AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE
N° RG 16/06804 – N° Portalis DBVX-V-B7A-KSLI
Société AKKA INGENIERIE PRODUIT
C/
[B]
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON
du 01 Septembre 2016
RG : F 14/03175
COUR D’APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2022
APPELANTE :
SAS AKKA INGENIERIE PRODUIT
RCS de NANTERRE N° 378 587 414
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée Me Emmanuelle POHU, avocat au barreau de LYON, et
par Me Nathalie ATTIAS de la SCP SCP ATTIAS, avocat, plaidant au barreau de PARIS , substituée par Me Olivier LADREGARDE, avocat au barreau de PARIS,
INTIMÉ :
[X] [B]
né le 12 Mai 1981 à [Localité 6] (69)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Fabien ROUMEAS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Christopher REINHARD, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Juin 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Patricia GONZALEZ, Présidente
Sophie NOIR, Conseiller
Catherine CHANEZ, Conseiller
Assistés pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 16 Septembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Patricia GONZALEZ, Présidente, et par Ludovic ROUQUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
La société AKKA Ingénierie produit venant aux droits de la société AKKA Ingénierie Process exerce une activité d’assistance et de conseil dans le domaine des nouvelles technologies d’ingénierie, d’études techniques et hydrauliques, électroniques et pneumatiques.
Elle applique la convention collective nationale Syntec.
M. [X] [B] a été embauché par la société AKKA Ingénierie Process à compter du 25 juillet 2005, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d’ingénieur méthodes, statut cadre.
La pratique de la société en matière de frais de déplacement a varié. Ainsi, du 1er janvier 2009 au 31 mars 2013, elle a fait application d’une franchise kilométrique de 30 kilomètres par aller-retour pour les petits déplacements, le montant de l’indemnité kilométrique étant fixé à 0,34 centimes, outre les frais de péage.
A compter du 1er avril 2012, la franchise est passée à 15 km par trajet. Elle a été supprimée au 1er janvier 2013. Le montant de l’indemnité kilométrique était fixé à 0,39 euros, outre les frais de péage.
Puis, à compter du 17 février 2014, elle a adopté un système de triangulation, la distance prise en compte pour le remboursement des frais consistant en la différence entre la distance domicile-lieu de la mission et la distance domicile-lieu de travail habituel.
Enfin, à partir du 17 février 2014, la société a adopté un système de triangulation afin de déterminer la distance à prendre en compte pour le remboursement des frais, soit la différence entre la distance domicile-lieu de mission et la distance domicile-lieu de travail habituel. Ce delta définit en outre la catégorie de déplacement (déplacement local, petit déplacement, grand déplacement, très grand déplacement). Le barème prévoit que les indemnités kilométriques lors d’un petit déplacement sont de 0,39 centimes par kilomètre.
Par requête du 30 juillet 2014, M. [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon de demandes relatives aux frais et heures de déplacement ainsi que de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
Par jugement rendu le 1er septembre 2016 sous le numéro 14/3175, le conseil de prud’hommes de Lyon a :
-condamné la société à payer à M. [B] les sommes suivantes :
– 608 euros au titre de la compensation financière liée aux temps de déplacement pour la période postérieure au 30 juillet 2012,
-500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,
-débouté M. [B] du surplus de ses demandes,
-débouté la société de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
-condamné la société aux dépens.
Par déclaration du 23 septembre 2016, la société a interjeté appel de ce jugement, puis, par déclaration du 30 septembre 2016, M. [B] a également fait appel.
Les deux instances ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 24 janvier 2017.
Les parties ont été convoquées à une audience de médiation, le 13 avril 2017, laquelle n’a pas permis de dénouer le litige.
