée du 3 décembre 2014, M. [V] a été engagé par la société Amayas Consulting en qualité de consultant système d’information statut cadre.

La société compte plus de 11 salariés et les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale SYNTEC.

M. [V] a effectué une mission chez le client Société Générale partenaire de la société. Celle-ci s’est achevée le 30 novembre 2017. A compter de cette date, M. [V] s’est trouvé en période d’inter-contrat.

Du 5 au 13 février 2018, M. [V] a été placé en arrêt maladie.

Par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 5 février 2018, M. [V] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement prévu le 14 février 2018. Par un courrier du 13 février 2018, la société a finalement convoqué M. [V] à un entretien préalable s’étant déroulé le 23 février 2018 en présence du salarié.

M. [V] a été dispensé de se rendre sur son lieu de travail du 13 au 28 février 2018.

Par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 28 février 2018, la société Amayas Consulting a notifié à M. [V] son licenciement pour faute grave.

Par requête reçue au greffe le 12 juin 2018, M. [V] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de contester la légitimité de son licenciement et d’obtenir le versement de diverses sommes.

Par jugement du 28 mai 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Nanterre a :

– Dit que les motifs invoqués pour justifier la faute grave de M. [V] sont insuffisants mais que M. [V] a eu un comportement fautif justifiant un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

– Condamné la société Amayas Consulting à verser M. [V] les montants suivants au titre de :

*Indemnité de préavis : 14’244 euros

*Congés payés sur préavis : 1’424 euros

*Indemnité conventionnelle de licenciement : 5’144 euros

*Frais irrépétibles : 1’000 euros

– Débouté M. [V] de toutes ses autres demandes

– Dit que les dépens éventuels seront à la charge de la société Amayas Consulting.

Par déclaration au greffe du 13 juillet 2021, M. [V] a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 28 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, M. [V] demande à la cour de :

– Recevoir Monsieur [V] en ses écritures,

Y faisant droit,

– Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– Dit que Monsieur [V] a eu un comportement fautif justifiant un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

– Considéré que « Monsieur [V] a eu un comportement inadapté aux responsabilités d’un consultant de niveau cadre exerçant dans une activité de prestation intellectuelle, discutant les choix ou les commentaires du client, renâclant à s’investir sur la proposition de mission faite par OFI AM ».

– Débouté Monsieur [V] de sa demande à voir jugé que la faute grave invoquée à l’appui de son licenciement n’est nullement caractérisée et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

– Débouté Monsieur [V] de sa demande de condamnation de la société Amayas Consulting à lui régler une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 4 mois de salaire soit 18.992 euros.

– Débouté Monsieur [V] « de l’ensemble des demandes complémentaires en l’absence de démonstration d’un préjudice particulier de sa part, ce dernier ayant fondé sa propre société de consulting à l’issue de sa période d’emploi chez Amayas Consulting. »

Statuant à nouveau sur les chefs du jugement infirmés,

– Juger que le licenciement de Monsieur [V] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

– Condamner la Société Amayas Consulting à régler à Monsieur [V] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 18.992 euros.

– Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Amayas Consulting à régler à Monsieur [V] les sommes suivantes :

*Indemnité de préavis : 14.244 euros

*Congés payés sur préavis : 1.424,40euros

*Indemnité conventionnelle de licenciement : 5.144 euros

*Frais irrépétibles : 1.000 euros

– Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Amayas Consulting aux dépens.

Y ajoutant :

– Débouter la société Amayas Consulting de ses demandes,

– Condamner la Société Amayas Consulting à régler à Monsieur [V] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du CPC en cause d’appel.

– Condamner la Société Amayas Consulting aux entiers dépens d’appel.

La société intimée n’a pas constitué avocat et n’a pas pris de conclusions.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 5 avril 2023.

SUR CE,

Sur le licenciement

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et implique son éviction immédiate ; la charge de la preuve incombe à l’employeur qui l’invoque.

En l’espèce, la lettre de licenciement invoque une faute grave en reprochant à M. [V] d’avoir délibérément adopté une attitude déloyale, fautive et contraire à ses engagements contractuels, en refusant les poste qui lui étaient proposés.

