Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 7
ARRET DU 02 MARS 2023
(n° , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/04725 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCEIT
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VILLENEUVE ST GEORGES – RG n° F16/00573
APPELANTE
Madame [W] [Y], [P] [M]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Laurent MORET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 427
INTIMEES
Société URBI DOM
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Danièle TETREAU ROCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0102
Société MEGAL
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Danièle TETREAU ROCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0102
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,
Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre,
Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller.
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR
ARRET :
– CONTRADICTOIRE,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Guillemette MEUNIER, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière en stage de préaffectation sur poste, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROC »DURE ET PR »TENTIONS DES PARTIES
Mme [M] a été embauchée par la société Megal, par contrat à durée indéterminée du 02 janvier 2008, en qualité de comptable.
Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale du bâtiment Etam.
Par courrier du 9 décembre 2011 remis en mains propres, la société Urbidom, holding de la société Megal, informe Mme [M] qu’elle entend transférer son contrat de travail à compter du 2 janvier 2012.
Par courrier du 21 avril 2016, Mme [M] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 04 mai 2016 assorti d’une mise à pied à titre conservatoire dans l’attente de la décision à intervenir.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 23 mai 2016, la société Urbidom a notifié à Mme [M] son licenciement pour faute grave.
Mme [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Villeneuve Saint Georges par requête en date du 21 septembre 2016.
Par jugement contradictoire du 11 juin 2020, le conseil de prud’hommes a :
-dit que le transfert du contrat de travail de Madame [W] [M] de la SAS Megal, prise en la personne de son représentant légal, vers la SAS Urbidom, prise en la personne de représentant légal, est valide, en conséquence :
-mis hors de la cause la SAS Megal et débouté Mme [W] [M] de sa demande de condamnation solidaire de la SAS Megal, prise en la personne de son représentant légal, et la SAS Urbidom, prise en la personne de son représentant légal.
-dit que Ia moyenne mensuelle brute des 12 derniers salaires de Madame [M] est fixée à 2.696.00 euros (Deux mille six cent quatre-vingt-seize euros).
-dit que le licenciement de Mme [W] [M] est fondé sur des causes réelles et sérieuses et que la gravité des faits reprochés à Mme [W] [M] est caractérisée, en conséquence :
-débouté, en conséquence, Mme [W] [M] de ses demandes au titre du licenciement sans causes réelles et sérieuses
-condamné la SAS Urbidom, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme [W] [M] la somme suivante :
5.304,00 euros à titre de solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016.
-débouté la SAS Urbidom, prise en la personne de son représentant légal, de sa demande reconventionnelle à l’encontre de Mme [M].
-rejeté le surplus des demandes de Mme [M],
-rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour le rappel des congés payés en application de l’article R,1454-28 du code du travail.
-condamné la SAS Urbidom, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Mme [W] [M] la somme de 1.200,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamné la SAS Urbidom, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens.
Par déclaration notifiée par la voie électronique le 17 juillet 2020, Mme [M] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 21 janvier 2021, Mme [M] demande à la cour de :
-infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Villeneuve Saint Georges en ce qu’il l’a débouté de ses demandes au titre des indemnités suivantes :
indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
dommages-intérêts pour licenciement vexatoire
indemnité de licenciement
remboursement mise à pied du 22 avril 2016 au 23 mai 2016
indemnité de préavis
congés payés sur préavis
remise de l’attestation pôle emploi rectifiée, certificat travail rectifié, des bulletins de paye du 24 mai au 24 juillet 2016 s’agissant du préavis,
le tout avec intérêts au taux légal à compter de la saisine devant le conseil de prud’hommes.
-confirmer le jugement rendu par le conseil en ce qu’il a :
condamné la SAS Urbidom à lui payer la somme de 5307,00 euros à titre de solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016,
condamné la SAS Urbidom à lui verser la somme de 1.200,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En conséquence, il est demandé à votre Cour de :
A titre principal de :
-dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse cette dernière n’ayant pas été licenciée par la société Megal son unique employeur,
-dire et juger en outre que le transfert de contrat de travail de la salariée en janvier 2012, de la société Megal à la société Urbidom est nulle en raison notamment de l’absence de délai de réflexion applicable en matière de modification substantielle du contrat de travail,
-dire et juger en conséquence que le licenciement intervenu est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En conséquence :
-condamner solidairement la SAS Urbidom et la SAS Megal à lui verser les sommes suivantes :
indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 52.614 euros
dommages-intérêts pour licenciement vexatoire à hauteur 10.000 euros
indemnité de licenciement à hauteur de 6.667 euros
remboursement mise à pied du 22 avril 2016 au 23 mai 2016 : 2.923 euros de congés payés afférents hauteur de 292 euros
indemnité de préavis à hauteur de 5.846 euros
congés payés sur préavis à hauteur de 584 euros
remise de l’attestation pôle emploi rectifiée, certificat travail rectifié, des bulletins de paye du 24 mai au 24 juillet 2016 s’agissant du préavis.
le tout avec intérêts au taux légal à compter de la saisine devant le conseil de prud’hommes.