Aux termes de ses dernières conclusions, la société demande à la cour de :
-infirmer partiellement le jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer les sommes suivantes à M. [B]’:
-608 euros au titre du temps de déplacement pour la période postérieure au 30 juillet 2012,
-500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-juger que M. [B] ne peut prétendre au paiement d’heures de trajet,
-confirmer le jugement pour le surplus,
-juger que M. [B] ne peut prétendre ni à l’indemnité de déplacement, ni à une indemnité kilométrique, les barèmes applicables au sein de la société étant conformes aux dispositions de la convention collective Syntec et le débouter l’intégralité de ses demandes,
-condamner M. [B] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions, M. [B] demande à la cour de :
-réformer partiellement le jugement entrepris,
-condamner la société AKKA à lui payer les sommes suivantes :
– 5 323,50 euros au titre des frais de déplacement (septembre 2009 à août 2011),
– 2 058,42 euros au titre des frais de déplacement (février 2014 au 30 juin 2014),
– 864,50 euros au titre de l’indemnité de déplacement,
– 1 221,48 euros au titre des frais de déplacement (de juillet 2014 au 13 mars 2015),
– 429,00 euros au titre des frais de déplacement (de juin 2015 au 31 août 2015),
– 179,40 euros au titre des frais de déplacement (d’octobre 2015 au 24 décembre 2015),
– 2 485,08 euros au titre des frais de déplacement (du 14 mars 2016 au 31 décembre 2017),
– 1 021,80 euros au titre des frais de déplacement (du 1er janvier 2017 au 30 septembre 2017),
– 2 527,20 euros au titre des frais de déplacement (du 1er juillet 2017 au 31 décembre 2018),
-18 501,82 euros au titre des heures de déplacement (septembre 2009 à août 2011) et 1 850,18 euros au titre des congés payés afférents,
– 3 943,60 euros au titre des heures de déplacement (janvier 2012 à novembre 2012) et 394,36 euros au titre des congés payés afférents,
– 7 343,80 euros au titre du paiement des heures de déplacement (juin 2013 à juin 2014) et 734,38 euros au titre des congés payés afférents,
-6 343,48 euros au titre du paiement des heures de déplacement (juillet 2014 à décembre 2014) et 634,35 euros au titre des congés payés afférents,
-1 716,73euros au titre du paiement des heures de déplacement (janvier 2015 à mars 2015) et 171,67 euros au titre des congés payés afférents,
-1 273,13 euros au titre du paiement des heures de déplacement (avril 2015 à mai 2015) et 127,31 euros au titre des congés payés afférents,
-1 341,89 euros au titre du paiement des heures de déplacement (juin 2015 à août 2015) et 134,19 euros au titre des congés payés afférents,
– 340,02 euros au titre du paiement des heures de déplacement (octobre 2015 à décembre 2015) et 34 euros au titre des congés payés afférents,
-5 627,07 euros au titre du paiement des heures de déplacement (mars 2016 à décembre 2016) et 562,71 euros au titre des congés payés afférents,
-3 970,22 euros au titre du paiement des heures de déplacement (janvier 2017 à septembre 2017) et 397,02 euros au titre des congés payés afférents,
-10 300,39 euros au titre du paiement des heures de déplacement (octobre 2017 à décembre 2018) et 1 030,04 euros au titre des congés payés afférents,
-30 000 euros nets au titre du paiement des heures de déplacement dépassant le temps normal de trajet (à titre subsidiaire),
-4 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat,
-3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture de la procédure a été signée le 25 février 2020, puis révoquée par ordonnance du 1er février 2022 afin de permettre la communication de nouvelles pièces. Cette même ordonnance a fixé la clôture au 12 avril suivant.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour rappelle qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de «’constatations’» ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques ou qu’elles constituent en réalité des moyens.
1- Sur la prescription des demandes
1-1- S’agissant des demandes relatives à l’action en paiement ou répétition du salaire
Selon l’article L. 3245-1 du code du travail issu de l’article 16 de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, «’l’action en paiement ou répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l’article 2224 du code civil.’»
L’article L. 3245-1 du code du travail dispose désormais que : «’l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour où lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture.’»