S’agissant de la proposition de mission Hermes SAP Finance, les premiers juges ont justement relevé que la société employeuse ne produit aucune lettre de mission et s’appuyait uniquement sur l’attestation d’un intermédiaire co-mandaté mais ne fournissant aucune preuve de ce mandat aux débats, tandis que le salarié, de son côté, donnait un juste motif de son refus de donner une suite favorable aux échanges entrepris.

En cause d’appel, la société Amayas ne comparaît pas et ne verse donc pas de nouvelles pièces.

L’appelant souligne à juste titre avoir été interrogé de façon informelle et avoir répondu dans ce même cadre, sans qu’une proposition de mission précisant l’identité de la société cliente ne lui ait été transmise par son propre employeur.

Ces éléments justifient que ce premier grief de refus de mission soit écarté.

Concernant le grief de refus de la mission BNP, s’il s’agissait bien d’un entretien de qualification, la société Amayas ne fournit aucune pièce démontrant que M. [V] aurait refusé sa mission chez BNP et contredisant ce dernier indique que c’est le client qui n’a pas retenu sa candidature dans le cadre de cet entretien de qualification ; il s’ensuit que ce second grief n’est pas non plus démontré.

S’agissant du grief de refus de la mission pour la société OFI, M. [V] produit d’abord le mail du 2 janvier 2018 dans lequel M. [P], directeur au sein de la société Amayas Consulting lui demandait de se préparer à une présentation de poste de Business Analyst (BA) chez le client OFI AM, et de M. [T], président, évoquant à la suite de nouveaux échanges le 10 janvier 2018 cette présentation avec OFI AM sur un poste de BA finance, ainsi que le mail de M. [L] évoquant le 15 janvier 2018 rechercher un profil Business Analyst.

Il produit également ses échanges avec M. [L] le 29 janvier 2018 :

Ce dernier lui indiquait : « [U], je vais me porter garant de ta candidature en interne, tu me parais parfaitement adapte au poste Une fois encore ce poste est une opportunité pour monter en compétence finance / AM (comme tu as pu le constater le périmètre métier est très large et concerne toutes les classes d’actifs ) et cumule les activités de support et BA finance avec la gestion de dossier évolutifs majeurs de bout en bout. Peux tu me confirmer ta motivation avant que j’avance et m’implique pour toi ‘ il me faut un retour aujourd’hui stp c’est important car l’entretien de validation sera pour demain »,

mail auquel il répondait en ces termes :

 » Bonjour [Z], je tenais à rappeler que mon CV a été envoyé à OFI AM pour un poste de Business Analyst. Je constate que c’est plutôt un descriptif d’un poste de support applicatif que tu me présentes. Vu que les postes sont ouverts, merci de me faire parvenir l’AO (appel d’offre), cela sera plus précis. En ce qui concerne ma motivation, je suis surpris que tu me la demandes car nous en avons discuté plus d’une fois, tu la connais très bien donc je ne vois pas la nécessité de réitérer cela à nouveau. Enfin, par souci de clarté et pour éviter toute ambiguïté, merci de me notifier si tu m’as adressé ce mail en ta qualité de collaborateur de la société AMAYAS ou en tant qu’un responsable OFI AM Merci d’avance de ton retour »

Si le ton de cette réponse apparaît maladroit, voire déplacé, il demeure que M. [V] a pu être surpris de se voir proposer une mission comprenant principalement des fonctions de support alors qu’une mission de Business Analyst lui avait été précédemment annoncée.

En outre, postérieurement à ce dernier échange, M. [T] lui adressait le message suivant :

« Bonjour [U],

Il ne fait aucun doute que ce poste correspond à tes compétences dans la continuité de ta mission SG tu as eu toutes les informations nécessaires, pas d’AO ou complément à suivre. Merci de nous avoir confirmé ta motivation, nous partons donc sur un dernier échange demain ou mercredi avec démarrage dans la foulée. [Z], bien que partenaire historique, n’en reste pas moins notre client donc ce n’est pas à toi de demander quoi que ce soit, merci de ne plus commettre ce type d’impers en inversant les rôles. Mais soyons positif, une belle mission débute sous peu », de sorte que le président de la société concluait sur une note positive.