-confirmer le jugement rendu par le conseil en ce qu’il a :
condamné la SAS Urbidom à lui payer la somme de :
solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016 à hauteur de 5.307, 00 euros.
condamné la SAS Urbidom à lui verser la somme de 1.200,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Y ajouter :
-condamner solidairement la SAS Urbidom et la SAS Megal à lui verser la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
A titre subsidiaire :
-dire et juger en tout état de cause que le licenciement intervenu est dépourvu de cause réelle et sérieuse pour les raisons de fond exposées précédemment dans les motifs,
-condamner en conséquence solidairement la SAS Urbidom et la SAS Megal à lui les sommes suivantes :
indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 52.614 euros
dommages-intérêts pour licenciement vexatoire à hauteur de 10.000 euros
indemnité de licenciement à hauteur de 6667 euros
remboursement mise à pied du 22 avril 2016 au 23 mai 2016 : 2923 euros de congés payés afférents hauteur de 292 euros
indemnité de préavis à hauteur de 5846 euros
congés payés sur préavis à hauteur de 584 euros
remise de l’attestation pôle emploi rectifiée, certificat travail rectifié, des bulletins de paye du 24 mai au 24 juillet 2016 s’agissant du préavis.
le tout avec intérêts au taux légal à compter de la saisine devant le conseil de prud’hommes.
-confirmer le jugement rendu par le conseil en ce qu’il a :
condamné la SAS Urbidom à lui payer la somme de :
5307, 00 euros à titre de solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016.
condamné la SAS Urbidom à lui verser la somme de 1.200,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Y ajouter :
-condamner la SAS Urbidom et la SA Megal à lui verser la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
En tout état de cause :
-débouter la société Urbidom de toutes ses demandes fins et conclusions tant abusives que mal fondées.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées par la voie électronique le 06 septembre 2022, la société Urbidom et la société Megal demandent à la cour de :
-dire et juger la société Urbidom recevable et bien fondée en son appel incident et y faire droit,
-dire et juger Mme [M] irrecevable et mal fondée en son appel et l’en débouter,
-infirmer le jugement rendu le 11 juin 2020 par le Conseil de Prud’hommes de Villeneuve Saint Georges en ce qu’il a :
condamné la société Urbidom à payer à Mme [M] la somme de 5.304 euros à titre de solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016,
débouté la société Urbidom de sa demande reconventionnelle,
condamné la société Urbidom à payer à Mme [M] la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance.
Statuant à nouveau,
-débouter Mme [M] de sa demande de condamnation à payer la somme de 5.304 euros à titre de solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016,
-condamner Mme [M] à payer à la société Urbidom la somme de 3.809 euros à titre de remboursement des primes exceptionnelles et primes de vacances indûment perçues au titre de l’année 2015 avec intérêt au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir et anatocisme,
-débouter Mme [M] de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et des dépens dans le cadre de la procédure de première instance,
-confirmer le jugement rendu le 11 juin 2020 par le Conseil de Prud’hommes de Villeneuve Saint Georges pour le surplus,
Et y ajoutant,
-condamner Mme [M] à payer la somme de 1.000 euros respectivement à la société Megal et à la société Urbidom au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile pour la présente procédure d’appel,
-condamner Mme [M] en tous les dépens de première instance et d’appel dont le recouvrement sera effectué par Maître Danièle Tetreau-Roche, Avocat à la Cour conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.