Ce texte issu de la loi du 14 juin 2013 comporte deux mentions relatives au temps :
– la première mention fixe un délai pour agir, c’est-à-dire pour saisir le tribunal ;
– la seconde mention temporelle n’est pas un délai de prescription mais une limite imposée par le législateur relativement à la période sur laquelle peut porter la demande des arriérés de salaires.
Autrement dit, l’article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 instaure une déconnexion entre le délai pour agir en paiement du salaire et la période du chef de laquelle la somme est réclamée.
En application des dispositions transitoires de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 réduisant le délai de prescription des actions en paiement des salaires de 5 ans à 3 ans, le délai de prescription triennale s’applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de ladite loi (soit le 16 juin 2013), sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Le délai de prescription de l’action en paiement des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise.
La prescription quinquennale de l’action en paiement de salaire formée par un salarié est interrompue par la saisine de la juridiction prud’homale.
En l’espèce, M. [B] a introduit son action devant le conseil de prud’hommes de Lyon le 30 juillet 2014. En application des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013, il est recevable à faire porter ses demandes relatives au temps de trajet sur une période débutant le 30 juillet 2009, dans la mesure où le délai de prescription de 5 ans prévu par l’ancien texte n’était pas écoulé lors de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi. Le jugement sera réformé en ce sens.
1-2-S’agissant des demandes relatives à l’exécution du contrat de travail
En application de l’article L. 1471-1 du code du travail, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
Ce texte s’applique aux prescriptions en cours à la date du 17 juin 2013, date de promulgation de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 qui l’a introduit.
Le délai de prescription antérieur à cette loi, fixé par la loi du 17 juin 2008, était de cinq ans.
Il résulte de l’article 2222 du code civil qu’en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
En l’espèce, M. [B] a introduit son action devant le conseil de prud’hommes de Lyon le 30 juillet 2014. En application des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013, il est recevable à faire porter ses demandes relatives au frais de déplacement sur une période débutant le 30 juillet 2012, dans la mesure où le délai de prescription de 5 ans prévu par l’ancien texte n’était pas écoulé lors de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi. Le jugement sera confirmé en ce sens.
2-Sur les demandes de remboursement des frais de déplacement
L’article 50 de la convention collective relatif aux frais de déplacement dispose :
«’Les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l’occasion d’une charge supplémentaire ou d’une diminution de salaire. L’importance des frais dépend du lieu où s’effectuent les déplacements, ils ne sauraient être fixés d’une façon uniforme. Ils seront remboursés de manière à couvrir les frais d’hôtel et de restaurant du salarié.
Ils pourront faire l’objet d’un forfait préalablement au départ, soit par accord particulier, soit par règlement spécifique approprié (…).’»
l’article 53 que : ‘Le salarié dont la lettre d’engagement mentionne qu’il doit travailler tout ou partie de l’année en déplacement continu aura droit, outre son salaire, à une indemnité de remboursement de frais pendant la durée de ce déplacement.
Cette indemnité sera :
– soit forfaitaire, auquel cas, elle représentera la différence entre les frais de séjour et les dépenses normales du salarié s’il vivait au lieu où il a été engagé, et sera fixée par accord préalable entre l’employeur et le salarié, sauf règlement spécifique conformément à l’article 50;
– soit versée sur pièces justificatives.’
l’article 60 que «’ lorsque le salarié utilise pour les besoins du service un véhicule automobile, une motocyclette ou un cyclomoteur, les frais occasionnés sont à la charge de l’employeur, à condition qu’un accord écrit ait précédé cette utilisation. Cet accord peut être permanent.
Le remboursement de ces frais tiendra compte de l’amortissement du véhicule, des frais de garage, de réparations et d’entretien, des frais d’assurances et, éventuellement, des impôts et taxes sur le véhicule.’»
Le contrat de travail de M. [B] contient les stipulations suivantes :
«’Article 4 – lieu de travail-mobilité
Vous exercerez vos fonctions au sein de l’établissement de la société situé à [Localité 4] ou éventuellement dans les établissements du client afin de l’accompagner dans la réalisation de son projet’. (…)
Article 6 – Modalités des déplacements professionnels
(…) Vous serez indemnisé des frais professionnels occasionnés selon les modalités en vigueur au sein de la société et dont vous déclarez avoir été informé.