Il s’ensuit que l’échange précédant ne suffit pas à caractériser un manquement du salarié justifiant la sanction d’un licenciement.

S’agissant enfin du grief de refus de mission pour la société Crédit Agricole, il ressort des motifs des premiers juges que la société Amayas avait versé aux débats en première instance une attestation de M. [C], salarié de la société Amayas indiquant comme raisons du refus la localisation géographique de cette mission à [Localité 7], tandis que M. [V] de son côté indiquait que c’est le client qui a jugé qu’il habitait trop loin, raison pour laquelle il ne l’a pas retenu sur cette mission et versait un mail du 13 mars 2018 demandant au représentant de la société CACIB de justifier des raisons pour lesquelles il n’a pas été retenu, également produit en cause d’appel.

Aucune réponse, ni aucun élément supplémentaire n’est versé aux débats permettant de clarifier les raisons pour lesquelles M. [V] n’a pas été retenu à l’issue de son entretien auprès de la société CACIB.

L’appelant souligne en outre que le lieu de sa précédente mission était situé à [Localité 5], à plus d’une heure trente de son domicile situé à [Localité 6] dans l’Essone.

Ainsi, la société ne démontre pas que M. [V] a refusé cette mission et le grief relatif à la quatrième mission doit être écarté.

Au surplus, M. [V] produit son entretien annuel d’évaluation en date du 29 janvier 2018 qui contient des appréciations très largement positives, en ce compris sur l’item « Orientation Client interne et/ou externe » comprenant notamment le «sens du service» ou le « relationnel client» et sur l’item « Présentation/ponctualité » comprenant le fait de « savoir se présenter chez le client en entretien », évalués comme « dépass[ant] le niveau requis ».

Il n’est pas non plus justifié de conséquences dommageables pour la société Amayas Consulting des manquements qu’elle allègue à l’encontre de M. [V].

En conséquence, le jugement sera aussi infirmé en ce qu’il a dit que M. [V] a eu un comportement fautif justifiant un licenciement pour cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a par suite rejeté la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières

A la date de son licenciement M. [V] avait une ancienneté de plus de 3 ans au sein de l’entreprise qui employait de façon habituelle au moins 11 salariés.

Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Amayas Consulting à verser M. [V] les montants suivants :

– Indemnité de préavis : 14 244 euros

– Congés payés sur préavis : 1 424 euros

– Indemnité conventionnelle de licenciement : 5 144 euros.

L’article L. 1235-3 du code du travail issu de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 publiée le 23 septembre 2017 prévoit, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et si la réintégration n’est pas demandée et acceptée, une indemnisation à la charge de l’employeur dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau produit, soit pour une ancienneté telle que celle de M. [V], une indemnité minimale de 3 mois de salaire brut et une indemnité maximale de 4 mois de salaire brut.

Au-delà de cette indemnisation minimale, et tenant compte notamment de l’âge, de l’ancienneté du salarié et des circonstances de son éviction, étant observé qu’il indique avoir créé son entreprise en avril 2018 et justifie de revenus déclarés en 2019 inférieurs à son salaire perçu antérieurement au sein de la société Amayas Consulting, il convient de condamner l’employeur au paiement d’une indemnité totale de 16 000 euros à ce titre.

Sur le remboursement par l’employeur à l’organisme des indemnités de chômage

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’appel seront mis à la charge de la société Amayas Consulting.

La demande formée par M. [V] au titre des frais irrépétibles en cause d’appel sera accueillie, à hauteur de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a dit que M. [V] a eu un comportement fautif justifiant un licenciement pour cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant de nouveau des dispositions infirmées et y ajoutant,

Dit le licenciement de M. [U] [V] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SAS Amayas Consulting à payer à M. [U] [V] les sommes suivantes :

– 16 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 2 000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles de procédure en cause d’appel,

Ordonne le remboursement par la SAS Amayas Consulting, aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à M. [U] [V] dans la limite de 6 mois d’indemnités en application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail,

Confirme le jugement pour le surplus,

Condamne la SAS Amayas Consulting aux dépens d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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