La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties à leurs conclusions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’instruction a été déclarée close le 12 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le transfert du contrat de travail et le licenciement
Pour infirmation et absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, Mme [M] soutient qu’elle n’a jamais donné son accord au transfert de son contrat de travail qui serait en conséquence nul. Elle fait en effet valoir que ce transfert qui lui a été imposé lui est inopposable pour ne pas avoir été matérialisé par un avenant, l’employeur lui remettant un simple courrier en mains propres ayant pour objet le transfert de son contrat de travail en précisant à deux reprises qu’il envisageait ce transfert. Elle en déduit qu’il s’agissait d’un simple projet et que la mention « lu et approuvé » apposée au bas de ce courrier ne peut caractériser son accord exprès, ce d’autant que le transfert entrainait modification de la convention collective applicable.
Les sociétés intimées opposent que le transfert est régulier tant en droit qu’en fait aux motifs que la société Urbidom a respecté l’obligation de maintien des conditions d’exécution du contrat en conservant les fonctions, l’ancienneté, le lieu de travail et la rémunération de Mme [M] qui a expressément accepté par écrit son transfert de la société Megal à la société Urbidom. Elles soulignent par ailleurs que Mme [M] a établi en sa qualité de comptable ses propres bulletins de salaire mentionnant comme employeur la société Urbidom et la convention collective Syntec.
Il ressort des pièces versées que Mme [M] a été engagée par la société Megal par contrat à durée indéterminée à compter du 2 janvier 2008, régi par les dispositions de la convention collective du bâtiment pour les Etam. Par courrier en date du 9 décembre 2011, la société Urbidom se présentant comme le nouvel employeur a informé la salariée du transfert de son contrat de travail en ces termes :
» Nous envisageons de transférer votre contrat de travail signé le 2 janvier 2008 de la société Megal à la société Urbidom, société holding du groupe détentrice de 90 % des actions de la SAS Megal.
En effet vos attributions actuelles en plus de celles effectuées pour la société Megal consistent :
-à tenir la comptabilité de toutes les filiales du groupe Urbidom: SAS Urbidom, SAS Megal, Eurl Lagem, SCI [Localité 7], SNC Megal, Sarl SL, Sarl Canto di [Localité 5], Sarl [Localité 6].
– à assurer le suivi social des sociétés employant du personnel : SAS Urbidom, SAS Megal, Eurl Lagem et la Sarl Canto di [Localité 5] ;
– à assurer l’ensemble des déclarations fiscales, hormis les liasses fiscales des sociétés du groupe.
Il est bien entendu que votre contrat de travail continuera de s’exécuter dans les mêmes conditions. Votre ancienneté sera conservée, ainsi que votre rémunération antérieure quelle que soit la source des avantages versés par votre employeur Megal. Tous les droits du salarié qui sont fonction de l’ancienneté de celui-ci seront calculés d’après la totalité des services accomplis depuis la date à laquelle vous avez été embauché chez la société Megal. Les congés payés vous seront versés par la caisse des congés payés pour le montant des droits acquis dans la société Megal et par la société Urbidom pour le montant des droits acquis dans la société
S’agissant d’un contrat de transfert, le contrat de travail conclu avec la société Megal n’est pas rompu, il se poursuit avec la société Urbidom. En conséquence :
-la société Megal n’a pas à verser d’indemnités de rupture au salarié transféré ;
– la société Urbidom doit prendre en compte l’ancienneté acquise chez la société Megal ;
– la société Urbidom est tenue par les clauses du contrat de travail qu’il a poursuivi.
Pour des raisons pratiques nous envisageons de transférer votre contrat en date du 2 janvier 2012 « .
Au bas de cette lettre ont été apposées la signature du Président de la société Urbidom et la signature de la salariée précédée de la mention » lu et approuvé « .
Il résulte des termes de ce courrier et des pièces versées que :
-le changement proposé à la salariée impliquait son transfert à une autre entité juridique, les sociétés Megal et Urbidom étant deux sociétés distinctes, la société Urbidom étant la holding;
– le changement proposé a impliqué en outre un changement de convention collective dont il n’était toutefois pas fait état, constituant de ce fait une modification dans l’économie fonctionnelle du contrat de travail de Mme [M] ainsi qu’un changement de l’effectif de l’entreprise, la société Urbidom comptant moins de 11 salariés à la différence de la société Megal ;
– la société Urbidom et sans aucune intervention de la société Megal imposait ce changement à compter du 2 janvier 2012 sans laisser expressément à la salariée la possibilité d’accepter ou non cette modification de son contrat de travail, ce d’autant que la lettre en date du 9 décembre 2011 était remise en mains propres à la salariée qui la signait le jour même.
Compte tenu de ces stipulations, il y a lieu de retenir que la lettre présentée par la société Urbidom, par ailleurs non signée par la société Megal, n’a pas opéré le transfert du contrat de travail entre la société Megal et la société Urbidom.