Les conditions de déplacements pourront être modifiées sans vous prévaloir d’une modification du contrat de travail.
Ces déplacements pourront s’effectuer par différents moyens retenus par la société.
Vous pourrez être amené à utiliser votre véhicule personnel dans le cadre de vos déplacements.
Vous communiquerez alors lors de votre embauche à la société une copie de votre permis de conduire, de votre carte grise et de votre contrat d’assurance ‘déplacements professionnels.
(…) La société rembourse les frais kilométriques sur la base du barème diffusé par note de service en vigueur dans la société. Les frais exposés pour souscrire la police d’assurance sont compris dans le cadre du remboursement des indemnités kilométriques.’»
M. [B] expose que la société a appliqué une franchise kilométrique et un système de triangulation contraires aux dispositions conventionnelles applicables, en ce sens qu’elle n’a pas procédé au remboursement de l’ensemble de ses frais professionnels exposés lors de ses trajets vers ses différents lieux de mission, et ce alors qu’un accord écrit avait précédé l’utilisation de son véhicule.
Au soutien de sa prétention, il fait valoir que ses temps de déplacement, dès lors qu’il effectue une prestation de travail sur le site d’un client de la société et non au sein d’une agence ou du siège de la société, devaient être considérés comme des temps de déplacement «’hors du lieu de travail habituel’» au sens de la convention collective, qu’il n’a jamais eu de lieu de travail fixe et ne pouvait être rattaché à un lieu de travail habituel et que son contrat de travail et ses ordres de mission l’autorisaient expressément à utiliser son véhicule personnel pour se rendre sur son lieu de mission.
Il affirme qu’il a refusé de signer les ordres de mission appliquant le nouveau barème basé sur la triangulation.
En outre, il soutient que l’indemnité de déplacement ne lui a pas été réglée lors de la mission Renault Trucks à [Localité 12] pour la période allant du 1er février 2014 au 30 juin 2014.
La société réplique que la loi n’impose pas la prise en charge intégrale par l’employeur des frais exposés par le salarié pour se rendre sur son lieu de travail, qu’il en est de même concernant les frais de carburant au regard de l’article L3261-3 du code du travail. En outre, elle soutient que les dispositions de la convention collective n’imposent pas une prise en charge intégrale par l’employeur des frais de déplacement ni même des indemnités kilométriques et permettent à l’employeur de rembourser les frais professionnels soit pour un accord particulier soit par un règlement spécifique approprié.
Elle expose également que dès lors qu’il existe au sein de la société un barème de remboursement il n’est pas nécessaire de faire approuver les ordres de mission par le salarié.
M. [B] verse aux débats les ordres de mission suivants :
-GERFLOR situé à [Localité 9] (69) du 2 février 2009 au 21 avril 2011, lequel prévoit le versement d’une indemnité de déplacement d’un montant de 9,5 euros par jour travaillé, ainsi qu’une indemnité kilométrique d’un montant de 18,36 euros par jour travaillé hors frais de péage,
-GERFLOR situé à [Localité 7] du 30 janvier 2012 au 30 avril 2012, lequel prévoit le versement d’allocations de grand déplacement d’un montant de 60 euros par jour travaillé, une indemnité veille voyage détente d’un montant de 19 euros et un voyage détente par semaine d’un montant de 125,8 euros hors des frais de péage, pour laquelle aucune demande n’est formulée par le salarié,
-GERFLOR situé à [Localité 7] du 2 mai 2012 au 30 novembre 2012, lequel prévoit le versement d’allocations de grand déplacement d’un montant de 63,6 euros par jour travaillé, une indemnité veille voyage détente d’un montant de 21 euros et un voyage détente par semaine d’un montant de 144,30 euros hors des frais de péage, pour laquelle aucune demande n’est formulée par le salarié,
-VOLVO Group situé à [Localité 12], du 2 janvier 2014 au 30 juin 2014, lequel prévoit le versement d’une indemnité de déplacement d’un montant de 9,50 euros par jour travaillé ainsi que d’une indemnité kilométrique d’un montant de 14,82 euros par jour travaillé,
