15 mars 2023
Cour de cassation
Pourvoi n°
21-16.426
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 mars 2023
Rejet non spécialement motivé
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10200 F
Pourvoi n° P 21-16.426
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 MARS 2023
La société Concentrix CVG Delaware International INC, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 21-16.426 contre l’arrêt rendu le 11 mars 2021 par la cour d’appel d’Angers (chambre sociale), dans le litige l’opposant à Mme [Z] [N], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Valéry, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Concentrix CVG Delaware International INC, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [N], après débats en l’audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Valéry, conseiller référendaire rapporteur, M. Pion, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Concentrix CVG Delaware International INC aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Concentrix CVG Delaware International INC et la condamne à payer à Mme [N] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Concentrix CVG Delaware International INC
La société Concentrix CVG Delaware International Inc., anciennement Stream International Inc. FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que le coefficient 310 de la grille de classification de la convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, était applicable à la situation de Mme [Z] [N], de l’AVOIR condamné à payer à Mme [Z] [N] la somme de 9 123,94 euros brut à titre de rappel de salaire sur classification sur la période comprise entre le mois de mars 2015 et le mois de juillet 2019, outre la somme de 912,39 suros bruts à titre de congés payés afférents, de lui AVOIR ordonné de remettre à Mme [Z] [N] les bulletins de salaire rectifiés conformes à l’arrêt ;
1°) ALORS QU’il est interdit aux juges de dénaturer les écrits soumis à leur examen ; qu’en l’espèce, il résultait clairement de la « classification des salariés Stream selon la convention collective nationale du Syntec » que si le « technicien support (dont experts) » pouvait passer d’un coefficient à un autre, ce passage n’était pas automatique après « une année d’expérience réussie en position 1.4.1 coefficient 240 » pour accéder au coefficient 275, après « une année d’expérience réussie en positions 2.1 coefficient 275 » pour accéder au coefficient 310, après « 2 à 4 années d’expérience réussie en position 2.2 coefficient 310 » pour accéder au coefficient 355, après « 5 à 10 années d’expérience réussie en tant que technicien support » pour accéder au coefficient 400, le salarié devant, pour se voir attribuer un coefficient plus élevé, non seulement remplir ce qui n’était qu’une « condition d’accès minimale », mais également exercer des « fonctions d’études ou préparation » pour être classé au coefficient 275, 310 ou 355 et des « fonctions de conception ou de gestion élargie » pour être classé au coefficient 400 et non seulement des « fonctions d’exécution » comme le technicien expert classé au coefficient 240 ; qu’en affirmant que la lecture de la grille de classification interne révélait que la référence aux trois fonctions types ne constituait qu’un simple rappel de la classification de la convention collective, mais ne signifiait pas que les attributions des techniciens support étaient modifiées lorsqu’ils se voyaient reconnaître le bénéfice du coefficient 275 à 400 et en jugeant dès lors qu’en application de ladite grille, le coefficient 400 devait être reconnu aux salariés justifiant de 5 à 10 années d’expérience réussie en tant que technicien support sans qu’il y ait lieu de rechercher s’ils exerçaient des fonctions de conception ou de gestion élargie, la cour d’appel a dénaturé « la grille de classification des salariés Stream selon la convention collective nationale du Syntec », en violation du principe susvisé ;
2°) ALORS QUE selon l’article 4 de l’accord du 15 décembre 1987 relatif à la méthode pour la mise en place de la nouvelle classification des ETAM, « A chaque position correspond un coefficient » ; qu’en l’espèce, il était constant que Mme [N] occupait la position 1.4.1 de la classification conventionnelle litigieuse (convention dite Syntec) et ne sollicitait aucun changement de position ; que selon les dispositions conventionnelles le coefficient associé à la position 1.4.1 est le coefficient 240 ; qu’en octroyant à la salariée le coefficient 310, la cour d’appel a procédé à une dissociation entre position et coefficient et, ce faisant, a méconnu les dispositions susvisées ;
3°) ALORS en outre QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté qu’en réponse à une question posée lors de la réunion des délégués du personnel du mois de mai 2015, les représentants de la direction avaient apporté la réponse suivante (v. production n° 8) : « Cette grille a été discutée entre Stream et les partenaires sociaux en 2002 pour donner de la visibilité aux salariés sur de possibles évolutions (démarche volontaire de l’entreprise). Pour rappel, le Syntec ne prévoit pas dans ses grilles de possibilités d’évolutions ou de circulation entre les différentes positions », que l’employeur avait ainsi reconnu vouloir réserver la possibilité d’un passage d’une position à une autre, que la grille de classification interne fixait des règles de progression de carrière en permettant le passage d’une position à l’autre, et que cette grille définissait les conditions d’accès minimales du technicien support à la position 2.1 coefficient 275 après « une année d’expérience réussie en position 1.4.1 coefficient 240 », à la position 2.2 coefficient 310 après « une année d’expérience réussie en positions 2.1 coefficient 275 », à la position 2.3 coefficient 355 après « 2 à 4 années d’expérience réussie en position coefficient 310 » et enfin la position 3.1, coefficient 400 après « 5 à 10 années d’expérience réussie en tant que technicien support » ; qu’en jugeant cependant in fine que le passage au coefficient 400 devait être reconnu aux salariés justifiant de « 5 à 10 années d’expérience réussie en tant que technicien support », la cour d’appel s’est contredite, en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU’il appartient au salarié qui revendique le bénéfice d’une classification conventionnelle de démontrer qu’il en remplit les conditions ; qu’en retenant à l’appui de sa décision que la société Concentrix ne démontrait pas en quoi précisément le fait que les techniciens supports relevant du coefficient 240 exerçaient des fonctions d’exécution, tandis que ceux relevant des coefficients 275 à 355 accomplissaient des fonctions d’étude et de préparation et que leurs homologues relevant du coefficient 400 étaient employés à des fonctions de conception et de gestion élargie, la cour d’appel a violé l’article 1315 devenu 1353 du code civil ;