Les bulletins de salaire établis postérieurement font apparaître la société Urbidom comme employeur et la convention collective applicable celle du personnel des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs.
Toutefois, la circonstance que Mme [M] ait continué son travail et a en qualité de comptable fait correspondre les mentions de ses bulletins de salaire avec les dispositions applicables à la société Urbidom ne permet pas de caractériser de sa part un accord au transfert de son contrat de travail à la société Urbidom. Aucune convention n’a été établie au titre d’un transfert du contrat de travail, celui-ci ne s’est pas réalisé dans le cadre d’une des situations visées par l’article L. 1224-1 du code du travail et il n’est pas justifié d’un contrat de mise à disposition.
Les sociétés intimées ne peuvent pas plus se prévaloir d’une absence d’opposition de Mme [M] à ce transfert, ne serait-ce que par l’apposition de la mention » lu et approuvé » précédant sa signature sur un document non signé par son employeur la société Megal pour en soutenir la validité, dans la mesure où son accord en qualité de salariée de la société Megal devait être donné de manière expresse et était nécessaire pour que ce prétendu transfert du contrat lui soit opposable, comme impliquant une modification du contrat de travail ne s’étant pas réalisée dans les conditions précitées.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Megal n’a pas cessé d’être l’employeur de Mme [M] depuis le 2 janvier 2008.
Il sera rappelé qu’un contrat de travail peut s’achever par la démission du salarié, par la prise d’acte de rupture, par le jeu de l’article L 1224-1 du code du travail , par convention de transfert ou par un licenciement.
Or, Mme [M] n’a pas démissionné, la convention de transfert est inapplicable à son cas et le jeu de l’article 1224-1 ne peut pas non plus s’appliquer au cas d’espèce.
Il s’en évince que le contrat de travail conclu le 2 janvier 2008 entre la société Megal et Mme [M] a été rompu le 23 mai 2016 et ce ne peut être que par un licenciement, qui ne peut être que sans cause réelle et sérieuse en l’absence de lettre de licenciement adresséé par l’employeur mentionnant un motif de rupture.
Sur la demande de rappel de congés payés
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions qui seul lie la Cour, Mme [M] sollicite la condamnation de la société Urbidom à lui verser la somme de 5307 euros à titre de solde de congés payés pour la période d’avril 2015 à mai 2016. Or, la société Urbidom n’est pas l’employeur de Mme [M].
En conséquence, cette demande ne peut être que rejetée.
Sur la demande de la société Urbidom
La société Urbidom réclame le remboursement par la salariée des primes qu’elle aurait indûment perçues.
Il sera rappelé en premier lieu que le contrat de travail n’a pas été transféré. En conséquence trouve à s’appliquer la convention collective initiale.
S’agissant de la prime de vacances, aux termes de l’article 5.1.2 de la convention collective des ETAM du bâtiment, ‘une prime de vacances égale à 30 % de l’indemnité de congés correspondant aux 24 jours ouvrables de congés, institués par la loi du 16 mai 1969, acquis sur la base de 2 jours ouvrables de congés par mois de travail, est versée aux ETAM après 6 mois de présence dans une ou plusieurs entreprises relevant d’une caisse de congés payés du bâtiment ou des travaux publics. Cette prime, qui ne se cumule pas avec les versements qui ont le même objet, est versée en même temps que l’indemnité de congés.
Au vu des explications des parties, des calculs opérés par la salariée et des mentions portées sur ses bulletins de salaire, la prime de vacances est due.
Toutefois, la convention collective ne précise pas les modalités du versement de primes exceptionnelles.
Mme [M] se prévaut de ce que l’employeur, la société Megal, rémunérait sous la forme de prime exceptionnelle les heures supplémentaires de ses salariés et que chaque prime aurait été avalisée par l’employeur. Or, elle ne verse aucun élément permettant d’apprécier le versement par la société Megal de cette prime dite exceptionnelle en sus des heures supplémentaires rémunérées selon les mentions portées sur son bulletin de salaire, étant observé que ces primes sont réclamées par la société Urbidom.
Elle sera en conséquence condamnée à rembourser à la société Urbidom la somme de 1897 euros avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt avec capitalisation des intérêts. Sur les demandes pécuniaires liées au licenciement
Compte tenu des réponses apportées par la Cour tant au titre du rappel sur congés payés qu’au titre des primes perçues, le salaire de référence sera fixé à la somme de 2769, 88 euros.