-VOLVO Group situé à [Localité 12] du 1er octobre 2014 au 31 décembre 2014, lequel prévoit l’octroi d’un ticket restaurant par jour travaillé,
-ALSTOM situé à [Localité 15] du 10 juin 2015 au 31 août 2015, lequel prévoit le versement d’une indemnité kilométrique d’un montant de 9,36 euros par jour travaillé hors péage, ainsi que l’octroi d’un ticket restaurant,
-BIOMERIEUX situé à [Localité 5] l’étoile du 1er octobre 2015 au 24 décembre 2015, lequel prévoit la participation aux frais de restaurant interentreprises à hauteur de 5,28 euros par jour travaillé,
-VOLVO Group situé à [Adresse 13] du 14 mars 2016 au 30 juin 2017 lequel prévoit une participation aux frais de restaurant interentreprises à hauteur de 5,46 euros par jour travaillé,
-VOLVO Group, situé à [Adresse 14], du 3 juillet 2017 au 31 décembre 2018, lequel prévoit le versement d’une indemnité de repas d’un montant de 9,5 euros par jour travaillé.
M. [B] a utilisé son véhicule personnel pour se rendre sur ses différents lieux de mission depuis son domicile situé à [Localité 10] (69) puis à [Localité 3] (69). Il ressort des éléments présentés que le remboursement des frais de déplacement s’effectue suivant les barèmes fixés à l’avance, que le contrat de travail de M. [B] fait référence à ces barèmes et qu’il a été informé des conditions de son départ par la remise des ordres de mission détaillant les conditions de remboursement des frais professionnels.
La convention collective rappelle que le remboursement des frais professionnels peut faire l’objet d’un forfait préalablement au départ soit par accord particulier soit par règlement spécifique, de sorte que l’absence de signature des ordres de mission n’entraine pas l’invalidité des barèmes applicables. En outre, il n’est pas démontré que l’article 60 de la convention collective prévoyant la prise en charge des frais générés par l’utilisation du véhicule personnel pour les besoins du service, exclut la mise en oeuvre d’une franchise kilométrique ou du système de triangulation.
Les barèmes mis en place au sein de la société s’analysent plutôt comme le règlement spécifique visé par l’article 50 de la convention collective et ils n’apparaissent pas manifestement disproportionnés eu égard aux dépenses que le salarié aurait engagées afin de se rendre sur son lieu de travail fixé contractuellement à [Localité 4] (69). En conséquence, il n’est pas établi que le salarié a supporté une charge supplémentaire ou une diminution de son salaire en raison de ses déplacements.
La cour confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande au titre des frais professionnels.
3-Sur la demande en paiement de l’indemnité de déplacement
M. [B] affirme que l’indemnité de déplacement d’un montant de 9,5 euros par jour travaillé convenue et prévue par l’ordre de mission ne lui a pas été versée au titre de la mission Volvo Group situé à [Localité 12] pour la période du 1er février 2014 au 30 juin 2014.
Il produit un ordre de mission signé attestant de l’engagement de la société à lui verser cette indemnité, qu’elle ne contredit pas. La société soutient cependant que le salarié aurait été rempli de ses droits par ses notes de frais, sans en apporter la preuve.
La cour infirme donc le jugement déféré et fait droit à la demande de M. [B] à hauteur de 864,50 euros au titre de l’indemnité de déplacement non versée.
4-Sur la demande en paiement des temps de déplacement
Il résulte de l’article L. 3121-4 dans sa version applicable au litige que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif, que, toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière.
La charge de la preuve de ce temps de trajet inhabituel n’incombe spécialement au salarié que pour la demande de contrepartie.
M. [B] fait valoir qu’il a été contraint d’effectuer des trajets domicile-lieu de mission anormalement longs si bien qu’il convient de considérer ses temps de trajet comme du temps de travail effectif.