5°) ALORS QUE lorsque les termes d’une classification des emplois de l’entreprise sont clairs, un sens contraire ne peut leur être donné sur la base d’une pratique concernant un seul salarié de l’entreprise ; qu’en énonçant à l’appui de sa décision qu’il était établi qu’un autre salarié de la société, M. [B], s’était vu reconnaître le coefficient 400 à compter du 1er avril 2017 sans qu’il ne soit démontré que la nature de ses tâches avait été modifiée, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
6°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens des parties ; qu’en l’espèce, la société Concentrix faisait valoir que si elle avait accordé à M. [B] le coefficient 400, c’était uniquement parce qu’elle avait été condamnée en ce sens par le conseil de prud’hommes d’Angers, dans un jugement du 13 mars 2017 ; qu’en énonçant à l’appui de sa décision qu’il était établi que M. [B] s’était vu reconnaître le coefficient 400 à compter du 1er avril 2017 sans qu’il ne soit démontré que la nature de ses tâches ait été modifiée, sans répondre au moyen péremptoire de l’employeur tiré de ce que l’accession du salarié au coefficient 400 résultait de la seule exécution d’une décision de justice, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
7°) ALORS subsidiairement QU’il incombe au salarié qui revendique le bénéfice d’une classification conventionnelle de démontrer qu’il en remplit les conditions ; qu’en l’espèce, il résulte des constatations de l’arrêt que le passage d’une position à une autre et le bénéfice d’un coefficient supérieur était conditionné par un nombre d’années d’expérience réussie différent selon les positions et que l’expérience était considérée comme « réussie »
seulement en cas de validation par le manager au cours de la revue annuelle de performance ; qu’en l’espèce, pour accorder à Mme [N] le coefficient 310, la cour d’appel a reproché à l’employeur de ne pas produire les évaluations de performance de la salariée pour les années 2008 à 2012 ; qu’en statuant de la sorte, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et partant, a violé l’article 1315 devenu l’article 1353 du code civil ;
8°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les termes du litige, lesquels sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu’en l’espèce, si dans ses écritures Mme [N] contestait la valeur probante des « performances review » produites aux débats par la société Concentrix pour les années 2013, 2015 à 2018 et alléguait qu’il appartenait à son employeur de justifier des appréciations ainsi portées par des éléments objectifs, elle ne contestait à aucun moment avoir été évaluée en « needs improvement » (« besoin de s’améliorer ») depuis 2007, ni n’alléguait que son employeur était seul détenteur des documents litigieux ; que pour accorder à la salariée le coefficient 310 de la grille de classification, la cour d’appel a relevé que l’employeur était seul détenteur des éléments de validation des années d’expériences réussie et lui a reproché de ne pas avoir produit lesdits éléments pour les années 2008 à 2012 ; qu’en statuant de la sorte, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige et partant, a violé l’article 4 du code de procédure civile ;
9°) ALORS en tout état de cause QUE les juges sont tenus de faire observer et d’observer eux-mêmes le principe du contradictoire ; qu’en l’espèce, si dans ses écritures Mme [N] contestait la valeur probante des « performances review » produites aux débats par la société Concentrix pour les années 2013, 2015 à 2018 et alléguait qu’il appartenait à son employeur de justifier des appréciations ainsi portées par des éléments objectifs, elle ne contestait à aucun moment avoir été évaluée en « needs improvement » depuis 2007 ni n’alléguait que son employeur était seul détenteur des documents litigieux ; que pour accorder à la salariée le coefficient 310 de la grille de classification, la cour d’appel a relevé que l’employer était seul détenteur des éléments de validation des années d’expériences réussies ;
qu’en relevant d’office un tel moyen, sans avoir préalablement invité les parties à s’expliquer sur ce point, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;
10°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu’en jugeant que dans l’évaluation de 2008, le manager de Mme [N] l’avait invitée à reprendre une formation complète pour retrouver une facilité et une aisance dans les appels, lorsqu’elle avait préalablement relevé que la société Concentrix avait produit les revues de performance de la salariée, i.e ses évaluations pour les années 2013, 2015 à 2018, mais aucun document concernant la période 1er février 2007 au 1er février 2013, la cour d’appel s’est contredite et partant, a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
11°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu’en l’espèce, il résultait de l’évaluation de la salariée de 2017 que son manager lui avait indiqué que « lors de ton retour, il faudra reprendre une formation complète pour retrouver une facilité et une conformité dans le traitement des appels » ; qu’en jugeant que c’était en 2008 que le manager avait invité la salariée à reprendre une formation complète pour retrouver une facilité et une aisance dans les appels, la cour d’appel a dénaturé le document litigieux en violation du principe susvisé ;
12°) ALORS subsidiairement QUE le motif hypothétique équivaut au défaut de motif ; qu’en l’espèce, pour conclure que Mme [N] pouvait prétendre au coefficient 310, la cour d’appel a relevé que l’invitation faite par le manager dans une de ses évaluations à reprendre une formation complète pour retrouver une facilité et une aisance dans les appels permettait de « conclure implicitement que Mme [N] bénéficiait d’une telle aisance antérieurement » ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a statué par voie de supposition quant aux compétences de la salariée pour la période antérieure à l’évaluation litigieuse, a violé l’article 455 du code de procédure civile ;