Mme [M] sollicite le paiement de la somme de 2923 euros, outre les congés payés afférents à titre de rappel de salaire correspondant à sa mise à pied.
Le licenciement n’étant pas fondé, la société Megal sera condamnée à lui verser à ce titre la somme de 2764, 88 euros, outre les congés payés afférents.
L’article L 1234-1 du code du travail prévoit que lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit, s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, à un préavis de deux mois.
En l’espèce, Mme [M] était en poste au sein de la société Megal depuis huit ans et 4 mois et a donc droit à une indemnité de préavis de deux mois soit 5529, 76 euros bruts, outre 552, 97 euros bruts au titre des congés payés afférents.
Compte tenu de l’ancienneté et de l’âge de Mme [M] (58 ans), l’indemnité de licenciement sera fixée à la somme de 6082, 73 euros nets.
La société Megal comptant plus de 11 salariés et eu égard à la date du licenciement, trouvent à s’appliquer les dispositions de l’article L.1235-5 du code du travail dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, selon lesquelles en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire.
Compte tenu de son ancienneté (8 ans et 4 mois), de son âge (58 ans), des conditions de la rupture et des justificatifs de perception de l’allocation de retour à l’emploi, le préjudice sera exactement réparé par l’allocation de la somme de 28.000 euros.
Mme [M] sollicite des dommages et intérêts pour licenciement vexatoire aux motifs que ce licenciement serait intervenu moins d’un an après la dénonciation qu’elle aurait faite des conditions de travail auprès de l’inspection du travail.
Toutefois eu égard au fondement juridique mis en avant et qui ne se rapporte pas aux conditions de travail mais au licenciement, elle ne rapporte pas la preuve du caractère vexatoire de celui-ci, de son lien avec une dénonciation auprès de l’inspection du travail hors ses allégations et de l’existence d’un préjudice distinct de celui déjà indemnisé.
La société Megal étant reconnue comme le seul employeur, il n’y a pas lieu de prononcer une condamnation solidaire. Elle sera seule condamnée au paiment des sommes arrêtées ci-avant.
Par ailleurs, les sommes fixées porteront intérêts à compter de l’introduction de l’instance pour les sommes ayant le caractère de salaires et à compter du présent arrêt concernant les autres sommes.
Selon les dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable au litige, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
Il ressort des développements précédents que la rupture du contrat a été jugée dépourvue de cause réelle et sérieuse par la cour. Etant ainsi dans le cas prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail, il y a lieu d’ordonner d’office à l’employeur de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois d’indemnités.
Sur les demandes accessoires
La société Megal sera condamnée à remettre à Mme [M] les documents sociaux et les bulletins de salaire du 24 mai au 24 juillet 2016 rectifiés conformément au présent arrêt.
Parties perdantes, les sociétés Urbidom et Megal seront déboutées de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elles seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d’appel et à payer à Mme [M] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement quant aux dépens et à l’article 700 seront infirmées.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en premier ressort,
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
DIT le licenciement de Mme [W] [M] sans cause réelle et sérieuse;
CONDAMNE la SAS Megal à payer à Mme [W] [M] les sommes suivantes:
2764, 88 euros à titre de rappel de salaire pour mise à pied conservatoire,
276,48 euros à titre de congés payés afférents,
5529, 76 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
552, 97 euros bruts au titre des congés payés afférents,
6082, 73 euros nets à titre d’indemnité de licenciement,
28.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
DIT que les sommes fixées porteront intérêts à compter de l’introduction de l’instance pour les sommes ayant le caractère de salaires et à compter du présent arrêt concernant les autres sommes.
CONDAMNE Mme [W] [M] à payer à la SAS Urbidom la somme de 1897 euros avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt avec capitalisation des intérêts au titre du remboursement de primes exceptionnelles ;
ORDONNE à la SAS Megal de remettre à Mme [W] [M] les documents sociaux et les bulletins de salaire du 24 mai au 24 juillet 2016 rectifiés conformément au présent arrêt ;
ORDONNE à la SAS Megal de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [W] [M] dans la limite de six mois d’indemnités ;
CONDAMNE in solidum la SAS Urbidom et la SAS Megal à payer à Mme [W] [M] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE in solidum la SAS Urbidom et la SAS Megal aux dépens ;
DÉBOUTE les parties de toute autre demande.
La greffière, La présidente.