Subsidiairement, il sollicite l’allocation de dommages et intérêts car ses temps de trajet auraient dû faire l’objet d’une contrepartie pécuniaire ou sous forme de repos.
La société réplique que les temps de trajet entre le domicile et le lieu de la mission effectués en France métropolitaine ne sont pas anormaux et qu’en tout état de cause, ils ne peuvent être assimilés à du temps de travail.
Elle ajoute que le temps de trajet s’il est anormal fait l’objet d’une contrepartie financière seulement au titre de la partie anormale du temps de trajet.
Elle ajoute que la demande est partiellement prescrite. Ce point a été tranché précédemment.
Subsidiairement, elle propose une indemnisation à hauteur de 10 euros pour chaque trajet anormalement long, soit d’un minimum d’une heure.
En l’espèce, M. [B], domicilié dans un premier temps à [Localité 10] (69) puis à [Localité 3] (69), réclame le paiement des heures de déplacement suivantes :
-mission GERFLOR situé à [Localité 9] du mois d’août 2009 au mois d’août 2011′: 55 minutes par trajet,
-mission GERFLOR situé à [Localité 7] du 27 janvier 2012 au 30 novembre 2012′: 127 minutes par trajet,
-mission Renault Trucks à [Localité 12] du 17 juin 2013 au 27 mars 2015′: 43 minutes par trajet, puis de 78 minutes par trajet à compter de l’obligation qui lui a été faite de prendre les transports en commun,
-mission AKKA à [Localité 8] du 24 avril 2015 au 29 mai 201′: 82 minutes par trajet,
-mission ALSTOM situé à [Localité 11] du 10 juin au 31 août 2015′: 33 minutes par trajet,
-mission BIOMERIEUX à [Localité 5] l’étoile du 1er octobre au 24 décembre 2015′: 10 minutes par trajet,
-Renault Trucks Défense à [Localité 12] du 14 mars 2016 au 31 décembre 2016′: 43 minutes par trajet,
-mission Renault Trucks défense à [Localité 8] du 1er janvier 2017 au 30 septembre 2017′: 41 minutes par trajet,
-mission Renault Trucks situé à [Localité 12] du 3 juillet 2017 au 31 décembre 2018′: 43 minutes par trajet.
Seul le trajet effectué par M. [B] lors de sa mission GERFLOR situé à [Localité 7] d’une durée de 127 minutes par trajet, et au titre de laquelle il produit l’ordre de mission pour la période allant du 30 janvier au 30 novembre 2012, apparaît comme étant anormalement long mais il a perçu des allocations de grand déplacement.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
5-Sur l’exécution déloyale du contrat de travail
Tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l’employeur d’exécuter le contrat de bonne foi.
La réparation d’un préjudice résultant d’un manquement de l’employeur suppose que le salarié qui s’en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d’une part la réalité du manquement et d’autre part l’existence et l’étendue du préjudice en résultant.
M. [B] échoue à apporter la preuve d’une exécution déloyale du contrat de travail par la société.
La cour confirme le jugement déféré en ce qu’il l’a débouté de ce chef.
6-Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
La société sera condamnée aux dépens d’appel.
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement prononcé par le conseil de prud’hommes de Lyon le 1er septembre 2016 sauf en ses dispositions relatives à la prescription des demandes relatives au temps de trajet et à l’indemnité de déplacement au titre de la mission Volvo Group à Vénissieux pour la période du 1er février 2014 au 30 juin 2014′;
Statuant à nouveau,
Dit que les demandes présentées par M. [X] [B] au titre de l’indemnisation du temps de trajet sont recevables à compter du 30 juillet 2009′;
Condamne la société AKKA Ingénierie Produit à payer à M. [X] [B] la somme de 864,50 euros au titre de l’indemnité de déplacement sur le lieu de la mission Volvo Group à [Localité 12] pour la période du 1er février 2014 au 30 juin 2014′;
Condamne la société AKKA Ingénierie Produit aux dépens d’appel’;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE